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L 2996

FEB 1 9 1931

RÉPERTOIRE

MÉTHODIQUE ET ALPHABÉTIQUE

DE LÉGISLATION, DE DOCTRINE

ET DE JURISPRUDENCE,

SUBSTITUTION. 1. Le mot substitution signifie, en général, une disposition par laquelle un tiers est appelé à recueillir une libéralité, à défaut d'une autre personne ou après elle. Cette dénomination n'a pas toujours, dans le langage du droit, une acception identique; elle s'applique, suivant les circonstances dans lesquelles elle est employée, à des dispositions diverses. Aujourd'hui, lorsqu'elle est employée seule, elle désigne proprement la substitution appelée fidéicommissaire.

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Division.

Historique et LÉGISLATION. DROIT COMPARÉ (no 2).
DES SUBSTITUTIONS PROHIBEES (no 26).

Des caractères constitutifs de la substitution prohibée (n° 28).

De la disposition faite au profit du grevé (no 32).

De la disposition faite au profit du substitué (no 51). Des dispositions conditionnelles permises, comparées aux substitutions prohibées (no 123).

Des clauses d'usufruit, de retour et de substitution réciproque dont peut résulter une substitution prohibée (n°157).

Des clauses d'usufruit dont peut résulter une substitution probibée (no 158).

Des clauses de retour dont peut résulter une substitution prohibée (no 199).

Des clauses de subtitution réciproque dont peut résulter une substitution prohibée (no 210).

De la nullité de la substitution et des effets de cette nul- | lité quant aux autres dispositions du même acle (n° 229).

ART. 4. De la preuve des substitutions prohibées (no 251). ART. 5. De 'interprétation des substitutions (no 258). ART. 6. Questions transitoires. Rétroactivité (no 270). SECT. 3. DES SUBSTITUTIONS AUTORISÉES PAR LE CODE NAPOLÉON EN FAVEUR DES petits-enfants, des neveux ou NIÈCES DU DISPOSANT (no 290).

ART. 1.

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Des personnes qui peuvent ou substituer, ou être grevées, ou être appelées (no 290).

ART. 2. Des biens qui peuvent être substitués etjusqu'à quelle concurrence (no 316).

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2. Le droit romain reconnaissait trois sortes de substitutions : 1o la substitution vulgaire ou directe; 2o la substitution pupillaire; 3o la substitution quasi-pupillaire ou exemplaire.

La substitution vulgaire ou directe était celle par laquelle le testateur, après avoir institué un héritier, en désignait un autre pour le cas où le premier ne pourrait ou ne voudrait recueillir l'hérédité. Il pouvait y avoir ainsi non pas seulement deux, mais plusieurs degrés d'institués, en aussi grand nombre que le voulait le testateur. Potest autem quis, disent les Institutes (lib. 2, tit. 15), in testamento suo plures gradus heredum facere, ut puta : SI ILLE HERES NON erit, ille hereS ESTO; et deinceps, in quantum velit testator substituere. Cette substitution était appelée vulgaire, parce qu'elle était vulgairement (c'est-à-dire ordinairement employée par les Romains, et directe, parce que le substitué recevait directement du disposant.

On sait que les Romains attachaient une extrême importance à ne pas mourir intestat, et que, d'un autre côté, si l'institution d'héritier tombait, toutes les autres dispositions contenues dans le testament tombaient avec elle (V. Disp. entre-vifs et testam., no 34). Il était donc naturel que, pour parer à ce double inconvénient, ils eussent recours à la substitution vulgaire, et l'on doit croire que son origine est presque aussi ancienne que celle des institutions d'héritier elles-mêmes. Elle était en pleine vigueur du temps de la république les écrits de Cicéron l'attestent (V. Brut., c. 52; De orat., 1, 39 et 57). L'usage en devint beaucoup plus fréquent sous les empereurs, lorsque les lois caducaires (Junia et Papia Poppaa), en multipliant les incapacités de recevoir, eurent par là même accru les chances de caducité auxquelles les testaments étaient exposés. - V. M. Ortolan, Explic. histor. des Instit., sur le tit. 15, liv. 2. La substitution pupillaire consistait, pour le père de famille, à instituer dans son propre testament un héritier à son fils impubère pour le cas où ce fils, lui survivant, décéderait avant d'avoir atteint l'âge de puberté, et par conséquent avant d'avoir pu lui-même instituer un héritier. Les Institutes (lib. 2, tit. 16) s'expriment ainsi sur ce point: Liberis suis impuberibus quos in potestate quis habet non solùm ita ut suprà` diximus substi

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tuere potest, id est ut si heredes ei non exstiterint alius ei sit heres; sed eo amplius, ut et si heredes ei exstiterint et adhuc impuberes mortui uerint, sit eis aliquis heres: veluti si quis dicat hoc modo: TITIUS FILIUS MEUS HERES MIHI ESTO; ET SI FILIUS MEUS HERES MIHI NON ERIT, SIVE HEREs erit et prIUS MORIATUR QUAM IN SUAM Tutelam venerit (id est, puber factus sit), TUNC SEIUS HERES ESTO. Quo casu siquidem non exstiterit heres filius, tunc substitutus patri fit heres; si verò exstiterit heres filius et ante pubertatem decesserit, ipsi filio fit heres substitutus. Nam moribus institutum est ut, cum ejus æstatis filii sint, in qua ipsi sibi testamentum facere non possunt, parentes eis faciant. Comme on le voit par les termes de ce passage des Institutes, il était d'usage de faire d'abord une substitution vulgaire pour le cas où le fils ne deviendrait pas héritier, et d'y ajouter une substitution pupillaire pour le cas où le fils, après avoir recueilli, mourrait impubère; mais cela n'était point nécessaire : la substitution pupillaire pouvait se faire au profit d'un individu qui n'était pas substitué vulgairement au fils; dans ce cas, le substitué ne recueillait la succession qu'autant qu'elle avait été préalablement recueillie par le fils. Toutefois une constitution de Marc-Aurèle (L. 4, pr., ff., tit. 6, lib. 28): avait décidé que toutes les fois qu'un cas de substitution était, exprimé, l'autre serait sousentendu. Ainsi, d'après cette constitution, le substitué pupillaire était considéré comme substitue vulgaire, à moins que le testateur n'eût exprimé une volonté contraire. V. M. Ortolan, sur le tit. 16, liv. 2, pr

A l'exemple de la substitution pupillaire, Justinien en avait institué une à peu près semblable, que pour cette raison les interprètes ont appelée quasi-pupillaire ou exemplaire. Un père ou une mère ayant un fils ou une fille, un petit-fils ou une petite-fille, ou, tout autre descendant, en état de démence ou de fureur, lui instituait un héritier pour le cas où il mourrait avant d'avoir recouvré la raison. Quâ ratione excitati, disent encore les Institutes (loc. cit., no 1), etiam constitutionem posuimus in nostro codice, quá prospectum est ut, si mente captos habeant filios, vel nepotes vel pronepotes cujuscumque sexus vel gradus, liceat eis, etsi puberes sint, ad exemplum pupillaris substitutionis certas personas substituere: sin autem sapuerint, eamdem substitutionem infirmari, et hoc ad exemplum pupillaris substitutionis, quæ postquam pupillus adoleverit infirmatur (V. aussi Cod., lib. 6, tit. 26, L. 9). Cette substitution n'était pas de tout point semblable à la substitution pupillaire, il existait entre l'une et l'autre deux différences notables : ainsi, 1o la substitution pupillaire ne pouvait être faite que par le chef de famille (paterfamilias), tandis que la substitution quasi-pupillaire pouvait être faite par tout ascendant, de quelque sexe que ce fût, et par conséquent sans qu'il fût nécessaire que le substituant eût la puissance paternelle; 2o le chef de famille qui faisait une substitution pupillaire pouvait substituer qui il voulait, la loi le laissait entièrement libre pour le choix des personnes; il n'en était pas de même pour la substitution quasi-pupillaire : l'ascendant qui faisait une telle substitution était obligé de prendre le substitué d'abord parmi les descendants de l'insensé s'il en avait, à défaut de descendants parmi ses frères; c'était seulement quand il n'y avait ni descendants ni frères qu'il était libre dans son choix (L. 9, Cod., lib. 6, tit. 26; V. aussi M. Ortolan, sur le tit. 16, liv. 2). 3. Parlons maintenant de l'institution qui, dans le droit romain, a été comme le germe de ces dispositions qui ont joué un si grand rôie dans l'histoire de notre droit et qu'on désigne sous le nom de substitutions fideicommissaires.

Les lois romaines avaient établi de très-nombreuses incapacités de recevoir par testament. L'habitant des provinces, qui ne jouissait pas des droits de cité, les femmes même citoyennes, dans les cas déterminés par la loi Voconia, les proscrits, les posthumes externes ou toutes autres personnes incertaines, comme les municipaliiés, les colléges, les pauvres, etc., ne pouvaient être l'objet de libéralités testamentaires. Il en fut de même, plus tard, de tous ceux auxquels s'appliquaient les lois Elia Sentia, Junia Norbana, Junia et Papia Poppœa: les affranchis déditicies, les affranchis latins juniens, les célibataires et ceux qui n'avaient pas d'enfants. Or, afin d'éluder la rigueur de ces prohibitions, il arriva que les testateurs, après avoir institué un héritier légalement capable de recevoir, le prièrent par d'autres actes, par paroles,

par lettres, soit en latin, soit en gree, de remettre tout ou partie de l'hérédité à telle personne qu'ils lui désignaient. Quelquefois cette prière était adressée, non à l'héritier, mais à un légataire; quelquefois même elle l'était à l'héritier ab intestat. Ce n'était pas un ordre, c'était une prière, pour laquelle on s'en remettait à la bonne foi de celui à qui elle était adressée. D'ailleurs cette volonté, eût-elle été exprimée en termes impératifs, n'eût eu aucune force obligatoire; la loi, en effet, n'eût pu prêter sa sanction à des dispositions qui l'enfreignaient. C'est pourquoi les dispositions ainsi faites portaient le nom de fideicommis (fideicommissa). Pour leur donner plus de force, pour mieux en assurer l'exécution, on faisait jurer la personne chargée du fidéicommis d'accomplir fidèlement la volonté du testateur. V. notamment Cicéron, In Verr., II, 1, 47; L. 77, § 23, ff., De legat. 2o; Inst., lib. 2, tit. 25, no 1.

Les fidéicommis n'étaient pas toujours employés à l'effet d'éluder les prohibitions légales. Il arrivait quelquefois qu'un citoyen, se trouvant dans un pays éloigné où il n'avait pas la possibilité de tester suivant les formes exigées par les lois romaines, écrivait à son héritier ab intestat pour le prier de remettre tout ou partie de l'hérédité à telle personne qu'il lui désignait (L. 1, § 6, ff., De leg. 3°; L. 8, § 1, ff., De jure codicill.). — L'usage du fidéicommis s'étendit peu à peu avec l'assentiment public. Ceux qui manquaient à les exécuter étaient flétris par l'opinion. Il arriva même, sous le règne d'Auguste, que, dans deux ou trois cas particuliers, soit par considération pour les personnes, soit parce qu'on dit que le mourant avait fait jurer par le salut de l'empereur, soit à cause de la perfidie insigne de certaines personnes, l'empereur ordonna aux consuls d'interposer leur autorité pour faire exécuter le fideicommis. «Comme cela parut juste et était populaire, poursuit Justinien (Instit., lib. 2, tit. 23, no 1), peu à peu cette intervention fut convertie en juridiction permanente, et telle fut la faveur pour les fidéicommis, qu'on fut amené à créer un préteur spécial, chargé exclusivement de cette juridiction, et nommé fideicommissaire.»>

La restitution de l'hérédité par l'institué au fideicommissaire se faisait dans le principe sous forme de vente. Gaïus nous décrit ainsi cette opération (Comment. 2, § 252, trad. de M. Domenget): «L'usage était que celui auquel on restituait l'hérédité l'achetât, pour la forme, avec un écu, et les stipulations qui ont lieu habituellement entre le vendeur et l'acheteur d'une hérédité avaient lieu entre l'héritier et celui auquel il restituait l'hérédité; cela se passait ainsi : l'héritier stipulait du fidéicommissaire que celui-ci l'indemniserait de tout ce qu'il serait condamné à payer comme héritier, ou de ce qu'il donnerait de bonne foi, et qu'il serait régulièrement défendu si quelqu'un agissait contre lui à titre d'héritier; mais celui qui recevait l'hérédité stipulait à son tour que, si l'héritier recevait quelque chose de l'hérédité, il le rendrait au fideicommissaire, qu'il laisserait même le fideicommissaire exercer les actions héréditaires soit comme procureur, soit comme cognitor.»

4. Dans cet état de choses, la situation de l'héritier était assez onéreuse; il était soumis à toutes les actions qui peuvent être dirigées contre un héritier, notamment à celles des créanciers de la succession, et, comme compensation de ces charges et de ces embarras, il n'avait droit de conserver aucune portion de l'hérédité. Son intérêt était donc de ne pas faire adition d'hérédité; alors le fideicommis tombait de lui-même et restait sans exécution. Pour remédier à cet inconvénient, un sénatus-consulte rendu sous le consulat de Trébellius Maximus et Annéus Sénèque (l'an de Rome 815) décida que celui auquel l'hérédité fidéicommissaire aurait été restituée exercerait lui même les actions civiles qu'on donnait à l'héritier, et qu'on exercerait contre lui celles qui se donnaient contre l'héritier (Gaïus, comm. 2, § 253). Cela pouvait suffire pour que l'héritier institué ne fir plus intéressé à répudier l'hérédité; mais ce n'était pas assez pour l'intéresser à l'accepter; aussi refusait-il souvent de faire une adition qui ne lui rapportait aucun bénéfice. I' y avait un pas de plus à faire: on le fit sous le consulat de Pegase et de Pusion, l'an de Rome 825; un sénatus-consulte décida que l'héritier chargé de restituer l'hérédité pourrait retenir un quart de cette hérédité, encore bien que le testateur ne le lui eût pas laissé. La même retenue était permise sur tout ce qui était laissé

pour être restitué par fidéicommis. Mais alors l'héritier institué soutenait toutes les charges de l'hérédité. Les actions étaient exercées par lui et contre lui. Seulement le gain et la perte en résultant étaient répartis entre lui et le fideicommissaire en proportion de leur part dans l'hérédité, et pour assurer cette répartition on recourait aux stipulations partis et pro parte, comme lorsqu'il avait été fait un legs de quotité (Gaïus, comm. 2, § 254). Le sénatus-consulte dont il vient d'être parlé était désigné sous le nom de sénatus-consulte Pégasien, et le quart réservé à l'héritier institué s'appelait quarte pégasienne.

5. Le sénatus-consulte Pégasien n'avait point, comme on pourrait le croire au premier abord, abrogé le sénatus-consulte Trébellien; chacun de ces deux sénatus-consultes recevait son application dans des cas différents. Si l'héritier institué n'était pas chargé de rendre plus des trois quarts de l'hérédité, c'était le sénatus-consulte Trébellien qui devait être appliqué; les actions étaient donnés pour et contre chacun selon ce qu'il avait reçu, savoir pour et contre l'héritier selon le droit civil; pour et contre le fideicommissaire d'après le sénatus-consulte Trébellien, bien que l'héritier institué restât héritier même pour la part qu'il avait restituée (Gaïus, comm. 2, § 255). Si le grevé était chargé de restituer plus des trois quarts, c'était le sénatus-consulte Pégasien qui était applicable (ibid., § 256). Il pouvait arriver alors que le grevé voulût retenir le quart, comme il en avait le droit, ou qu'il ne le voulût pas: dans un cas comme dans l'autre, il soutenait toutes les charges de l'hérédité; mais lorsqu'il retenait la quarte, les stipulations partis et pro parte devaient intervenir comme entre un légataire partiaire et l'héritier; si, au contraire, l'institué restituait toute l'hérédité, les choses se passaient comme dans la vente fictive de l'hérédité (V. suprà, no 3). -Il pouvait arriver que l'héritier institué refusât de faire adition parce que l'hérédité lui semblait onéreuse; dans ce cas, le sénatusconsulte Pégasien disposait que, si le fideicommissaire le désirait, le préteur forcerait l'institué à faire adition et à restituer, et que les actions seraient données au fidéicommissaire et contre lui suivant les règles établies par le sénatus-consulte Trébellien (ibid., § 258).

Cependant les stipulations auxquelles donnait lieu le sénatusconsulte Pégasien avaient été vues de mauvais œil en ce qu'elles exposaient réciproquement chacune des parties aux chances de l'insolvabilité de l'autre. Papinien les avait qualifiées de captieuses. C'est pourquoi Justinien crut devoir abolir le sénatusconsulte Pégasien pour ne laisser subsister que le sénatusconsulte Trébellien, en insérant toutefois dans ce dernier quelques-unes des dispositions du sénatus-consulte Pégasien. D'après la loi ainsi modifiée, soit que le testateur eût laissé à l'héritier le quart, ou plus, ou moins, ou qu'il ne lui eût rien laissé, l'héritier devait restituer l'hérédité d'après le sénatusconsulte Trébellien; s'il n'avait rien ou s'il avait moins du quart, il pouvait retenir ou compléter ce quart, ou même le répéter s'il l'avait payé (ceci était une disposition nouvelle introduite par Justinien); les actions alors se divisaient entre l'héritier et le fidéicommissaire, en proportion de la part de chacun, comme d'après le sénatus-consulte Trébellien. Mais s'il restituait volontairement toute l'hérédité, toutes les actions héréditaires passaient au fidéicommissaire et contre lui. Si l'héritier refusait de faire adition, il pouvait être contraint de restituer toute l'hérédité au fidéicommissaire qui le désirait; toutes les actions passaient alors à ce fideicommissaire ou étaient exercées contre lui (Inst., lib. 2, tit. 23, no 7).

6. Nous avons dit que, dans le principe, les fideicommis avaient eu le plus souvent pour but d'éluder les dispositions de la loi qui défendaient de donner à certaines personnes. Mais on comprend qu'il n'en pouvait plus être ainsi du moment où les fidéicommis devenaient une institution régulière sanctionnée par elle-même. Aussi les personnes déclarées inhabiles à recevoir par testament furent-elles reconnues incapables de recevoir par fidéicommis Si donationis causá suspectam hereditatem sibi heres dixerit, porte la loi 67, § 3, ff., Ad sen. cons. Trebellian., et restituerit ei qui solidum capere non possit, auferetur ei id quod capere non potest.

7. Jusqu'à présent nous avons envisagé le fideicommis sous sa forme la plus simple ;..mais il n'était pas toujours ainsi fait.

Il pouvait être diversement modifié par la volonté du testateur. D'une part, il n'était pas nécessaire que la volonté de faire un fidéicommis fût formellement exprimée, pourvu que d'ailleurs elle résultât de la clause même; d'autre part, le testateur pouvait, en imposant à son héritier l'obligation de restituer les biens à une personne désignée, lui en laisser la jouissance, soit pendant un certain temps, soit même pendant sa vie. Il était permis, par exemple, de disposer en ces termes; J'institue mon frère héritier; mais je lui défends d'aliéner ma maison, afin qu'elle reste dans la famille. Dans ce cas, si l'héritier aliénait la maison ou la laissait à sa mort à un héritier étranger, les héritiers naturels avaient le droit de réclamer. Fratre herede instituto, dit la loi 69, § 3, ff., De legat. 2o, petit ne domus alienaretur sed ut in familia relinqueretur, si non paruerit heres voluntati, sed domum alienaverit, vel extero herede instituto decesserit, omnes fideicommissum petent, qui in familia fuerunt. Une autre loi examine la question de savoir si le testateur peut imposer à son héritier l'obligation de faire un tel son héritier, et elle la résout négativement, mais en même temps elle décide qu'une telle clause équivaut à l'obligation, pour l'héritier, de restituer l'hérédité à la personne désignée, et qu'ainsi entendue elle est parfaitement valable. Ex facto tractatum est an per fideicommissum rogari quis possit ut aliquem heredem faciat? Et senatus censuit rogari quidem quem, ut aliquem heredem faciat, non posse; verum videri per hoc rogásse ut hereditatem suam ei restitueret; id est quidquid ex hereditate sua consecutus est, ut is restitueret (L. 17, pr., ff., Ad senat. cons. Trebell.; V. aussi L. 74, pr., ff., eod. tit.). Il est facile de reconnaître, dans les dispositions qui précèdent, ce que le droit français a désigné sous le nom de substitution fideicommissaire.

Peu à peu les fidéicommis devinrent graduels. On s'en servit pour perpétuer les biens dans les familles, en les transmettant d'un premier successeur à un second, d'un second à un troisième, et ainsi de degré en degré, de génération en génération, sans que les possesseurs pussent les aliéner ou hypothéquer. L'usage s'établit ainsi de donner aux fidéicommis une durée indéfinie. Mais Justinien, trouvant avec raison qu'un tel usage portait une grave atteinte aux intérêts sociaux, limita à quatre degrés le droit qu'avait le testateur d'immobiliser ses biens, soit dans sa propre famille, soit dans une famille étrangère (V. la novelle 159, ch. 2).

Tel était le système des lois romaines lorsqu'elles devinrent le type de la législation de presque toute l'Europe, et particulièrement de la France. Voyons quelles modifications subirent, en passant dans notre droit, les divers modes de substitution que nous venons d'exposer.

8. La substitution vulgaire fut généralement admise tant dans les pays de droit écrit que dans les pays coutumiers. Il faut excepter toutefois certaines coutumes, telles que la coutume du Berry (tit. 18, art. 1), qui, n'admettant qu'une première institution, enlevaient par cela même tout effet à une substitution quelconque (Merlin, Rép., vo Substitution directe, § 1, no 8).Quant à la substitution pupillaire et à la substitution exemplaire, elles n'étaient d'aucun usage dans les pays coutumiers (Ricard, Tr. des substit., part, 1, nos 90 et 91; Boubier, ch. 75, no 2; Gudelin, De jure novissimo, lib. 2, ch. 5; Vinnius, Ad inst., De vulgari substit.; Merlin, Rép., vo Substit. dir., § 2, no 15, et § 5, no 9). Toutefois, lorsqu'un père faisait une disposition de ce genre, elle n'était pas absolument nulle, mais elle était considérée comme une substitution fidéicommissaire, et elle produisait l'effet qu'eût produit cette dernière (Bourjon, Dr. commun de la France; Ricard, loc. cit.; Merlin, loc. cit.).

9. Les dispositions des lois romaines concernant les substitutions fidéicommissaires ne furent admises en France qu'avec de grandes modifications. Dix coutumes (celles de Bourbonnais, la Marche, Auvergne, Sedan, Montargis, Bassigny, Nivernais, Bretagne, Normandie, Hainault), qui formaient environ le cinquième de son territoire, avaient ou exclu ou resserré dans des bornes très-étroites la liberté de substituer; et là où elle ne recut pas les mêmes atteintes, on substituait indéfiniment, au lien d'observer la novelle de Justinien. Ajoutez que, conformément à l'esprit des institutions féodales, cet ordre de succession perpétuel et particulier à chaque famille se réglait le plus souvent

de måle en måle et d'atné en aîné. – Il a été jugé que les lois romaines qui règlent les effets d'une substitution n'étaient applicables qu'au cas où il y aurait eu du doute sur la volonté de l'instituant; qu'elles ne sont donc pas violées par un arrêt décidant expressément qu'un instituant n'a pas eu la volonté d'appeler | les descendants de sa fille, à défaut de mâle de son nom et de sa race, à recueillir le fidéicommis qu'il avait fait au profit des descendants måles de son frère (Req. 19 mai 1808, MM. Muraire, pr., Pajon, rap., aff. de Furstenberg).

10. Le premier remède apporté aux nombreux inconvénients de cette institution fut l'ordonnance d'Orléans, de janvier 1560, due au génie du chancelier de l'Hôpital, qui, pour couper la racine à une foule de procès qui s'élevaient en cette matière, défendit (art. 59), pour l'avenir, de substituer au delà de deux degrés après la première disposition. Cette défense fut confirmée par l'art. 57 de l'ordonnance de Moulins, de février 1566, qui disposa, en outre, que les substitutions faites antérieurement à l'ordonnance d'Orléans seraient restreintes au quatrième degré outre l'institution.

11. Tel était l'état de la législation au moment où d'Aguesseau, poursuivant la réforme qu'il avait entreprise notamment en ce qui concerne les donations entre-vifs et les testaments, fut amené à s'occuper des substitutions. L'ordonnance d'août 1747, qu'il fit rendre sur cette matière, était destinée, comme le porte son préambule, à prévenir le retour du grand nombre de procès qui s'étaient élevés « sur l'interprétation de la volonté souvent équivoque du donateur ou testateur, sur la composition de son patrimoine et sur les distractions dont les fidéicommis sont susceptibles, sur le recours subsidiaire des femmes quant aux biens grevés de substitution, sur les formalités nécessaires pour rendre les substitutions publiques et les effets de leur omission. >> L'art. 30 de cette ordonnance, confirmant l'art. 59 de l'ordonnance d'Orléans, limitait pareillement le droit de substituer à deux degrés outre le donataire, l'héritier institué ou légataire, ou autre qui aurait recueilli le premier les biens du donateur ou testateur.

12. Sous l'empire de cette législation, il a été jugé : 1o qu'il est de principe qu'une substitution ne pouvait avoir de valeur et produire son effet qu'autant qu'elle était publiée et enregistrée dans les formes prescrites, et que sans l'observation préalable de ces formalités de rigueur, elle ne pouvait être opposée contre les tiers acquéreurs, et que le défaut de publication et d'enregistrement d'une substitution ne pouvait être suppléé ni regardé comme couvert par la connaissance que les tiers acquéreurs pourraient avoir eue de la substitution, par d'autres voies que celles de la publication et de l'enregistrement (Rej. 19 prair. an 4, MM. Bailly, pr., Cochard, rap., aff. Bovis C. Gavarry); 2o Que le grevé de biens substitués, sous l'ord. de 1747, n'est pas fondé à se prévaloir contre l'appelé du défaut d'accomplissement des formalités prescrites par les art. 35, 36 et 37 de cette ordonnance (délivrance, envoi en possession, etc.), ces formalités n'étant exigées que dans l'intérêt des tiers possesseurs (Req. 24 août 1814, MM. Lasaudade, pr., Genevois, rap., aff. de Béarn C. Destourmel); 3° Que la nullité prononcée par les art. 35, 36, 37, 39 et 40, tit. 2, de l'ord. de 1747, à défaut d'enregistrement et de publication de la substitution, était couverte par l'exécution de la substitution consentie par les héritiers du grevé au profit de l'appelé (Req. 21 mai 1822, MM. Botton-Castellamonte, pr., Favard, rap., aff. Dotton C. Billet).

13. Bien qu'il fût peu favorable aux substitutions, d'Aguesseau n'avait point osé les proscrire. Mais elles étaient trop fortement empreintes de l'esprit des institutions féodales pour trouver grâce devant les pouvoirs issus de la révolution. L'assemblée nationale, après avoir, par un premier décret des 25 août-2 sept. 1792, disposé qu'à partir de ce jour il n'était plus permis de substituer, prononça l'abolition définitive des substitutions par un décret des 25 oct.-14 nov. 1792 (1), qui déclara sans effet les substitutions faites antérieurement qui ne seraient pas ouvertes

(1) 14-15 nov. (25 oct.) 1792. Décret qui abolit les substitutions. Art. 1. Toutes substitutions sont interdites et prohibées à l'avenir. 2. Les substitutions faites avant la publication du présent décret, par quelques actes que ce soit, qui ne seront pas ouvertes à l'é

à l'époque de sa publication, et ajouta que les substitutions ou vertes lors de cette publication n'auraient d'effet qu'en faveur de ceux qui auraient alors recueilli les biens substitués ou le droit de les réclamer. Il a été décidé : 1° que l'héritier substitué pour le cas où l'héritier grevé ne laisserait pas d'enfants n'est pas fondé à demander la nullité des ventes des biens frappés de substitution, consenties par l'héritier grevé, si la substitution ne s'est ouverte que depuis la publication du décret du 28 août 1792, et si le prix a servi à payer les dettes dont ces biens étaient grevés, bien que le substitué soit le frère du grevé et le fils du substituant (Req. 21 août 1822, MM. Lasaudade, pr., Voysin de Gartempe, rap., aff. Robert C. Perrotin); 2o Que l'appelé

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à une substitution ouverte postérieurement à la loi du 14 nov. 1792, qui a aboli toutes les substitutions fidéicommissaires non alors ouvertes, n'est pas recevable à opposer aux héritiers du grevé qui ont recueilli les biens substitués en vertu de cette abolition, l'inaccomplissement de la part du grevé des formalités | prescrites par l'ordonnance de 1747 pour la conservation des biens dans l'intérêt de l'appelé (Req. 31 janv. 1842, aff. de Lascoups, no 110-4o).

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14. Mais il a été jugé: 1o qu'une substitution qui était ouverte au profit de l'appelé au moment de la promulgation de la loi du 14 nov. 1792 a dû avoir son effet, bien que l'appelé n'eût pas encore demandé la délivrance des biens substitués (Req. 1er fév. 1832, MM. Zangiacomi, f. f. pr., de Maleville, rap., aff. de Valernod C. des Isnards); 2o Que la propriété des biens grevés de substitution a été irrévocablement fixée sur la tête de celui qui y avait droit au jour de la loi du 14 nov. 1792, abolitive des substitutions, bien que, par le titre, ce droit eût été subordonné à l'événement d'une condition qui n'était point alors accomplie (Cass. 2 janv. 1813, MM. Muraire, 1er pr., Gandon, rap., aff. Demonge C. Desandrouin); — 3° Qu'il y a lieu de maintenir, en vertu de la loi du 14 nov. 1792, une substitution ouverte avant la publication des lois qui les ont abolies, alors même qu'une condition imposée au grevé n'aurait pas été accomplie, si son inaccomplissemenc ne provient pas de son fait, mais de la puissance des lois; si, par exemple, on lui avait imposé l'obligation d'épouser nne personne issue de famille chapitrale, condition devenue impossible par la suppression de la noblesse (Req. 16 mars 1813, MM. Henrion, pr., Liger de Verdigny, rap., aff. LoozCorssvarem C. Looz-Corssvarem);-4° Que l'abolition des substitutions prononcée par la loi des 25 oct.-14 nov. 1792 ne s'appliquait pas aux substitutions pupillaires (Toulouse, 30 août 1815, M. Dast, pr., aff. Cluzel C. Desplats): elle ne s'appliquait pas davantage à la substitution vulgaire.

15. On sait que la loi du 17 niv. an 2 (art. 1) avait déclaré nulles les donations entre-vifs faites depuis et compris le 14 juill. 1789, ainsi que les institutions contractuelles et toutes dispositions à cause de mort dont l'auteur était encore vivant ou n'était décédé que le 14 juill. 1789 et depuis, lors même qu'elles auraient été faites antérieurement. Des doutes s'étant élevés sur la question de savoir si les substitutions et leurs effets avaient été abolis à dater de la même époque que les autres dispositions, la convention, par un décret du 22 ventôse an 2 (52o), émit sur ce point un avis portant « qu'il n'y a pas de doute que les substitutions créées le 14 juill. 1789 et depuis, ou même antérieurement à cette époque, lorsque leur auteur n'est décédé que postérieurement, ne soient annulées sous la dénomination générale de dispositions à cause de mort; qu'à l'égard des effets des substitutions antérieures on doit s'en tenir au décret des 25 oct.-14 nov. 1792; que ce décret a fait assez, en conférant au possesseur la pleine propriété, pour faire cesser une indisponibilité aristocratique, funeste, d'ailleurs, au commerce et aux transactions sociales; mais que nulle faveur n'était due ni au grevé, ni au substitué, ni aux leurs, qui n'étaient, à vrai dire, que des privilégiés de famille, pour discuter ou changer leur condition respective dans l'intervalle du 14 juill. 1789 au moment où fut portée la loi d'abolition des substitutions; qu'à cette époque on ne vit que la

poque de ladite publication, sont et demeurent abolies et sans effet. 3. Les substitutions ouvertes lors de la publication du présent décret, n'auront d'effet qu'en faveur de ceux seulement qui auront alors recueilli les biens substitués ou le droit de les réclamer.

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