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» dités toutes mortelles, le désir d'usurper l'un » à l'autre ce qui est de chacun, la folie de cha» cun de ne se contenter jamais de ce qu'il » possède, firent de nouveau reprendre les » armes au Portugal et à la Castille (1155) >> pendant le règne de l'empereur don Alonzo. >> La discorde produisait des ravages, et ceux-ci » accroissaient la discorde; celui qui, sans autre >> fruit, avait l'avantage, en faisant du mal, de» meurait si satisfait, qu'il oubliait les pertes >> qu'il avait souffertes pour celles qu'il avait >> causées; on appelait victoire, produire un mal » sans en recueillir aucun bien; le sang inon» dait, le feu dévorait les villages des deux na>tions, et ils gardaient moins le souvenir d'a>> voir souffert tant de ruines, que celui de les >> avoir infligées ». Peut-être en détachant ainsi quelques phrases, n'y trouvera-t-on que de l'esprit et de la hardiesse de style; mais quand trois volumes in-folio sont écrits de cette manière, on est accablé par la recherche et l'antithèse, et l'on reconnaît dans cet abus de l'esprit, l'avant-coureur certain de son anéantissement.

Les autres ouvrages en prose de Faria sont moins distingués; les mêmes défauts s'y trouvent joints à d'autres encore, mais on y mais on y cherche vainement le même éclat. Son Commentaire sur le Camoëns, dans lequel il témoigne une extrême admiration pour ce grand poète, est re

marquable par l'absence complète du sentiment de ce qui fait sa beauté. La pédanterie mythologique, qui trop souvent fut le défaut du Camoëns, est la qualité par laquelle il a brillé aux yeux de Manuel de Faria. Ce commentateur, à son tour, accable le lecteur par tout le fatras d'une érudition inutile; le goût, la justesse, la délicatesse, lui manquent également, et le commentaire n'est précieux que par les notices qu'il contient sur le Camoëns et sur les navigateurs portugais. Le même Faria entreprit d'écrire la vie du Camoëns, d'en faire une églogue, et de composer cette églogue de centons de ce poète même. Il est difficile de trouver un ouvrage plus ennuyeux, plus dépourvu d'intérêt comme de poésie, et qui suppose en même temps un travail plus long et plus puéril. De nombreuses notes indiquent les licences que s'est permises l'auteur de cet ouvrage de marqueterie, en changeant quelquefois une syllabe ou un mot dans le vers qu'il employait ; mais, après tout, il était bien en droit de le faire, car la syllabe, ou le mot qu'il substituait, se trouvaient aussi dans le Camoëns.

Entre un beaucoup plus grand nombre de sonnets qu'il avait composés, Faria n'en a choisi que six cents pour les produire au public; quatre cents sont castillans, et le reste portugais. En général, on y trouve tour à tour les

défauts de Marini, de Lope de Vega, et de Gongora; une prétention, une recherche excessives; de l'enflure, des images forcées, des hyperboles, de la pédanterie. Cependant il y en a un certain nombre qui ne sont point dépourvus de grâce et de sensibilité. Les idées ne sont point assez neuves pour qu'ils méritent d'être traduits, mais j'en rapporterai deux en note, que Boutterwek avait déjà signalés (1).

(1) Ninfas, ninfas do prado, tam fermosas,
Que nelle cada qual mil flores gera,
De que se tece a humana primavera,
Com cores, como bellas, deleitosas;

Bellezas, o bellezas luminosas,
Que sois abono da constante esfera;
Que todas me acudisseys, bem quisera,
Com vossas luzes, e com vossas rosas.

De todas me trazey maes abundantes,
Porque me importa, neste bello dia,
A porta ornar da minha Albania bella.

Mas vós, de vosso culto vigilantes,
O adorno me negays, que eu pretendia,
Porque bellas nam soys diante della.

Sempre que torno a ver o bello prado
Onde, primeira vez, a soberana
Divindade encontrey, con forma humana,
On humano esplendor deificado:

E me acordo do talhe delicado,
Do riso donde ambrosia e nectar mana,
Da fala, que då vida quando engana,
Da branca maõ, e do cristal rosado.

Dans ses églogues et dans son discours sur la poésie pastorale, Manuel de Faria y Souza a voulu prouver, par des exemples et des raisonnemens, que toutes les passions, toutes les occupations des hommes, ne devenaient poétiques qu'autant qu'on leur donnait la forme pastorale. Il classe lui-même ses bucoliques de la manière suivante des églogues amoureuses, chasseuses, maritimes, rustiques, funèbres, judiciaires, monastiques, critiques, généalogiques et fantastiques. On peut juger ce que devenait la poésie des idylles, avec de tels travestissemens.

Après Manuel de Faria y Souza, le premier rang appartient peut-être, parmi les poètes portugais de ce siècle, à Antoine Barbosa Bacellar, né en 1610, mort en 1663, qui, par un goût assez rare chez les gens de lettres, quitta la poésie, où il s'était distingué, pour la jurisprudence. Il publia ses poésies avant d'avoir vingtcinq ans; mais la réputation qu'il acquit au moment de la révolution, par sa défense des droits au trône de la maison de Bragance, lui

Do meneo soave, que fazia

Crer, que de brando zefiro tocada,
A primavera toda se movia,

De novo torno a ver a alma abrazada,

E em desejar sómente aquelle dia,

Vejo a gloria real toda cifrada.

fit abandonner les Muses pour une carrière plus lucrative. Il fut le premier à donner à la poésie portugaise l'espèce d'élégie qui y est désignée par le nom de saudades; ce sont des plaintes et des désirs amoureux exprimés dans la solitude. Notre goût actuel ne peut plus admettre ces monotones plaintes d'amour, et cette répétition éternelle des mêmes sentimens, encore que le langage soit harmonieux, et que les images soient gracieuses et variées. Jacinthe Freire de Andrade, est encore un des meilleurs poètes de cette époque, comme le plus distingué des écrivains en prose; ses poésies sont presque toutes dans le genre burlesque; il tournait en ridicule, avec assez d'esprit et de gaîté, l'enflure et les prétentions des imitateurs de Gongora, de ceux qui croyaient faire de la poésie par la pompe de leur fatigante mythologie et de leurs images gigantesques. Il écrivit dans ce but un petit poëme sur les amours de Polyphème et de Galathée, qu'on pouvait considérer comme une parodie de celui de Gongora; mais le ridicule dont il voulait couvrir cette composition, ne découragea point ses compatriotes: on vit paraître après lui trois ou quatre poëmes de Poly phème, non moins monstrueux que celui qu'il avait parodié.

Andrade a obtenu plus de réputation par sa Vie de don Juan de Castro, quatrième vice-roi

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