Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

son frère héritier, en le chargeant de rendre l'hérédité à celui des enfants qu'il voudrait choisir (Toulouse, 18 mai 1824)(1); ·

lestament de Louis Molière présentait une fiducie, et non une substitution fideicommissaire; que mal à propos, pour soutenir ce système, il excipait de deux circonstances: la première, de ce que Molière, testateur, dispensait son épouse de rendre compte, la seconde, de ce qu'il lui donnait le pouvoir de vendre et engager en cas de besoin; que la clause portant dispense de rendre compte pouvait ici être regardée comme ajoutée par un effet de l'ignorance du testateur ou du notaire qui n'en connaissaient pas sans doute l'application; mais que cette clause n'étant pas accompagnée de celles qui caractérisent l'institution fiduciaire, ne pouvait d'ailleurs détruire la force des autres clauses qui démontraient que le testateur avait institué son épouse en la propriété; que celle portant pouvoir de vendre et engager en cas de besoin, ne prouvait point, d'autre part, qu'il eût entendu la charger d'une simple fiducie ; que l'aliénation des biens d'un fideicommis pouvait avoir lieu par l'héritier grevé, dans certains cas déterminés, en s'y faisant autoriser par justice, le testateur, dont la volonté était la loi, pouvait accorder cette autorisa→ tion et donner ainsi une extension aux cas d'aliénation prévus par la loi, sans que pour cela l'héritier grevé devint un simple fiduciaire; qu'une condition importante et même caractéristique de la fiducie, est l'obligation imposée à l'héritier apparent de rendre les biens du testateur à celui auquel ce dernier veut les transmettre à un temps ou âge fixe et déterminé, et non à la mort de l'héritier apparent, ou quand bon lui semblera; car, en ces derniers cas, ce serait un fideicommis conditionnel, suivant la loi 1, § 2, ff., De condit. et dem., suivant la doctrine des auteurs et d'après la jurisprudence des arrêts; Considérant qu'il ne peut appliquer à la cause les dispositions de l'art. 23 de la loi du 17 niv. an 2, ni les dispositions de l'art. 7 de la loi du 18 pluv. an 5, parce que ces articles traitent seulement du cas où un époux décédé aurait conféré au conjoint survivant la simple faculté d'élire un ou plusieurs héritiers dans ses biens, et non du cas où le conjoint survivant aurait été institué héritier ou légataire à la charge de rendre; Considérant que la rémission d'hérédité, faite par Madelaine Courbis, le 16 mars 1793, ne saurait être considérée, ainsi que l'intimé l'a représenté, comme le payement d'une dette, comme l'exécution d'une obligation naturelle qui, dans le fond de l'honneur et de la conscience, obligeât ladite Courbis à l'accomplissement de ce qui y était contenu; que rien ne constate que le testateur ait nominativement désigné à son épouse celui des éligibles qu'elle choisit ensuite; que le testament démontre, au contraire, que Louis Molière père laissa à sa veuve, héritière grevée, entière liberté de choix, et que l'acte même de rémission annonce que Madelaine Courbis, en le faisant, n'entendit se conformer qu'au contenu du testament; que d'ailleurs, y eût-il eu désignation particulière et secrète du père, ce qui ne paraît pas, il n'aurait pas existé pour Madelaine Courbis une obligation naturelle, parce que l'obligation naturelle ne peut exister là où le droit positif a établi des règles absolues, et que tout ce qui concerne l'ordre des successions n'est point du domaine du droit naturel, parce qu'enfin l'obligation naturelle ne peut exister là où son accomplissement nuit au droit des tierces personnes, là où cet accomplissement est diamétralement opposé à ce qui est prescrit par la loi; rant qu'il résulte de toutes les observations précitées que le tribunal de première instance de Privas s'est, d'un côté, déguisé à lui-même la vraie nature de la disposition sur laquelle il avait à prononcer, et que, de l'autre, il y a mal à propos appliqué les règles établies pour les simples facultés d'élire, au lieu de celles qui l'avaient été pour les fideicommis conditionnels non ouverts, en confondant ainsi deux choses parfaitement distinctes; que, par suite, il y a lieu, en reprenant l'instance, d'adjuger aux appelants les fins et conclusions par eux prises; Considérant enfin qu'il y a lieu de compenser les dépens à raison de la qualité des parties; Dit mal jugé, et sans s'arrêter à l'acte de rémission du 16 mars 1795, ordonne le partage des biens de feu Louis Molière père, etc. Du 17 août 1808.-C. de Nimes.

[ocr errors]

Considé

(1) Espèce (Demoiselles Anglas C. leur oncle.) - En 1791, décès du sieur Anglas, père de quatre filles en bas âge, laissant un testament public, à la date du 2 mai 1791, par lequel il léguait d'abord à chacune d'elles une légitime, en les instituant ses héritières particulières.-Ensuite, après avoir fait à son épouse une pension viagère exigible seulement dans le cas où son épouse ne pourrait pas vivre avec son héritier institué, il a institué pour son héritier général et universel Barthelemi Anglas, son frère, à la charge par lui de rendre son hérédité à celle de ses quatre filles qu'il jugerait à propos. - Peu après ont été rendues les lois qui ont aboli les substitutions.-Postérieurement, mariage des quatre filles Anglas. - Barthelemi Anglas, leur oncle, figure dans leur contrat en qualité d'héritier institué de feu Anglas. Il paye à chacune de ses nièces le legs qui leur a été fait par leur père; il leur fait même des dons particuliers, moyennant lesquels elles renoncent, avec l'assistance de leurs époux, à tout supplément de légitime, et autres droits quelconques, sur la succession paternelle. - En 1821, deux des filles Anglas ont prétendu que leur oncle n'avait été institué par leur père qu'à titre de fiducie, et pour la forme; que, n'ayant pas usé du droit d'elec

4o Dans la disposition par laquelle un père a institué son épouse pour héritière universelle, en la chargeant de rendre l'hérédité à

tion en temps utile, la succession de leur père devait être partagée entre ses quatre filles.-Jugement du tribunal d'Alby qui déclare les demanderesses non recevables, soit parce qu'elles ont exécuté le testament en recevant leurs legs, soit parce qu'elles avaient renoncé à tous autres droits.-Appel par les demoiselles Anglas.-Arrêt.

LA COUR; Attendu qu'il est constant, en fait, que dans leurs contrats de mariage, des 17 brum. an 14, et 8 nov. 1809, Marie-Anne Anglas et Mouton, mariés, ainsi que Jeanne-Marie Anglas et Rolland, mariés, tous parties de Bressoles, reconnurent Barthelemi Anglas, leur oncle, comme héritier de Jean-Pierre Anglas, en vertu du testament du 2 mai 1791. Cette reconnaissance ne résulte pas seulement de la qualité donnée audit Barthelemi dans lesdits contrats, mais encore des stipulations par lesquelles les futures épouses, en se constituant en dot le legs que leur père leur avait fait, dans son testament du 2 mai 1791, à titre d'institution héréditaire, déclarent que le montant dudit legs lour est dû par Barthelemi Anglas, leur oncle, héritier de Jean-Pierre Anglas, leur père; qu'elles font une semblable déclaration, en se constituant une autre somme provenant de la succession de Catherine Monestie, lour grand'mère; qu'enfin cette reconnaissance est confirmée par les accords stipulés entre les époux et ledit Barthelemi sur les époques des payements des constitutions dotales;-Qu'il résulte de ces faits une approbation et une exécution réelle du testament du 2 mai 1791, et que, dès lors, lesdites parties de Bressoles ne sont point recevables à contester que ledit Barthelemi Anglas n'ait été le véritable héritier de Jean-Pierre Anglas, son frère;

Attendu qu'indépendamment de cette reconnaissance, il est également constant, en fait, que, dans lesdits contrats de mariage, Barthelemi Anglas fit des donations en faveur des futures épouses, ses nièces; et que, moyennant lesdites donations, il fut expressément convenu que les futures épouses n'auraient aucun droit de supplément de légitime, ni autres droits généralement quelconques à prétendre sur la succession de feu leur père, ledit Barthelemi Anglas n'ayant fait lesdites donations qu'à cette condition; que les parties stipulèrent même, à l'égard de ces donations, une clause pénale; - Que, dès lors, lesdits contrats de mariage renferment, non-seulement un véritable traité sur les difficultés qui pourraient s'élever à l'avenir, à raison dudit testament, mais encore un premier acte entre cohéritiers équipollent à partage; que cet acte a irrévocablement fixé tous les droits; car, en supposant que les parties do Bressoles eussent été lésées, elles auraient négligé de l'attaquer dans les délais accordés pour les actions rescisoires, puisqu'en point de fait, la plus jeune desdites parties de Bressoles avait plus de trente-deux ans à l'époque de l'introduction de l'instance; - Qu'ainsi, les fins de nonrecevoir opposées par les parties de Derrouch sont évidemment bien fondées ;

Attendu, au fond, qu'on lit dans le testament de Jean-Pierre Anglas la clause suivante: «En tous et chacun ses autres biens meubles, immeubles, noms, droits, raisons et actions, et hypothèques en général, en quoi que le tout consiste, puisse consister, de présent et à l'avenir, ledit testateur a fait, institué, et, de sa propre bouche, nommé pour son héritier universel et général Barthelemi Anglas, son frère, à la charge par lui de rendre ladite hérédité à telle de ses quatre filles qu'il jugera à propos; et, dans le cas que ledit Barthelemi Anglas, sondit héritier, vienne à se marier, il sera tenu de faire, de suite, ladite élection et nomination; et, dans ce cas seulement, ledit testateur donne à sondit frere Barthelemi la somme de 350 fr., pour le dédommager des soins qu'il pourrait s'être donnés pour travailler et entretenir ses biens; pour, par ledit Barthelemi Anglas, héritier ci-dessus nommé, jouir, faire et disposer de ses entiers biens et hérédité à ses plaisirs et volontés, aux conditions ci-dessus, tant en la vie qu'en la mort; cassant, révo quant, etc. »; que les parties de Bressoles soutiennent que cette clause renferme, non un fideicommis conditionnel, mais une simple fiducie, qui n'aurait point été abolie par la loi du 14 nov. 1792, puisque ce n'était point une substitution.

Attendu que, d'après tous les auteurs, et notamment d'après M. Merlin, en son Répertoire, vo Fiduciaire, on entend par héritier fiduciaire celui que le testateur a chargé, en l'instituant pour la forme, dadmi→ nistrer sa succession, et de la tenir en dépôt jusqu'au moment of il doit la remettre au véritable héritier; qu'ainsi, l'héritier fiduciaire n est héritier que de nom; qu'il n'est pas saisi de la succession; que ce n'est pas sur sa tête que repose la propriété des biens du défunt; qu'il n'en est que l'administrateur;

Attendu, d'après ces principes, qu'il est impossible de ne voir dans Barthelemi Anglas qu'un simple héritier fiduciaire, puisque, non-seulement l'institution faite en sa faveur, est formelle et directe, mais que rien, dans le testament ne fait supposer que l'intention du testateur fût de ne nommer en son frère qu'un dépositaire et un simple administrateur de ses biens; - Que Barthelemi Anglas fut évidemment saisi de la succession par la mort de son frère, et que la propriété en reposa sur sa tête, puisque, non-seulement le testateur lui avait conféré le

celui de ses enfants qu'elle voudra choisir, quand elle le jugera, à propos; encore bien que ces enfants soient en minorité, que ce père ait, par une autre disposition de son testament, donné à sadite épouse les revenus de ses biens meubles, le pouvoir de vendre pour payer les dettes et legs, et qu'il l'ait dispensée de faire inventaire et de rendre compte des revenus (Bordeaux, 10 mai 1834) (1).

44. On a décidé également que lorsqu'en pays de droit écrit, an mari avait institué sa femme pour héritière, à charge de remettre la succession à celui de leurs enfants qu'elle choisirait, avant la majorité de cet enfant, cette disposition était une institution fideicommissaire emportant transmission de la propriété

droit d'élection, mais qu'il lui avait imposé des charges réelles, avec obligation de les remplir à ses dépens, telles que la charge de faire célébrer un certain nombre de messes, indépendamment de ses honneurs funèbres; de payer une pension annuelle à la femme du défunt, et de faire réparer pour elle un logement convenable; - Attendu que si, d'après Henrys, liv. 3, quest. 22, l'institution fiduciaire est toute conjecturale et dépend des termes du testament, il est impossible, même en prenant cette opinion pour règle, de reconnaître une simple fiducie dans le testament dont il s'agit, puisque les termes de ce testament sont précis et clairs, et qu'ils ne permettent point de douter de l'intention du testateur;

Attendu, d'ailleurs, que, dans l'espèce, Barthelemi Anglas n'avait pas été chargé de rendre à une époque fixe et déterminée, et que le testateur lui avait conféré le droit d'élection; que l'absence d'un délai fixé pour la remise de l'hérédité, ainsi que la faculté d'élire, étaient regardés comme des caractères exclusifs de la fiducie, d'après la jurisprudence du parlement de Toulouse, attestée par plusieurs auteurs recommandables et par plusieurs arrêts, notamment par celui du 18 avril 1731, rapportée par M. de Juin, au Journal du palais, ch. 108 où il fut formellement jugé qu'une institution n'était pas fiduciaire, parce que la mère et le frère du testateur, qui étaient institués, étaient chargés de droit d'élection fit conclure que c'était un fidéicommis, et non une fiducie, parce que ce droit d'élire faisait que l'hérédité était véritablement sur la tête des héritiers nommés, et que les enfants n'étaient que des substitués;

: ce

Attendu que la cour de cassation elle-même l'a ainsi jugé, le 18 frim. an 5, sans qu'on puisse dire qu'elle a jugé le contraire par son arrêt du 23 nov. 1807, puisque, dans l'espèce de ce dernier arrêt, le testateur avait clairement manifesté l'intention de ne faire qu'une simple fiducie, et non une institution d'héritier, dans la personne de son frère ; Attendu que, puisqu'il est établi que la clause testamentaire dont il s'agit ne renferme point une simple fiducie, il faut nécessairement en conclure qu'elle contient un fideicommis conditionnel, une véritable substitution, anéantie par les lois abolitives de 1792 et suivantes; que, dès lors, la décision du tribunal de première instance d'Albi doit être maintenue; Attendu que les parties de Bressolles, succombant dans leur appel, doivent supporter l'amende et les dépens; Par ces motifs, après en avoir délibéré, démet de l'appel.

Du 18 mai 1824.-C. de Toulouse, 2o ch.-M. de Cambon, pr. (1) (Delvalat C. Lafon.) LA COUR; Attendu que Géraud Gauthier, par son testament sous la date du 4 déc. 1782, déclare nommer et instituer pour son héritière générale et universelle Marguerite Lafargue, son épouse, à la charge de remettre son hérédité à telle de leurs deux filles, lors mineures, que bon lui semblera, quand elle le jugera à propos. Attendu que, par cette disposition, dont les termes n'ont rien d'ambigu, l'hérédité du testateur fut déférée directement, et au premier degré, à Marguerite Lafargue, pour la transmettre à ses enfants, avec droit d'élire et sans aucune détermination de l'époque où la remise devait en être effectuée; qu'une telle disposition, qui présente un ordre successif, avec faculté à l'héritière instituée de choisir entre les appelés, et de conserver les biens grevés jusqu'à sa mort, ne peut se concilier avec une simple fiducie; - Qu'elle présente, au contraire, les caractères auxquels, d'après la jurisprudence et la généralité des auteurs, on reconnaissait la substitution fideicommissaire; Que si Géraud Gauthier ajoute qu'il donne à son épouse les revenus de tous ses biens meubles et autres effets, pour en jouir sa vie durant, sans que ni elle ni les siens soient tenus de rendre aucun compte, on ne saurait donner à cette clause un sens exclusif du droit de propriété résultant de celle qui la précède immédiatement; Que, par cette dation de la jouissance des revenus qui, sans qu'il fût nécessaire de l'exprimer, était une conséquence de l'institution universelle, le testateur a voulu expliquer, d'une manière plus explicite, la destination ultérieure de ses biens et les limites qu'il était dans son intention d'apposer à sa libéralité; Attendu que le pouvoir donné à Marguerite Lafargue de vendre et d'aliéner des biens de l'hérédité pour payer les dettes et legs, n'était pas non plus incompatible avec le fideicommis; Que le testateur a pu

jusqu'à la remise du fidéicommis, et non point une fiducie, autrement un simple dépôt; qu'en conséquence la personne instituée ne devait point être tenue de rendre les fruits; qu'il y aurait eu fiducie si le testateur avait chargé sá femme de remettre la succession aux enfants avant leur majorité, sans lui donner le droit d'élire (Limoges, 1er juill. 1817) (2).

45. On ne pouvait considérer comme une simple institution fiduciaire l'institution à charge de rendre au fils du testateur, à la volonté de l'institué, et qui laissait à ce dernier la libre disposition de l'hérédité, dans le cas où l'enfant décéderait avant d'avoir atteint l'âge de vingt-cinq ans (Montpellier, 22 avril 1831) (3).

aussi la dispenser de la faction d'inventaire à laquelle, sans cette dispense, elle aurait été tenue, aux termes de l'art. 1 du titre 2 de l'ord. de 1747; Attendu que la substitution dont il s'agit s'étant trouvée ouverte lors de la promulgation de la loi du 25 oct.-14 nov. 1792, la propriété des biens substitués fut consolidée sur la tête de Marguerite Lafargue, qui a, dès lors, pu disposer desdits biens en faveur d'Anne Gauthier, épouse Delvalat, sa fille aînée, sauf la légitime de sa seconde fille, Gabrielle Gauthier, épouse Lafon; Que c'est d'après ces bases qu'il devra être procédé au partage; Par ces motifs, émendant, dif et déclare que l'institution générale et universelle faite par Géraud Gauthier, dans son testament du 4 déc. 1782, contient une substitution fidéicommissaire, et non une simple fiducie; Que les biens compris dans cette institution, et recueillis par Marguerite Lafargue, sont devenus sa propriété par l'effet de la loi des 25 oct.-14 nov. 1792, abolitive des substitutions; Ordonne en conséquence qu'il sera procédé, d'après ces bases, entre les parties, au partage des successions dont il s'agit, à l'effet de quoi elles se retireront devant le notaire désigné par les premiers juges pour y être procédé conformément aux art. 828 et suiv. c. civ.

[ocr errors]

Du 10 mai 1834.-C. de Bordeaux, 2o ch.-M. Gerbeaud, pr. (2) (Dame Bringaud C. Maiso ial.) LA COUR Considérant 1810, des conclusions prises par Francoise Bringaud dans celui du 27 août 1812, et par lesquelles elle déclara acquiescer à celles prises par l'avoué de Maisonial, quant aux condamnations provoquées contre Jacques Bringaud; que son acquiescement ainsi restreint aux dispositions dudit jugement qui lui étaient favorables, ne pouvait, d'après les principes et la jurisprudence, être étendues à celles qui lui étaient contraires; que l'appel de ce jugement est dès lors recevable; · Considérant que

le droit d'élection accordé à Françoise Bringaud par le testament de son mari, ayant fixé l'hérédité sur sa tête jusqu'au moment de cette élection cette circonstance donne à l'institution faite en sa faveur par ledit testament, le caractère d'une véritable institution fidéicommissaire, nonobstant ceux de fiducie qu'elle eût eus sans cette circonstance; s'arrêter aux fins de non-recevoir, met l'appellation et ce dont est appel au néant, etc.

Du 1er juill. 1817.-C. de Limoges.

Sans

(3) Espèce : (Pons et Dupin C. Privat.) — 1788, testament par lequel la dame Privat lègue à ses deux filles, Françoise et Antoinette, 2,000 fr. payables à chacune d'elles, lorsqu'elles se marieront, et sous la condition qu'elles n'auront plus rien à prétendre sur les biens de la testatrice. Elle lègue également, sous la même condition, 3,000 fr. à son fils aîné, Charles-Augustin, et institue son mari pour héritier universel, à la charge de rendre l'hérédité à Pierre-Alexis Privat, son fils puiné, laissant à la volonté du sieur Privat père l'époque de la remise de l'hérédité, et lui en abandonnant, en outre, la libre disposition, au cas où Pierre-Alexis Privat décéderait avant d'avoir atteint l'âge de vingt-cinq ans.-En l'an 3, Françoise Privat s'étant mariée, reçoit de son père le legs à elle fait par sa mère. Elle meurt ensuite, laissant pour héritières les dames Pons et Dupin, ses filles. Charles-Augustin et PierreAlexis Privat sont aussi décédés. En 1829, les dames Pons et Dupin assignent le sieur Privat père en partage de la succession de sa femme. Elle demandent que le testament de 1788 soit annulé comme entaché du vice de prétérition, attendu qu'il ne contient, en faveur de PierreAlexis Privat, aucune disposition positive et directe.- Privat père soutient que l'exécution donnée au testament par Françoise Privat a couvert tout moyen de nullité; que la prétérition ne constituait qu'une nullité relative que l'héritier prétérit pouvait seul faire valoir; qu'au surplus, le vice de prétérition n'existait point, puisqu'au moyen de la substitution faite à son profit, Pierre-Alexis Privat eût dû être investi un jour de toute l'hérédité.-Jugement qui, accueillant ces moyens, dė➡ clare n'y avoir lieu d'ordonner le partage. - Appel. — Arrêt.

LA COUR; Attendu, sur les fins de non-recevoir, que toutes les circonstances de la cause démontrent que Françoise Privat n'avait, à l'époque de son contrat de mariage, aucune connaissance des vices et nullités du testament de sa mère, et qu'elle reçut et quittança le legs à elle fait, sans avoir vu ni discuté ledit testament; d'où il suit qu'elle ne put,

46. Nous venons d'expliquer quelle doit être la nature de la première des deux dispositions dont le concours forme la substitution. Mais à quels termes se fait-elle reconnaître? En parlant de l'interprétation des substitutions, nous démontrerons que la premiere disposition ne peut, non plus que la seconde, s'induire, comme autrefois, de conjectures ou de simples présomptions; qu'elle doit être expresse. En voici un important exemple cité dans tous les auteurs: Les personnes mises dans la condition ne sont pas censées dans la disposition. «J'institue Pierre, et s'il meurt sans enfants, je substitue Jacques. » Les enfants ne sont mis que dans la condition; l'instituant ne les appelle ni ne les substitue; Jacques seul est substitué. Telle est la décision des lois romaines, qu'il s'agisse soit de testaments (L. 114, § 13, ff., De legat.; L. 5 et 17, § 5, ff., ad S. C. Treb.), soit de contrats (L. 30, ff., De pact. dotal.; L. 48, ff., Solut. matr.). L'ordonnance de 1747 s'exprime dans le même sens, art. 19, tit. 1: « Les enfants qui ne seront point appelés expressément à la substitution, mais qui seront seulement mis dans la condition, sans être chargés de restituer à d'autres, ne seront en aucun cas regardés comme étant dans la disposition. >>

47. La condition si sine liberis decesserit devrait de nos jours être encore moins réputée renfermer l'institution des enfants, depuis que les substitutions sont prohibées, ou du moins limitées bien en deçà des bornes posées par l'ordonnance. Les termes d'un acte ne s'interprètent point dans un sens qui en neutralise l'effet.-La même doctrine est enseignée par MM. Merlin, Rép., vo Substitution fidéicommissaire, sect. 9; Rolland de Villargues, nos 122 à 126; Toullier, t. 5, no 25; Duranton, t. 8, no 70; Zachariæ, t. 5, p. 247. Quant à M. Delvincourt, « j'avoue, dit-il (t. 2, note 2, sur la page 105), que j'ai toujours eu beaucoup de peine à adopter cette opinion. » Il en donne ce double motif : « Il est si naturel de penser que le testateur a eu en vue de gratifier les enfants de son légataire! La loi 85, ff., De hæred. inst., dans une

par le fait de la reception dudit legs, couvrir les vices et nullités dont il s'agit, et renoncer à les faire valoir; - Attendu, en ce qui touche la fin de non-recevoir, que la nullité résultant de la prétérition était radicale et absolue, et non relative et propre au légitimaire prétérit ou à ses représentants; qu'elle emportait l'institution, faisait mourir le défunt sans héritier institué, donnait ouverture à la succession ab intestat, et appelait tous les enfants à un partage égal: d'où il suit que l'action en nullité de testament, pour vice de prétérition, appartenait indistinctement à tous les enfants ou autres légitimaires, et pouvait être intentée alors même que le prétèrit ne se plaignait pas, et après l'execution ou l'approbation du testament de sa part;

[ocr errors]

Attendu, au fond, que le testament de Marie-Anne Pessade ne laissait rien à titre d'institution à Pierre-Alexis Privat, son fils, pour le remplir de sa légitime; que la substitution, ou le fideicommis de l'hérédité, fait au profit dudit Pierre Privat, ne pouvait, suivant la jurisprudence du parlement de Toulouse et la doctrine des auteurs, notamment de Furgole et de Serres, tenir lieu à son égard de l'institution expresse et actuelle exigée par les art. 50, 51, 52 et 53 de l'ord. de 1735, conforme à la législation des novelles ; Attendu que Jean Privat et la veuve de Pierre-Alexis sont non recevables à prétendre que le testament de MarieAnne Pessade ne contient qu'une simple institution fiduciaire au profit de ce dernier, puisqu'ils ont l'un et l'autre formellement reconnu le contraire, notamment par le contrat de mariage dudit Pierre-Alexis Privat, en date du 21 déc. 1810; qu'on ne saurait, d'ailleurs, reconnaître dans la disposition dont il s'agit du testament de Marie-Anne Pessade, les caractères d'une simple fiducie; et qu'enfin l'institution, même fiduciaire, n'aurait pu purger le testament du vice de prétérition et tenir lieu à PierreAlexis Privat de l'institution expresse exigée par la loi, alors que l'époque de la remise de l'hérédité était laissée à la volonté de Jean Privat père, et que la testatrice lui en avait laissé la libre disposition, au cas que Pierre-Alexis vînt à décéder avant d'avoir atteint l'âge de vingtcinq ans;

Sans s'arrêter ni avoir égard à l'appel des héritiers et représentants de Charles-Augustin Privat, ordonne que le jugement dont est appel sortira, à cet égard, son plein et entier effet; -Et en ce qui touche les enfants et representants de Françoise Privat, sans s'arrêter ni avoir égard aux fins de non-recevoir à eux opposées, et les rejetant, met l'appellation et le jugement dont est appel au néant; condamne le sieur Jean Privat à délaisser auxdits enfants et représentants de Françoise Privat, le quart des entiers biens, meubles et immeubles délaissés par feu Marie-Anne Pessade, et en suivant le partage qui en sera fait entre eux aux formes de droit.

Du 22 avril 1831.-C. de Montpellier.-M. Rosier, pr.

TOME XLI.

| espèce absolument semblable, prononce que le testateur est censé avoir préféré au substitué non-seulement l'institué, mais encore les enfants de ce dernier: non enim fratrem solùm prætulit substitutis, sed et ejus liberos. » Mais cette hésitation, dit M. Arm. Dalloz (Dict., vo Substit., no 47), fondée sous la loi romaine, ne l'est pas d'après la règle d'interprétation qu'on vient de poser. - Il a été décidé que par une clause ainsi conçue:

« Je donne mon bien à mon petit-fils pour en jouir sa vie durant dans le cas qu'il meure sans être majeur ni ne laisse des enfants, je les donne à tels, etc., le testateur n'est pas censé avoir fait une substitution en faveur de ses arrière-petits-enfants, et, par suite, ceux-ci ne sont pas fondés à agir en délaissement contre des tiers acquéreurs, une telle clause ne disposant pas pour le cas où l'institué laisserait des enfants, ne contenant pas non plus l'obligation de conserver et de rendre, ni enfin ne portant aucune disposition en faveur de ses arrière-petits-enfants; qu'en cas pareil, d'ailleurs, la question de savoir si les arrièrepetits-enfants placés dans la condition, n'étaient pas compris dans la substitution, est une question de volonté dont l'appréciation, placée dans le domaine du juge, ne saurait tomber sous la censure de la cour de cassation (Req. 22 nov. 1842) (1).

48. L'ordonnance de 1747 suppose, dans l'article cité, que les enfants ont été simplement mis dans la condition, sans être chargés de restituer à d'autres.-Si donc le testateur avait dit: «J'institue Pierre, et s'il décède sans enfants, je leur substitue Paul,» dans ce cas, les enfants seraient réputés grevés envers Paul. Telle était l'opinion de Furgole, Comment. de l'ord. de 1747, p. 6 et 92, et de Pothier, sect. 2, art. 2. Nous pensons, comme M. Rolland de Villargues, no 125, qu'elle doit encore être suivie.

[ocr errors]

49. Du reste, les réflexions qui précèdent s'appliquent à toute autre personne qu'aux enfants de l'institué, et qui serait seulement dans la condition. M. Rolland de Villargues, nos 86,

[ocr errors]

(1) Espèce (Hérit. Desbonne C. Loumagne.) - Les circonstances dans lesquelles ces décisions ont été rendues ressortent suffisamment de la lecture de l'arrêt. Il s'agissait, comme on peut le voir, d'une action en délaissement de biens prétendus compris dans une substitution, et que le grevé de restitution aurait indûment aliénés. Ces prétentions furent repoussées par jugement du tribunal de la Pointe-à-Pitre, confirmé par arrêt de la cour royale de la Guadeloupe, du 22 mars 1839. Pourvoi des héritiers Desbonne pour violation des lois et des principes en matière de substitution fideicommissaire, spécialement des lois 19, 82 et 85, Dig., De hered. instit.; fausse application de l'art. 19, tit. 1, de l'ord. de 1747. Les deux conditions exprimées par la testatrice, a-t-on dit, démontrent clairement que son intention a été de n'accorder que l'usufruit de ses biens à son fils et à son petit-fils, et, par conséquent, de grever de substitution aussi bien le petit-fils que le premier grevé; d'où il résulte qu'en cas d'existence d'enfants de son petit-fils, il faut nécessairement conclure que ces arrière-petits-enfants de la testatrice doivent être appelés à recueillir, après la mort de leur père, les biens dont celui-ci n'avait que la jouissance, sa vie durant. En effet, la défense d'aliéner qui résulte de la qualité d'usufruitier attribuée au petitfils, s'interprète dans le sens d'une substitution fidéicommissaire tacite. Il n'est pas nécessaire, dit Pothier, Subst., sect. 3, § 1, p. 362, pour que la défense d'aliéner renferme une substitution fidéicommissaire que le testateur ait exprimé en faveur de qui il faisait cette défense, pourvu qu'on puisse connaître en faveur de qui il a voulu la faire, et il cite comme exemple la loi 74, Dig., Ad senatus consultum Trebell., où un père s'était ainsi exprimé à l'égard de sa fille : Mando tibi non testar donec liberi tibi sint. L'empereur Sévère décida que cette disposition renfermait une substitution au profit des collatéraux de cette fille, bien qu'ils n'eussent pas été désignés, et que la disposition eût été faite sous Arrêt. condition qu'elle n'aurait point d'enfants.

LA COUR-Attendu, en fait, que, par son testament du 13 avr. 1792, la dame Durieux, veuve Vannier Desbonne, demeurant à la Guadeloupe, s'exprima en ces termes : « Je donne à mon fils tout ce qui me reste de biens pour en jouir sa vie durant, et, après lui, à son fils, pour en jouir sa vie durant. Dans le cas qu'il meure sans être majeur, ni ne laisse des enfants, je désire que mon bien soit donné, un quart à Marie-Jeanne Durieux ou à ses enfants, un quart à Marguerite Durieux ou à son fils. Les deux autres quarts seront à partager entre les enfants de François Desbonne, mon neveu, les enfants de Mariette Lacul et ceux de Manette Lacul; Attendu que la testatrice mourut à la Guadeloupe le 11 avr. 1793, laissant son fils et son petit-fils vivants. Le petit-fils se maria et deux filles provinrent de son mariage: ce sont les demanderesses en cassation, qui, prétendant trouver dans le testament une substitution en

3

121 et 123, fait la même observation, qu'il fonde sur plusieurs textes de droit romain, et notamment sur les lois 19 et 82, ff., De hæred. instit.

50. De ce que, pour "aractériser une substitution, il faut une première disposition faite au profit du grevé, plusieurs auteurs ont conclu que l'héritier ab intestat chargé par le testateur de rendre à un tiers ne saurait être assimilé à un grevé de substitution. Et, en effet, dit-on, ce n'est pas du testateur que l'héritier ab intestat reçoit, c'est de la loi; donc, dans cette hypothèse, la première condition de la substitution prohibée, la disposition en faveur du grevé, fait défaut. Tel est le sentiment notamment de MM. Rolland de Villargues, no 128; Duranton, t. 8, no 67; Delvincourt, t. 2, note 5 sur la page 103; Zachariæ, t. 5, p. 244. Et les termes de l'art. 896 semblent favorables à cette interprétation. Cet article, en effet, pour désigner le grevé, emploie ces dénominations: « le donataire, l'héritier institué, ou le légataire, » qui semblent exclure l'héritier ab intestat. - Toutefois nous ne croyons pas que cette opinion doive être suivie. Elle ne nous paraît reposer que sur une subtilité. Lorsque le testateur, qui pourrait disposer de l'hérédité en faveur d'un étranger, la laisse à son héritier ab intestat, il dispose bien véritablement en faveur de ce dernier : dat qui non adimit; son silence équivaut à une manifestation de volonté : c'est une sanction donnée au bénéfice de la loi. Et d'ailleurs que fait la loi elle-même quand elle règle la dévolution de l'hérédité ab intestat? Elle interprète la volonté tacite du défunt; c'est le législateur lui-même qui l'a dit dans l'exposé des motifs du titre des Successions: «La loi des successions est le testament présumé de ceux qui meurent sans avoir disposé. » Il est donc vrai de dire que le premier élément de la substitution prohibée, la disposition en faveur du grevé, existe dans le cas dont il s'agit. D'ailleurs, comme le fait remarquer un auteur (M. Coin-Delisle), le code Napoléon a entendu abolir les substitutions fidéicommissaires telles qu'elles existaient sous l'ancien droit. Or, sous l'ancien droit, il y avait substitution fidéicommissaire encore bien que la charge de conserver et de rendre fût imposée à l'héritier ab intestat (V. Ricard, Substit., part. 1, no 98 et no 166; Pothier, Substit., sect. 4, art. 1, § 3, 3 alin.; Thévenot, chap. 6, § 1). C'est en ce dernier sens que se prononcent, sous l'empire du droit actuel, MM. Coin-Delisle, sur l'art. 896, nos 12 et 13; Troplong, no 107; Marcadé, sur l'art. 896, n° 4. Et il a été décidé, en ce sens, que la disposition avec charge de conserver et de rendre forme une substitution prohibée, sans qu'il y ait lieu de distinguer si la personne instituée héritière était ou non héritière ab intestat du disposant (Angers, 7 mars 1822, aff. Hunaut, no 121).

--

[blocks in formation]

51. Nous avons dit que, pour qu'il y eût substitution prohibée, il était nécessaire qu'à côté de la libéralité faite en faveur du grevé, il y eût une libéralité au profit du substitué. L'absence de cette dernière exclurait toute idée de substitution. Il suit de là que la disposition par laquelle un testateur défend à son héritier de laisser tout ou partie des biens dépendant de sa succession à une personne indiquée ne renferme pas une substitution fidéicoramissaire tacite en faveur des héritiers ab intestat soit du testateur, soit de son héritier institué : « Attendu, porte l'arrêt, que, la défense portée dans le testament dont s'agit ne désignant ni explicitement ni implicitement aucune personne ni famille en faveur desquelles elle est faite, il ne peut y avoir de fidéicommis >> (Bruxelles, 51 janv. 1816, aff. Mouchet C. Dumont; V. Conf. M. Zachariæ, t. 5, p. 255).

52. Il ne faut pas confondre avec la substitution les disposi

[ocr errors]

leur faveur, agirent en désistement de la moitié de l'habitation; -Attendu que la cour royale s'est proposé deux questions: la première, résolue négativement, de savoir si la disposition contenait une substitution en faveur des arrière-petites-filles de la testatrice; la seconde. résolue aussi négativement en fait et en droit, de savoir si les petitesfilles n'étant que dans la condition, elles devraient être placées dans la disposition;

Attendu, en droit, que la testatrice n'a pas disposé pour le cas où son petit-fils laisserait des enfants, qu'elle ne l'a pas chargé de obligation de conserver et de rendre, qu'elle n'a fait aucune disposition en

tions charitables qui, bien qu'imposant une charge à l'institué en faveur de personnes plus ou moins vaguement désignées, ne constitueraient pas cependant, en faveur de ces dernières, un droit dont elles pussent réclamer l'exécution. Ainsi, par exemple, la fondation par testament, pour servir au logement gratuit d'ouvriers malheureux, d'une maison dont la construction et l'en tretien sont imposés au légataire universel institué dans ce tes tament et à ses héritiers, n'a pas, soit entre ces ouvriers, soit quant à ce légataire universel, le caractère d'une substitution prohibée, mais constitue une simple charge perpétuelle. — Jugé en conséquence que, le legs universel n'étant pas, à l'égard des valeurs affectées à une telle fondation, entaché de substitution prohibée, les héritiers légitimes ne peuvent réclamer ces valeurs, comme devant être détachées de l'institution testamentaire ellemême, aux termes de l'art. 896 c. nap., qui annule la disposition viciée de substitution aussi bien à l'égard de l'institué que du substitué (Req. 17 août 1852, aff. Hanavie, D. P. 52. 1. 263).

[ocr errors]

53. Mais en quels termes doit être conçue la disposition faite au profit du substitué? Il n'est point de locution ou formule déterminée il suffit que la volonté de substituer soit clairement énoncée. Voluntatis defuncti quæstio in æstimatione judicis est, dit la loi 7, C., De fideic. Peu importe que les termes soient impropres si la volonté est manifeste (L. 69, § 1, ff., De legat., 3). Thévenot cite cet exemple, no 188: « J'institue un tel, et après qu'il aura recueilli, j'institue ses enfants. » Ce mot j'institue, quoique direct, formera au profit des enfants la substitution oblique ou fidéicommissaire, parce que les expressions après qu'il aura recueilli ne permettent pas de lui donner un autre sens (V. aussi MM. Rolland de Villargues, no 165; Coin-Delisle, sur l'art. 896, no 39; Marcadé, sur l'art. 896, no 7; Zachariæ, t. 5, p. 250). Peu importe non plus à qui les termes soient adressés dans la loi 69, ff., eod. tit., 2o, c'est au substitué que le testateur parle; dans la loi 108, ff., De legat., 1o, § 13 et 14, c'est à un tiers, dépositaire de la chose léguée (Thévenot, nos 246, 247). Dans l'ancien droit des Romains, les legs et les fidéicommis se distinguaient par des termes qui leur étaient propres: les legs étaient conçus en forme de commandement; les fidéicommis en forme de prière. Dès avant Justinien, qui confirma ce changement, une loi du code avait supprimé cette différence.

[ocr errors]

54. Cependant les paroles du disposant doivent, quelles qu'elles soient, réunir certains caractères, pour qu'elles expriment la volonté de substituer. Il faut, 1° que les termes soient dispositifs et obligatoires; 20 qu'ils emportent l'ordre successif; 3o que l'époque fixée pour la restitution soit le décès du grevé. C'est au développement de ces trois aperçus que se rattacheront tour à tour les observations qui suivent.

res.

55.1° Il faut que les termes soient dispositifs et obligatoiIl faut d'abord qu'ils soient dispositifs et non simplement énonciatifs. C'est une règle enseignée par tous les auteurs, qui la fondent sur les lois 2, C., Comm. de leg. et fid., et 72, § 8, ff., De cond. et dem. (Thévenot, no 180; M. Merlin, Rép., vis Substit. fidéic., sect. 8, no 2; Institut. d'hérit., sect. 4, no 9). Qu'un testateur, par exemple, se borne, sans substituer positivement, à dire qu'il a substitué soit par un testament précédent, soit par le même acte, l'énonciation ne suffira pas (L. 72, § 8, ff., De cond. et dem.; L. 84, pr., ff., De legat., 2o; V. aussi MM. Rolland de Villargues, no 170; Coin-Delisle, sur l'art. 896, no 37; Troplong, no 108). - Il en serait autrement de ces mots : j'ai substitué. Les auteurs remarquent avec raison que dans beaucoup de dispositions le passé est mis pour le présent.

56. Le même principe, combiné avec l'art. 19, tit. 1, de l'ordonnance de 1747, et les observations que nous avons faites ci-dessus (no 46 et 47), ne permet pas de comprendre dans la faveur de ses arrière-petits-enfants, et que, dès lors, en jugeant que le petit-fils de la testatrice n'avait pas été grevé de substitution, la cour royale a fait une juste application des principes sur la matière; -Attendu que, pour juger la question de savoir si les petites-filles, placées dans la condition, devaient être censées dans la disposition, il s'agissait d'interpréter la volonté de la testatrice, voluntatis quæstio in æstimatione judicis est; cette interprétation était donc dans les attributions exclusives de la cour royale; elle ne peut pas être soumise à la cour de cassation; - Rejette.

Du 22 nov. 1842.-C. C., ch. req.-MM. Lasagni, pr.-Mestadier, rap

disposition les enfants ou toute autre personne mis seulement dans

la condition.-V. en ce sens Furgole, des Testam., chap. 7, sect. 4, n° 64; M. Troplong, no 108.

57. Du reste, il ne faut point perdre de vue la règle générale posée par Thévenot, nos 181 et 182 : « L'omission des termes du fidéicommis ne doit pas, dit-il, en empêcher l'effet, si l'on voit par la liaison et le rapport de ce qui se trouve écrit que c'est un simple oubli de mots (L. 67, ff., De leg., 2o, § 9), si la volonté de faire une substitution fidéicommissaire paraît évidemment par le surplus du contexte» (V. aussi M. Marcadé, sur l'art.

[ocr errors]

(1) Espèce: (Demoiselle Schwartz C. hér. Ortlieb.)-Par testament olographe du 10 mai 1832, le sieur Ortlieb avait institué, pour son héritière unique et universelle, la demoiselle Porcienne Schwartz, sa cousine issue de germaine, pour, dès le moment de sa mort, en jouir en toute propriété, à charge, cependant, de délivrer à certaines personnes quelques legs particuliers faits par ce même testament. Le 27 mars 1853, le sieur Ortlieb rédigea une annexe à son testament précédent, où on lit la clause suivante : « Je veux et ordonne qu'en cas de décès de demoiselle Porcienne Schwartz avant d'avoir contracté mariage, et, quand même elle se serait mariée, sans avoir eu d'enfants de son mariage à l'époque de sa mort, le bénéfice du legs que j'ai fait en sa faveur dans le présent testament soit réversible, pour la jouissance seulement, à sa mère survivante, dame Magdeleine Schwartz, née Ortlieb, ma cousine germaine, après la mort de laquelle ce bénéfice appartiendrait de droit à mes héritiers naturels, tant du côté paternel que du côté maternel. »

[ocr errors]

Le sieur Ortlieb décéda le 3 nov 1836, et Porcienne Schwartz se fit envoyer en possession de sa succession. Mais le 17 avr. 1837, les héritiers naturels du défunt formèrent une demande en nullité de testament, fondée sur ce que le legs universel fait au profit de la demoiselle Schwartz contenait une substitution fidéicommissaire prohibée par l'art. 896 c. civ.

7 août 1837, jugement du tribunal de première instance de Colmar, qui accueille cette demande en ces termes : - «Attendu qu'on ne peut sérieusement se méprendre sur le sens et la portée des dispositions testamentaires de feu Jean-David Ortlieb; que sa volonté est clairement manifestée; - Que, par le testament olographe du 10 mai 1852, il a institué sa cousine Porcienne Schwartz héritière universelle de sa fortune, pour en jouir en toute propriété, en la chargeant de faire la délivrance des legs particuliers que renferme le testament; Qu'il est question que Porcienne Schwartz possédait la confiance et les affections du testateur, puisque, dans une des dispositions du testament, il a manifesté le désir de voir son nom de famille joint légalement à celui de l'époux que se donnerait la légataire par un futur mariage, et qu'il l'a constituée dépositaire de ses effets d'habillement, d'armement et de ses insignes militaires; Que l'idée du mariage de la légataire paraît avoir préoccupé le testateur depuis la confection de son testament olographe; qu'il a pensé que ce mariage pourrait ne pas se réaliser, et que la légataire universelle viendrait à décéder sans postérité légitime; que, dans ces prévisions, il a fait un retour sur la première disposition testamentaire, en stipulant une clause additionnelle, sous date du 27 mars 1855, dans un second acte qualifié par le testateur, « annexe à mon testament olographe du 10 mai 1852; » que cette clause est ainsi conçue :... (V. les faits); -En ce qui touche la question de substitution : Attendu que, par la clause additionnelle, le testateur a exprimé la volonté que le bénéfice du legs universel serait transmis à ses héritiers naturels, dans le cas d'inexistence d'enfant du mariage de la légataire, en assurant toutefois à la mère Schwartz, en cas de survie, la jouissance viagère de ce même legs; - Attendu que cette disposition renferme le caractère de la substitution prohibée par la loi; qu'on y rencontre l'obligation de conserver et de rendre; que le testateur a établi une triple institution; qu'il a gratifié sa cousine Schwartz en première ligne, en lui attribuant la propriété du legs, puis, à la mort de celle-ci, la mère Schwartz, en cas de survie, et en dernière ligne ses héritiers naturels; qu'une pareille disposition, qui ne transmet à des tiers la propriété d'un legs qu'après que cette propriété a fait impression sur la tête d'une autre personne, constitue une substitution fideicommissaire dans la force du terme; que cette substitution est principalement signalée par le trait du temps, tractu temporis, et par l'ordre successif; que le testateur, en instituant Porcienne Schwartz, veut qu'à son décès elle rende le legs à la mère Schwartz, en cas de survie, et qu'à la mort de celle-ci il advienne à ses héritiers naturels; qu'il est évident que chaque institué est tenu de conserver jusqu'à sa mort pour transmettre à un autre institué; que, dès lors, il y a limitation de temps; que cela résulte nécessairement des termes dont le disposant s'est servi; Attendu qu'on ne peut point considérer cette disposition comme renfermant un legs sous condition purement résolutoire, puisque le testateur n'a pas entendu donner l'usufruit du legs à Porcienne Schwartz, mais bien la nue propriété, ainsi qu'il l'a virtuellement énonce; que, dès lors, en instituant en dernière ligne ses héritiers naturels pour recueillir le legs, il a interrompu l'ordre successif et dé

896, n° 7). Ainsi, jugé : 1o qu'il n'est pas absolument nécessaire que les mots je substitue soient dans la disposition (Pau, 4 janv. 1826, aff. Guiraud, no 203-3°);- 2o Que la disposition par laquelle un testateur ordonne qu'en cas de décès du légataire institué sans avoir contracté mariage, ou sans enfants de son mariage, le bénéfice du legs soit réversible à un tiers, constitue une substitution prohibée, alors même que la charge de conserver et de rendre n'est pas exprimée formellement (Rej. 21 juin 1841) (1).

58. Les termes doivent encore être obligatoires, c'est-à-dire imposer une obligation véritable au grevé et à ses héritiers, et pouillé les héritiers de la légataire universelle des droits successifs que leur attribuait la loi; Attendu que la condition d'existence d'enfant attachée à la clause du testament ne peut point altérer la substance et la nature de la substitution; que cette condition éventuelle n'est qu'un surcroit de manifestation de la volonté du testateur, que la légataire universelle ayant survécu au testateur sans existence d'enfant d'un mariage, ne pourrait recueillir le legs qu'avec l'obligation de le conserver sa vie durant, et de le rendre à sa mort; que ce legs ne serait pas sa propriété incommutable, puisqu'elle ne pourrait en disposer à titre de proprié taire, et qu'il adviendrait à sa mort en propriété aux héritiers naturels du testateur; que le législateur, en prohibant la substitution fidéicommissaire, a précisément voulu empêcher que les propriétés transmises par testament ne restassent flottantes et incertaines dans les familles, et que l'ordre de succession établi par la loi ne fût rompu par des institutions en seconde ligne; - En ce qui touche les conclusions subsidiaires des défendeurs : - Attendu qu'une seule et même volonté a dicté les deux dispositions testamentaires faites en faveur de la demoiselle Schwartz; que ces dispositions s'enchaînent l'une dans l'autre; qu'on ne pourrait les diviser sans rompre la volonté du testateur; Que dans l'acte testamentaire du 27 mars 1833, à la suite de la clause additionnelle, le testateur a lui-même déclaré : « Telle est ma volonté, qui sera suivio dans toute sa force et teneur, et avec tout le contenu et dispositions renfermées dans mon testament du 10 mai 1832; » Attendu qu'on ne saurait restreindre la nullité à la substitution seule renfermée dans l'acte du 27 mars 1855 et laisser subsister dans toute sa force l'institution du legs fait dans l'acte du 10 mai 1832; Que ce système serait contraire à la volonté du testateur, et contraire aux dispositions de l'art. 896 c. civ., qui prononce la nullité de la disposition, tant à l'égard du donataire ou légataire qu'à l'égard de l'héritier substitué; que la nullité de la substitution entraîne nécessairement la nullité de l'institution principale; que peu importe que la substitution soit renfermée dans un acte distinct, la volonté du testateur n'en est pas moins une et indivisible ; qu'admettre le principe contraire, ce serait tomber dans de graves inconvénients; Attendu qu'il est vrai de dire que le testateur, en écrivant ses dispositions de dernière volonté, n'a pas eu l'idée qu'il faisait une substitution prohibée par la loi, et que la demoiselle Schwartz pourrait être privée du bénéfice de son legs; Qu'il entendait, au contraire, avantager cette dernière de préférence à tous autres; mais de ce que le testateur a ignoré la loi, il ne s'ensuit pas qu'une stipulation illicite puisse être maintenue; Que dès lors il y a lieu de prononcer la nullité des deux dispositions testamentaires faites en faveur de Porcienne Schwartz et de la veuve Schwartz et des héritiers institués, conformément aux dispositions de l'art. 896 c. civ. »

-

[ocr errors]

[ocr errors]

Appel. 24 mars 1838, arrêt de la cour de Colmar, qui confirme en adoptant les motifs des premiers juges. Pourvoi de Porcienne Schwartz.

10 Fausse application de l'art. 896 e violation des art. 898, 899 et 1157 c. civ., en ce que l'arrêt attaqué a annulé la disposition testamentaire dont il s'agit comme contenant une substitution prohibée. 2o Fausse application de l'art. 896 et violation des art. 900, 1055 et 1036 c. civ., en ce que la cour royale, considérant comme un seul et même tout l'annexe du 27 mars 1835 et le testament antérieur du 10 mai 1832, a étendu au testament l'effet de la nullité dont aurait été entachée l'annexe posterieure. - Arrêt.

LA COUR; Sur le premier moyen: - Attendu qu'en confirmant le jugement qui, dans la disposition de l'acte de dernière volonté de JeanDavid Ortlieb, en date du 27 mars 1853, relative à Porcienne Schwartz, avait reconnu tous les caractères d'une substitution prohibée, l'arrêt attaqué a fait une juste appréciation de cette disposition et n'a ni faussement appliqué l'art. 896 c. civ. ni violé les art. 898, 899 et 1157 du même code; Sur le deuxième moyen- Attendu qu'en jugeant que

le testament du 10 mai 1832 et l'annexe du 27 mars 1853 ne faisaient, quant à Porcienne Schwartz, qu'un seul et même acte, dont les dispositions liées entre elles formaient un tout indivisible, et en confirmant le jugement qui rejetait les conclusions subsidiaires de ladite Porcienne Schwartz à fin d'exécution du testament du 10 mai 1852, l'arrêt altaque a fait encore une juste interprétation des actes dont il s'agit, et n'a ni faussement appliqué l'art. 896 c. civ. ni violé les art. 900, 1055 et 1056 même code;

[ocr errors]

Rejette.

Du 21 juin 1841.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Miller, rap.-Laplagne-Barris, 1er av. gen., c. conf.-Roger et Coffinières, av.

« VorigeDoorgaan »