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envoyé ici, c'est qu'il a inventé une espèce toute nouvelle de fusées incendiaires dont on ne peut plus éteindre le feu. Il veut en faire l'essai sur la flotte turque, et il nous a pris tous les six à bord de son bâtiment en qualité d'officiers d'artillerie. Je me réjouis d'être d'un combat naval, afin de goûter un peu de tout. Quoique j'aie bien peu de connoissances en marine, je saurai payer de ma personne, si F'on vient à l'abordage, et peut-être j'enleverai un sabre

turc.

« Encore un mot d'Hydra. La ville est construite sur un rocher aride; elle a 3000 maisons et environ 16,000 habitans. Chaque, famille a sa propre maison. Il y a beaucoup de familles riches et considérables. Tous les hydriotes n'ont d'autre profession que la navigation. Ils ont tous en général beaucoup voyagé, et parlent ordinairement trois à quatre langues. Ce sont eux qui les premiers ont pris les armes pour conquérir leur liberté. Je ne puis vous dire assez quel bon esprit règne ici en faveur de la liberté. Ils haïssent mortellement leurs tyrans; et, dans les quatre victoires navales qu'ils ont remportées, ils ont montré un courage tel que celui des anciens Grecs à la bataille de Salamine. Leur habillement est très-élégant, propre et très-riche. Ils ont des mœurs sévères. Vous ne verrez jamais ici un homme ivre, Les filles se marient dès l'âge de quatorze à quinze ans. Malheur à celui qui veut avoir une intrigue avec la femme d'un autre ! Un coup de pistolet ou de poignard auroit bientôt mis fin à l'intrigue.

« Je vous prie de faire vos efforts pour que les sociétés d'Allemagne ne se lassent pas de soutenir la juste cause des Grecs. Oh! n'écoutez pas ceux qui, par découragement, abandonnent une si belle cause. Ce sont des hommes foibles, qui n'ont point de constance, et qui croyoient ne venir ici que pour avoir des places de commandans. Il faut

encore soutenir plus d'une lutte pénible, avant de recueillir les fruits de la liberté. »

Les Chamois.

Le Voyage dans le haut pays du canton de Berne, par M. Wyss, récemment publié en allemand, contient un aperçu très-intéressant sur les dangers et les plaisirs qui accompagnent la chasse aux chamois, ainsi que sur la manière de vivre de ces animaux. Nous en extrairons quelques remarques.

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Il est prouvé, par le témoignage unanime des chasseurs et par les observations personnelles de M. Wyss, que chaque troupe de chamois est conduite et gouvernée par une femelle. C'est très-probablement la mère. Elle se tient toujours dans l'endroit le plus élevé du pâturage pour veiller à la sûreté du troupeau; elle monte sur les rochers, s'avance sur les bords, et promène de toutes parts ses regards perçans; dès qu'elle aperçoit quelque chose de suspect, elle en donne un premier avis par un léger sifflement qui part du nez; le danger lui paroît-il approcher, elle donne, par un second sifflement très-fort et très-aigu, l'ordre du départ: aussitôt le troupeau entier se met en marche; elle le précède et le dirige vers un lieu plus sûr. Jamais un chamois mâle n'a été vu exerçant ces fonctions de surveillance.

Lorsque la chèvre conductrice ou fuhr-geiss a été alteinte du plomb mortel, le reste du troupeau semble perdre toute intelligence; il court comme égaré, en cherchant les traces de sa honne et infortunée mère; souvent il se laisse égorger autour de son corps ensanglanté.

Les boucs, dès l'âge de cinq à sept ans, se séparent de leur troupeau, et mènent une véritable vie d'ermite. Au mois de décembre ils reparoissent, dominés par l'instinct sexuel; ils gardent alors les femelles, en observant d'un œil jaloux les chasseurs. C'est une croyance générale en Suisse que plus l'époque de l'accouplement est retardée, et plus l'hiver aura de durée. M. Wyss a lui-même vérifié la justesse de cette opinion,

On surprend quelquefois les chamois près des rochers où il suinte du sel gemme liquéfié, endroits qu'on appelle, en dialecte suisse, Sulz-Leckinen. Le chamois a, comme les chèvres et les vaches, un besoin naturel de lécher ces rochers.

Les chamois se nourrissent d'un lichen semblable au chen islandicus, et que, dans l'idiome du pays, on nomme rag; ils mangent aussi les écorces tendres de quelques arbres et les boutons des pins; le gazon même ne leur manque pas aussi souvent qu'on pourroit le croire; la violence des vents met souvent à nu, au milieu des HautesAlpes, des endroits où les herbes se sont conservées sous la neige. Cependant il est certain qu'ils éprouvent quelquefois des famines. On a trouvé dans leur estomac des feuillettes d'ardoise qu'ils semblent avoir avalées pour apaiser la faim. Pendant l'hiver, ces animaux sont gras; au contraire, a printemps, en mangeant de l'herbe nouvelle, ils maigrissent, ils souffrent des diarrhées trèsfortes, et sont couverts de poux.

Il ne paroît pas vrai que les chamois s'accrochent aux pointes des rochers pour monter en ligne droite sur des montagnes taillées à pic. Le fait se réduit à ceci : une trèsfoible inclinaison, par exemple, de 30 degrés, suffit pour que le chamois y monte, parce que, ne s'arrêtant qu'un instant à chaque repos, ils n'ont besoin que d'un très

mince taillis pour appuyer leurs pieds et pour prendre l'élan nécessaire; c'est ainsi que, de saut en saut, ils arrivent au sommet de rochers que l'oiseau seul paroissoit pouvoir franchir. M. Wyss a mesuré le saut d'un chamois; il étoit de 25 pieds, mais de haut en bas, circonstance qui réduit presque à zéro le mérite de cette observation.

Quelques chasseurs, placés dans des positions très-dangereuses, ont employé la ressource de se faire des entailles dans la plante des pieds, dans l'espoir de se soutenir sur les rochers au moyen du sang glutineux qui, coulant de la plaie, devoit les aider à se retenir à l'endroit où les auroit portés un saut désespéré. M. Wyss, avec raison, doute de l'efficacité de ce moyen; il ne l'a jamais vu employer. Le philosophe-psychologiste dira peut-être que la même force du désespoir qui persuade au chasseur de porter son couteau sur un de ses membres, l'aide aussi à faire avec succès le saut périlleux, et à se maintenir en équilibre à la place où ce saut le porte.

La vie d'un chasseur de chamois qui en fait profession, dit M. Wyss, est dangereuse et misérable; mais un simple amateur peut éviter les périls et jouir des plaisirs singulièrement attachans. Il y a dans ces courses au milieu des montagnes, dans cette activité vigilante, dans cette variété des stratagèmes à employer, un charme qui entraîne les hommes forts de corps et d'ame. Plusieurs personnes estimables s'y livrent avec passion. Mais une longue habitude de la chasse aux chamois produit un air sérieux, taciturne et mélancolique; l'aspect continuel des rochers déserts et silencieux donne au caractère quelque chose d'extraordinaire, de romantique et en même temps d'intéressant.

Tolérance et intolérance dans l'Inde.

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M. Forbes, qui, en 1780, étoit administrateur d'une partie du Guzurate et entre autres la ville de Dhuboy. «Cette ville, dit-il dans ses Mémoires, étoit jadis habitée par des brahmines de diverses classes; il en reste encore beaucoup; la plupart passent leur vie dans un état d'inertie sanctifié par leur religion. Assis du matin au soir sous les arbres qui bordent le grand étang, ils méditent sur les institutions du législateur Ménou, ou se plongent dans des rêveries sur les incarnations de Vichenou. Des hommes occupés de méditations aussi sublimes, ne souffrent point que les pauvres Chandales et Pariahs vivent dans la même ville qu'eux; il faut que ces malheureux se retirent à quelque distance dans la campagne. On sait maintenant que les prêtres du brahminisme ne sont pas aussi doux et aussi tolérans qu'on l'a cru. M. Buchanan, en parlant d'une querelle des brahmines de Mysore, raconte que le parti le plus fort fit écraser les prêtres de Jaine dans des moulins à huile, et ne fit grâce qu'à ceux qui abjureroient leurs opinions.

Je fus souvent témoin des pénitences rudes et cruelles que s'imposoient les dévots à Dhuboy; mais du reste les Hindous de cette contrée me retraçoient la simplicité de l'âge patriarcal. N'ayant eu que peu de rapports avec les Européens, ils avoient conservé leurs anciens usages respectés par les Mahométans qui avoient subjugué cette contrée.

Peu de temps après mon arrivée, quelques brahmines vénérables et les principaux de la ville vinrent me prier de ne pas permettre aux Européens de tourmenter les singes ni de tirer sur les pélicans, les grues et les oiseaux aquatiques Ils alléguoient pour motif de leur prière non-seulement le système de la métempsycose, mais aussi l'utilité de ces animaux qui délivroient la ville d'une quantité de bêtes

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