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grâce voluptueuse du dernier, il a orné sa poésie d'une délicatesse morale, à laquelle Villegas était loin de prétendre. Les plaisirs, les peines, les jeux de l'amour à la campagne, les fêtes, l'aisance et la douce vie des champs, sont les sujets que Melendez s'est plû à chanter. Son talent pittoresque le caractérise pour un Espagnol, mais le tour de ses pensées indiquerait un Anglais ou un Allemand. Quelques idylles de lui ont toute la grâce de Gessner, avec l'harmonie du beau langage du Midi. J'en rapporterai en note, d'après Boutterwek, deux exemples, et ce sont les derniers morceaux de poésie espagnole que je présenterai (1).

(1) Voici une idylle de Melendez.

Siendo yo niño tierno,

Con la niña Dorila,
Me andaba por la selva
Cogiendo florecillas,
De que alegres guirnaldas
Con gracia peregrina
Para ambos coronarnos

Su mano disponia.

Así en niñeces tales
De juegos y delicias
Pasábamos felices
Las horas y los dias.
Con ellos poco á poco
La edad corrió de prisa,
Y fué de la inocencia

Saltando la malicia.

Yo no sé; mas al verme

Ici nous terminons le compte que nous nous étions proposé de rendre de la littérature espa

Dorila se reia,

Y á mi, de solo hablarla
Tambien me daba risa.
Luego al darle las flores
El pecho me latia,
Y al ella coronarme
Quedabase embebida.
Una tarde tras esto
Vimos dos tortolillas
Que con tremulos picos
Se halagaban amigas.
Alentónos su exemplo,
Y entre honestas caricias,
Nos contamos turbados
Nuestras dulces fatigas.

Y en un punto, qual sombra
Voló de nuestra vista

La niñez; mas en torno

Nos dió el amor sus dichas.

Voici aussi un sonnet du même Melendez.

Qual suele abeja inquieta revolando
Por florido pensil, entre mil rosas,
Hasta venir a hallar las mas hermosas
Andar con dulce trompa susurrando.
Mas luego que las vé, con vuelo blando
Baxa, y bate las alas vagarosas,
Y en medio de sus venas olorosas
El delicado aroma está gozando.
Asi, mi bien, el pensamiento mio,
Con dichosa zozobra, por hallarte
Vagaba de amor libre, por el suelo.
Pero te ví, rendíme, y mi albedrio
Abrazado en tu luz, goza al mirarte
Gracias, que envidia de tu rostro el cielo.

gnole, et nous le sentons avec regret, les brillantes illusions que des noms illustres et des moeurs chevaleresques avaient d'abord excitées en nous, se sont successivement évanouies. Le poëme du Cid s'est présenté le premier parmi les ouvrages espagnols, comme le Cid parmi les héros de l'Espagne, et après lui nous n'avons rien trouvé qui égalât ni l'auguste simplicité et l'héroïsme de son vrai caractère, ni le charme des brillantes fictions dont il a été l'objet. Tout ce qui est venu ensuite, n'a jamais pu obtenir de nous une admiration sans réserve. Au milieu des jeux si animés de l'imagination espagnole, notre goût a été sans cesse blessé par l'enflure et la prétention, ou, notre raison rebutée par un travers d'esprit qui arrive souvent jusqu'à l'extravagance; nous ne pouvons jamais nous expliquer à nous-mêmes comment tant d'imagination peut s'allier avec un goût si bizarre, et tant d'élévation dans l'âme avec une recherche si éloignée de la vérité. Nous avons vu les Italiens tomber de même dans la recherche et le mauvais goût, mais nous les avons vus s'en relever avec gloire, et le siècle qui a produit Métastase, Goldoni et Alfieri, peut, si ce n'est s'égaler à celui de l'Arioste et du Tasse, du moins soutenir sans humiliation la comparaison. Mais les faibles efforts de Luzan, de la Huerta, d'Yriarte et de Melendez, nous font sentir da

vantage au contraire combien est tombée la nation dont ils forment, pendant tout un siècle, la seule richesse poétique. L'inspiration antique a fini, et la culture moderne a été trop imparfaite, trop restreinte, pour suppléer aux richesses que le génie ne donnait plus. Les Italiens ont eu trois siècles littéraires, divisés par deux longs intervalles de repos : celui de la vigueur antique, où le Dante semblait puiser son inspiration dans la force et la plénitude de ses sentimens ; celui de l'imagination classique, où l'étude des anciens avait renouvelé les richesses de l'Arioste et du Tasse; celui enfin de la raison et de l'esprit appliqués aux arts, où l'élévation des pensées et la mâle éloquence d'Alfieri, comme la finesse d'observation de Goldoni, suppléent aux trésors d'une imagination qui commence à s'épuiser. Mais la littérature espagnole n'a proprement qu'une seule période, c'est celle de la chevalerie; toute sa richesse est dans la loyauté et la franchise antiques; son imagination n'est fertile qu'autant qu'elle est ignorante; elle crée sans relâche des prodiges, des aventures et des intrigues, pourvu qu'elle ne se sente point gênée par les bornes du possible et du vraisemblable. La littérature espagnole brille de tout son éclat dans les anciennes romances castillanes; tout le fonds de sentimens, d'idées, d'images et d'aventures,

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dont elle a disposé dans la suite, se trouve déjà dans cet ancien trésor. Boscan et Garcilaso lui donnèrent bien une nouvelle forme, mais non pas une nouvelle sève et une nouvelle vie; les mêmes pensées, les mêmes sentimens romantiques, se retrouvèrent dans ces deux poètes et dans leur école, seulement avec une parure nouvelle et une coupe presque italienne. Le théâtre espagnol commença, et pour la troisième fois ce fonds primitif d'aventures, d'images et de sentimens, fut mis en œuvre sous une nouvelle forme. Lope de Vega et Calderon produisirent sur la scène les sujets des anciennes romances, et firent reparaître dans le dialogue dramatique ce qui depuis long-temps se trouvait dans les chants nationaux. Ainsi, sous une apparente variété, les Espagnols se sont lassés de leur monotonie. La richesse de leurs images et tout le brillant de leur poésie, ne recouvraient qu'une pauvreté réelle; si l'esprit avait été nourri comme il doit l'être, si la pensée avait été libre, les classiques espagnols seraient enfin sortis de leur sentier circulaire, et ils auraient marché dans le même sens que les autres nations.

Cependant ce fonds d'images et d'aventures que les Espagnols ont tant travaillé, est celui même auquel on a donné, de nos jours, le nom de romantique. Ce sont les sentimens, les opinions, les vertus et les préjugés du moyen

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