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peuple. Il fallait arrêter cet horrible accroissement des impôts, qui fesait peser sur une nation, déjà accablée, des oppressions toujours nouvelles. Philosophe avant que le mot philosophie eût frappé l'attention publique, Malesherbes commença par de grandes actions sa vie, qui devait en offrir une si longue suite. Sans passions, sans faiblesse, sans irrévérence et sans flatterie, approfondissant chaque sujet, et éclairant tous les détails obscurs de la matière fiscale, dévoilant toutes les fraudes de la répartition des impôts, tous les petits crimes de la cupidité appuyée par le pouvoir, toute la tyrannique insouciance de l'autorité qui épuisait la substance du peuple, il fut, pour ainsi dire, le bouclier de sa patrie: cette première partie de sa vie politique suffirait pour lui mériter la reconnaissance éternelle de la France. Son langage doux et austère, plein de respect et de fermeté, forçait les princes eux-mêmes à lui prêter leur attention; et quand ils venaient de la part du roi faire enregistrer les édits, on voyait la grandeur du rang et la légèreté habituelle des mœurs parlementaires, s'abaisser devant la vertu parlant en faveur de l'humanité. En 1768, le prince de Condé fut chargé d'aller imposer silence à cette chambre redoutée, Malesherbes lui dit: "Prince, la vérité doit sembler bien terrible, puisqu'on lui oppose tant d'obstacles, et qu'on la repousse du trône avec tant de rigueur." Profond sentiment de la liberté, sentiment non moins vif des convenances et du devoir, tels étaient les caractères de ces précieuses remontrances, monumens éternels de sagesse et de dévouement. La cour, que les paroles effrayaient encore, lorsqu'elle n'y fesait aucun droit, finit par regarder l'éloquence vertueuse de Malesherbes comme un ennemi à craindre. Il s'était servi de cette puissance de la parole pour arracher aux cachots de Bicêtre Monnerat, qui y était resté deux ans enseveli, par une méprise," dit la Biographie

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universelle. Une méprise! Un nommé Varenne, protégé par la cour, et payé pour harceler les parlemens, fut condamné par eux et par Malesherbes; le roi abolit la peine; Varenne, à genoux devant les magistrats, entendit les paroles suivantes sortir de la bouche de Malesherbes: "Le roi vous accorde des lettres de grâce; la cour les entérine: retirez-vous; la peine vous est remise, mais le crime vous reste." Nommé directeur de la librairie, Malesherbes exerça ce ministère d'esclavage, destiné à l'asservissement de la pensée, avec toute la philosophie et la tolérance de son caractère. Il ne pouvait détruire les mauvaises lois; il sut du moins comprimer ou neutraliser leur force oppressive, et ouvrir passage aux lumières à travers ce chaos. Sous son administration parut l'Encyclopédie monument littéraire qui suffirait à la gloire de plusieurs siècles. Les gens de lettres trouvaient en lui un père; la littérature lui devait une tendance utile, forte et courageuse. Placé entre tous les partis et exposé à les mécontenter tous, il échappa à leur haine par l'ascendant de sa bonté : c'est le dernier triomphe de la vertu ; vaincre les intérêts des hommes est souvent au-dessus de son pouvoir. Les jésuites et les jansénistes, les philosophes et les dévots, les gens de cour et les théistes, tous, en murmurant contre la modération de Malesherbes, se soumettaient à l'influence de son âme. Il chercha à préparer la liberté de la presse, et parvint à rendre respectables les fonctions des censeurs. Il défendit souvent lui-même les écrivains dont on inculpait ou les intentions ou les paroles. On peut juger si cette conduite parut horrible à la cour. Maupeou, l'immoral chancelier, qui avait réclamé la peine de mort contre les écrivains séditieux, fit sentir tout le danger d'une telle conduite. Il se ligua avec la courtisane en faveur, Mme de Pompadour, que les gens de lettres effrayaient, et qui avait toutes les faiblesses et toute la terreur du

vice devenu puissant: la perte des parlemens, l'exil de Malesherbes, furent préparés. A des coups d'autorité on joignait des ruses puériles, et pour abattre une vertu et un courage si redoutables il n'est pas de basse intrigue, de folles inventions et de tours d'écolier, dont la favorite et le favori ne s'avisassent. Tantôt on jetait le trouble dans la compagnie dont Malesherbes était chef; tantôt on lui assignait des heures incommodes pour venir rendre ses comptes : un jour on força cette compagnie de poursuivre le roi dans son voyage, et on lui donna si peu de tems, que sans l'esprit et l'adresse de Malesherbes ces magistrats en course n'eussent jamais pu l'atteindre. L'homme simple déjouait sans cesse le courtisan. Cependant la cour avait pris son parti: et comment le sage n'aurait-il pas succombé? la marquise l'avait destitué dans sa pensée. Le 6 avril 1770, Malesherbes fut retenu en exil, dans sa terre de Malesherbes. La cour des aides fut cassée par des soldats; et les parlemens, dernière ressource de la nation, brisés par un mot de quelques favoris. Louis XV mourut... ; quatre ans d'exil s'étaient passés, pendant lesquels Malesherbes n'avait obtenu que trois jours de répit, après la mort de son père. Les cris du peuple redemandent les parlemens: Malesherbes reparaît à la tête de sa cour des aides. Son triomphe fut le plus doux et le plus touchant de tous les triomphes; il était, comme Titus, l'amour et les délices de la nation: il jouit de sa gloire avec cette sérénité d'âme qui le caractérisait, et ne chercha à en profiter que pour l'intérêt de sa patrie. L'avenir de la France se découvrit à ses yeux; il avait cette sagacité profonde qui lit le futur dans le passé: l'âge des révolutions approchait. La réforme était dans les esprits; le trône et la cour restaient isolés au milieu d'un peuple entièrement métamorphosé. Il fallait, ou qu'ils tombassent, ou qu'ils se prêtassent à cette révolution qui s'empara de la TOME IV.

.....

une

pensée publique. Malesherbes voyait cette nécessité terrible: il l'indiqua dans ses célèbres remontrances de 1774, peignit la France avec effrayante vérité, dévoila ses besoins, son malheur, ses craintes. Par prodige, il fut écouté; et le ministère fut une fois la récompense de la franchise, de la philanthropie et de la sagesse. Le roi Louis XVI fit signifier à Malesherbes qu'il était choisi d'avance pour successeur du duc de La Vrillière le magistrat répondit que cette place importante convenait peu à ses goûts. 11 fallut un ordre exprès qui le forçât à accepter. Ministre malgré lui, et par lettre de cachet, si l'on peut s'exprimer ainsi, il ne reçut le ministère qu'à condition de le quitter promptement. Il le garda neuf mois, et fit de grandes choses; il vida les prisons de cette foule de malheureux que l'autorité y avait entassés, établit une commission pour juger l'utilité des lettres de cachet, poussa le gouvernement dans la route de l'humanité et de la morale; quitta une première fois le ministère en 1776, et suivit Turgot dans sa disgrâce, plutôt que d'approuver les mesures de rigueur que l'on voulait employer; rentra au conseil en 1787, et l'abandonna bientôt. La chute du trône approchait ; le sauver était impossible; et Malesherbes ne devait reparaître sur la scène que pour protéger les victimes et les suivre. Libre, après ces glorieux et inutiles services, Malesherbes rentra dans la vie privée. Il cultiva

ses jardins; il y rassembla des plantes de toutes les contrées, hôtes charmans qui n'ont pas les passions cruelles des hommes, et qui font quelquefois oublier leurs vices. Dans l'intervalle de ses deux ministères, il voyagea sous un déguisement vulgaire, jouit souvent de cette gloire qu'il fuyait, et entendit plusieurs fois son nom prononcé avec des larmes de reconnaissance, par des inconnus qui ne voyaient en lui qu'un bourgeois nommé M. Guillaume. C'est sous ce nom qu'il visita la Suisse, 2 A

l'Allemagne, la Hollande. Les trois grandes académies de Paris l'avaient admis au nombre de leurs membres. Il possédait le goût, le style, la pensée; il savait beaucoup, comparait avec justesse, raisonnait avec force, et mêlait à ses argumens une onction pleine de douceur, qui est le partage de bien peu d'écrivains, et qui caractérise particulièrement le style de ce Fénélon des ministres. Aimé des littérateurs et des savans, il passa au milieu d'eux le tems de sa retraite ; sans regret, sans envie, et plus grand que tous les philosophes orgueilleux, dont l'antiquité se vante. J. J. Rousseau l'aima: et cet esprit trop clairvoyant, ou si l'on veut trop ombrageux, ne trouva, dans toute cette époque, que la candeur de Malesherbes et la droiture de Duclos, qui ne lui présentassent aucun alliage. Malesherbes entretint, avec ce malheureux et immortel écrivain, une correspondance sur la botanique ; époque de calme pour Malesherbes : elle ne fut troublée que par le choix de Louis XVI, qui de nouveau l'appela au conseil : il y entra, s'aperçut que sa présence ne servait à rien, que sa voix n'était jamais utile, et obtint sa retraite. La solitude de Malesherbes recueillit le sage. Hélas! quelle force et quelle bonté, quelle retraite assez profonde peuvent préserver l'homme vertueux dans les malheurs publics? Malesherbes devait couronner une admirable vie par une mort sublime, et, après avoir consacré toute son existence à la sagesse et au dévouement, la terminer par le dernier degré de l'héroïsme. l'avait pas écouté; ses prédictions fatales étaient accomplies. Le trône, lâchement soutenu, était tombé dans le gouffre de la dette publique, creusé par la corruption. Louis XVI était traduit à la barre de la convention. Les grands avaient fui, le peuple était muet;

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On ne

le plus imminent danger menaçait les défenseurs du roi. Malesherbes, que jamais on n'avait daigné entendre; Malesherbes, dont les conseils avaient été rejetés, et

que sa philosophie et son dévouement avaient rendu odieux sous les deux règnes; Malesherbes, ignoré, enseveli dans la retraite, en sort tout-àcoup et se constitue le défenseur du monarque près de périr. Il fit cette action avec la simplicité qu'il mettait à tout il fut introduit au Temple, il vit Louis XVI, et lui dévoua sa vie. Son conseil, son consolateur, son ami, à 70 ans, il trouva, pour être encore un héros, l'activité, la force et l'énergie d'une âme de 20 ans l'univers sait le reste. Malesherbes porta son désespoir dans sa terre de Malesherbes, où bientôt la mort, qu'il avait bravée, vint le chercher. En Décembre 1793, il fut arrêté et conduit à Paris où, après une courte détention, il mourut sur le même échafaud que sa fille, sa petite-fille et le mari de cette dernière. Comment tracer, sans une douleur profonde, la fin de cette admirable vie cette douceur, cette bonté, cette égalité d'humeur, cet esprit toujours occupé des autres hommes et du bien de l'humanité entière; redire ces mots cruels, simples et touchans, derniers accens d'une âme si tendre?" Que voulez-vous? je suis devenu mauvais sujet sur la fin de ma vie, et je me suis fait mettre en prison !" Avant de monter dans le char funèbre, son pied heurta contre une pierre." Voilà, dit-il, un mauvais présage! un Romain serait rentré !" Cette mort ne peut être comparée qu'à celle de Socrate. Ce grand homme était simple dans son costume, distrait dans ses manières, affable dans son accueil, malin sans avoir recours à cette triste ironie qui n'est qu'un mépris. Un jour, un chirurgien insolent l'aborde à la cour, frappe sur son gros ventre, et d'un ton de familiarité ridicule, lui dit : " BODjour pater!-Bonjour, frater !" répond le ministre. Ami de l'agriculture, il lui fit faire de grands progrès. Tout respirait autour de lui la joie, l'abondance et le bonheur. Simplement simple, comme disait

Mme Geoffrin, il fut, pendant qu'il vivait, l'objet du culte de ceux avec lesquels il vivait. Sa conversation était facile, brillante, longue, souvent diffuse; c'était une promenade au hasard: toutes les divagations y avaient place et y apportaient leur utilité, surtout leur plaisir. Gaillard et M. Lacretelle aîné (qui prépare un ouvrage précieux sur ce grand homme) ont joui du bonheur de l'entendre, dans ses promenades solitaires, se livrer à tout l'épanchement de sa philanthropie: suivant eux, il n'était pas d'entretien plus ravissant dans sa liberté naïve. Malesherbes possédait un trésor inépuisable de connaissances, un ressort puissant d'imagination, de la malice dans l'esprit, une bonté sans égale dans le cœur, la facilité du langage, et l'assemblage de tous les talens sans vanité et de toutes les vertus sans orgueil. Qui le croirait cependant? on a calomnié sa vie. Il était réservé aux tems, où l'on excuse tous les crimes, ́de calomnier Malesherbes! On a beaucoup écrit sur Malesherbes ; un homme digne de le louer, M. Boissyd'Anglas, a donné un excellent Essai sur sa vie : la vertu louant la vertu, a trouvé des détracteurs; et chose inconcevable, la famille de Malesherbes a réclamé solennellement contre les éloges donnés à ce martyr. Avant M. Boissy-d'Anglas, M. Gaillard, ami intime du ministre pendant 50 années, avait publié, sous le titre de Vie, ou Eloge historique, un morceau remarquable et curieux pour l'histoire; et M. J. B. Dubois avait rassemblé, dans une notice bien faite, les principaux traits de cette admirable vie. M. Lacretelle aîné possède aussi, sur Malesherbes, un ouvrage inédit d'une haute importance. Le livre de Delisle de Salles, intitulé Malesherbes, contient des faits curieux, mais peu d'exactitude et du désordre. Malesherbes lui-même a beaucoup écrit sur l'histoire naturelle, sur quelques parties des sciences, et surtout sur la morale administrative. Le recueil de ses remontrances et de ses mémoires sur divers points de

politique, ou spéciale, ou générale, est un des plus beaux héritages que le 18me siècle a laissés, comme le souvenir de Malesherbes est une des plus nobles gloires que la France ait léguées à l'avenir. A cet article, où nous avons cherché à renfermer les principaux traits d'une vie si sublime, nous joignons une lettre écrite de Paris, le 22 Novembre 1790, par ce grand homme à l'homme vertueux qui devait retracer ses vertus, M. Boissy-d'Anglas: elle offre le plus fidèle témoignage et l'image la plus naïve des pensées qui dirigèrent toujours Malesherbes." Je suis trèsflatté, Monsieur, du prix que vous voulez bien mettre à ma façon de penser; et comme j'en mets beaucoup à la vôtre, j'ai à cœur de vous faire voir que la mienne est la conséquence de celle que j'ai toujours eue, et par Jaquelle j'avais obtenu quelque part dans votre estime et dans celle de vos amis. Pour cela, il faut exposer quelle a été ma conduite depuis que j'existe; il faut entreprendre d'évaluer moi-même à quels titres et jusqu'à quel point j'ai pu me rendre digne de la faveur publique, dont j'ai reçu plusieurs fois des témoignages très-flatteurs. Cela sera un peu

long; et dans un autre tems, il y aurait eu un orgueil ridicule à parler si souvent de moi. Mais aujourd'hui ce n'est pas mon éloge pour le passé que j'entreprends, c'est la justification de mes sentimens actuels, et je crois me la devoir. Vous nous avez dit, avec grand raison, qu'il y a bien des gens dont les intérêts personnels influent sur le parti qu'ils prennent au sujet des affaires publiques. Je serais sensible à ce reproche s'il m'eût été adressé. Il m'est aisé de prouver jusqu'à l'évidence qu'il ne peut tomber sur moi; c'est ce que vous allez voir. Dans le tems que la magistrature était l'idole de la nation, on m'a donné, ainsi qu'à plusieurs de mes confrères, des éloges dont je n'ai jamais été engoué, parce que je les trouvais exagérés. On exaltait nos talens, on allait jusqu'à les com◄

parer à ceux de Cicéron et de Dé mosthènes. On m'a couronné moimême de la palme académique, au retour de notre exil, avec une sorte d'acclamation. J'ai toujours pensé et toujours dit que nos talens, qui brillaient beaucoup sur notre théâtre où nous étions les seuls, se trouveraient très-inférieurs à bien d'autres quand nous aurions pour concurrens tous les citoyens qui seraient admis comme nous à plaider la cause du peuple. On exaltait le courage avec lequel nous nous exposions à des actes de despotisme, et on ne songeait pas que ce courage était peu de chose en comparaison de celui de deux ou trois cent mille citoyens, dont l'état est de sacrifier leur vie pour la défense de la patrie. A présent, je dirai aussi que ceux dont le devoir est de dire hautement la vérité, avaient besoin de beaucoup moins de courage pour braver les lettres-de-cachet qu'il n'en faut aujourd'hui pour s'exposer aux assassinats et aux incendies. Je déelare donc que je renonce sans regret aux éloges excessifs dont on nous a comblés; je me restreins à ce que je crois qui m'est dû. Si j'ai quelques droits à l'estime publique, c'est pour avoir été le défenseur des droits du peuple, dans un tems où ce rôle ne conduisait pas, comme à présent, à devenir une des puissances de l'état; c'est pour avoir combattu, le plus fortement que j'ai pu, le despotisme ministériel, lorsque, par ma position, je pouvais aspirer aux faveurs du roi, promises par les ministres.

On m'a rendu la justice que, dans cette espèce de combat, je m'étais toujours conduit avec franchise, et que je n'avais pas mêlé aux attaques publiques des négociations secrètes. On m'a su gré particulièrement de ce qu'étant magistrat, je n'ai jamais réclamé pour la magistrature aucune prérogative qui pût faire ombrage aux autres citoyens; de ce que je n'ai insisté pour l'inamovibilité des charges de juges, pour leur faire conserver l'intégrité de leurs fonctions et la liberté

de leurs suffrages, que parce que je

regardais ces droits, et que toute la nation les regardait alors, comme la sauvegarde des propriétés, de la liberté et de la vie des citoyens; de ce qu'en revendiquant pour les cours de justice la prérogative de porter au souverain les plaintes du peuple, j'ai toujours observé que cette éminente fonction n'était réservée aux magistrats que parce que la nation n'avait pas de représentans choisis par elle. Enfin, la popularité que j'ai pu acquérir pendant cette période de ma vie est venue, surtout, de ce que j'ai eu le bonheur de parler au nom d'une cour qui, depuis bieu long-tems avant les autres, a demandé au roi d'entendre la nation elle-même sur ses plus grands intérêts. Lorsque des circonstances singulières m'ont fait parvenir malgré moi au ministère, on m'a encore su gré de n'avoir pas changé de principes en changeant d'état; et de ce qu'après avoir dénoncé les lettres-de-cachet comme le plus grand abus du pouvoir arbitraire, j'ai cherché à y mettre ordre dans la partie du pouvoir qui m'était confiée. J'avais dit aussi, comme citoyen, que la justice est la vraie bienfesance des rois. Devenu ministre, j'ai insisté auprès du roi pour que sa bienfesance fût soumise aux règles de la justice; et quand, après plusieurs années, j'ai été appelé une seconde fois au conseil, non-seulement j'y ai dit, mais j'ai consigné, dans un mémoire qui existe, que les dépenses occasionnées par la bonté du roi étant payées du produit des impositions, la nation était en droit de demander au roi de mettre des bornes à sa bienfesance. Pendant ce second ministère, je n'avais aucune fonction active; je n'avais que le droit de parler, et ce que j'y ai dit n'a pas été publié. Mais le secret du conseil n'est pas assez bien gardé pour qu'on ait ignoré que ni les égards pour ceux qui étaient plus puissans que moi, ni l'amitié, ni les liens du sang, ni aucun autre motif ne m'ont empêché de m'opposer de toute ma force à des actes d'autorité

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