Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

de sa vie ; mais depuis que Moreto fut entré dans l'état ecclésiastique, il ne travailla plus pour le théâtre. Il avait plus de gaîté que Calderon, et ses intrigues donnent lieu à des situations plus plaisantes; il a aussi essayé plus souvent de peindre des caractères, et de donner à ses comédies cet intérêt d'observation et de vérité qui manque si généralement au théâtre espagnol. Quelques-unes de ses pièces ont passé au théâtre français, dans le temps où tous nos auteurs empruntaient de l'Espagne. La plus connue du peuple, parce qu'on l'a destinée long-temps au spectacle du mardi-gras, est don Japhet d'Arménie, de Scarron, traduite presque littéralement del Marques del Cigarral; mais.cette pièce n'est point parmi les meilleures de Moreto. Il y a des caractères bien plus heureusement tracés, bien plus de gaîté dans l'intrigue, bien plus d'invention, et un dialogue plus spirituel dans sa comédie intitulée No puede ser (Cela ne peut être), où une femme d'esprit, aimée par un jaloux, se propose, avant de l'épouser, de le convaincre qu'il est impossible de garder une femme, et qu'il n'y a de sûreté pour lui qu'en s'en remettant à sa bonne foi. La leçon est sévère, car elle assiste dans une intrigue amoureuse la soeur de son amant, qu'il tenait enfermée et qu'il surveillait avec une extrême défiance. Elle ménage ses entrevues avec

un jeune homme; elle aide la soeur à s'échapper de la maison de son frère, et à se marier sans son consentement, et lorsqu'elle a joui de la confusion de celui-ci, lorsqu'elle lui a bien fait voir que, malgré toute sa finesse, toute sa défiance, il a été grossièrement pris pour dupe, elle consent à lui donner elle-même la main : l'intrigue, au reste, est conduite avec assez de naturel et beaucoup plus d'originalité encore. Elle donne lieu à des scènes très-divertissantes, et dont Molière a profité dans son Ecole des Maris.

C'est une pièce à peu près du même genre que celle de don Fernando de Zarate, intitulée la Presumida y la Hermosa (la Pédante présomptueuse et la Belle). On y trouvé de même quelques traits de caractère joints à une intrigue fort plaisante. Il y avait encore en Espagne quelques hommes de goût qui tournaient en ridicule le phoebus dont Gongora avait été l'inventeur. Zarate, en donnant à Léonor un langage culto ou précieux, mais qui ne diffère guère de celui de Gongora, et souvent même de Calderon, s'efforce cependant de faire sentir combien il est absurde, et son Gracioso se récrie sur l'outrage qu'on fait ainsi à la pauvre langue castillane (1). Les deux soeurs Léonor et Vio

(1) Léonor est, avec sa soeur, en présence d'un cheva

lante ont, dans cette pièce, à peu près le même caractère qu'Armandé et Henriette dans les Fem

lier qu'elles aiment toutes deux, et elle veut le faire décider entre elles.

LEONOR.

JUAN.

CHOCOL.

[blocks in formation]

Porque quando se levanta
De la cuna de la aurora
La Delfica luz, es clara
Consecuencia visual

!! Que el Alva, nevado mapa,'
Cadaver de cristal, muera
En monumentos de plata :
Y assi en crepusculos rizos
Donde se angelan las claras
Pavesas del sol, es fuerza
Que el sol brille, y fine el Alva.
Señora, vos sois el astro

Que dà el fulgor à Diana;
Y violante es el candor
Que se deriva del aura.
Y si el candor matutino
Cede la nautica braza
Al zodiaco austral,
Palustre serà la parça,
Avassallando las dos
A las rafagas del Alva.

Viva Christo; somos Indios,
Pues de esta suerte se habla
Entre Christianos? Por vida
De la lengua castellana

Que si mi hermana habla culto
Que me oculte de mi hermana,

Al inculto barbarismo,

à las lagunas de Parla,

[ocr errors]

mes savantes; mais les Espagnols ne cherchaient point à faire naître l'intrigue des caractères. Ceux qu'ils tracent sont toujours des hors d'œuvres; ils influent à peine sur les événemens: la pédante trouve un amoureux tout aussi aimable, tout aussi noble, tout aussi riche que la belle naïve; son ridicule n'ajoute ou ne diminue rien à ses chances de bonheur; un stratagème, un déguisement hardi, imaginé et exécuté par un valet fripon, fait le sort de tous les personnages; et quelle que soit la vivacité de l'intrigue, cette pièce ne sort point de la classe commune des comédies espagnoles.

Un des auteurs comiques qui jouissaient de plus de réputation au milieu du dix-septième siècle, était don Francisco de Roxas, chevalier de Saint-Jacques, dont on trouve un grand nombre de pièces dans les anciens recueils de comédies espagnoles, et dont le Théâtre français a emprunté quelques drames, entre autres le Venceslas de Rotrou et don Bertran de Cigarral, de Thomas Corneille. Cette dernière pièce est traduite de celle intitulée, Entre bobos anda el

O à la Nefritica idea;

Y si algun critico trata
Morir en pecado oculto,
Dios le conceda su habla
Para que confiesse a voces
Que es castellana su alma.

juego (l'Intrigue est parmi les sots), qui passe pour la meilleure que Roxas ait écrite. Mais d'autre part, j'ai vu de lui une comédie religieuse, intitulée la Patrone de Madrid, NotreDame d'Atocha, qu'il a écrite en vieux langage, apparemment pour lui donner quelque chose de plus respectable, et qui réunit toutes les extravagances, toute la morale monstrueuse que nous avons déjà relevées dans les pièces religieuses de Calderon.

Les critiques espagnols et allemands comptent parmi les meilleures comédies de ce théâtre, le Châtiment de l'avarice (el Castigo de la miseria) de don Juan de Hoz. Cette pièce, très-plaisante en effet, met toujours plus en évidence le vice radical du théâtre espagnol; la complication de l'intrigue détruit entièrement l'effet de la peinture des caractères. C'est en vain que Juan de Hoz a dessiné en caricature son avare Marcos; le stratagème par lequel dona Isidore se fait épouser de lui, détourne tellement l'attention, que l'avarice du protagoniste n'est plus le trait frappant du tableau. D'ailleurs, il y a une sorte d'impudence à donner à une comédie, un titre qui annonce un but moral, lorsqu'elle doit se terminer par le triomphe des fripons, et par une absence scandaleuse de toute probité dans les personnages mêmes qui passent pour honnêtes.

« VorigeDoorgaan »