Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub
[ocr errors]

le

partagé ses diverses régions; les habitans des glaces de la Scandinavie, qui ont la gloire non disputée d'avoir les premiers vaincu les Romains; les Allemands, les Polonais, les Russes, qui ont succédé aux Germains et aux Scythes; les Thraces soumis au joug ottoman; et les habitans de ces pays fameux pour les mœurs, génie, le courage; ces pays où l'on voyait naître des cœurs éloquens, des esprits animés par l'imagination la plus vive, qui par les armes et les lettres en même temps portèrent jusqu'aux cieux la gloire de la Grèce. Il peint ensuite les Italiens, autrefois si puissans dans les armes, dont toute la gloire se réduit aujourd'hui à être soumis au portier du Christ; les Gaulois, dont la célébrité date des triomphes de César; enfin il arrive aux monts Pyrénées : « De là, dit-il, on découvre la noble Espagne, >> elle est comme la tête de toute l'Europe; déjà >> son empire et sa gloire ont été soumis à plusieurs >> reprises aux révolutions de la roue fatalę ; » mais jamais la fortune inconstante ne pourra » accumuler sur elle des dangers qu'elle ne sur» monte par l'effort et le courage des cœurs >> belliqueux qu'elle nourrit. Le détroit, der» nier travail du vaillant Thébain, la sépare » de la Mauritanie Tingitane, où se termine la » Méditerranée : elle enferme en son sein des » nations diverses qu'entourent les ondes de

» l'Océan ; toutes le disputent les unes aux au>> tres en noblesse et en vaillance, et l'on ne >> saurait entre elles assigner le premier rang ». Après avoir caractérisé les autres peuples d'Espagne, il ajoute : « C'est là enfin qu'est placé le >> royaume de Lusitanie, comme une couronne » sur la tête de toute l'Europe; c'est là que la » terre finit, que la mer commence, et que >> Phoebus se repose dans l'Océan. Le ciel juste » a voulu que ce pays fleurît dans les armes » contre le Maure voluptueux qu'il a chassé de >> son sein, et qu'il force à demeurer tran» quille, mais jamais content, sur le rivage ar» dent de l'Afrique. C'est là qu'est mon heu>> reuse et chère patrie. Si le ciel permet que >> j'échappe à tant de dangers, et que j'y re>> tourne après avoir achevé cette entreprise, » je me tiendrai heureux de terminer ma vie >> au moment où j'entrerai dans le port ». Gama raconte ensuite quels furent les commencemens du royaume de Portugal, et son récit doit avoir plus d'intérêt pour nous que pour le roi de Mélinde. Il revêt de formes poétiques l'histoire de sa patrie, il met en évidence tout ce qui élève ou entraîne l'âme par de grandes vertus ou de grandes douleurs. Cependant il faut moins chercher dans la Lusiade l'intérêt romanesque, que celui de l'instruction. Le Camoëns a voulu rassembler, dans un poëme épique,

TOME IV.

23

tout ce que l'histoire contenait de glorieux pour sa patrie, il a voulu illustrer son sujet par le charme des vers, plutôt qu'il n'a pu espérer que son sujet illustrât son poëme; il a gravé les fastes nationaux dans la mémoire des hommes, mais il n'a pu faire qu'ils fussent autre chose que des fastes nationaux. Le récit de Gama sera pour nous-mêmes comme un court exposé de l'Histoire du Portugal.

Lorsque le roi Alphonse vi de Castille eut, par la conquête de Tolède, attiré de toutes les parties du monde des aventuriers, qui consacraient à Dieu leur épée, et qu'il eût étendu sa domination jusqu'aux rives de l'Océan occidental, il résolut de récompenser ces valeureux chevaliers en leur abandonnant le gouvernement de leurs conquêtes; et il fit choix pour être leur chef d'un Henri, que le Camoëns donne pour second fils au roi de Hongrie, quoiqu'il fût issu de Robert-le-vieux, petit-fils de Hugues Capet, et fondateur de la première maison de Bourgogne. Alphonse vi créa ce Henri, comte de Portugal, il lui céda une partie des terres de cette contrée, et lui donna en mariage sa fille Thérèse. Henri, laissé à ses seules forces, étendit sa domination sur de nouvelles provinces qu'il enleva aux ennemis de la foi.

Henri en mourant, chargé de gloire autant

que d'années, comptait laisser le trône à son fils Alphonse. Mais Thérèse passa à un second mariage; elle prétendit que le Portugal était la dot que son père lui avait donnée, qu'il lui appartenait à ce titre, et elle exclut son fils de toute part à la succession. Alphonse ne voulut point se soumettre à cette exclusion; les Portugais, impatiens de secouer toute dépendance de la Castille, embrassèrent sa cause avec ardeur; les armées ennemies se rencontrèrent dans la plaine de Guimaraëns, et pour la première fois, en 1128, le sang portugais coula dans une guerre civile. Alphonse fer remporta la victoire; sa mère et son beau-père tombèrent entre ses mains, et toutes leurs forteresses lui ouvrirent leurs portes. Mais, aveuglé par la colère, il fit charger sa mère de fers, et il attira ainsi sur lui la vengeance divine et celle des Castillans. Ceux-ci vinrent l'assiéger dans Guimaraëns avec des forces innombrables. Alphonse, hors d'état de résister, fut obligé de promettre l'obéissance, et de donner pour garant de l'observation de sa promesse, la parole du chevalier portugais qui l'avait élevé, Egaz Moniz, le même qu'on célèbre comme le plus ancien poète du Portugal. Cependant, aussitôt que le danger fut écarté, Alphonse ne put se résoudre à se soumettre à un pouvoir étranger, et à payer le tribut qu'il avait promis. Egaz

[ocr errors]

Moniz ne voulut point ou demeurer garant d'un parjure, ou pour sauver sa vie, contribuer à soumettre sa patrie à un joug étranger (1). « Il >> part avec ses fils et sa femme pour se déga»ger avec eux de sa garantie. Déchaussés et » sans ornemens ils se présentent de ma>> nière à exciter la pitié bien plus que la ven

(1) Cant. III, Strop. 38.

E com seus filhos e mulher se parte
A levantar com elles a fiança;
Descalços e despidos, de tal arte

Que mais move a piedade que a vingança.
Se pretendes rei alto, de vingarte
Da minha temeraria confiança,
Dizia, eis aqui, venho offerecido,
A te pagar co a vida o promettido.

Ves aqui, trago as vidas innocentes
Dos filhos sem pecado, e da consorte;
Se a peitos generosos, e excellentes
Dos fracos satisfaz a fera morte.
Ves aqui as mãos e a lingua delinquentes;
Nellas sós exprimenta toda a sorte
De tormentos, de mortes, pelo estilo
De Scinis, e do touro de Perilo.

Qual diante do algoz o condemnado

Que ja na vida a morte tem bebido,
Põe no cepo a garganta, e já entregado

Espera pelo golpe tao temido;

Tal diante do principe indignado
Egas estava a tudo offerecido.

Mas o rey vendo a estranha lealdade,

Mais pode em fim que a ira a piedade.

« VorigeDoorgaan »