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dont il nous a lu l'analyse, et où discutant l'origine des armoiries, présentant sur ce sujet des vues et des observations toutes nouvelles, il fera ressortir l'utilité de cette étude au point de vue de la critique historique.

Enfin le laborieux abbé Auber presse l'impression du 3° et du 4 volumes du grand ouvrage sur le symbolisme religieux dont il nous a déjà présenté les deux premiers. Ils sont consacrés à exposer les théories d'après lesquelles on doit reconnaître et étudier le symbolisme, en établir l'existence et l'emploi dans les usages de tous les temps et de tous les peuples. Les deux derniers volumes appliqueront ces théories à l'architecture, à la peinture, à la sculpture chrétiennes, et, grâce aux tables générales et particulières qui y seront jointes, deviendront un véritable dictionnaire de symbolisme et d'art chrétien.

Vous le voyez, Messieurs, malgré les cruelles préoccupations qui ont encore pesé sur nous cette année, notre ancienne ardeur ne s'est point ralentie. C'est que nous sommes toujours persuadés que, dans l'étude de ce qui a existé et de ce qui s'est fait autrefois, il y a fréquemment à profiter pour ce qui se fait aujourd'hui, et qu'il n'y a d'ailleurs que les peuples qui savent honorer leur passé qui méritent d'avoir un avenir.

ESSAI

SUR

L'ORIGINE DES ARMOIRIES FÉODALES

ET SUR

L'IMPORTANCE DE LEUR ÉTUDE

AU POINT DE VUE DE LA CRITIQUE HISTORIQUE

Par M. ANATOLE DE BARTHÉLEMY.

Au milieu du XIXe siècle, une étude sur les origines et sur l'utilité du blason, au point de vue des travaux historiques, peut paraître un rêve d'archéologue. Il semble que tout doit avoir été dit sur cette question, qu'il n'y ait plus rien d'intéressant à découvrir sur un usage suranné, en apparence. Il semble que l'héraldique, avec ses figures bizarres, ses couleurs tranchantes et sa nomenclature spéciale, ait le droit de faire sourire certaines personnes, à peu près comme si elles entraient dans le laboratoire d'un alchimiste ou d'un astrologue. Des érudits veulent bien admettre que la connaissance matérielle des écus armoriés peut servir parfois à dater le monument, la statue, le manuscrit sur lesquels ils sont gravés, sculptés ou peints; mais on ne va guère plus loin.

Je vais tenter d'établir que l'étude du blason féodal,

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pendant une période que je fixerai, est souvent aussi utile à la critique historique que la connaissance d'un texte. Je chercherai à déterminer l'époque à laquelle ont commencé les armoiries proprement dites, leur caractère spécial. Je signalerai incidemment quelques armoiries inédites ou peu connues; enfin je rectifierai plusieurs erreurs héraldiques qui, par leur caractère quasi-officiel, peuvent dérouter les archéologues.

Je disais plus haut que, pour beaucoup de personnes, il semble qu'aujourd'hui il n'y ait plus rien à dire sur l'art ou, pour parler plus correctement, sur la science héraldique - je reviendrai sur la préférence que je donne à ce dernier mot; - c'est une grave erreur.

Les nombreux ouvrages relatifs aux armoiries, publiés antérieurement à 1789, ne contiennent rien de précis sur l'origine des blasons féodaux. Les hérauts d'armes étaient, à cet égard, d'une ignorance incompréhensible. Quelquefois, lorsqu'ils ont essayé de rompre le silence, ils n'ont fait qu'accréditer des fables, souvent ridicules, inventées par les familles intéressées qui cherchaient à rattacher leur illustration aux temps les plus reculés de l'histoire nationale : ainsi, ils n'hésitaient pas à rappeler des concessions d'armoiries faites par Clovis, Charlemagne, Louis VII et Philippe-Auguste. D'autres se sont bornés à attribuer l'origine des armoiries aux tournois, puis aux croisades; on a voulu enfin en faire honneur aux Orientaux, qui n'en ont jamais eu. A tous ces systèmes il ne manque que des preuves sérieuses.

Non-seulement les hérauts se préoccupaient peu de l'origine des armoiries féodales, mais encore ils ignoraient complétement les armes primitives de plusieurs familles historiques. Cherchez, par exemple, dans les recueils les plus

anciens, manuscrits ou imprimés, les blasons primitifs des maisons de Blois, de Rohan, de Clermont ou Beauvoisis, d'Avaugour, etc., vous feuilleterez vainement. Le fait peut s'expliquer facilement.

Nous verrons plus loin que le blason féodal, à l'origine, tenait au fief et non à la personne du détenteur de celui-ci. Or, à certains moments, sous saint Louis et Philippe le Bel, bon nombre de fiefs passèrent des maisons qui les avaient possédés depuis leur création à des familles nouvelles. Parmi celles-ci, il s'en trouvait qui n'avaient aucun intérêt à conserver le souvenir des anciens possesseurs. Les hérauts, institués au commencement du XIVe siècle, (1) n'avaient souci que des familles existant de leur temps, et s'occupaient peu des prédécesseurs auprès desquels les nouveaux propriétaires jouaient souvent le rôle de parvenus.

Les hérauts n'ont qu'un mérite, c'est d'avoir établi une nomenclature assez parfaite pour que la description d'un blason, faite d'après les termes consacrés, en donne une idée précise. C'est au point que si l'on demandait à vingt personnes étrangères les unes aux autres la reproduction graphique d'un blason d'après la définition héraldique, on obtiendrait vingt dessins identiques. - Quant au symbolisme, c'est-à-dire à la signification attribuée aux objets figurés sur les écus, ainsi qu'aux couleurs elles-mêmes, les hérauts d'armes n'ont fait qu'abuser d'un certain ordre d'idées, de manière à arriver aux conjectures les plus hasardées et les plus puériles. Je traiterai spécialement ce point dans un des paragraphes de ce travail.

Avant d'entrer en matière, je dois donner les motifs qui me font préférer le mot science au mot art pour tout ce qui

(1) On dit que les premiers hérauts d'armes, en Angleterre, furent institués au xve siècle.

concerne l'étude des armoiries. Suivant moi, l'art héraldique comprend ce qui se rattache directement au dessin, à la sculpture, à la gravure, à l'enluminure des blasons; mais les personnes qui déchiffrent ceux-ci retrouvent les familles qui les ont portés, étudient leurs différentes combinaisons, ainsi que les motifs et l'origine de ces combinaisons: ces personnes font de la science héraldique.

I.

Il est indispensable d'établir une distinction entre les blasons, et d'adopter des termes qui fassent cesser la confusion qui a régné jusqu'ici.

On appelle généralement blasons des figures ou symboles adoptés par des individus ou des corporations civiles ou religieuses. Mais il est singulier que l'on n'ait pas encore songé à adopter des vocables spéciaux pour distinguer les blasons des bourgeois et roturiers de ceux des nobles. Entre les premiers et les seconds il y a cependant une telle différence, qu'il n'est pas possible de s'en occuper sérieusement si on les confond sous la même dénomination. C'est justement cette confusion qui donna aux héraldistes anciens l'idée d'attacher à toute espèce de blasons une signification symbolique qui faisait retrouver sur les écussons une sorte de langage hiéroglyphique de convention.

Les blasons ont été de tout temps en usage. Les vases peints nous montrent les héros grecs armés de boucliers sur lesquels figurent des épisèmes, c'est-à-dire des symboles attribués à ces personnages. Les Romains avaient également des signes personnels qui tenaient de ce que l'on désigna plus tard sous le nom d'armes parlantes; ils avaient aussi

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