NOTE

SUR LE NOUVEAU SHETLAND.

JE capitaine Cook, après avoir raconté dans le ournal de son second voyage la découverte de la Terre de Sandwich, continue ainsi : « Je conclus Įne la terre que nous avions vue étoit, soit un groupe d'îles, soit une pointe du continent; car je crois fermement qu'il y a un espace de terre près du pôle, et que la plus grande partie de la glace répandue sur ce vaste océan méridional y prend son origine; je pense qu'elle se prolonge aussi au nord, vis-à-vis l'Océan atlantique méridional et vis-à-vis la mer des Indes, parce que nous avons toujours rencontré dans ces mers la glace plus au nord que dans les autres; ce qui, je le présume, ne pourroit pas avoir lieu, s'il n'y avoit pas de terre au sud, j'entends une terre d'une étendue considérable.

La justesse de cette remarque a été démontrée par l'événement; les NOUVELLES ANNALES DES VOYAGES ont annoncé, dans le Tome Ier, la découverte du nouveau Shetland, faite en février

1816, par M. William Smith, capitaine du Williams de Blythe, qui alloit de Buenos-Ayres à Valparaiso. Des coups de vent violens, accompagnés de tourbillons de neige, et des champs de glace, empêchèrent, à cette époque et au retour du navire en mai, d'explorer la côte, vue par 62° 40' de latitude sud, et près des 60° de longitude ouest. Dans un voyage subséquent, au mois d'octobre, le capîtaine Smith put s'approcher de terre, reconnoître la direction des côtes et sonder; le temps étoit favorable; on réussit à débarquer; la terre étoit stérile et couverte de neige; des phoques innombrables couvroient les rochers, C'est d'après la reconnoissance faite par le capitaine Smith et d'autres navigateurs qui, après lui, ont visité cette terre éloignée, que la carte qui la représente avec exactitude a été dressée.

Le nouveau Shetland est composé d'îles nom+ breuses; celles que l'on connoît s'étendent de 61 à 63° 30' de latitude sud; l'on a encore aperçu la terre au sud à perte de vie. On n'y découvre d'autre vestige de végétation qu'une espèce de mousse qui croît sur les rochers près du rivage; des neiges éternelles couvrent les parties plus éloignées qui sont montagneuses. L'aspect de la nature, dans ces régions antarctiques, est stérile et repoussant. Le thermomètre n'étoit jamais aut dessous du point de la congélation; mais la fonte des neiges près de la plage imbibe si profondé

ment le sol, qu'elle arrête toute végétation. On trouve en abondance de la houille qui brûle trèsbien; la mer est remplie de crevettes; des troupes de manchots, en nombre incroyable, se promènent sur ces îles comme sur toutes les terres antarctiques. Une portion d'une ancre, que l'on reconnut pour espagnole, a été trouvée sur le rivage; on a supposé que c'étoit tout ce qui restoit d'un vaisseau de 74 canons qui alloit d'Espagne à Lima, et dont on n'a plus entendu parler.

Plusieurs navires des Etats-Unis ont visité le Shetland méridional; les capitaines assurent que quelques ports sont très-bons, et que l'on y est à l'abri de tous les côtés. Des trois premiers mois de l'année 1821, mars fut le plus doux ; mais la plupart des phoques avoient gagné la mer; on aperçut dans deux ou trois coins solitaires quelques brins d'herbe; on ne voyoit pas de champs de glace; cependant des glaçons flottoient de tous les côtés.

Un capitaine des Etats-Unis a rapporté qu'il avoit pénétré jusqu'à 65° de latitude, et qu'il y avoit observé des terres se prolongeant plus au sud; il n'avoit pu en reconnoître les extrémités ; toute cette surface étoit, même au milieu de l'été, fermée par la neige et par la glace, excepté dans quelques endroits fréquentés par les phoques.

La frégate russe le Vattek, qui, en 1821, reve

noit d'un voyage de découvertes avec une corverte, a fait, dit-on, le tour de la Terre de Sandwich, et découvert trois petites îles plus au nord. On ajoute que ces bâtimens ont aussi reconnu la partie méridionale du nouveau Shetland par 69° et quelques minutes sud, et ont aperçu une île à quelque distance; peut-être étoit-ce un grand cap ou un promontoire; les glaces ne permirent d'en approcher qu'à 40 milles.

On avoit d'abord dit que les cachalots fréquen toient les côtes du nouveau Shetland; sans doute il en doit venir quelquefois dans ces parages; mais l'espèce de baleine que l'on y trouve le plus communément est le gibbar.