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d'objets particuliers indivis entre plusieurs copropriétaires, par exemple au partage d'une même chose qui a été léguée en commun à plusieurs légataires (res duobus pariter legata aut donata). Il y a en effet même motif de décider dans tous les cas, eadem est ratio legis. (Pau, 28 février 1887, Sir., 87. 2. 125).

A tout acte équivalant à partage. La cession de droits successifs peut dans certains cas avoir ce caractère; elle le présente très certainement, lorqu'elle fait cesser l'indivision à l'égard de tous les cohéritiers; telle serait la cession faite au profit d'un des cohéritiers par tous les autres. Cette matière donne lieu à des difficultés graves, dans le détail desquelles nous ne pouvons entrer ici.

Enfin le principe s'applique à tous les biens, de quelque nature qu'ils soient, compris dans le partage. Chaque cohéritier sera donc censé avoir succédé seul au défunt pour tous les biens, meubles ou immeubles, corporels ou incorporels, qui ont été mis dans son lot.

329. Toutefois la question est vivement controversée en ce qui concerne les créances héréditaires susceptibles de division. La difficulté vient de l'art. 1220, d'après lequel ces créances se divisent de plein droit entre les héritiers. Ce texte dit en substance que chaque héritier peut, dans la mesure de sa part héréditaire, exiger de chaque débiteur du défunt le paiement de sa dette. On s'est prévalu de cette disposition pour soutenir que, la loi opérant de plein droit le partage des créances héréditaires entre les héritiers, d'après cette ancienne règle de la loi des XII tables: Nomina inter heredes pro portionibus hereditariis ercta cita sunto, les créances héréditaires se trouvent en dehors de la masse à partager; que sans doute les héritiers peuvent, pour faciliter les opérations du partage ou pour ménager leurs convenances réciproques, répartir entre eux les créances héréditaires autrement que ne le fait la loi; mais que cette répartition ne constitue pas un partage, les héritiers n'ayant pas à partager ce qui a déjà été partagé par la loi, et que par suite il ne saurait être question de lui appliquer l'effet déclaratif du partage. Quelle serait donc alors la nature de la convention, en vertu de laquelle les héritiers, dérogeant à la division légale établie par l'art. 1220, auraient mis une créance tout entière dans le lot d'un seul héritier, ou la lui auraient attribuée pour une part plus forte que sa part héréditaire ? Ce serait un transport-cession. Chaque héritier était de plein droit créancier pour sa part héréditaire, en vertu de l'art. 1220; la créance ne peut désormais appartenir à l'un d'eux pour le tout qu'en vertu d'une cession qui lui est consentie par les autres. Il faudrait donc appliquer les règles de la cession de créances, et non celles du partage: ce qui conduirait notamment à décider que l'héritier, auquel a été attribuée la créance, n'en sera saisi à l'égard du débiteur et des tiers que par l'accomplissement de l'une des deux formalités prescrites par l'art. 1690. Bref, dans ce système, l'héritier, auquel une créance héréditaire est attribuée pour la totalité par une clause du partage, serait considéré comme la tenant, non du défunt exclusivement, par application de l'art 883, mais de ses cohéritiers, pour tout ce qui excède sa part héréditaire dans la créance. Le partage serait donc, quant aux créances, translatif, et non déclaratif de propriété. Nous nions absolument le point de départ de cette opinion: l'art. 1220 n'opère pas, comme on le prétend, le partage des créances. Il suffit, pour le démontrer, de faire remarquer que ce texte ne divise pas les créances entre tous les successeurs universels du défunt, mais seulement entre ceux qui représentent sa personne. La loi dit que les héritiers peuvent réclamer les créances pour les parts dont ils sont saisis.... comme représentant le créancier; donc la division légale ne s'applique pas aux successeurs non saisis, notamment aux enfants naturels; or une division qui est faite entre quelques-uns seulement des ayant droit, n'est pas et ne peut pas être un partage. Supposons, pour éclaircir ce point, que le défunt ait laissé deux frères et un PRÉCIS DE DROIT CIVIL. 3e éd., II.

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enfant naturel: auquel cas l'enfant naturel a droit à une moitié de la succession, et les deux frères à l'autre moitié (art. 757). Supposons de plus que la succession ne comprenne absolument que des créances. D'après l'art. 1220, les créances, c'est-àdire l'hérédité tout entière, se diviseront de plein droit par portions égales entre les deux frères du défunt, qui seuls représentent sa personne; l'enfant naturel, bien qu'il ait droit à la moitié de la succession, est exclu de cette répartition. Est-ce là un partage? Peut-on considérer comme telle une opération, dont le résultat est de donner le tout à deux des héritiers, et rien au troisième, qui cependant a droit à la moitié? Inutile d'insister; on ne peut concevoir un partage qui ne comprenne pas tous les copartageants. Que signifie donc l'art. 1220? Il règle d'une manière provisoire la situation des débiteurs du défunt par rapport à la succession. Il faut bien qu'à toute époque un débiteur héréditaire dont la dette est échue puisse valablement se libérer, et aussi que quelqu'un puisse le contraindre à payer. A qui paiera-t-il, en attendant le partage que feront les héritiers? Qui pourra le poursuivre? Telle est la question dont se préoccupe exclusivement l'art. 1220; il répond que chaque représentant du défunt pourra poursuivre les débiteurs héréditaires pour la part dont il est saisi, et par suite recevoir le paiement dans cette mesure de ceux qui viendraient l'offrir. La loi n'accorde pas le même droit aux successeurs universels non saisis, parce que, demander le paiement d'une créance ou le recevoir, c'est faire acte de possession, et le successeur irrégulier ne possède pas tant qu'il n'a pas obtenu la délivrance ou l'envoi en possession.

La disposition de l'art. 1220 ne fait donc nul obstacle à ce que les héritiers partagent les créances héréditaires comme tous les autres biens de la succession. D'ailleurs l'art. 832 dit positivement que les créances sont comprises dans le partage et qu'on doit autant que possible les répartir également dans les différents lots. Ce texte est décisif.

Le partage s'appliquant aux créances comme aux autres biens de la succession, on se trouve nécessairement conduit à décider qu'il sera régi par l'art. 883, c'est-àdire que l'héritier, qui recevra une créance dans son lot, sera considéré comme ayant seul succédé au défunt pour cette créance. Il pourra donc désormais en exiger le paiement intégral, et les paiements que ferait le débiteur entre les mains des autres héritiers ne le libèreraient pas, sauf peut-être l'application de l'art. 1240, s'il avait payé de bonne foi dans l'ignorance du partage. Mais les paiements, qui auraient été faits par le débiteur avant le partage, conformément à l'art. 1220, seraient libératoires; car un acte fait conformément à la loi doit nécessairement être maintenu. Et il faudrait en dire autant de tous les droits acquis à des tiers, dans l'intervalle de l'ouverture de la succession au partage, par application de l'art. 1220, notamment des compensations acquises au profit des débiteurs héréditaires qui étaient eux-mêmes créanciers des héritiers. Il est vrai qu'en appliquant pleinement la fiction de l'art. 883 on arriverait à annuler tous ces actes, et certains esprits ont soutenu qu'il fallait aller jusque-là. Mais c'est ne tenir aucun compte de la disposition de l'art. 1220, et de ce principe, que les actes faits en exécution de la loi doivent être respectés.

En résumé, l'art. 1220 ne fait que régler provisoirement les rapports des débiteurs héréditaires avec les héritiers jusqu'au partage; mais il ne partage pas, comme on l'a dit, les créances entre les héritiers. Le partage des créances est soumis aux mêmes règles que celui de tous les autres biens héréditaires, et il est par conséquent déclaratif de propriété, sauf le maintien des droits antérieurement acquis à des tiers en exécution de l'art. 1220. Nous reconnaissons toutefois qu'il s'élève des difficultés graves sur le point de savoir ce qu'il faut entendre ici par droits acquis.

Sur la question que nous venons d'examiner la jurisprudence est incertaine.

Voyez dans notre sens Alger, 24 décembre 1877, Sir., 78. 2. 214. En sens contraire, Cass., 23 mars 1881, Sir., 82. 1. 217.

§ II. De la garantie.

330. Les copartageants se doivent respectivement la garantie, à raison des troubles et évictions qui procèdent d'une cause antérieure au partage. C'est-à-dire que les cohéritiers doivent se protéger mutuellement contre les troubles qu'ils peuvent éprouver dans la possession des objets mis dans leur lot, et que, si l'un d'eux est évincé, les autres doivent l'indemniser, le tout pourvu que le trouble ou l'éviction ait une cause antérieure au partage.

Quel est le fondement de cette obligation? La garantie étant de droit dans la vente et dans l'échange (art. 1603 et 1707), il est tout simple que les copartageants en soient tenus les uns à l'égard des autres, dans une législation, qui, assimilant le partage à l'un ou à l'autre de ces contrats, le considère comme translatif ou attributif de propriété. Cette base fait défaut dans notre législation, qui regarde le partage comme déclaratif de propriété. Quel est donc alors le fondement de la garantie entre copartageants? Pothier dit à ce sujet : « La seule raison sur laquelle est fondée dans notre droit l'obligation de la garantie des copartageants, c'est que l'égalité qui doit régner dans les partages, se trouvant blessée par l'éviction que souffre l'un des copartageants dans quelqu'une des choses tombées dans son lot, la loi qui exige cette égalité oblige chacun des copartageants à la rétablir ». La garantie nous apparait donc comme une sanction du principe d'égalité, qui est l'âme des partages. Elle repose sur cette idée que chaque copartageant doit obtenir, en vertu du partage, la totalité de la part à laquelle il a droit, c'est-à-dire l'équivalent en propriété divisée de ce qu'il avait en propriété indivise.

331. Conditions requises pour qu'il y ait lieu à la garantie. Aux termes de l'art. 884 : « Les coheritiers demeurent respectivement » garants, les uns envers les autres, des troubles et evictions seulement » qui procèdent d'une cause antérieure au partage. La garantie n'a pas lieu, si l'espèce d'eviction soufferte a été exceptée par une clause » particulière et expresse de l'acte de partage; elle cesse, si c'est par sa » faute que le coheritier souffre l'éviction ».

Quatre conditions sont done requises, pour qu'il y ait lieu à la garantie qui nous occupe. Il faut :

1° Que l'un des copartageants ait subi une ÉVICTION ou tout au moins un TROUBLE. L'éviction est la dépossession que subit un cohéritier par suite d'une défaite judiciaire: evincere a vincendo in judicio dicitur. Tel serait le cas d'un cohéritier condamné par un jugement à restituer le fonds qui a été mis dans son lot au véritable propriétaire, sur l'action en revendication intentée par celui-ci. Le trouble est un précurseur de l'éviction, et à ce titre la loi le met sur la même ligne. Ainsi un tiers revendique contre un cohéritier l'immeuble mis dans son lot. Tant que la demande n'a pas reçu de solution, l'éviction n'est pas encore consommée, mais elle est à craindre; il y a trouble, et la loi

accorde l'action en garantie pour le faire cesser. Il ne s'agit ici que du trouble de droit, c'est-à-dire du trouble causé par quelqu'un qui agit en vertu d'un droit qu'il prétend avoir sur la chose, et non du trouble de fait, causé par quelqu'un qui agit sans invoquer aucun droit, par exemple par des maraudeurs qui viennent dévaster une propriété. Chaque cohéritier doit faire cesser lui-même par les moyens de droit le trouble de fait dont il est victime, sans pouvoir exercer de ce chef aucun recours contre ses cohéritiers.

2° Que l'éviction ou le trouble procède d'une cause antérieure au partage. En effet la garantie en matière de partage nous apparaît comme la sanction du principe d'égalité entre les copartageants; or c'est au moment du partage que l'égalité doit exister; il n'y a pas à se préoccuper (ce serait bien impossible d'ailleurs) des événements postérieurs qui peuvent la faire disparaître. Les cohéritiers ne seront donc pas garants des troubles et évictions, dont la cause est postérieure au partage tel serait le cas où l'un des cohéritiers serait exproprié pour cause d'utilité publique et recevrait une indemnité insuffisante. La garantie ne serait pas plus due dans cette hypothèse qu'elle ne le serait à raison d'un incendie ou d'une inondation postérieure au partage, qui aurait détruit ou détérioré la chose mise dans mon lot. Ce sont là des cas fortuits dont chaque cohéritier doit supporter seul les conséquences, comme il profiterait seul aussi des augmentations de valeur, survenues aux biens mis dans son lot par suite d'événements indépendants de sa volonté, par exemple l'alluvion.

3° Que l'espèce d'éviction soufferte n'ait pas « été exceptée par une » clause particulière et expresse de l'acte de partage ».

La clause de non-garantie doit être particulière et expresse. Particulière. Donc serait nulle une clause générale de non-garantie, par exemple la clause conçue en ces termes : les cohéritiers ne se devront respectivement aucune garantie. La loi a bien pu autoriser une semblable stipulation en matière de vente (art. 1628 et 1629), parce que la vente est un acte de spéculation, et les parties peuvent spéculer même sur des chances et rendre ainsi le contrat plus ou moins aléatoire. Mais elle devait la prohiber en matière de partage, comme incompatible avec le grand principe d'égalité qui domine toute cette matière. En ce sens, la garantie est de l'essence du partage.

Expresse. Si les copartageants veulent exclure la garantie, il faut qu'ils le disent; il ne leur suffirait pas de le sous-entendre. Notamment cette circonstance, que l'héritier aurait connu le danger d'éviction dont est menacé le bien mis dans son lot, ne pourrait pas lui être opposée comme entraînant de sa part une renonciation tacite à la garantie. C'est une nouvelle différence avec la vente. Cpr. art. 1629.

4° Que l'éviction soufferte ne résulte pas de la faute du cohéritier evince, ou mème de son simple fait. Autrement, il n'aurait le droit de s'en prendre qu'à lui-même du préjudice qu'il éprouve. Tel serait le cas d'un cohéritier, qui, actionné en revendication relativement à un immeuble mis dans son lot, n'aurait succombé que pour avoir omis de faire valoir un moyen péremptoire qui lui aurait assuré gain de cause (art. 1640, arg. anal.).

De là il faut conclure que le cohéritier, qui a laissé s'accomplir sans l'interrompre une prescription commencée avant le partage, n'aurait pas droit à la garantie à raison de l'éviction qu'il souffre. C'est en effet par sa faute qu'il la subit, puisqu'il aurait pu facilement la conjurer au moyen d'un acte interruptif. Il n'y aurait plus faute de la part du cohéritier, si l'heure de la prescription était sur le point de sonner au moment du partage, de telle façon qu'il ne lui restât plus un temps moralement suffisant pour l'interrompre. Aurait-il droit en ce cas à la garantie? Nous le pensons. On peut objecter, il est vrai, qu'il ne suffit pas, pour que l'héritier évincé ait droit à la garantie, que l'éviction ne résulte pas de sa faute; qu'il faut de plus que l'éviction ait une cause antérieure au partage, et qu'ici la cause est postérieure, puisque la prescription ne s'est accomplie qu'après le partage. Il faut répondre que l'éviction a en réalité une cause antérieure au partage (pour partie au moins); car elle résulte d'une prescription qui s'est accomplie presque tout entière antérieurement au partage. L'éviction est postérieure au partage, mais sa cause est antérieure.

332. Contre qui peut être intentée l'action en garantie. « Chacun des cohéritiers est personnellement oblige, en proportion de sa » part héréditaire, d'indemniser son cohéritier de la perte que lui a cau»sée l'éviction. Si l'un des cohéritiers se trouve insolvable, la portion » dont il est tenu doit être également répartie entre le garanti et tous les » cohéritiers solvables » (art. 885). Ainsi il y a trois héritiers pour portions égales, Primus, Secundus et Tertius; ce dernier est évincé d'un objet mis dans son lot, qui vaut 300 fr.; chacun des deux autres est tenu de l'indemniser pour un tiers, soit jusqu'à concurrence de 100 fr. L'évincé sera donc lui-même en perte de 100 fr.: ce qui est juste, car s'il obtenait la réparation intégrale du préjudice causé par l'éviction, il se trouverait en définitive avoir plus que ses cohéritiers, et sous prétexte de rétablir l'égalité on la violerait. Si Primus est insolvable, Tertius pourra recourir contre Secundus pour 150 fr., et sera lui-même en perte de pareille somme. L'insolvabilité de l'un des cohéritiers est un sinistre commun, qui doit peser sur tous les cohéritiers également, dit notre article, ou, en termes plus exacts, proportionnellement à leurs parts héréditaires. La loi veut parler évidemment d'une égalité relative aux vocations héréditaires, c'est-à-dire d'une égalité proportionnelle.

333. L'indemnité fournie au garanti doit être pécuniaire. A quelle époque se place-t-on pour en calculer le montant? L'art. 885 dit que l'indemnité doit être égale à la perte causée par l'éviction. D'où nous

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