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TRADUCTION

Nous nous avançons avec le désir de voir l'église de Saint-Denis, qui mérite d'être visitée, par le temps le plus rigoureux. La physionomie de la ville ne charme certes pas le spectateur, car elle n'est ni bien bâtie ni heureusement située. Elle doit entièrement sa célébrité au temple du saint évêque, qui est le patron de la France. Poussé un jour par l'ardeur de sa foi, Denis apparut en ce lieu accompagné d'une troupe fidèle. Il arracha un peuple aux horreurs de l'enfer, en amenant les cœurs des barbares au vrai Dieu. L'ingrat Fescennius (1) ne supporta pas le renversement des autels, ni le vide fait autour de ses temples. Il lui fit trancher la tête, car ni les traits, ni le feu, ni sa terrible fureur n'avaient servi de rien contre lui. Du côté où Lutèce est exposée aux vents du nord s'élève une montagne qui domine majestueusement la ville (2). C'est là que le prêtre, dit-on, fut exposé pour être frappé de la hache avec ses compagnons. La tête avait été détachée du tronc, et, chose merveilleuse! Denis la prit dans ses mains. Il ne s'arrêta qu'après avoir marché pendant deux milles, puis il déposa son fardeau, témoignage de sa belle mort. Cet endroit, ainsi désigné, lui fut donné pour tombeau par une dame nommée Catulla, aussi noble par sa foi que par sa famille (3). De là vint le nom de villa Cattulliaca, mais c'est la piété des habitants qui donna naissance à la ville. Si une si belle église, dédiée au patron du lieu, s'élève en cet endroit, c'est à toi, ô Dagobert, roi des Français, qu'il faut en rapporter l'honneur et la gloire (4). Ce qui fait valoir les mérites de ce temple, ce sont les tombeaux que renferme depuis longtemps, comme un trésor, cette sainte maison. Les reliques du roi Louis sont renfermées dans de l'or (5) et une urne contient la tête de l'évêque Hilaire (6). On y vénère un clou que le Christ, en mourant, a baigné de son sang et

(1) Fescennius ou Fescenninus était alors gouverneur en Gaule.

(2) La colline de Montmartre.

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(3) Cette dame (accompagnée d'une infinité de multitude d'anges que l'on entendait chanter Gloire te soit, ò Seigneur !» adioustant souventes fois alleluya ainsi enuironnée d'une grande lumière) lequel elle reçut ensemble le précieux corps, et le ayant deuestée de sa sacrée tunique, chausses et autres siens habits, lui donna sépulture et après l'avoir enseully, et laissa le tout pour servir à la postérité de mémoire et saintes reliques, fit peu après ériger un tombeau. » Doublet, Histoire de l'abbaye de Saint-Denis, page 95.

(4) On sait que Dagobert Ier a fait entièrement reconstruire la basilique.

(5) Voir Millet, le Trésor sacré de Saint-Denis, page 105, et Félibien, Histoire de l'abbaye de Saint-Denis, page 540.

(6) Voir Millet, page 97, Félibien, page 538.

que la mer a lavé de son eau (1). Nous avons vu un morceau de ce tronc d'arbre sacré où a été suspendu le doux fardeau du Dieu fait homme (2). Nous avons vu le sang qui est sorti du cœur lorsque son flanc a été percé de la lance d'un soldat cruel (3). On y conserve dans une châsse la lanterne avec laquelle l'orgueilleux Juif (4) est venu prendre Dieu au milieu de la nuit (5). On y trouve aussi le doigt avec lequel Thomas, entouré par les apôtres (6), toucha le vrai corps de son maître. On y voit également un vase en cristal taillé qui faisait partie des trésors du roi Salomon (7). Le temple possède une coupe étincelante de pierres précieuses et dont l'éclat est rehaussé par différents fragments de pierres (8). Des rois de France ont placé un diadème, une couronne sous ces voûtes augustes (9). Il y a des épées qui ne sont pas remarquables au point de vue de l'art, mais elles ont servi à augmenter partout la foi des Chrétiens. Il y a entre autres le bouclier avec lequel Turpin a mis en fuite les étendards sarrazins, lorsque le Maure farouche possédait l'Espagne (10). On y voit l'épée que portait un saint roi qui dans les champs de la Syrie se teignait du sang des infidèles (11). On y voit l'épée de la vierge d'Orléans, qui repoussa les Anglais vainqueurs (12); le salut des Français est dû au courage d'une femme. Il reste aussi un souvenir du fameux Roland, c'est le cor d'ivoire qu'il a fait souvent retentir (13). Si le miroir de Virgile pouvait nous reproduire ses traits, nous aurions aussi dans ce temple l'image du poète (14). Une corne de neuf pieds de long sert, dit-on, de remède aux personnes qui ont absorbé un violent poison (15). Que citer

(1) Voir Millet, page 86, Félibien, page 537. Je ne puis me rendre compte à quel fait Rombise fait allusion lorsqu'il écrit: quem mare lavil aqua.

(2) Voir Millet, page 85, Félibien, page 536.

(3) Voir Millet, page 103, Félibien, page 538. (4) L'orgueilleux Juif désigne ici Judas.

(5) Voir Millet, page 126.

(6) Voir Millet, page 95, Félibien, page 540.

(7) Voir Millet, page 120.

(8) Voir Millet, page 122, Félibien, page 544

(9) Voir Millet, page 131, Félibien, pages 538, 541.

(10) Voir Millet, page 127.

(11) Saint-Louis. Voir Millet, page 135, Félibien, page 541. (12) Voir Millet, page 126.

(13) Voir Millet, page 126.

(14) Voici en quels termes Millet, page 126, parle de ce miroir : Le miroir du prince des poètes Virgile, qui est de jayet. On sait qu'une légende a attribué à Virgile une réputation de magicien. On montrait à Florence, en même temps qu'à Saint-Denis, un miroir qui, disait-on, était celui dont se servait le poète pour ses opérations de nécro

mancie.

(15) Voir Millet, page 125. Millet dit qu'elle avait six pieds et demi. Il ne parle pas

de ses vertus curatives.

parmi tant de merveilles préférables à l'or? un avare oserait à peine souhaiter de pareilles richesses. Une perle plus précieuse que l'or, enchâssée dans des topazes, brille des mille feux du diamant. Mais ce temple renferme les sépultures des souverains du monde et apprennent assez que les rois, eux aussi, appartiennent à la mort. Ils sont tous rangés en ordre à la suite les uns des autres, et nul trésor n'aurait pu les arracher à un si grand mal. Après des alternatives de paix et de guerre, et accablés par les années, ils sont venus rendre à la terre la terre dont ils étaient formés. Et quelque puissants qu'aient été les peuples qu'ils ont gouvernés, ils n'ont qu'un nom inscrit parmi les autres. Pour passer sous silence les autres choses qui se trouvent dans le temple, je dirai qu'on y trouve tout ce que la France a de rare.

Nous quittons la ville pleins de joie, au moment où le doux printemps avait fait sa réapparition, et nous nous préparons surle-champ à suivre une nouvelle route. Nous désirons arriver aux frontières extrêmes de la France, là où règne au fond d'un golfe la déesse de la mer. Nous partons à cheval et nous nous dirigeons sans retard vers les régions où la Seine, s'élargissant, jette ses eaux à la mer. Le fleuve fait des détours et forme de nombreuses sinuosités; trois fois nous avons dû le franchir en bateau (1). Tout près se trouve une petite ville qui ne brille par aucun faste, mais elle est célèbre parce qu'elle possède la tunique du Christ (2). Sur les bords de l'Oise (3) se trouvent des collines où le vigneron travaille et cultive la terre. Là s'élève Pontoise, limite de l'île de France, sa rivière, quoique petite, sépare deux pays.

(1) Je ne m'explique pas bien que Rombise ait pu, de Saint-Denis, traverser trois fois la Seine pour aller à Argenteuil. Ou il est rentré à Paris pour suivre la route qui, suivant le pont de Neuilly, retraverse de nouveau la Seine à Argenteuil, ou il entend parler de l'ensemble de son voyage et des différentes traversées qu'il a dû faire de Paris à Rouen.

(2) Argenteuil.

(3) Nulle part ailleurs je n'ai vu l'Oise désignée sous le nom d'Amasis. Rombise a probablement forgé le mot.

LE VEXIN

AVANT LES VELLOCASSES

Études et découvertes d'archéologie préhistorique

Par M. GUSTAVE DUMOUTIER

LIAURÉ, sur la rive gauche de la Troesne, entre Gomerfontaine et Trie-Château, près Gisors, est un ancien rendez-vous de chasse admirablement situé, bâti en 1617 par le duc Henry de Longueville, prince de Neufchâtel, etc., filleul de Henri IV, celui qui épousa en secondes noces, en 1642, la sœur du grand Condé.

Après avoir subi des fortunes diverses, après avoir été successivement affecté à l'usage de ferme, abandonné et sur le point de tomber en ruines, ce vestige intéressant de l'histoire seigneuriale de Trie vient récemment d'être restauré et rendu à sa destination primitive.

C'est à ce fait que nous devons d'avoir songé à nous fixer dans la contrée pendant ces dernières vacances (1885). M. Edmond Laubière, qui vient de ressusciter Iliauré, est de nos amis, et c'est une partie de villégiature qui a été le point de départ des découvertes qui feront le sujet de cette étude.

A une portée de fusil environ du mur de clôture de ce domaine,

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