Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Dugald-Stewart, et bien d'autres.-Puis c'est nous fournir une présomption pratique qui n'est pas sans valeur; car (il faut le reconnaître) la bonne renommée concourt, sinon toujours, du moins souvent, avec l'accomplissement de nos devoirs. Ces avantages

ne sont pas à mépriser.

309. Mais, en théorie, le système de la sympathie apporte-t-il un critérium auquel on puisse se confier? A notre avis, les partisans de l'infaillibilité de la conscience ont tort de le dédaigner. Le trouble qui offusque fréquemment une conscience étourdie par la passion, peut ne pas exister dans une autre conscience désintéressée. Il y a toujours avantage à consulter un juge dont l'impartialité est plus probable.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

310. Pour nous, qui repoussons l'infaillibilité absolue de la conscience individuelle fonctionnant seule, nous ne pensons pas que l'appui de la conscience d'autrui lui donne cette infaillibilité. Et d'abord, plus désintéressée dans les témoins de nos actes que dans

1 Jouissance qu'il faut rechercher, sous peine de paraître indifférent à la vertu elle-même, si l'on en croit cette proposition de Tacite (Annal., lib. IV, cap. xxxvIII) : « Contemptu famæ, contemni virtutes. »

nous-mêmes, la conscience peut cependant céder encore à quelque contre-coup d'un intérêt caché ; ainsi la sécurité que peuvent donner l'approbation ou le blâme d'autrui ne demeure pas entière.

311. Même en supposant qu'aucun intérêt caché ne rende suspecte la conscience d'autrui, elle n'est pour nous que ce qu'est la nôtre, c'est-à-dire la révélation du premier principe du devoir. Quant aux applications du principe, en confier la recherche à nos semblables, c'est renvoyer seulement à un autre juge la fatigue de l'étude que nous nous dispensons de faire nous-mêmes. Sur ce déclinatoire, que pourra faire ce nouveau juge? Avant d'accorder son estime à celui qui la désire, ne faudra-t-il pas qu'il se demande d'abord dans quel cas il doit estimer ou mépriser? Ainsi, même question pour lui que pour nous1; et la solution n'a pas fait un pas.

312. Puis les consciences juges de la nôtre auront entre elles des divergences. L'impression qu'une action commise par moi produit sur mes semblables n'est pas la même pour tous. Elle m'attire la sympathie des uns, elle produit l'irritation des autres. En présence de cette lutte de sentiments opposés, il faut un autre critérium. Quel sera-t-il?

Ceci nous sert de transition pour arriver aux chapitres suivants.

1 Aussi Dugald Stewart ne voit dans le principe de la sympathie qu'un auxiliaire des autres. (Esquisse de philosophie, partie II, chap. 1, sect. 2.)

CHAPITRE III.

TROISIÈME SUBDIVISION DU PREMIER SYSTÈME.

DÉTERMINATION

ABSOLUE DES OBJETS DU DEVOIR DANS LA CONSCIENCE DU LÉGISLATEUR.

[blocks in formation]

313. Foi au droit divin, à la mission surnaturelle du législateur.

313. Nous avons vu ceux qui manquent de la foi au devoir, se soumettre à la direction des puissants de la terre, et accepter d'eux la création d'un ordre arbitraire, quel qu'il soit.

Une foi exagérée arrive à la même docilité par un chemin tout opposé. Elle se soumet à la direction des puissants de la terre, parce qu'ils lui paraissent institués de droit divin, c'est-à-dire investis par Dieu même de la mission de tracer la distinction du juste et de l'injuste. La présomption de cette mission entraîne la présomption de l'exactitude de la manière dont ils remplissent leur mandat. Trop peu rassurée par le choix de témoins pris au hasard, comme le propose Adam Smith, la conscience individuelle, dans ses perplexités, s'humilie devant ces pasteurs des peuples, que désigne une auréole sacrée.

[blocks in formation]

314. Représenter le devoir comme la nécessité d'avoir confiance dans la sagesse du législateur, c'est le considérer sous un aspect pratique, du côté seulement des gouvernés; c'est prêcher utilement à ceux-ci une obéissance sans laquelle famille et société ne sauraient vivre un jour.

Chercher à donner à cette obéissance l'assentiment de la pensée convaincue, en s'appliquant à comprendre tout ce qui peut justifier l'oeuvre du législateur, c'est, de la part des gouvernés, garder une défiance d'eux-mêmes, meilleure conseillère que l'outrecuidance'. Il faut approuver la disposition d'esprit qui présume la supériorité du droit promulgué par la raison collective, sur le droit rêvé par la raison individuelle. Le possessoire doit être du côté de la loi existante. Mais ce possessoire peut être attaqué.

En effet, qu'il est difficile, en lisant l'histoire, de saluer constamment comme élus de Dieu les dominateurs des nations, qui paient tant de tributs à la passion ou à l'erreur! Impossible d'obliger la raison

1 Consultez l'ouvrage de M. Godin, sur le respect dû aux puissances

établies.

humaine à fermer les yeux pour se faire opiniàtrement cette illusion.

315. Ni les chefs de famille, ni les chefs des peuples ne peuvent violer le sanctuaire inaccessible du libre examen. Là se retranche un juge, bon ou mauvais, impartial ou passionné, de leurs œuvres. L'amour et la haine de ceux qui obéissent réviseront en dernier ressort les volontés de ceux qui commandent; on donnera à l'expression de ces volontés le nom de lois, si elles paraissent inspirées par l'amour du souverain bien 1; ou sinon, l'on dira avec Cicéron : « Non magis legis nomen attingunt, quam si latrones aliqua « consessu suo sanxerint 2.

«

CHAPITRE IV.

[ocr errors]

QUATRIÈME SUBDIVISION DU PREMIER SYSTÈME. DÉTERMINATION ABSOLUE DES OBJETS DU DEVOIR DANS LA CONSCIENCE UNIVERSELLE, OU AUTORITÉ GÉNÉRALE.

[blocks in formation]

316. Prédominance alléguée de la raison de tous sur la raison de chacun.

317. Modestie de ce système. — Absence d'efforts dans ceux qui

l'adoptent.

(CICER.)

318. Ecole historique de jurispru dence, issue de ce système. 319. Ecole historique, ennemie de toute codification.

316. L'autorité générale véritable, l'autorité géné

1 Domat, Préface des lois civiles, chap. xi, no 20.

2 De legibus.

Nulle autorité ne fera accepter aux hommes des lois qui ordonneraient aux prêtres de révéler le secret de la confession, au fils de dénoncer le père, aux médecins de trahir les secrets de leurs malades.

« VorigeDoorgaan »