Ces observations générales suffisent pour faire apprécier dans leur ensemble les procédés de critique qui ont présidé au travail d'Iriarte, et l'utilité des recherches dans lesquelles M. Gail s'est engagé; l'examen de plusieurs passages corrompus, pour la restitution desquels la voie conjecturale eût été impuissante sans le secours du manuscrit, montrera, mieux que tous les raisonnements, combien il était important de remonter au texte original. Ρ. 444, 14 : Απὸ Ζαρινῆς ἐπὶ τὸ Ζεφύριον ςάδ. ρν'. ἄκρα ἐςὶ ΔΙΚΑΕΙΑ. M. Gail dit en note: Est-ne corrupte pro Sinaía? Conjiciendumne Sinαoía, vel Sinepaia? Ces conjectures sont inutiles; la véritable leçon est ΔΑΣΕΙ͂Α. Ρ. 446, 1 : Κώμην ἔχει ὁρμίζουσαν ὑπ ̓ ΑΤΤΟΙ͂Σ ἀφ ̓ ἐσπερίου ἀνέμοις. M. Gail conjecture : κ. ἔχει· ὁρμίζου ἐπ' ΑΥ̓ΤΗΝ ΤΟΙ͂Σ; vel ὑπὸ ΤΟΙ͂Σ ἀφ' ἑσπέρας ανέμοις, se référant à ce passage, S 35 : Ορμίζου ἐπ ̓ αὐτὴν τοῖς avalev avéμois. Cette correction est en partie justifiée par le manuscrit qui, au lieu de π' άττоïs, donne úπàτоîs, c'est-à-dire úπ' (lis. Éπ') aútηv τοῖς κ. τ. λ. P. 454, 2: Εςι δὲ γεώργιον ΠΛΑΤΥ τοῦ ποταμοῦ. Μ. Gail traduit en paraphrasant: Sunt arra fluvii lata (i. e. alveus latus, vel potius lata arva, quæ fluvium versus declivia sunt?) L'éditeur a expliqué comme il a pu ce yeúpуov пλatú, qui est de l'invention d'Iriarte; ce dernier aurait beaucoup mieux fait de reproduire l'abréviation 1 du manuscrit, qui, au lieu de πλατύ, porte πλ"/, c'est-à-dire πλησίον, et il faut lire γεώργιον ΠΛΗΣΙΟΝ τοῦ ποταμοῦ, près du fleuve est un champ cultive2, γεώργιον, δοὺ νην σάδ. ρί. Απὸ ςαδίων ..... Τραχέα. ςάδ. ζ'. Le chiffre σάδ. ζ' est de l'invention d'Iriarte, qui a confondu ce signe numérique avec celui de la ligne suivante ; il n'y a qu'une fois sad. ' dans le manuscrit, et c'est la mesure du paragraphe suivant : Απὸ Πεζώνης εἰς Πνιγέα ςάδ. ζ'. La phrase précédente s'arrête au mot Τραχέα. 1 Iriarte était bien peu habile à comprendre les abréviations dans les manuscrits; en voici une nouvelle preuve. Dans son catalogue, p. 396, col. 6, il donne ainsi le commencement d'une διάλεξις de Choricius : Ιδωρίωνα λόγος τὸν αὐλητὴν τὸν ἀδελφὸν ἐπιτρέψαντος οἱ οἷς (lege oἷοις) θύμασιν ἐπαντῆ (leg. ἐπαντεῖ) Αλεξάνδρου. Dans le manuscrit, il n'y a ni ἐπαντῆ nἱ ἐπαυτεῖ, mais bien ἐπαυλεῖν écrit en abrégé, c'est-à-dire avec deux petits traits placés transversalement au-dessus du lambda, dont la partie gauche est presque horizontale, comme dans certains manuscrits. Quant à celte dianeis et deux autres discours inédits de Choricius, que j'ai copiés à Madrid, je les ai donnés à M. Boissonade, qui s'occupe de les publier. Il est inutile de supposer que le singulier yewpytov est ici pour le pluriel; c'est ce qu'a fort bien observé M. Letronne dans un cas semblable, Fragments des poëmes géogr. etc. p. 312. Les racines yn et epyov, qui servent à former le mot yewpytov, se retrouvent dans le composé Qiλoyewpybs, Man. gr. n° 2420, pars 2', p. 30: Éσ7αι dè nai Çiλoyewpyós; et dans l'adverbe dyεwpyntes, qui peut être ajouté au Thesaurus, Anonym. ladjectif γεωργήσιμος, labourable, susceptible de culture, dans Strabon, P. 777: Εν μέσῳ δὲ νῆσος εὔδενδρος καὶ γεωργήσιμος. Et, p. 697, χώραν... πλωτὴν ἅμα καὶ γεωργήσιμον οὖσαν. Ρ. 465, 8: Από Αμινσοῦ εἰς τὰς Αμμωνιακὰς πύλας ΕΝΤΟΣ ΚΟΙΛΟΤΑΤΟΥ τοῦ κόλπου. Εt, en note, «ἐντ. Leg. ἐντὸς Iriartus. » Comment M. Gail a-t-il pu adopter aussi facilement la correction d'Iriarte, et comment, d'après les éléments paléographiques de év, n'a-t-il pas reconnu qu'il fallait lire ἐν τῷ et changer κοιλοτάτου en κοιλοτάτῳ ', legon qui se trouve effectivement dans le manuscrit. Ρ. 467, 6 : Απὸ τοῦ Σκοπέλου, κ. τ. λ. ..... Νότῳ τὰ εὐώνυμα μακρὸν διαβάλλῳ, ςάδ. τν'. M. Gail propose μικρὸν διαφυλάσσου et traduit cum Noto (fante) a sinistra procul caveas. M. Longueville corrige διαφυλασσομένῳ. Quoique ce mot, dans le manuscrit, soit presque entièrement effacé, j'ai pu cependant déchiffrer la legon διαραμένῳ. Les Grecs disaient, comme nous, le vent se lève, le vent tombe; dans Homère (Odyss. T, 202): Τῇ τρισκαιδεκάτῃ δ' ΑΝΕΜΟΣ ΠΕΣΕ· τοὶ δ ̓ ἀνάγοντο. Le Thesaurus de MM. Didot cite, sans indiquer l'édition, Anton. 65: Πνεύματος αιρομένου πελαγίου. Ρ. 469, 11 : Απὸ τῆς ἄκρας ἔγγιςα πρὸς τὴν Κύπρον, εἰς πόλιν Καρπασίου νεωτάτου ςάδ. ύ. M. Gail dit, en note: « Fors. οὐριώτατον, ut S. 139;» conjecture confirmée en partie par le manuscrit qui donne εἰς πόλιν Καρπάσια οὐριώτατα. Η faut lire Καρπασίαν ου Καρπασείαν, car les deux formes étaient également usitées, voy. Steph. Byz. s. h. v. Quant à oùριώτατα, c'est une expression familière à l'auteur. Outre le passage indiqué par M. Gail, voyez aussi p. 485, 1. Ρ. 471, 4 : Απὸ τοῦ Ζεφυρίου ἐπ' ἄκραν καὶ πόλιν Αφροδισιάδα, ςάδ. μ'. Απὸ δὲ τῆς Σαρπηδονίας ἄκρας εἰς Αφροδισιάδα ὁ πλοῦς ἐπὶ τὴν κα...... δέθιν, ςάδ. ρκ'. Locus fedatus dit en note M. Gail. Ce passage est presque illisible, tant l'écriture est effacée, je suis cependant parvenu à le in Cantic. Man. gr. 371, A, fol. 3o, ν°. Μυστικὸς εἶ, Θεοτόκε, παράδεισος, ἀγεωργήτως βλαστήσασα Χριστόν. On ne trouve dans le Thesaurus de MM. Didot aucun exemple du superlatif κοιλότατος. J'en citerai d'autres: Olympiod. in Meteorolog. lib. II, πραξις κ', fol. 31, r. Εσται γὰρ τὸ ΚΟΙΛΟΤΑΤΟΝ ἡ ῥήσις (leg. ῥύσις) καὶ ἡ Θάλαττα τοῦτον ἐπέχει τῆς γῆς τόπον. Τὸ δ' ἐπιχείρημα τὸ λέγον· ὅτι ἐν τῷ ΚΟΙΛΟΤάΤΩ τῆς γῆς ἐστὶν ἡ θάλασσα· διὸ αὕτη ὑπάρχει ὁλότης· ἐπειδὴ, τὸ πάντων χαρακτηριστικὸν τοῦ ὕδατος, τουτέστι τὸ διώκειν τὸν ΚΟΙΛΟΤΑΤΟΝ τῆς γῆς τόπον ἐπέχει. Voyez encore πραξις κά, fol. 33, ro. La forme comparative κοιλότερος manque aussi dans le Thesaurus de MM. Didot; elle a été employee par Strabon (p. 693) : Εκλιπόντος τοῦ Ινδοῦ τὸ οἰκεῖον ῥεῖθρον, ἐκτραπομένου δ' εἰς τὸ ἕτερον ἐν ἀριστερᾷ ΚΟΙΛΟΤΕΡΟΝ πολύ. déchiffrer et j'ai lu ént τǹv naxeívov dúow, qui est, sans aucun doute, la véritable leçon. D'après tous ces détails, on voit combien il était nécessaire d'entreprendre une nouvelle collation du manuscrit de Madrid. Grâce à ce travail, le texte du Stadiasmus se trouve considérablement amélioré. On voit, en effet, disparaître à peu près trente fautes d'orthographe portant sur les noms propres, vingt-cinq erreurs de chiffres, trente-cinq fautes de langage, dont quelques-unes avaient été devinées par M. Gail; la collation a fourni, en outre, sept restitutions certaines, que la voie conjecturale n'aurait peut-être jamais trouvées. Sans parler des avantages qu'un futur éditeur pourrait tirer de mes notions générales sur le manuscrit, de pareils résultats sont positifs et méritaient d'être signalés au monde savant. En répondant à l'appel de M. Letronne, j'ai voulu rendre service aux sciences géographiques et signaler des éléments précieux pour une nouvelle édition du Stadiasmus. E. MILLER. NOUVELLES LITTÉRAIRES. INSTITUT ROYAL DE FRANCE. La séance publique des cinq académies de l'Institut a eu lieu, le jeudi 2 mai, sous la présidence de M. le baron Ch. Dupin, président de l'Académie royale des sciences. Après un discours du président, la commission du prix de linguistique fondé par M. le comte de Volney a proclamé le résultat du concours de 1844 et le sujet du prix à décerner en 1845. La commission avait annoncé, pour le concours de 1844, qu'elle accorderait une médaille d'or de la valeur de 1,200 francs à l'ouvrage de philologie comparée qui lui en paraîtrait le plus digne parmi ceux qui lui seraient adressés. Ce prix a été décerné à M. le docteur Schwartze, auteur d'un ouvrage allemand intitulé: Das alte Egypten oder sprache, etc., c'est-à-dire l'Ancienne Égypte, ou exposé de la langue, de l'histoire et de la religion de l'ancienne Égypte. (Leipzig, 1843, 2 vol. in-4°.) L'Académie a accordé une mention très-honorable à M. Ad. Pictet, professeur à l'Académie de Genève, auteur d'un Mémoire manuscrit sur les origines des noms de nombre dans la famille des langues indo-européennes, et une seconde mention honorable à M. Eichhoff, professeur à la faculté de Lyon, pour son Essai sur les langues slaves comparées entre elles et au sanscrit, ouvrage manuscrit. La commission annonce qu'elle décernera, pour le concours de 1845, une médaille d'or de la valeur de 1,200 francs à l'ouvrage de philologie comparée qui lui en paraîtra le plus digne parmi les ouvrages, tant imprimés que manuscrits, qui seront adressés. Il faudra que les travaux dont il s'agit aient été entrepris à peu près dans les mêmes vues que ceux dont les langues romane et germanique ont été l'objet depuis quelques années. L'analyse comparée de deux idiomes, et celle d'une famille entière de langues, seront également admises au concours, Mais la commission ne peut trop recommander aux concurrents d'envisager, sous le point de vue comparatif et historique, les idiomes qu'ils auront choisis, et de ne pas se borner à l'analyse logique, ou à ce qu'on appelle la grammaire générale. er Les mémoires manuscrits envoyés avant le 1 mars 1845, et les ouvrages imprimés qui seront envoyés avant la même époque, pourvu qu'ils aient été publiés depuis le 1 janvier 1844, seront également admis au concours. La séance a été terminée par la lecture des quatre morceaux suivants : 1° Fragment sur l'étude des vases peints antiques, par M. Lenormant, de l'Académie des inscriptions et belles-lettres; 2° Fragment sur l'histoire philosophique de la littérature française, par M. de Rémusat, de l'Académie des sciences morales et politiques; 3° quelques fables inédites, par M. Viennet, de l'Académie française; 4° fragment de l'article Apelle, destiné au dictionnaire des beaux-arts, par M. Raoul-Rochette, secrétaire perpétuel de l'Académie des beaux-arts. ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES. M. Burnouf père, membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, est mort à Paris le 8 mai, LIVRES NOUVEAUX. FRANCE. ex Diplomata, charte, epistolæ, leges, aliaque instrumenta ad res gallo-francicas spec tantia, prius collecta a VV. CC. de Bréquigny et La Porte du Theil, nunc nova ratione ordinata, plurimumque aucta, jubente ac moderante Academia inscriptionum et humaniorum litterarum, edidit J. M. Pardessus, ejusdem Academiæ sodalis. Tomus primus. Instrumenta ab anno 417 ad annum 627. Lutetiæ Parisiorum, Typographeo regio, 1843, in-folio de 445-230 pages. On sait qu'indépendamment de la Table chronologique des diplômes, dont la première idée remonte à l'année 1746, le gouvernement avait ordonné, en 1762, la publication du texte même des documents qui, n'étant ni des chroniques, ni des biographies, ni des compositions de littérature, sciences ou arts, pouvaient jeter quelque jour sur l'histoire des mœurs de la nation, et qui n'étaient pas de nature à entrer dans la collection des Ordonnances des rois de la troisième race, ni dans celle des Historiens de France. En 1782, 1 Trois volumes de ces tables ont été publiés par de Bréquigny avant la révolution. L'Académie des inscriptions a fait paraître le tome IV en 1837. Le V volume est sous presse. il fut décidé que cette collection serait divisée en deux séries de documents: 1° les 2 |