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les toits aigus et saillans sur une sorte de corniche ou encorbellement en bois uniformément découpé annonçaient une construction déjà ancienne, n'avait plus ni vitrages ni portes, ni boiseries: il ne restait guère que les murailles nues. Toutefois, il avait eneore beaucoup moins souffert que les divers bâtimens ruraux qui l'environnaient, dont les murs dégradés et éboulés, les toits abattus ou enlevés, laissaient à peine reconnaître leur destination primitive. Long-temps abandonnée pendant les guerres qui, à partir de 1635, avaient constamment désolé la contrée, cette ferme alternativement occupée par les armées belligérantes, avait été ainsi dévastée de fond en comble. Elle était dans ce pitoyable état quand l'abbé Alexandre de Brissy entreprit de la restaurer, peu de temps après la paix des Pyrénées (1659).

Cent vingt ans plus tard, vers 1780, le dernier des abbés de Maroilles, dom Maur Senepart, faisait démolir cette même maison qui tombait de vétusté, et la faisait rebâtir dans un goût moderne, à portée de là, sur un sol moins humide où elle subsiste toujours.

Confisquée, lors de la Révolution française, comme les autres biens de l'abbaye, la Grande-Court fut acquise par la commune de Taisnières-en- Thiérache, avec d'autres domaines déclarés nationaux, pour le prix de 62,243 livres 5 sols; mais bientôt disloquée, elle passa en différentes mains. M. Cuel, ingénieur en chef des ponts et chaussées, possesseur actuel de tous les bâtimens et de quelques dépendances, a transformé le corps d'habitation en une jolie maison de campagne, et a fait, du surplus, une petite ferme qu'il a surtout beaucoup embellie par des plantations de toute nature.

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La Grande-Court a été louée, en 1659, moyennant un fermage annuel de 1,000 liv. et 150 rasières de grains de diverses espèces, et en 1789, le fermage était plus élevé de 660 livres et de 100 rasières de grains. A l'une comme à l'autre époque, les religieux avaient eu soin d'imposer au fermier, outre certaines prestations, les frais d'une récréation qui devait leur être offerte un jour par an.

La Petite-Court, à Taisnières-en-Thiérache.

Dans des temps déjà fort éloignés, il existait sur la rive droite de l'Helpe-Majeure, entre la cense dite la Grande-Court et l'église paroissiale, une maison de quelque apparence nommée la PetiteCourt,

Assise au milieu des aisemens communaux ou pâtures de ville, sur un monticule appuyé contre la rivière et formé à force de bras et à grands frais, de terres rapportées pour élever le sol au dessus

du niveau des plus fortes inondations, cette maison semble avoir été batie, en cet endroit, dans un but d'utilité publique. Tout porte à croire, en effet, que ce fut moins une ferme qu'une maison forte destinée à protéger à la fois la cense seigneuriale et le corps du village. Cependant, on manque de renseignemens précis à cet égard.

Mais ce qui est plus certain, c'est que les bâtimens de la Petite Court, brulés et entièrement détruits, comme les autres habitations de la localité, par les troupes de Henri II, en 1552 et 1554, n'offraient plus, en 1559, qu'un monceau de décombres. Le terrain, évidemment d'origine communale, était aussi devenu une propriété particulière.

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A une époque où, comme alors, les brigandages n'étaient guère moins funestes au plat pays que les invasions des armées ennemies, et tandis que, dans la partie méridionale du Hainaut, on élevait partout des retranchemens afin de résister aux bandes organisées, sur la frontière de France, pour le pillage et la dévastation des campagnes où, toujours, elles portaient l'épouvante et la mort, il était naturel que, de leur côté, les habitans de Taisnières pensassent à compléter leurs moyens de défense, dont maintes fois, ils avaient eu l'occasion de reconnaître l'insuffisance. Aussi, immédiatement après la paix du Câteau-Cambrésis (1559), les bailly, mayeur et eschevins et la plus grande et saine partie des mannans, habitans et communaulté de la ville de Taisnières, se réunirent, en assemblée générale, pour délibérer et aviser sur cet objet important. Ils convinrent unanimement qu'une petitte pasture nomméela Petitte Court, tenant de trois sens aux aisemens et à la rivière... estoit fort duisable (convenable) à la ditte ville pour édiffier ung fort pour retirer les mannans d'icelle ville et leurs bestiaulx durant la guerre, et firent incontinent les diligences nécessaires pour en obtenir la propriété par voie d'échange. Cet arrangement ne fut pas plutôt ratifié par le massart, dans un acte du 23 juillet 1559, qu'on se mit à l'œuvre. On poussa les travaux avec une telle activité que, au bout de quelques années, on voyait, sur l'emplacement de la Petite Court, une espèce de forteresse formant un carré régulier de 50 mètres de face, et dont les épaisses murailles, renforcées par des terrassemens en forme de parapets, étaient entourées d'un large et profond fossé plein d'eau où passait le ruisseau des Viviers avant de se jeter dans l'Helpe. Le fort proprement dit, sorte de grosse tour quadrangulaire, très-massive, ayant des souterrains, des meurtrières et des créneaux, occupait, sur l'éminence, la partie la plus occidentale de l'enclos, et, du côté opposé, se trouvait une cour vaste et creuse, réservée pour les bestiaux, et que, pour cela, on appelait la basse cour. On entrait dans l'en

ceinte fortifiée par un pont- levis placé vers l'angle N.-O, et aboutissant à une petite chaussée de 7 mètres de largeur, établie à partir du grand pont, sur la digue de la rivière, pour l'exploitation des pâtures de ville. Les habitans trouvèrent souvent leur salut dans ce fort qui, pendant plus d'un siècle, fut toujours leur réfuge, en cas d'alerte. Bien des fois ils furent attaqués dans cette retraite et même quelquefois très-vivement. On peut citer principalement l'entreprise faite, le 8 août 1637, par un détachement de soldats irlandais venus de Maroilles pour surprendre et forcer le fort qu'ils n'abandonnèrent qu'après avoir obtenu, par composition, la somme de 36 livres, prélevée sur les taxes extraordinaires des bestiaux.

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A partir de la réunion du village de Taisnières à la France par le traité des Pyrénées, en 1659, le fort ne fut plus que rarement utile. On finit même, dans la suite, par ne plus s'en occuper, et, à la longue les murailles, faute de réparation, s'écroulèrent dans les fossés. Pendant les guerres du commencement du 18° siècle c'était dans l'église du lieu que les habitans retiraient leurs meubles et effets. En 1706 et 1708, la commune donna en location moyennant 50 liv. par an, l'enclos du fort, les digues et les fossés qui, quoiqu'à sec, ne produisaient que des roseaux et quelques mauvaises herbes; mais elle s'était réservé, avec la plate forme, alors couverte d'épines et de broussailles qui poussaient à travers des tas de cailloux et de débris de maçonnerie, le droit de passage pour y aller au besoin Ce ne fut qu'en 1764 qu'on entreprit de défricher, déblayer et égaliser le terrain qui, en définitive, ne fut mis en culture qu'à partir de 1769. On démolit aussi, en même temps, une ancienne masure qui se trouvait entre le grand et le petit fort, et qui avait long temps servi de corps degarde pour un poste avancé. Quoique les terres de la butte du fort et des parapets appelés vulgairement les digues du grand fossé furent jetées dans les excavations pour les remplir, ce fossé ne conserve pas moins en différens endroits, une profondeur de 1 m. 50 c. sur 7 à 8 de largeur.

Comme la Petite Court, le fort à son tour a disparu. Bientôt rien ne rappellera, sur le terrain, l'existence de l'un ni de l'autre, et viendra le temps où le souvenir en sera entièrement effacé de la mémoire des hommes. Ainsi passent les choses d'ici bas! MICHAUX, aîné.

Avesnes, le 11 juin 1841.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

76. HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE DE LA VILLE ET COMTÉ DE VALENTIENNE, par sire Simon Leboucq, prévôt; reproduction du précieux manuscrit appartenant à la bibliothèque publique de Valenciennes, illustrée par des lithographies représentant les anciens monumens de ladite ville, dessinés par M. H. Macaire, publiée par les soins de M. A. Prignet, imprimeur, et précédée d'une notice sur l'auteur par M. A.

Dinaux.

Les amis de l'histoire du pays ont souvent regretté que Sire Simon Le Boucq ait été prévenu par le Sire d'Oultreman, son prédécesseur comme prévôt de Valenciennes, dans la publication de l'histoire de cette ville qu'ils administrèrent tous deux longtemps et dont tous deux composèrent l'histoire. Simon Le Boucq, plus exact, plus soigneux, plus lucide que d'Oultreman, était aussi plus versé que lui dans la connaissance des anciennes chartes : son travail était mieux conçu, mieux ordonné et établi sur des pièces et des documens irrécusables dont la plupart se trouvaient en sa possession. Mais il eut le tort de venir après son concurrent, et, lorsqu'après avoir usé une partie de son existence dans l'étude et la transcription de l'histoire de sa ville natale, il se préparait à la mettre au jour, le fils de d'Oultreman le gagna de vitesse et fit imprimer à Douai le travail de son père. Le Boucq alors sentant combien peu d'accueil il trouverait, en arrivant le second, même avec sa supériorité, laissa son histoire en manuscrit, et éprouva le regret de voir répandre autour de lui une publication imparfaite qu'il pouvait si avantageusement remplacer.

Aujourd'hui que l'on revient de toutes parts avec une noble ardeur aux études historiques dont on a senti toute l'importance et l'utilité; aujourd'hui que le gouvernement même prête l'appui le plus avoué aux recherches de ce genre, et que, d'accord avec le monde savant, il vient d'exprimer le désir de voir cha

que ville fouiller dans ses vieilles annales, pour arriver un jour à former un tout complet sur l'histoire des communes de la France; aujourd'hui, disons-nous, le temps était venu de reprendre la grande pensée de Simon Le Boucq et de rendre à la lumière son œuvre principale, son HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE DE VALENTIENNE comme il l'appelle, ensevelie jusqu'à présent dans la poussière des bibliothèques et prête à périr de vétusté et d'oubli.

L'histoire ecclésiastique de Valenciennes est une histoire achevée et complète qui a l'avantage de ne plus attendre de supplément; car aujourd'hui l'église n'a plus de rôle à jouer dans les affaires publiques: c'est en même temps une histoire monumentaire de la cité, puisque cinquante édifices au moins seront gravés dans cet ouvrage, d'après les croquis naïfs et vrais de Simon Le Boucq, qui, seul, nous a conservé des monumens curieux dont à peine aujourd'hui on connait l'emplacement. Cette peinture du vieux Valenciennes, si exacte en récit et en image, est un curieux monument historique à mettre sous les yeux de la génération nouvelle qui se doute à peine des souvenirs qu'elle foule aux pieds et des ruines sur lesquelles elle fonde son industrie moderne. C'est à la fois un pieux hommage rendu par des fils à la mémoire de leurs pères, et une œuvre utile à l'art architectural dont elle déroule les révolutions et les progrès. Ce livre, qui rebâtit Valenciennes pierre par pierre, et qui, reculant de plusieurs siècles, nous transporte sous la domination espagnole, aura un attrait particulier par la comparaison que l'on pourra faire de la cité gothique et ornée avec la ville moderne et simplifiée, telle que nous l'ont rendue les siéges, les conquêtes et l'industrie.

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Si les dessins des monumens Valenciennois que l'on offre aujourd'hui au public sont purs et authentiques, le style du texte qui les accompagne n'est pas moins simple, naïf et vrai. L'auteur plein de cette bonhomie des temps antiques, a composé son ouvrage en conscience, et l'a exécuté comme une œuvre pie qu'il devait à ses concitoyens. Animé par une foi vive et pure, il s'est donné à lui-même cette tâche immense et l'a remplie con amor et pour ainsi dire par vocation. Son labeur, comme toutes les grandes entreprises de son temps, est dédié A la glorieuse Vierge mère de Dieu, et voici en quels termes il place sous la protection de Marie l'histoire sainte d'une ville que les traditions mettent sous sa haute protection: « M'estant, passez plusieurs » années, Vierge incomparable! occuppé à la recerche des fon»dations des lieux pieux qui sont dans l'enclos de la ville et com» té de Valentienne, pour en laisser la mémoire à la postérité, j'en ai dresché au mieulx qu'il m'at esté possible, cette histoire ecclésiastique, laquelle, Vierge sacrée, je vous viens offrir et

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