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<< y avoir pour le genre humain de société paisible et « honnête 1? »

196. Nous n'en doutons pas; la conscience va nous le montrer. Il apparaîtra sous deux formes différentes, mais identique au fond sous ces deux formes. Sous l'une d'elles, il prendra le nom de premier principe de la détermination du devoir. Sous l'autre, il prendra le nom de premier principe de la sanction du devoir.

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197. Le premier principe de détermination du devoir fera l'objet de notre titre I. Le premier principe de sanction fera l'objet de notre titre II.-Dans un titre III, nous constaterons l'accord de la révélation positive avec la conscience sur le premier principe du devoir.

TITRE PREMIER.

PREMIER PRINCIPE DE DÉTERMINATION DU DEVOIR.-ASSISTANCE DUE PAR TOUT ÊTRE A TOUT ÊTRE.

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198. Devoir quelque chose à quelqu'un, c'est lui devoir du bien. Premier principe du devoir: Assistance due par tout être à tout être.

198. Nous sommes en relation de devoirs avec Dieu, avec autrui, avec nous-mêmes. Or, en quoi peuvent consister nos devoirs envers un être? A lui

1 Puffendorff, Droit de la nature et des gens, liv. I, chap. vi, § 18.

faire du mal? quelle absurdité! A lui faire du bien? c'est évident... Ainsi il n'y a pas à chercher longtemps pour trouver dans la conscience ce premier principe du devoir: ASSISTANCE DUE PAR TOUT ÊTRE A TOUT ÈTRE. La voilà formulée, cette loi naturelle dont parle Cicéron : «Est hæc non scripta, sed nata lex; quam non didici« mus, accepimus, legimus, verum ex natura ipsa ar« ripuimus, hausimus, expressimus; ad quam non « docti, sed facti, non instituti, sed imbuti sumus. »

Veut-on une démonstration plus détaillée de l'existence de ce principe? - Pour la donner, combinons d'abord l'idée de l'être considéré isolément, avec l'idée du but de cet être, c'est-à-dire de sa conservation, de son perfectionnement et de son bonheur. Puis, acceptant le fait de la pluralité des êtres, voyons apparaître l'idée de la conservation, du perfectionnement et du bonheur de tous les êtres. Enfin, analysons le moyen pour tous les êtres d'arriver à leur but; et nous le trouverons dans le concours réciproque que chacun d'eux, cherchant son but, doit aux autres, cherchant le leur.

I.

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COMBINAISONS DE L'IDÉE DE L'ÊTRE, CONSIDÉRÉ isolément, avec l'idée DU BUT DE CET ÊTRE C'EST-A-DIRE DE SA CONSERVATION, DE SON PERFECTIONNEMENT, DE SON BONHEUR.

« Omnis summa philosophiæ ad beate vivendum re« fertur. » (CICER., De finibus.)

199. Tendance de tout être à sa conservation et à son perfectionnement, c'est-à-dire à son bonheur.

199. L'être trouve bon d'exister. Il trouverait bon d'exister mieux, s'il était possible. L'idée de but

lui apparaît comme synonyme de ces deux idées : conservation, perfectionnement. La réunion de ces deux idées elles-mêmes produit la résultante: bonheur.

Conservation. -La première loi de tous les êtres, donc de l'homme, est de tendre à continuer d'être autant qu'il est possible. Toutes les déclamations sur la souffrance ne contrediront pas cette vérité: Exister vaut mieux que ne pas exister, parce que le néant n'a pas de valeur.

Perfectionnement.

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La seconde loi de tous les êtres finis, donc de l'homme, est de suivre une évolution successive, en passant du germe le plus simple à un état de développement, pour arriver ensuite à un état relatif de dissolution, ou, (si l'on préfère un mot qui ne préjuge rien), de transformation. Ainsi, la graine confiée à la terre produit une tige, des feuilles, des boutons, des fruits, qui se flétrissent après une vie de quelques jours.

Bonheur. -Tout être, donc l'homme, en avisant à sa conservation et à son perfectionnement régulier, recherche un état qui lui plait ou qui lui plaira. Il le nomme le bonheur.- Bonheur! mot séduisant que, dans tous les systèmes, les jurisconsultes doivent présenter en tête de leur vocabulaire, s'ils veulent être écoutés! Proposons-le à nos disciples: sinon, les uns prendront en risée notre logique, en s'écriant avec Montaigne: «De vrai, ou la raison se moque, ou « elle ne doit viser qu'à notre contentement1! » et les autres la prendront en tristesse, en reconnaissant,

▲ Essais, liv. I, chap. XIX: Que philosopher c'est apprendre å mourir,

avec saint François de Sales, une tendance si grande de l'esprit de l'homme au bieneêtre, « qu'il ne faut << pas penser d'apporter aucun remède à cela 1!»

Sans doute (hâtons-nous de faire cette réserve), le mot bonheur a mille significations. Le bonheur ne doit pas être confondu avec la volupté, que trop souvent on prend pour lui. Et puisque «la vie de l'âme, sé« parée du corps, est une continuation de la vie pré<< sente, on ne doit pas, dans la définition du bonheur, <«< se borner à la considération de cette période de la «< vie qui se termine à la mort. » En ce qui nous concerne, lecteur, nous nous garderons bien, dans la suite de cet ouvrage, de demander le sens du mot bonheur à des théories dépourvues de courage et de dignité3. Mais ce n'est pas le moment d'indiquer, sur le choix du souverain bien, nos préférences ou nos antipathies. Tout ce que nous voulons constater ici, c'est que nulle démonstration ne peut persuader à un être de désigner ainsi son but Malheur définitif. Il faut toujours lui proposer, comme couronnement d'une série d'actes conformes à sa destination, une satisfaction dernière quelconque, soit dans cette

4 Lettre du 7 avril 1595.

La pensée de l'intérêt personnel se cache parfois jusque dans les actes de dévouement. « Il semble souvent que c'est la charité qui fait agir, et c'est « plutôt la chair! Car il est bien rare que l'inclination naturelle, la volonté ⚫ propre, l'espérance de quelque récompense, le désir de quelque avantage particulier, ne se glissent point dans nos actions. -»

(Imitat. de J.-C., liv. I, chap. xv.)

• Pestel, Fundamenta justitiæ naturalis, traduit du latin sur la 2o édition (part. I, sect. I, no 17).

3 Dans le passage de Montaigne cité page précédente, il signifie le contentement dans la vertu.

vie, soit dans une autre. Sur cette incontestable vérité, nous trouverons d'accord et les païens et les chrétiens, et les anciens et les modernes. A l'exemple d'Aristote disant : « qu'être heureux et bien agir << sont une seule et même chose1, » Tertullien affirme « qu'on ne quitte les plaisirs que pour des plai«<sirs plus grands. » Si, d'après Mallebranche, le désir invincible d'être heureux est le motif de ceux qui aiment Dieu, ce désir, suivant Pascal, est, sans exception, le motif de toutes les actions de l'homme, jusqu'à ceux qui vont se pendre2.

Nous trouvons dans Leibnitz cette définition de la science de la sagesse : « Science de la félicité; » dans Bulamaqui, cette définition du droit : « Tout ce que <<< la raison reconnaît comme un moyen sûr et abrégé « de parvenir au bonheur *. » Enfin, M. Jules Simon nous fournit cette proposition: « Je ne puis cesser, quoi que je fasse, de vouloir mon propre bonheur. »

1 Livres moraux adressés à Nicomaque. 2 Pensées.

3 Definitiones ethicæ.-«La fin du droit naturel, dit-il encore, est le bien de ceux qui l'observent. » (Monita quædam ad Puffendorffii principia. 4 Bacon a dit aussi dans ses aphorismes: Finis et scopus quem leges intueri, atque ad quem jussiones et sanctiones suas dirigere debent, non alius est quam ut cives feliciter degant. Id fiet, si pietate et religione « recte instituti, moribus honesti, armis adversus hostes externos tuti, << legum auxilio adversus seditiones et privatas injurias muniti, imperio et magistratibus obsequentes, copiis et opibus locupletes et florentes fuerint. « Harum autem rerum instrumenta et nervi sunt leges.

5 Le Devoir.

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