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Quoique dans un âge si peu avancé, sortant à peine du tumulte des armes, on le vit apporter à ses nouvelles fonctions toute la sagesse et la gravité d'un ancien magistrat. L'étonnante activité de son esprit se tourna vers l'étude, et bientôt une mémoire heureuse, un jugement exquis, une ardeur infatigable, une pénétration, qui n'avait d'égale que son extrême avidité d'apprendre, en firent un savant aussi brillant que profond.

Admis en 1757 à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen, il en fut nommé, peu de temps après, Secrétaire-perpétuel, pour les belles-lettres et les arts.

Il remplit avec honneur sa charge de Lieutenant-Général criminel jusqu'en 1789, épo que à laquelle il aima mieux s'en démettre, que de prêter le serment qu'on exigeait des parle

mens.

Des circonstances particulières l'ayant engagé à venir demeurer à Paris, il y vivait depuis plusieurs années, au sein d'une famille qui l'adorait, et cultivait les lettres, dont il faisait ses délices, lorsque la mort vint le frapper, après après une longue et douloureuse maladie, le 29 juin 1810.

Il était âgé de quatre-vingt-deux ans et deux

mois.

La douceur et la pureté de ses moeurs, l'aménité et les graces d'une conversation aussi instructive qu'agréable, la profondeur et la variété de ses connaissances, et surtout le rare talent de se mettre au niveau de chacun, sans jamais cesser d'être lui-même, firent chérir et

respecter M. Haillet de Couronne de tous ceux qui eurent le bonheur de l'approcher.

Aussi modeste qu'instruit, M. Haillet de Couronne, n'a jamais rien fait imprimer sous son nom, mais il se plaisait à enrichir les ouvrages des autres. Outre la grande quantité de notes qu'il a fournies à M. Desessarts pour sa bibliothèque d'un homme de goût, et ses siècles littéraires, on sait combien d'articles il a donnés à M. Prudhomme pour les volumes qui ont paru de la nouvelle édition du dictionnaire historique; un plus grand nombre encore de ses notes seront employées dans les autres volumes.

Il se proposait de donner au public plusieurs ouvrages qu'il n'a pas eu le temps d'achever, et qui sont restés en manuscrits dans ses papiers. Le plus considérable est l'histoire litté raire de Normandie. Cette immense travail, que réclamait depuis long-temps notre littérature, était à la veille d'être terminé. Après cinquante années de recherches sur une matière aussi riche que hérissée de difficultés, M. Haillet de Couronne était parvenu à réunir tous ses matériaux; il travaillait à les mettre en ordre, et bientôt les premiers volumes allaient être en état de paraître, lorsque la mort l'a enlevé aux sciences.

Outre ce précieux ouvrage, auquel il avait consacré tous ses soins, et qui devait fonder sa gloire littéraire, M. Haillet de Couronne a laissé les matériaux d'une bibliographie qu'il avait conçue d'après un plan nouveau, qui en aurait fait un livre aussi utile que piquant;

une immense quantité de notes biographiques; des recherches profondes sur les anonymes et les pseudonymes; les matériaux d'un nouveau dictionnaire des femmes célèbres, et enfin ceux d'un traité savant et curieux intitulé les épistolaires.

Dans les circonstances où se trouvait M. Haillet de Couronne, au moment où il mettait la dernière main à ses travaux, sa mort a été pour les lettres une perte irréparable. Espérons cependant que tant de trésors littéraires seront soigneusement conservés, espérons qu'une main habile mettra quelque jour en oeuvre ces précieux matériaux, et enrichira notre siècle de ces fruits de soixante années de veilles et des travaux d'un littérateur tel que celui que nous avons à regretter!....

... Cui pudor, et justitiae soror Incorrupta fides, nudaque veritas, Quando ullum invenient parem?

HORACE.

TABLE

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