EXCURSION CHARS, BOUCONVILLIERS, NUCOURT ET MAGNY-EN-VEXIN Le 14 Juin 1886 COMPTE RENDU Par M. LOUIS REGNIER MESSIEURS, Les excursions archéologiques, dont un certain nombre de ociétés savantes ont pris la très louable habitude, sont d'une contestable utilité. Non seulement elles apprennent à ceux qui y articipent à mieux connaître leur pays, en même temps qu'elles ettent en relief des églises ou des châteaux curieux perdus au ilieu de la campagne, mais encore elles éclairent souvent les opulations sur la véritable valeur de ces édifices et des objets d'art u'ils renferment, en les engageant à n'y toucher qu'avec un relieux respect. Toutefois, il ne faut pas s'illusionner, les services ue sont appelées à rendre à l'histoire de l'art ces explorations Ommunes ne peuvent être sensibles et durables qu'à la condition d'en conserver le souvenir. Certes, on ne peut demander à chaque excursionniste de rédiger un récit de la promenade à laquelle il a pris part: cet exercice, dont les élèves de l'École des Chartes font l'usage le plus intelligent et le plus profitable, ne saurait être imposé à de simples amateurs. Mais toute excursion, faite le plus souvent et forcément avec rapidité, devrait, selon nous, être suivie d'une relation imprimée, contenant la description suffisamment étendue des monuments visités, accompagnée, autant que possible, de gravures. C'est pour répondre à cette nécessité que vous avez bien voulu, Messieurs, me confier aujourd'hui la tâche de perpétuer dans les Mémoires de la Société Historique de Pontoise et du Vexin le souvenir de l'excursion que vous avez faite, le 14 juin dernier, à Chars, Bouconvilliers, Nucourt et Magny. Je dois ce périlleux honneur à cette circonstance que j'avais déjà réuni quelques notes sur les monuments qu'il s'agit de décrire, notes qu'il m'a suffi de compléter. Néanmoins, vous comprendrez, Messieurs, que je tienne à réclamer ici toute votre indulgence. I L'excursion dont j'ai à vous entretenir devait avoir lieu l'année dernière, mais diverses circonstances, notamment la mort de notre regretté vice-président, M. l'abbé Grimot, en ont alors empêché la réalisation. Elle a été faite seulement le lundi 14 juin 1886, par une belle journée d'été. Elle se composait de MM. Seré-Depoin, président, Joseph Depoin, secrétaire général, Jouarre, trésorier, Agnès, administrateur de la Société ; le comte René de Mas-Latrie, membre de l'Institut, professeur à l'École des Chartes; Charles Fessart, de Paris; le docteur Cesbron, de Marines; Hustin, directeur de Seine-et-Oise Illustré (1); Armand, de Marines; Eugène Lefèvre-Pontalis, bibliothécaire du Comité des travaux historiques; l'abbé Blanquart, curé de Neaufles; Alfred Bellenger, Gabriel de Gossellin, Achille Bernier, caissier à la Banque de France; Lechalard, notaire honoraire à Pontoise; LebeauxBréchot, Gendrot, notaire à Pontoise; Arsène Sarrazin, de Magny; Mallet, docteur en droit, à Pontoise; Le Bret, de Gisors; Henri Lebas, architecte de l'arrondissement de Pontoise; Salles, notaire honoraire à Paris; Toussaint, attaché au Ministère de l'Agriculture; Fouyé, notaire à Marines; Lebaigue, ancien expert-chimiste, à (1) M. Hustin a publié, dans le numéro de Seine-et-Oise Illustré portant la date du 20 juin, un compte rendu de l'excursion. D'autres journaux, notamment l'Echo Pontotsien et le Vexin, en ont aussi parlé. Paris; Fournez, de Saint-Germain-en-Laye; Edgard Joseph, de Neuilly; Léon Plancouard, de Cléry, et Régnier. Quelques dames avaient bien voulu honorer l'excursion de leur gracieuse présence; Mmes Gendrot et Lebeaux, notamment, ne craignirent pas de s'exposer à toutes les fatigues de la journée. Une partie seulement des excursionnistes prirent part aux courses de la matinée, sous la direction de M. J. Depoin. Un second groupe arriva à Magny après le déjeuner, ayant à sa tête M. le Président. Dès l'arrivée à Chars, à huit heures, on se dirigea vers l'église, édifice de transition dont les beautés n'ont pas été assez signalées par les monumentalistes. On ne manqua pas de se livrer à un examen attentif des particularités architectoniques qui lui donnent un grand intérêt. Une ascension dans les tribunes qui pourtournent le chœur et les transepts à mi-hauteur, et une promenade dans le pittoresque jardin du presbytère, dont les portes avaient été obligeamment ouvertes par M. le Curé, permirent de saisir tous les détails intérieurs et extérieurs du monument. En même temps, notre jeune confrère, M. Eugène Lefèvre-Pontalis, dont le nom est déjà synonyme à juste titre d'observation précise et d'archéologie sérieuse, donnait des explications verbales et faisait ressortir surtout l'analogie du chœur de Chars avec celui de la grande église abbatiale de Saint-Germer. Notre collègue se propose de préparer pour vous la monographie de l'église de Chars. Je n'ai donc pas à décrire aujourd'hui cet édifice et je me contenterai de reproduire ici l'analyse très claire qu'il en avait faite lui-même dans le programme-itinéraire qui a été distribué à tous les excursionnistes. L'église de Chars est sans contredit le monument religieux le plus intéressant du xe siècle que possède actuellement le Vexin français. Elle est mentionnée dès l'année 1172 dans une charte octroyée par Thibauld de Gisors à l'abbaye de Saint-Martin de Pontoise pour lui donner la moitié des revenus de l'église. Quelques années plus tard, Geoffroy, abbé de Saint-Martin, concéda ses droits sur l'église de Chars à l'abbaye de Saint-Denis, qui aliéna le patronage de la cure aux seigneurs de Chars à la fin du xvie siècle, comme nous l'apprend Félibien. L'église de Chars fut remaniée successivement au xye et au xvie siècle. En 1869, elle a été l'objet de travaux de restauration assez importants. « Le plan de cet édifice comprend une nef flanquée de deux bas-côtés, un transept et un choeur entouré d'un déambulatoire. La nef, dont les piliers sont formés d'un faisceau de colonnettes, est recouverte de voûtes sur croisée d'ogives, ornées de clefs très originales. Ses grands arcs et ses doubleaux, garnis de nombreuses moulures, sont en tiers-point, tandis que toutes ses fenêtres ont |