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doubla le monde pour nous en faire admirer un autre (Mundus subterraneus); aux Bernoulli, aussi profonds en mathématiques que Puffendorf le fut en politique et en histoire; aux Heinsius, aux Gronovius, aux Schoeffer, aux Morhoff, aux savans chimistes Etmuller et Kunckel, et à tant d'autres qui, marchant sur les traces de ceux-ci, semblent n'avoir laissé à leurs successeurs que les fleurs de l'érudition, dont ils détournèrent si laborieusement les épines! Admirez enfin ce savant illustre, dont le nom, plus célèbre encore, semble avoir reporté sur l'Allemagne une partie de la gloire littéraire du siècle de Louis XIV; c'est Leibnitz, l'un des plus beaux génies que la nature ait produits et dont la véritable philosophie puisse s'enorgueillir. L'étendue de ses connoissances peut passer pour un prodige. Il fut mathématicien, historien et poète, et, sans contestation, le plus savant et le premier littérateur de son siècle.

Au défaut de ce genre sévère de richesses, l'Espagne ne vous présentera, dans un ordre supérieur à la vérité, que des talens et des grâces. elle compensera toutes les profondeurs de l'érudition avec la riante imagination de Michel Cervantes, et tous les problèmes de la géométrie par les excellentes scènes de Lopez de Vega, mine féconde, dont notre théâtre s'est enrichi sans beaucoup de scrupule, mais du moins avec succès pour nos

plaisirs; par celles de Calderon, d'un genre plus sérieux, mais non moins remarquable, et par celles d'Augustin Moreto, dont le talent fut peut-être supérieur à celui de Calderon dans le genre vraiment comique, et qui se rapprocha le plus de la manière de Térence (1). La poésie vous montrera Boscan, qui introduisit le rhythme italien dans la poésie espagnole, et dont les sonnets rappellent ceux de Pétrarque; les deux Argensola, que leurs compatriotes ont appelés les deux Horaces de l'Espagne; les trois Figueroa, dont le premier, Francisco, fut surnommé par ses admirateurs le Pindare espagnol; Alonzo de Ercilla, connu par son Araucana, que Voltaire a qualifié de poème épique, en reconnoissance de quelques beaux morceaux dont il a profité dans Alzire; enfin, Estevan Manuel de Villegas, qui, donnant à la poésie moderne un caractère antique, fit revivre dans ses odes la raison d'Horace et les grâces d'Anacréon.

(1) Parmi les nombreuses pièces de Calderon, il s'en trouve une qui porte ce titre : Dieu par raison d'état. Dans cette espèce de drame, l'Esprit et la Pensée sont deux acteurs allégoriques. Ils vont chercher l'Athéisme en Amérique; l'Athéisme répond mal à leurs syllogismes, et, pour s'en débarrasser, la Pensée lui donne des coups de bâton....... Nos poèmes et nos romans du XV. et du XVI. siècle offrent plusieurs de ces personnages allégoriques; mais c'est dans un autre genre qu'ils sont ridicules.

L'histoire vous offrira Antoine Herrerà et Antoine de Solis, l'un pour la connoissance générale des Indes, l'autre pour la conquête du Mexique. La littérature vous présentera Quevedo de Villegas, dont les nombreux ouvrages lui assurent une place distinguée parmi les hommes d'un esprit supérieur ; Mendoza, dont les épîtres sont pleines de grâces et de délicatesse, qui traça l'original de Gil Blas dans son roman comique de Lazarille de Tormes, et dont l'Histoire de la révolte des Maures est un chef-d'oeuvre; George de Montemayor, inventeur du roman pastoral; et le Jésuite de Lisła, qui, dans son Frère Gerundio, avec autant d'esprit que de gaieté, osa reporter sur les moines le ridicule que Cervantes avoit versé sur la chevalerie. Enfin les arts, avec orgueil, vous montreront L'Espagnolet et Balthasar Murillo (1).

L'Angleterre, sous le rapport des productions littéraires, peut être comparée à son climat ou à sa température sévère, nébuleuse et mélancolique. Si, d'après les idées établies dans un système moderne, c'est la mélancolie qui engendre le sublime, on ne peut disconvenir que sa végétation n'ait été fort

(1) La période un peu plus que séculaire, qui comprend le règne des trois Philippes, de 1556 à 1665, peut être appelée l'âge d'or de la littérature espagnole.

belle à cette époque. Les rayons de l'aurore qui préparoit le beau règne de Louis XIV, dissipèrent sans doute la brume qui pesoit sur l'horizon de la Grande-Bretagne, et y firent éclore les beaux génies de Shakespear et de Bacon. C'est au commencement du XVII. siècle, que brillèrent ces deux phénomènes dans un genre différent : l'un, comme poète tragique du premier ordre; l'autre, comme savant et philosophe du premier mérite. Bientôt vous les voyez suivis d'une foule de savans, de littérateurs et d'écrivains distingués, qui placent, quoiqu'un peu tard, la nation angloise au second rang dans l'ordre des hommes illustres de cette époque, auxquels les connoissances humaines doivent une partie de leurs progrès.

Si, pour mieux distinguer le mérite de chacun de ces hommes célèbres, nous les divisons en trois classes, les sciences, les lettres et les beaux-arts, la dernière n'offrira rien à notre curiosité; car, à cet égard, l'Angleterre a laissé à la France toute la gloire qu'on en pouvoit retirer. Mais dans la première, et selon l'ordre des temps où leurs ouvrages ont paru, vous voyez Jacques Usher ou Usserius, l'un des plus savans chronologistes connus; Walton, dont le prodigieux travail nous a donné la Bible polyglotte la plus estimée; Jacques Marsham, pour qui la mystérieuse antiquité n'eut point de

VIII.

ÉPOQUE.

De 1650

à 1715. Siècle

Portez vos regards sur la foule brillante et nombreuse des hommes célèbres qui ont ouvert ou illustré le siècle de Louis XIV, et le parallèle que vous en pourrez faire surle-champ, suffira pour vous convaincre que Louis XIV. la France a le droit incontestable à une supériorité que lui devoit la justice, et que la postérité a confirmée.

de

Ce siècle de Louis XIV, sous le rapport des sciences et des lettres, ne commence qu'avec le milieu du XVII. En remontant de l'époque où nous sommes jusqu'à la mort d'Henri IV, nous trouvons tout le règne de Louis XIII (de 1610 à 1642). C'est là que vous pouvez placer en regard, et comme contemporains, Descartes (1) avec Bacon, Malherbe avec Shakespear; et vous aurez, pour mettre en balance avec trois poètes et deux savans anglois, les Scévole de Sainte-Marthe (2), littérateurs d'une éru

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(1) Descartes est le plus illustre des philosophes françois. Sa patrie lui refusa le dernier témoignage d'estime et d'admiration qu'il méritoit à tant de titres. Un ordre de la cour empêcha de prononcer son oraison funèbre. Il resta à ce François célèbre, » dit M. Thomas, le mausolée qui fut élevé à Stockholm, où il s'étoit retiré : il lui resta son nom » sa gloire, l'admiration de l'Europe, et, ce qui » dans la suite l'honora encore plus, le silence de Newton, qui jamais ne prononça son nom dans » un ouvrage.» (Essai sur les éloges.)

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(2) Le premier des six hommes célèbres de ce

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