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au peuple français. La question délicate de l'émigration y est envisagée sous toutes ses faces et discutée avec habileté. Cet ouvrage ne contribua pas peu à préparer les mesures qui rouvrirent à tant d'exilés les portes de leur patrie. L'auteur en profita luimême et rentra en France après le 18 brumaire (1800), Lors des négociations pour le Concordat, il crut devoir les appuyer par plusieurs lettres écrites au rédacteur du Courrier de Londres, sur le bref du pape aux évêques français. Il y parlait de Bonaparte avec éloge. C'est un passage de ces lettres, très flatteur pour le premier consul, que citait M. de Chateaubriand dans la préface de sa première édition du Génie du Christianisme, Toutefois Lally s'en tint à ce tribut envers l'homme extraordinaire qui rétablissait l'ordre et la religion en France, et il éluda constamment les occasions qui lui furent offertes depuis de se rattacher au gouvernement impérial. Retiré aux environs de Bordeaux, il ne rechercha d'autre caractère public que celui d'avocat, et se fit inscrire sur le tableau de cet ordre. Vingt ans plus tard, el revêtu d'une éminente dignité, il se souvemait d'en avoir fait partie lorsque, assistant à une rentrée de la cour royale de Bordeaux, il refusait la place d'honneur qu'on lui avait réservée dans cette cérémonie, pour aller se confondre dans les rangs du barreau. En 1805 il vint à Paris, et fut présenté à Pie VII, qui accueillit avec bienveillance l'auteur des Lettres sur le Concordat. Depuis cette époque il ne quitta que rarement, pour quelques voyages dans la capitale, une province où le retenaient des liens d'amitié et de famille, puisqu'il y avait marié sa fille unique, La Restauration l'y trouva encore exclusivement occupé de travaux

littéraires. Louis XVIII, dès les premiers moments de son retour, le pomma membre de son conseil privé, et il suivit ce prince à Gand à l'époque des Cent-Jours. Il y coopérait à la rédaction du Moniteur ou Journal universel, et on lui attribue un article de cette feuille intitulé: Exa men des observations sur la décla ration du Congrès de Vienne. Il y fit aussi en conseil d'État le rapport d'après lequel fut rédigé le manifeste du roi à la nation française. Au mois d'août 1815 Lally fut élevé a la pairie, à laquelle l'appelaient sou talent, son illustration personnelle et celle de sa famille. Dès ses premiers votes dans la Chambre haute, il sy montra ce qu'il aurait été sans doute dans ce sénat qu'il préconisait en 1789, libéral, mais modéré, coustitutionnel, mais ami de la prérogative royale. Dans le procès du maréchal Ney, il vota pour la déportatation, bien que dans ces circonstances déplorables il eût, comme tous les sincères amis de la royauté, gémi sur les conséquences de la faiblesse du pouvoir. On dit qu'après la condamnation à mort prononcée com tre l'accusé, il proposa de recommander à la clémence du roi le sauveur de l'armée française dans la retraite de Moscou. Le 9 janvier 1826, il éleva la voix en faveur de la proposition de loi relative à la célébration de l'anniversaire de la mort de Louis XVI. Rappelaut à cette occasion un opuscule qu'il avait publié l'année précédente sur ce sujet, il insista pour que la loi ordonmat, comme seule oraison funebre de l'infortuné monarque, la lecture publique de son testament. Dans la discussion de la mesure législative qui bannissait les régicides, il releva les mots de bonté toute gratuite, par lesquels le procès-verbal caractér

sait les sentiments qui avaient porté le roi à associer les deux Chambres à cet acte, et il expliqua que le bannissement et les autres dispositions pénales qu'il contenait ne pouvaient émaner que de la réunion des trois pouvoirs. Cette remarque, fort juste sous le rapport du droit public, ne l'empêcha pas d'adopter les exceptions à la loi d'amnistie; car en 1819 il contribua à faire rejeter par la Chambre et biffer de ses registres une pétition tendant au rappel des régicides. Après l'ordonnance du 5 septembre 1816, Lally fut du nombre des hommes politiques qui s'en déclarèrent partisans. Il aimait trop la Charte telle qu'elle était pour approuver les tendances de la majorité de 1815, qui ne voulait cependant retoucher à cette constitution que pour restituer à la couronne des garanties dont l'avenir prit soin de justifier la nécessité, et qui certes eussent sauvé la monarchie de la restauration, si, comme on l'a dit, cette monarchie n'eût pas consenti ellemême à se suicider par l'ordonnance du 5 sept. 1816. On comprend dèslors comment Lally appuya, soit comine rapporteur, soit comme simple opinant, les nouvelles lois sur les élections rédigées dans un sens opposé aux principes de la Chambre de 1815. Plus tard, en 1819, conséquent avec ces idées, il repoussait la proposition de Barthélemy pour la révision de ces lois. Quant à la liberté de la presse, appelé à diverses époques à manifester son opinion sur ce sujet agité tant de fois devant les Chambres de la Restauration, il se prononça constamment pour le jugement des délits de la presse par jury. C'était son principe éternel, comme il le dit lui-même dans une lettre publiée par les journaux en 1825. Il se disculpart dans ce même écrit, comme

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d'une imputation imméritée, d'appartenir à l'opposition. « Depuis dix « ans que j'ai l'honneur de siéger dans la Chambre des pairs, ajoutait-il, j'ai toujours dit et je crois avoir prouvé que je n'étais ni de Paul, ni d'Apollon ou de Céphas, mais du Christ et de l'Évangile, c'est-à-dire du roi et de la Charte.» Il avait sans doute le droit de se refuser à être classé parmi les membres qui faisaient une opposition systématique au gouvernement; parlant presque toujours sur plutôt que contre les propositions du pouvoir, et ne sortant jamais des bornes d'une critique mesurée et impartiale. Cependant il paraissait, à cette époque, peu favorable, en général, au nouveau ministère choisi parmi les membres du côté droit. C'est ainsi qu'il combattit les modifications aux lois de 1819 sur la presse, et que, dans les deux discussions de la loi sur le sacrilége, il voulut en faire rejeter les dispositions les plus sévères, et particulièrement l'application de la peine de mort. D'un autre côté, les grandes mesures réparatrices des maux causés par la Révolution, l'indemnité des émigrés, celle des colons de Saint-Domingue, les pensions aux Suisses du 10 août furent vivement appuyées par lui. Il admirait trop les institutions anglaises pour ne pas voter en faveur de la proposition du rétablissement du droit d'aînesse et de l'extension des substitutions. Son nom ne se trouve pas parmi ceux des orateurs qui prirent part, en 1823, aux discussions si importantes de cette époqué sur la guerre d'Espagne. Ce silence s'explique, ainsi qu'une lacune de toute une année dans sa vie politique, par un grave accident dont il manqua alors d'être victime. A la fin de 1822 sa voiture avait versé sur la route de Bordeaux

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fondateurs de la Société royale pour l'amélioration des prisons. L'ordonnance du 21 mars 1816 le nomma membre de l'Académie Française. Un semblable choix était de ceux qu'une élection libre eût sans doute ratifiés. Le talent littéraire fort remarquable dont il était doué se distingue principalement par la noblesse des pensées et une diction brillante. Mais ses écrits, quel qu'en soit le genre, se ressentent trop de celui dans lequel il s'exerça le plus, le genre oratoire. Il y prodigue aussi quelquefois à l'excès les citations d'écrivains classiques de l'antiquité, défaut qui tenait chez lui peut-être à une mémoire prodigieuse. On retrouvait cette faculté dans sa conversation animée comme son style. Le mot si connu de Rivarol ou de Mme de Staël (car on l'a attribué à l'un et à l'autre), qui définissait Lally le plus gras des hommes sensibles, si on veut le prendre pour une épigramme, ne pouvait en avoir que la prétention. En effet, rien de moins affecté, rien de plus naturel au contraire en lui que cette facilité d'émotions qu'il portait jusqu'à l'attendrissement. Avec une telle organisation il n'est pas étonnant qu'il mît à servir ses amis un zèle et une chaleur justement célèbres dans le monde. Nous ajouterons, parce que c'est aussi la vérité, que cette sensibilité exquise était toujours inspirée par le dévouement et la bienveillance, et que dans ce cœur excellent il n'y avait d'ardeur que pour aimer, protéger et défendre, jamais pour attaquer ni pour hair. A toutes les époques, la moindre circonstance qui pût réveiller en lui le sentiment de la piété filiale donna lieu à des manifestations d'intérêt fort touchantes. Nous citerons à ce sujet ce qu'il écrivit le 23 sept. 1811 aux rédacteurs du Journal

de l'Empire, sur un passage des Lettres de Mme du Deffant, injurieux à la mémoire de son père. Ce morceau est d'ailleurs très historique, et il représente mieux que nous ne saurions le faire le caractère, le style, et jusqu'à la vie de Lally-Tollendal, en même temps qu'il fait connaître des traits curieux de l'histoire de son père. « Messieurs, vous n'avez encore vu que mon nom, et déjà vous m'avez compris. J'étais éloigné de Paris, j'ai lu votre journal du 20 de ce mois; au saisissement de la douleur ont succédé les transports de l'indignation; j'accours remplir encore une fois le plus saint de mes devoirs. Justice, Messieurs, et justice entière! Ce n'est pas seulement la nature déchirée qui vous la demande; la vérité, non moins outragée que la nature; la religion méconnue, l'honnêteté publique violée, l'honneur français calomnié, tout crie vengeanee ainsi que moi! tout s'est soulevé avec moi contre ce fragment honteux dans lequel une frivolité sacrilége s'est fait un jeu de flétrir, je ne dis pas la gloire et les services, je ne dis même pas l'innocence et les vertus, je dis les derniers moments, je dis le dernier souffle de mon malheureux père! Et cette lettre a été écrite par une femme, quand le sang d'un infortuné vieillard fumait encore auprès d'elle! par Mme du Deffant, quand, parmi ces personnes affligées, dont elle profanait la douleur, étaient celles dont l'intimité l'honorait le plus, qui certainement lui moutraient leur affliction, et à qui sans doute elle adressait des paroles compatissantes fe jour où elle insultait à leur sensibilité dans le secret de ses correspondances! Le trait rapide d'indignation dont vous avez marqué, Messieurs, cette lettre criminelle, est un premier mouvement qui vous ho

LALLEMENT (GUILLAUME), compilateur, natif de Metz, vit le jour le 2 déc. 1782. Il ne poussa pas loin ses études classiques, et vint jeune à Paris pour y remplir dans l'imprimerie les fonctions, tantôt de prote, tantôt de correcteur. Mais, doué d'une grande facilité développée par la lecture de tant de feuilles qui passaient sous ses yeux, il suppléa, s'il ne remédia totalement à l'imperfection de son éducation premiere. Il fut secrétaire de Félix Lepelletier, et fit, comme lui, montre d'un grand enthousiasme pour les formes et les institutions républicaines. Fréquemment en relation avec divers littérateurs, il eut plus d'une fois une part importante, mais secrète, à leurs travaux, lesquels du reste ne nous semblent pas de ceux qui lui auraient donné la gloire. Sous l'Empire il publia plusieurs opuscules poétiques à la louange du grand homme. Ces éloges de sa part étaient sincères, sinon exacts: il idolâtrait l'Empire. Puis, revirement bizarre, mais avec lequel nous sommes familiers aujourd'hui, l'Empire tombe; plutôt que de se résigner aux Bourbons, Lallemand redevient républicain et travaille à l'Aristarque (1815). Il s'expatria en 1816 en compagnie de réfugiés français de Belgique, et se mit à publier à Gand le Journal de la Flandre Orientale et Occidentale. Cette feuille, violemment satirique, eut beaucoup de succès auprès de ceux qui regrettaient le régime français, et généralement auprès des lecteurs de toute classe, mais non auprès du ministère, qui lui enjoignit de quitter le pays. Lallement alors se rendit à Aix-la-Chapelle; mais la Prusse Rhénane lui fut de même interdite par le gouvernement prussien, et ordre lui vint de Berlin d'aller résider à Koenigsberg, sinon de quitter les

États de Frédéric-Guillaume III. JI feignit d'obéir à la première partie de cet ordre, mais en réalité il se hâta de rentrer, sous un travestissement, en Belgique, et bientôt après il fut rédacteur en chef de la Gazette de Liége, puis inséra des articles dans le Vrai Libéral de Bruxelles. Il y mit d'abord un peu de modération; mais bientôt il perdit toute mesure, et le gouvernement belge le fit reconduire en France par deux gendarmes. Le libéralisme, qui continuait alors avec ardeur la lutte commencée contre la Restauration, ne pouvait que le recevoir avec transport. Nous l'avons vu coopérer en 1815 à l'Aristarque. A son retour il coopéra au Feuilleton Littéraire (1824), au Diable Boiteux, au Frondeur; puis, par sa compilation républicaine des discours prononcés dans les chambres délibérantes de 1789 à 1815, il sut en même temps gagner de l'argent commodément et se créer des relations. Sa mort eut lieu en 1828.On lui doit: I. Le Secrétaire royal parisien, ou Tableau indicatif de tout ce qui dans Paris peut intéresser, etc., Paris, 1814, in-12. II. Petit Roman d'une grande histoire, ou Vingt ans d'une plume, facétie, 1814, in-8o. III. De la Véritable Légitimité des souverains, de l'Élévation et de la Chute des dynasties en France, 1814, in-8o. IV. Choix de rapports, opinions el discours prononcés à la tribune nationale depuis 1789, recueillis dans un ordre historique, Paris, 1818-1823, 22 vol. in-8°. Co:nme tout recueil de pièces, cette compilation a quelque prix: mais elle est faite au point de vue de ce que l'auteur appelle l'art oratoire, et dans un esprit trop exclusif et trop partial; l'histoire y trouve moins que ne pourrait lui fournir un recueil moins volumineux, Les Palabras de tribune

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