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L'ANCIEN HOTEL DE VILLE Aquarelle de Raffet.

Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale.

canonniers attendent depuis trois heures des ordres précis. Il n'a qu'à faire un geste, la Convention est perdue; l'Assemblée percluse d'émoi, tend la gorge aux massacreurs. Sauf Carnot, que rien ne trouble, et qui travaille solitaire 1, tous les membres des Comités ont déserté leur poste pour se réfugier dans la salle des séances 2. Collot préside : il avertit ses collègues que les locaux de la Sûreté générale sont au pouvoir des scélérats et que « voici l'instant de mourir ». L'heure est solennelle et sinistre; dans cette sombre et profonde salle qu'éclairent quelques quinquets, deux lustres pendant du plafond de papier peint et les hauts lampadaires à quatre foyers qui s'élèvent de chaque côté de la tribune, parviennent assourdies les rumeurs du dehors. Les députés se groupent ou se promènent en causant ; plusieurs dorment 5; nulle délibération; d'instants en instants, soit par un citoyen surgi dans l'ombre de la barre, soit par un collègue qui s'est risqué jusqu'aux anti-salles, ils sont avisés des péripéties de l'attaque imminente: Hanriot harangue ses troupes; le nombre des assaillants grossit; les canons chargés à mitraille sont braqués sur le palais ", et la Convention dont les seules

1. Merlin de Thionville cite de Carnot un mémoire sur l'artillerie légère daté du 9 thermidor. Correspondance de Merlin, publiée par JEAN REYNAUD.

2. Mémoires de Barras, I., 189.

3. Moniteur, réimpression, XXI, 339.

4. Archives nationales, F13 2782 et C 354, no 1853. L'éclairage de la Convention et des Comités, dirigé par le citoyen Lange, «< illuminateur, rue Avoye», coûtait environ 15.000 livres par trimestre pendant l'hiver. Le Comité de Salut public dépensait à lui seul 480 livres de mèches en trois mois. 5. Mémoires de Fievée.

6. Archives nationales WIA 80. Rapport de Carlier lieutenant

armes sont ses décrets, met « hors la loi » les insurgés et leurs complices. Hors la loi ! c'est la suppression sans phrase, la condamnation à mort, soustraite à l'aléa du procès. Hors la loi Hanriot, Robespierre, Le Bas, Saint-Just, toute la Commune rebelle... Mais que peuvent ces sanctions contre l'émeute déchaînée ?

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Pourtant, il est neuf heures et demie; la nuit est tout à fait tombée, aussi brûlante que le jour. Hanriot n'attaque point; à ses côtés titube Damour, l'officier de paix de la section des Arcis, ivre à ne point se tenir debout et serrant sur son cœur les cordes qui ont lié son général : « Les voici, ces cordes, elles valent pour moi une couronne civique; je ne les donnerais pas pour un million De son côté Hanriot pérore toujours. Le vrai, c'est que lui, ni personne, n'ose rien d'irrémédiable. L'insurrection est sans chef; nul ne veut assumer la responsabilité du premier coup de feu, et la bataille se passera en discours, en jurons, en galopades. Et, tout à coup, Hanriot commande demitour et emmène toute sa troupe vers l'Hôtel de Ville, où il est reçu en triomphateur. Robespierre jeune et Le Bas sont là; mais Maximilien ? Qu'est-il devenu? On le sait maintenant à la prison du Luxembourg, où il est arrivé vers sept heures et demie, suivi « d'environ deux à trois mille badauds 2 », le concierge a refusé d'ouvrir sa porte; l'ordre de la Commune est « de ne recevoir aucun

en second commandant la deuxième pièce de la section Mutius Scevola.

1. Archives nationales WIA 80.

2. Déclaration de Guiard, concierge du Luxembourg. Archives nationales, WIA 79

'détenu1 >>. Maximilien s'est fait conduire par ses deux gendarmes à la Mairie, située dans l'enceinte du Palais de justice, à l'ancien hôtel du premier président. Il y parvint vers neuf heures du soir; la servante de la citoyenne Lescot-Fleuriot s'apercevait depuis le matin « qu'il y avait bien du train » ; mais elle en ignorait le motif; elle entendit, à la tombée de la nuit, dans la rue de Jérusalem, qui donnait accès à la Mairie, « des applaudissements et des cris de Vive Robespierre ! a ». Les administrateurs de police accoururent à l'arrivée du fiacre et en ouvrirent la portière : Robespierre « bondit hors de la voiture, sans toucher au marchepied », comme un homme égaré; «< il tenait un mouchoir blanc collé sur sa bouche, et s'élança dans la cour » ; il était « blême et tout abattu ». Les administrateurs l'accueillirent avec les plus vives démonstrations d'amitié ; l'ayant pressé dans leurs bras, ils l'entraînèrent en le soutenant vers leur bureau. Un employé qui s'était mis à la fenêtre entendit l'un d'eux dire : « Rassure-toi donc ; n'es-tu pas avec tes amis ?3 ». Les gendarmes qui

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1. Archives nationales, WIA 80. « Commune de Paris, Département de Police (minute) le 9 thermidor, au concierge de la maison d'arrêt de (sic). Nous t'enjoignons, citoyen, sous ta responsabilité, de porter la plus grande attention à ce qu'aucune lettre ni autre papier ne puisse entrer dans ni sortir de ia maison dont la garde t'est confiée... Il t'est pareillement défendu de recevoir aucun détenu, ni de donner aucune liberté que par les ordres de l'Administration de police. Les Administrateurs de police du Département. Signatures. »

2. Déclaration de Louise Picard, âgée de 14 ans et demi, demeurant chez la citoyenne Fleuriot où elle faisait un service salarié. 2 Rapport de COURTOIS, pièce justificative XXXII, p. 193.

3. La mort de Robespierre, tragédie en trois actes, en vers, avec des notes où se trouvent des particularités inconnues, par (Serieys).

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