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longué zone de la côte septentrionale d'Afrique présente, dans nos connoissances géographiques, une lacune qui ne me paroît pas suffisamment remplie par les recherches des voyageurs modernes. J'étois intimement persuadé que ce vaste golfe de la grande Syrte, qui pénètre si profondément dans le continent de l'Afrique, devoit être fertile en objets nouveaux et en phénomènes remarquables. Quant à la Cyrénaïque, tous les passages des auteurs anciens, relatifs à ce pays, excitoient en moi le plus vif désir de la visiter. C'est le pays du Silphium si renommé (1); c'est là que la terre se charge d'une triple moisson et prodigue les fruits les plus exquis (2); c'est encore dans la Cyrénaïque qu'étoient placés les fameux jardins des Hespérides (3) et le séjour des bienheureux qui jouissoient de la douce température d'un printemps perpétuel (4)

1 L'expédition militaire que le pacha de Tripoli envoya dans ce pays à la fin de l'hiver de 1817 m'ayant présenté de! une occasion qui promettoit quelque sûreté, je me hasardai à entreprendre ce voyage si désiré, et j'offre aujourd'hui au public le fruit de mes travaux.

J'ai conservé à ma relation la forme épistolaire que je lui ai donnée dans l'origine, et à laquelle j'avois pris goût dans le cours de mon voyage. Entouré de barbares et contraint de vivre avec eux du matin jusqu'au soir, je rentrais à peine dans ma tente, que, transporté en Europe par l'imagination, je me plaisois à m'entretenir avec l'illustre professeur qui attachoit quelque prix, je le sa

(1) Strabon, Geogr., Liv. XVII, Scilax. Perip. Ptolémée, Géogr.

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vois, aux observations auxquelles je me livrois d'après ses exhortations. J'ai sacrifié aux conseils de ce correspondant éclairé, toutes ces aventures qui déparent, lorsqu'elles ne servent point à faire connoître le caractère et les mœurs des peuples, un voyage dont les sciences sont le but. Pour tenir lieu de cette partie romanesque, je me suis attaché, autant que les circonstances et més foibles moyens me l'ont permis, à peindre la nature, l'aspect et1 les productions des pays que j'ai visítés. A chaque changement que j'ai observé dans la nature du sol, j'ai recueilli des échantillons de petit volume, mais suffisans, que j'ai déposés au musée de l'université royale de Gênes, afin de faire connoître par ce moyen la géologie de ces contrées.

Le sol brûlé, sablonneux et souvent mobile de la grande Syrte né nourrit que peu de plantes; on en remarque dependant quelques-unes d'une grande rareté et des plus belles formes. Quant à la flore de la Cyrénaïque, il suffi roit du Lotus et du Silphium pour l'ennoblir. J'ai remis l'herbier que j'avois recueilli au professeur Viviani (1); c'est dire que je me suis occupé des intérêts de la science en répondant à la confiance du botaniste.

Il y a une partie de cette relation que je dois à la complaisance du docteur Viviani; ce sont des éclaircissemens sur la géographie ancienne dont il l'a ornée, en comparant avec autant d'érudition que de critique la description du pays que j'ai observé avec celles des anciens; il a traité aussi de quelques plantes et d'autres productions naturelles qui, jadis estimées et célèbres, n'en sont pas moins oubliées ou inconnues aujourd'hui. Je devois d'au

(1) Il se propose de publier incessamment un Specimen flora Libyca. Comme il s'agit de plantes desséchées, son travail a été retardé par la difficulté d'en reconnoître avec sûreté les caractères de ma nière à pouvoir les dessiner et les décrire.

tant mieux déclarer que ces recherches sur les antiquités n'étoient point mon onvrage, que, pour ne point interrompre le lecteur par des notes perpétuelles, je les ai fondues dans mes lettres aux endroits où elles se rapportoient.

Privé des moyens nécessaires pour donner avec une exactitude scrupuleuse les mesures itinéraires de ma route, surtout à cause de ses sinuosités continuelles, en traversant des sables où aucun sentier fixe et bien connu n'étoit tracé, j'ai cherché à suppléer à cet inconvénient en indiquant avec exactitude la direction des chaînes de montagnes, assez mal tracée sur les meilleures cartes, en signalant la nature du terrain ou sablonneux, ou cultivé, ou boisé; en marquant la présence des eaux, soit de source, soit recueillies dans des puits, ou répandues en étangs ou en marais, enfin d'autres particularités qui tendent à fournir, sur la nature de ces contrées, des connoissances exactes et positives.

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VOYAGE DE TRIPOLI DE BARBARIE

AUX FRONTIÈRES D'ÉGYPTE.

:

DE TRIPOLI A TAGIOURA.

VOILA deux mois que je suis à Tripoli, et, dans cet intervalle, je n'ai point laissé passér un seul jour sans chercher à recueillir pour vous des plantes, des minéraux ou d'autres productions naturelles qui vous rappelassent que l'éloignement n'éteint dans vos élèves ni l'amour de l'histoire naturelle ni le souvenir le plus reconnoissant de leur professeur. Mes désirs cependant n'ont point été aussi pleinement accomplis que je me l'étois d'abord imaginé avant de connoître la nature des lieux. Tripoli est situé sur une plage où le minéralogiste ne trouve que des sables à observer et où les plantes ne végétent qu'avec peine à cause de la sécheresse, ou bien sont chassées par la culture. A peu de distance de la ville, le pays est infesté par des hordes errantes d'Arabes-Bédouins; et le moindre risque l'on court en tombant entre les mains de ces misérables, c'est d'étre dépouillé.

que

Les villes florissantes répandues anciennement dans cette partie célèbre de la Libye, sont aujourd'hui désertés. Sur la côte qui sépare Tripoli du golfe de Bamba, et qui a goo milles d'étendue, on compte tout au plus 30,000 habitans stables répartis dans les villes de Tripoli, Tagioura, Sliten, Mesurata, Bengasi et Derna. Dans les vastes déserts qui bordent la grande Syrte, la sûreté est de ne rencontrer personne; et cette solitude, en préservant le voyageur du danger des assassins, lui laisse encore à combattre et la faim et la soif. Dans l'intérieur des térres, aucun toit ne s'élève sur la vaste surface de la Pentapole, et l'on ne peut s'y mettre à l'abri pendant la nuit que sous la tente du Bédouip. L'origine patriarcale de ces Arabes leur a valu une grande réputation d'hospitalité, et cette fausse idéo a coûté la vie à plus d'un voyageur, qui croit trouver chez ces brigands les vertus héréditaires d'Abraham et d'Isaac. Quvrez la carte d'Afrique d'Arrowsmith, sur laquelle cet habile géographe a tracé les routes suivies par les voyageurs qui, en différens sens, ont parcouru cette partie du globe vous ens verrez quelques-uns partant de l'Egypte arriver au Fezzan, et de là se rendre à Tripoli; d'autres, prenant de cetté ‹ ville Fleur point de départ, se diriger à travers le grand désert et tenter la route de Tombouctou, ou bien se replier vers les rives du Nil'; mais vous remar

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