Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

rai pas à déclarer la libéralité réductible, elle sera nulle pour le tout ».

L'interprétation, que nous venons de donner de l'art. 1099, est conforme à la jurisprudence constante de la cour de cassation (Cass., 23 mai 1882, Sir., 83. 1. 72 et 22 juillet 1884, Sir., 85. 1. 112) qui toutefois ne déclare nulle la donation déguisée ou faite à personne interposée qu'autant qu'elle excède la quotité disponible, restriction qui nous parait contraire à l'esprit non moins qu'au texte de la loi.

Un parti important dans la doctrine donne à l'art. 1099 une interprétation toute différente de celle que nous venons d'indiquer. Les donations déguisées ou faites à personnes interposées ne seraient que réductibles à la quotité disponible, en cas d'excès, de même que les donations indirectes; quand l'art. 1099 in fine dit que ces donations sont nulles, il faut, dit-on, sous-entendre: pour ce qui excède la quotité disponible. Mais outre que cette restriction est contraire au texte de la loi, qui prononce la nullité dans des termes absolus, elle aboutit en définitive à considérer l'alinéa 2 de l'art. 1099 comme une répétition, et une répétition en termes fort peu satisfaisants, de la disposition contenue dans l'alinéa 1. Nous convenons volontiers d'ailleurs qu'il sera souvent difficile en pratique de distinguer une donation indirecte d'une donation déguisée. Mais la difficulté que peut éprouver le juge pour appliquer une distinction ne nous paraît pas être un motif suffisant pour la repousser, lorsque les termes de la loi commandent de l'admettre.

780. Le législateur établit ici, comme il l'a déjà fait dans l'art. 911 au sujet d'un cas analogue, certaines présomptions légales d'interposition de personnes, qui dispensent de toute preuve ceux au profit de qui elles sont établies et n'admettent pas la preuve contraire de la part de ceux contre qui elles sont dirigées. L'art. 1100 dit à ce sujet : « Seront » réputées faites à personnes interposées, les donations de l'un des époux » aux enfants ou à l'un des enfants de l'autre époux issus d'un autre » mariage, et celles faites par le donateur aux parents dont l'autre époux » sera héritier présomptif au jour de la donation, encore que ce dernier » n'ait point survécu à son parent donataire ». Cpr. art. 911 et supra

n. 396.

La loi considère donc comme personnes interposées par rapport au conjoint du donateur :

1o Les enfants de ce conjoint issus d'un autre MARIAGE, mais non ceux issus de son mariage avec le donateur. En d'autres termes, la donation que l'un des époux fait à un enfant d'un autre lit de son conjoint, par conséquent à un enfant qui n'est pas le sien, est réputée s'adresser au conjoint auteur de cet enfant. Mais il n'en est pas de même de celle qu'il fait à un enfant de ce conjoint qui est aussi le sien, c'est-à-dire à un enfant issu de son mariage avec ce conjoint. La première est inspirée, la loi du moins le suppose, par l'amour conjugal, la deuxième par l'amour paternel. D'ailleurs la présomption d'interposition de personne, appliquée aux enfants du mariage, aurait abouti à les frapper d'une incapacité personnelle de recevoir de leur père et de leur mère: ce qui n'aurait eu aucune raison d'être.

[ocr errors]

2o Les personnes dont le conjoint du donateur est héritier présomptif au jour de la donation. Aux yeux de la loi, la donation, que je fais à une personne dont mon conjoint est héritier présomptif, est destinée à ce conjoint je donne en vue de le faire profiter de la donation, quand il recueillera la succession du donataire, dans laquelle il trouvera le bien donné. Il faut et il suffit que la qualité d'héritier présomptif du donataire existe chez le conjoint au jour de la donation, sans qu'il y ait lieu de se préoccuper de savoir si elle existe au jour du décès du donataire; car la loi interprète la volonté du donateur, et elle ne peut l'interpréter que d'après l'état de choses existant lors de la donation.

Tels sont les seuls cas dans lesquels l'interposition de personne est présumée de plein droit. En fait, elle peut exister dans bien d'autres hypothèses; mais alors les intéressés, qui en allèguent l'existence, devront en fournir la preuve : ce qu'ils pourront d'ailleurs faire par tous les moyens possibles. C'est le droit commun quand il s'agit de démasquer une fraude.

* 781. Reste une question. Il est incontestable que les art. 1099 et 1100 servent de sanction à l'art. 1098 qui les précède immédiatement. Mais servent-ils en outre de sanction aux art. 1094 et 1096 ? L'affirmative est admise par la jurisprudence (Lyon, 14 mai 1880, Sir., 81. 2. 38) et par un parti considérable dans la doctrine. On argumente surtout en ce sens de l'art. 1099, qui dispose : « Les époux ne pourront se donner indirectement au delà de ce qui leur est permis par les dispositions ci» dessus ». Le législateur ne se serait vraisemblablement pas exprimé de la sorte, s'il n'avait songé qu'au cas prévu par l'art. 1098. D'abord, au lieu de dire: Les époux..., il aurait dit probablement : L'époux ayant des enfants d'un autre lit; car l'art. 1098 ne limite pas le droit de disposer pour les époux, mais seulement pour celui qui a des enfants d'un précédent mariage. Et puis, à la place des mots par les dispositions ci-dessus, il aurait plutôt employé ceux-ci par l'article précédent. L'art. 1099 se réfère donc, dit-on, à toutes les dispositions qui le précèdent; il sert de sanction, non seulement à l'art. 1098, mais aussi à l'art. 1094, qui fixe le disponible entre époux n'ayant pas d'enfants d'un précédent mariage, et en outre à l'art. 1096, en tant qu'il défend aux époux de se faire des donations irrévocables : les époux pourraient songer à éluder cette dernière prohibition, comme celle de l'art. 1098 ou celle de l'art. 1094, par le moyen d'une donation déguisée ou faite à personne interposée, dont il serait le plus souvent fort difficile d'établir le véritable caractère; pour les détourner de cette idée, la loi frappe la donation de nullité. Nous pensons avec quelques auteurs qu'il y a lieu de distinguer. Nous admettons bien que les art. 1099 et 1100 se réfèrent à l'art. 1094, mais nous ne croyons pas qu'ils servent aussi de sanction à l'art. 1096. Les mots AU DELA de ce qui leur est permis par les dispositions ci-dessus annoncent que la loi ne songe ici qu'aux dispositions limitant la faculté de disposer entre époux. La sanction qu'elle établit s'applique donc à l'art. 1094, qui est conçu dans cet ordre d'idées aussi bien que l'art. 1098, mais non à l'art. 1096 qui détermine seulement le caractère des donations faites entre époux constante matrimonio, en les déclarant révocables.

TITRE III

Des contrats ou des obligations conventionnelles en général.

782. Définition de l'obligation. On peut définir l'obligation: un lien de droit, parlequel une personne est astreinte envers une autre à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Cpr. art. 1101.

Un lien de droit, juris vinculum: d'où le nom d'obligation, de ob ligare. Pour être immatériel, comme toutes les choses quæ in jure consistunt, ce lien n'en est pas moins résistant. Celui qu'il enchaîne ne peut en général le rompre qu'en faisant ce qu'il a promis de faire, en payant. Le paiement est le mode régulier et normal de dissolution du lien que l'obligation a formé; aussi les Romains l'appelaient-ils solutio, de solvere, solutum, et définissaient-ils l'obligation: Juris vinculum quo necessitate adstringimur alicujus solvendæ rei. Par là l'obligation se distingue des simples devoirs moraux, qui sont dépourvus de toute sanction légale, et dans l'accomplissement desquels l'homme ne relève que de sa conscience.

L'effet de l'obligation est, d'après notre définition, d'astreindre une personne envers une autre à DONNER, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Ces expressions sont reproduites de l'art. 1101 qui lui-même les a empruntées pour partie à la loi romaine: ad aliquid dandum vel faciendum vel præstandum. Le mot donner, comme le mot latin dare dont il est la traduction, signifie ici transférer la propriété. S'obliger à donner, c'est donc s'obliger à transférer la propriété d'une chose.

Une obligation suppose nécessairement deux personnes : l'une qui est liée, c'est le sujet passif de l'obligation, le débiteur, debitor, is qui debet; l'autre au profit de laquelle le lien existe, c'est le sujet actif de l'obligation, le créancier, creditor, de credere, creditum, croire, avoir confiance, parce que le créancier a suivi la foi du débiteur, il a compté sur sa loyauté, sur sa fidélité à tenir ses engagements, credidit: ce qui n'empêche pas que, si le débiteur ne s'exécute pas de bonne grâce, il pourra y être contraint par les voies légales.

L'obligation a donc deux faces, suivant qu'on l'envisage par rapport au débiteur ou par rapport au créancier. Pour le premier, dont elle restreint la liberté en le soumettant à une nécessité juridique, elle constitue une charge; on la désigne alors sous le nom d'obligation passive ou dette; elle figure dans son patrimoine comme une quantité négative, par conséquent au passif. Pour le second, le créancier,

l'obligation constitue un droit; elle augmente son patrimoine, où elle prend place à l'actif, et reçoit le nom de créance ou obligation active. 783. Sources des obligations. Les obligations peuvent dériver de cing sources: 1° le contrat; 2° le quasi-contrat (faits licites); 30 le délit; 4° le quasi-délit (faits illicites); 5° la loi.

[ocr errors]

Le contrat est la source la plus importante des obligations, parce qu'elle est de beaucoup la plus féconde. C'est pour ce motif sans doute que notre législateur a consacré un titre spécial, le titre III, aux obligations résultant des contrats (obligations conventionnelles), tandis qu'il a relégué les autres sous le nom d'engagements (obligations non conventionnelles) dans un deuxième titre, très bref d'ailleurs, le titre IV (art. 1370 à 1386). Ce qui n'empêche pas cette division d'être souverainement illogique. Pothier et Domat, qu'on peut considérer comme les vrais auteurs du titre Des obligations, avaient adopté un plan bien préférable; notre législateur leur a tout emprunté, sauf la méthode. Ici comme ailleurs, nous respecterons cependant son œuvre même dans ses imperfections, persuadé qu'il y aurait plus de préjudice que de profit pour nos jeunes lecteurs à modifier les grandes lignes du saint édifice au milieu duquel nous essayons de guider leurs premiers

pas.

CHAPITRE PREMIER

DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES

Convention

784. Définition de la convention ou contrat. vient de venire cum, se rencontrer, se réunir. C'est qu'en effet la convention ou contrat (ces expressions sont synonymes), est le résultat de l'accord de deux ou plusieurs personnes qui s'entendent pour former entre elles quelque obligation, ou pour éteindre ou modifier une obligation préexistante.

-

Pothier dit dans son traité des obligations, n. 3 : « Un contrat est une espèce de convention. Pour savoir ce que c'est qu'un contrat, il est donc préalable de savoir ce que c'est qu'une convention. Une convention ou pacte (car ce sont termes synonymes) est le consentement de deux ou plusieurs personnes pour former entre elles quelque engagement, ou pour en résoudre au précédent ou pour le modifier : duorum vel plurium in idem placitum consensus... L'espèce de convention qui a pour objet de former quelque engagement est celle qu'on appelle contrat... De là il suit... qu'on le doit définir une convention par laquelle les deux parties réciproquement, ou seulement l'une des deux, promettent et s'engagent envers l'autre, à lui donner quelque chose, ou à faire ou ne pas faire quelque chose ». Il est difficile de ne pas reconnaître cette définition de l'illustre auteur dans l'art. 1101, ainsi conçu : « Le contrat est une » convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plu» sieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».

D'après le code civil, comme d'après Pothier, le contrat n'est donc qu'une espèce

particulière de convention, celle qui est faite en vue de créer quelque obligation. Mais cette dénomination ne comprendrait pas les autres conventions, notamment celles faites en vue d'éteindre une obligation; ces dernières devraient être désignées sous la dénomination pure et simple de conventions. Hâtons-nous de dire d'ailleurs que cette distinction entre le contrat et la convention ne présente aucun intérêt ni théorique ni pratique : ce qui explique que le législateur se soit empressé tout le premier de l'oublier à l'occasion. La confusion entre le contrat et la convention apparait jusque dans la rubrique de notre titre : Des CONTRATS ou des obligations CONVENTIONNELLES en général, et on la trouve ailleurs, notamment dans les art. 1127 et 1128.

785. Différence entre le contrat et la pollicitation.-Avec le contrat il ne faut pas confondre la simple pollicitation. « Le contrat, dit Pothier, renferme le concours des volontés de deux personnes dont l'une promet quelque chose à l'autre, et l'autre accepte la promesse qui lui est faite. La pollicitation est la promesse qui n'est pas encore acceptée par celui à qui elle est faite, pollicitatio est solius offerentis promissum ». La pollicitation ne fait naître aucun droit au profit de celui à qui elle s'adresse, tant qu'il ne l'a pas acceptée; car nul ne peut acquérir un droit sans sa volonté; aussi jusque-là celui qui l'a faite peut-il la retirer.

§ I. Divisions des contrats.

786. Le code nous indique ici trois divisions des contrats: 1o contrats synallagmatiques et contrats unilatéraux; 2° contrats de bienfaisance et contrats à titre onéreux; 3° contrats commutatifs et contrats aléatoires. Il en sous-entend une quatrième, celle des contrats nommés et innommés, dans l'art. 1407. Nous en ajouterons deux autres: 5° contrats principaux et contrats accessoires; 6° contrats consensuels, solennels ou réels.

I. Contrats synallagmatiques et contrats unilatéraux.

787. « Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les con» tractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres ». Ainsi s'exprime l'art. 1102.

Synallagmatique vient du grec auvaλλxyux qui signifie contrat; sinallagmatique est donc synonyme de contractuel. D'après cette étymologie, le contrat synallagmatique serait un contrat contractuel ce qui ne laisse que le vide dans l'esprit. Le mot bilatéral exprime beaucoup mieux ce qu'il veut dire dérivé des deux mots latins bis et latus, lateris, il est merveilleusement choisi pour désigner les contrats qui produisent des obligations réciproques, ex utroque latere. Telle est la vente, dans laquelle le vendeur s'oblige à rendre l'acheteur propriétaire de la chose vendue et celui-ci à en payer le prix; tels sont encore l'échange, le louage, la société et beaucoup d'autres contrats.

« VorigeDoorgaan »