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lité, comme les maladies des yeux; je n'ai pas trouvé trace de femmes oculistes.

Si l'on quitte les siècles antérieurs à notre ère, pour entrer dans celle-ci, on se trouve en présence de documents du plus grand intérêt, que j'emprunterai à un travail du D' Houssay (de Pont-Levoy), paru dans la Gazette Médicale du Centre (mai 1899), et à la thèse du D' Bécavin (Paris, 1888) sur l'École de Salerne.

« Les pays latins, dit le D' Houssay, ont compté un grand nombre de Femmes-médecins. Non seulement l'art de la chirurgie et de la médecine faisait partie du programme de science de toute femme bien née, à cette époque de féodalité où son seigneur et maître revenait souvent couvert de plaies et de blessures; non seulement les nonnes de Paraclet, pour ne citer qu'elles, faisaient de la chirurgie sous l'impulsion d'Abailard, mais encore il existait des Femmes-médecins gagées, salariées, qu'on nommait des médeciennes ou miresses. »

C'est surtout l'École de Salerne qui jeta un vif éclat, autant par ses Femmes-médecins que par les praticiens célèbres dont les travaux nous sont restés.

Salerne, ville italienne, située dans le golfe du même nom, au sud du golfe de Naples, possédait dès le 1x siècle de notre ère une École de Médecine, dont la renommée ne fit que s'accroître dans les siècles suivants, jusqu'en 1811, époque de sa suppression.

Parmi les Femmes-médecins de l'École de Salerne, ou medichese salernitaines, celle qui a joui de la plus grande réputation est Maestra Trotula (1050). Son principal ouvrage est intitulé: De morbis mulierum et eorum cura. On y lit, entre autres, « le conseil de prendre des bains de sable au bord de la mer, pour faire maigrir les femmes par l'excès de la transpiration; le chapitre sur

les soins à donner à l'enfant nouveau-né, et dans lequel se trouve la recommandation, malheureusement encore trop suivie aujourd'hui, de pétrir et de façonner la tête, le nez et les membres de l'enfant ; enfin le chapitre sur le choix d'une nourrice, sur son hygiène et sur son régime, qui n'aurait à subir aujourd'hui aucune modification » (D' Bécavin, loc. cit.).

Trotula recommande, pour les enfants en bas àge, les hochets recouverts de sucre ou de miel pour adoucir les gencives, les images pour récréer la vue; le doux langage et les caresses pour donner à l'enfant une voix délicate.

Il n'y a pas lieu de s'étonner que, au milieu de préceptes judicieux, se trouvent énoncées des pratiques superstitieuses, comme le moyen suivant de diagnostiquer le sexe de l'enfant dans le sein de sa mère : ad cognoscendum utrum mulier gestet masculum vel feminam, accipe aquam de fonte, et mulier extrahat duas vel tres guttas sanguinis aut lactis de dextro latere, et infundentur in aquam et si fundum petent, masculum gerit; si supernatent, feminam.

Trotula s'est occupée non seulement des maladies des femmes et des accouchements, mais encore d'autres branches de la médecine et de la thérapeutique. Dans le compendium salertinain, il y a des chapitres qu'elle a écrits sur l'épilepsie, sur les maladies des yeux, oreilles et des dents; sur les coliques intestinales, sur les moyens de resserrer ou de relâcher le ventre. Comme preuves, je citerai les quelques extraits suivants :

des

Epilepsia fit ex materia circa cerebrum existente et non aliunde adveniente. Epileptici nimia et continua capitis gravedine laborant, casum non præsentiunt, nec adsunt signa quæ in analepsia et cathalepsia.

Cataracte oculorum quandoquidem incurabile, quandoquidem curabile; curatur autem cum chirurgico instrumento, scilicet cum acu, sed solet recidivare passio..... Ad dolorem aurium: accipe rutam et exprime succum illius et misce cum sagello anguille et colla patientis in ægro, et pone prædictum succum in sanam auriculam, et obdormi: Valde bonum est.

Contra tortionem ventris ex frigiditate temporis aut ex humiditate, seu cruditate, humorum da bibere aquam calidam, et spongiam seu lanam calidam vino infusam et aliquantulum expressam, ori, stomacho et ventri appo

natur.

D'après ces documents, on voit que les préceptes de Trotula étaient plutôt pratiques que théoriques.

Les autres medichese de Salerne ont été : Constanza Calenda, remarquable par sa grande beauté autant que par sa science et sa distinction, mais dont il n'est resté aucun ouvrage; Abella, qui a écrit deux traités, l'un sur l'atrabile, l'autre sur la génération, ce dernier en vers; Mercuriade, qui a laissé des travaux sur la peste et sur le traitement des blessures; Rebecca Guarna, qui a rédigé des mémoires sur les fièvres, sur les urines et sur l'embryon; enfin Stephania, moins connue par ses travaux que par la façon tragique dont elle mit à profit ses

connaissances.

Stephania était la femme du patricien Romain Crescentius, de ce Crescentius qui avait entrepris de faire secouer à l'Italie le joug des empereurs d'Allemagne et des papes, qui chassa Grégoire V de Rome, puis, après avoir rétabli la république, se fit nommer consul. Pendant dix-huit années, Crescentius administra la république avec autant de sagesse que de fermeté. Mais, en 998, Othon III, voulant rétablir Grégoire V,

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son parent, sur le trône pontifical, marcha sur Rome à la tête d'une armée, et assiégea avec succès le château Saint-Ange, où Crescentius s'était retiré et se défendait avec la plus grande énergie. Othon, lui ayant proposé une capitulation honorable, Crescentius, sur sa parole, sortit du château Saint-Ange, mais il fut arrêté aussitôt, et eut la tête tranchée. Stephania fut abandonnée à la brutalité des soldats allemands.

Trois ans plus tard, ayant appris que le roi Othon était rentré malade d'un pèlerinage, Stephania lui fit part de son habileté dans l'art de la médecine; elle réussit à l'approcher, et, grâce à sa beauté, devint sa maîtresse en même temps que son médecin, et en profita pour lui verser un poison qui le fit mourir dans de longues et horribles souffrances. » (D' Bécavin, loc. cit.)

Pour terminer cet aperçu historique, je rappellerai l'édit de 1311, réglementant l'organisation de la médecine en France. Cet édit faisait « défense à tout chirurgien ou chirurgienne d'exercer sa profession sans avoir préalablement subi un examen devant un jury spécial ». Ce qui prouve bien qu'il existait des Femmes-médecins dans la France d'alors.

On trouve dans les Archives de l'Université de Bologne mention d'Alexandra Gigliani, savante anatomiste au xvi° siècle, et de Maria Pettracina, au XVII° siècle, auteur de plusieurs mémoires sur l'éducation physique des enfants. Au xvII° siècle, Anne Manzolini se livra à l'étude de l'anatomie pour seconder son mari, fabricant de modèles en cire; les modèles, confectionnés par elle, étaient parmi les curiosités du musée de Bologne; ses découvertes lui valurent une chaire à Milan.

En Espagne, au xvn° siècle, Oliva del Sabucco laissa un traité d'anotomie et de physiologie. A la même époque,

Barbara Weintrauben exerça la médecine en Allemagne avec succès, pendant que réussissaient en Angleterre Anna Volley et Elisabeth de Kent.

Au xv siècle encore, on cite le nom de Christina Erxleben à l'Université de Halle, et celui de Félicité de Fay à la Faculté de Montpellier. La célèbre praticienne, Mme Boivin, était leur contemporaine; c'est à elle que l'Université de Marbourg octroya gracieusement le diplôme de docteur.

Je n'ai pu faire devant vous, Messieurs, qu'un résumé de la question des Femmes-médecins d'autrefois; développer ce sujet, m'aurait entraîné trop loin. Quoi qu'il en soit, vous voyez que les médecins du sexe féminin ont existé de tout temps.

De nos jours, leur nombre s'est accru dans des proportions considérables. Et cependant, le besoin ne s'en faisait pas sentir, les médecins de notre sexe représentant déjà une corporation bien remplie. Certes, si les Femmes-médecins n'existaient pas, il ne serait pas nécessaire de les inventer. En leur absence, la terre accomplirait quand même ses révolutions, et ses habitants ne s'en porteraient ni mieux ni plus mal. On peut donc dire de cette institution qu'elle n'est ni un mal ni un bien. Le dévouement et le savoir des Femmes-médecins d'aujourd'hui est à l'abri de toute critique; mais les malades n'étaient pas moins bien soignés avant le déluge actuel des Médecines.

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