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C'est donc ici la forme qui donne l'existence à la chose, forma dat esse rei. Aussi, quand les parties passent des contrats de ce genre, ontelles l'habitude, pour ne pas faire un acte nul, de se soumettre aux exigences de la loi quant à la forme les formes prescrites sont donc ici usitées, parce qu'elles sont de rigueur, et c'est pourquoi, au dire de M. de Savigny, ces contrats ont été appelés solennels, de solere, solemnis. Ladiste des contrats solennels n'est pas longue dans notre droit civil. Elle ne comprend que cinq termes deux contrats relatifs aux personnes : le mariage et l'adoption, et trois relatifs aux biens : la donation (art. 931), le contrat de mariage (art. 1394 al. 1), et le contrat hypothécaire (art. 2127).

III. Les contrats réels sont ceux qui, outre le consentement des parties, exigent pour leur perfection la tradition ou livraison de la chose obiet du contrat, qui re perficiuntur. Tel est le prêt (à usage ou de consommation peu importe): il n'existe, et par suite l'obligation de restituer qu'il engendre à la charge de l'emprunteur ne prend naissance, que lorsque la chose qui en fait l'objet lui a été remise. Il en est de même du dépôt et du gage. Ces divers contrats produisant tous une obligation de restituer, c'est par la force même des choses qu'ils sont réels; car le bon sens dit assez que, pour être tenu de restituer, il faut avoir recu. Jusque-là il peut bien y avoir une promesse valable de réaliser le contrat; mais le contrat lui-même n'existera que lorsque cette promesse aura été exécutée. Ainsi je puis valablement m'engager à vous prêter de l'argent ou à recevoir en dépôt une chose qui vous appartient; mais il n'y aura prêt ou dépôt que lorsque je vous aurai remis l'argent ou que j'aurai reçu le dépôt. En attendant il n'y aurait qu'un contrat innommé, obligatoire d'ailleurs comme toute convention licite.

VI. Contrats principaux; contrats accessoires.

793. Les contrats principaux, dit Pothier, sont ceux qui existent principalement et pour eux-mêmes, comme la vente, le louage, le prêt, le dépôt. Les contrats accessoires sont ceux qui interviennent pour assurer l'exécution d'un autre contrat: tels sont le cautionnement et l'hypothèque.

§ II. Des trois choses qu'on doit distinguer dans tout contrat.

794. D'après Pothier, il y a lieu de distinguer dans chaque contrat: 1o les choses essentielles; 2o les choses naturelles; 3° les choses accidentelles.

1. « Les choses essentielles sont celles en l'absence desquelles le contrat ne peut subsister; faute de l'une de ces choses, ou il n'y a pas du tout de contrat, ou c'est une autre espèce de contrat ». Ainsi sont essentiels dans le contrat de vente, une chose, res quæ veneat, et un prix en argent, pretium. A défaut de chose ou de prix, il n'y a pas de contrat, et, si le prix consiste en une chose autre qu'une somme d'argent, il y a échange et non pas vente.

PRÉCIS DE DROIT CIVIL. 3e éd., II.

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2. Les choses naturelles sont celles qui sont sous-entendues dans le contrat, lorsque les parties ne se sont pas expliquées, quæ in contractu tacite veniunt, mais qui, n'étant pas de l'essence du contrat, peuvent en être écartées par une stipulation formelle. Telle est la garantie dans le contrat de vente: les parties n'ont pas besoin de la stipuler pour qu'elle soit due; mais elles peuvent l'écarter par une stipulation expresse (art. 1627), sans que pour cela le contrat cesse d'exister ou change de nature. Ce sera toujours une vente, mais une vente sans garantie.

3. Les choses accidentelles sont celles qui, n'étant pas de la nature du contrat, n'y peuvent être renfermées qu'en vertu d'une clause particulière: par exemple dans la vente le terme accordé à l'acheteur pour le paiement du prix, ou la faculté de payer le prix par fractions.

La loi va s'occuper dans le chapitre II des choses essentielles à la validité des conventions en général.

CHAPITRE II

DES CONDITIONS ESSENTIELLES A LA VALIDITÉ DES CONVENTIONS

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795. « Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention: Le consentement de la partie qui s'oblige; Sa capacité » de contracter; - Un objet certain qui forme la matière de l'engage»ment; - Une cause licite dans l'obligation» (art. 1108).

De ces quatre conditions, il y en a une, la capacité de contracter, qui n'est requise que pour la validité de la convention: en son absence la convention ne serait pas inexistante, mais seulement nulle ou annulable (arg, art. 1125). Les trois autres sont requises pour l'existence de la convention, de sorte que leur absence la rendrait inexistante.

Dans les contrats dits solennels, il y a une autre condition qui est indispensable pour la validité et même pour l'existence du contrat: c'est l'observation des formes prescrites par la loi. Notre article a pu se dispenser de la mentionner, soit parce qu'il énumère les conditions requises pour la validité ou l'existence de toutes les conventions en général, soit parce que, dans les contrats solennels, l'absence de la forme peut paraître se confondre avec l'absence du consentement, en ce sens que le consentement n'a pas d'existence aux yeux de la loi quand il n'est pas manifesté dans la forme qu'elle prescrit.

Suivent quatre sections, consacrées à chacune des quatre conditions qu'indique l'art. 1108.

SECTION PREMIÈRE

DU CONSENTEMENT

796. Le mot consentement, consensus, vient de cum et de sentire: sentire cum alio. Le consentement en effet est l'accord de deux ou plusieurs personnes sur un mème point; il est la résultante de deux

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ou plusieurs volontés qui s'unissent. Consentire est in unam eamdemque sententiam concurrere. On voit que le consentement est nécessairement un acte bilatéral, à la différence de la volonté qui est un acte unilatéral. Je puis bien vouloir seul; mais je ne peux pas consentir seul, puisque le consentement est un concours de volontés. C'est donc avec raison qu'on a critiqué la disposition de l'art. 1108, qui ne parle que du consentement de la partie qui s'oblige, semblant donner ainsi à entendre que le consentement de la partie envers laquelle l'obligation est contractée n'est pas nécessaire. Toutes les parties doivent consentir; car l'accord, qui constitue le consentement, n'existe que lorsque la volonté de chacune d'entre elles s'est unie à celle de toutes les autres.

797. Comment se produira le concours de volontés qui constitue le consentement? Avant de s'unir, les volontés se cherchent, puis se rencontrent. L'un des futurs contractants fera des offres à diverses personnes, jusqu'à ce qu'il en ait trouvé une disposée à les accepter.

L'offre, que l'une des parties fait ainsi en vue de préparer le contrat, d'amener sa conclusion, porte le nom de pollicitation : pollicitatio est solius offerentis promissum. Celui qui a fait cette offre n'est pas encore obligé, car il ne peut pas se lier par sa seule volonté; l'obligation constitue un droit pour celui au profit de qui elle est contractée, et nul ne peut acquérir un droit sans sa volonté. Il faut donc, pour que le lien se forme, que celui auquel l'offre a été faite l'accepte; alors, mais alors seulement, il y aura promesse obligatoire, la pollicitation se sera transformée en un contrat.

Celui à qui l'offre a été faite peut l'accepter tant qu'elle subsiste. L'offre cesse de subsister:

1° Lorsque celui dont elle émane vient à mourir, ou lorsque quelque autre événement, tel qu'une sentence d'interdiction, le rend incapable de persévérer dans sa volonté;

2° Lorsque l'auteur de l'offre la retire: ce qu'il a le droit de faire tant qu'elle n'a pas été acceptée, car jusque-là il n'est pas lié. Il peut d'ailleurs la retirer dès qu'il le juge à propos, à moins qu'il n'ait été convenu expressément ou tacitement qu'il la laissera subsister pendant un certain temps. Le pollicitant qui retire son offre doit en informer l'intéressé, excepté quand il lui a imparti un délai fatal pour l'acceptation, auquel cas la pollicitation est de droit considérée comme non avenue par cela seul qu'elle n'a pas été acceptée dans le délai fixé.

797 bis. Suffit-il, pour que le consentement existe et que par suite le contrat se forme, que la pollicitation ait été acceptée? ou faut-il en outre que celui dont elle émane ait connaissance de l'acceptation? On voit facilement l'intérêt de la question. S'il n'y a consentement et par suite contrat qu'à partir du moment où l'acceptation

de l'offre est parvenue à la connaissance du pollicitant, il pourra jusqu'à ce moment retirer utilement son offre, alors même qu'elle aurait été acceptée à son insu; si au contraire le contrat se forme au moment même de l'acceptation et avant que le pollicitant en ait été avisé, il ne pourra plus désormais se dédire. Nous croyons qu'il n'y a consentement, et par suite contrat, que lorsque l'acceptation est parvenue à la connaissance de celui qui a fait l'offre. Ainsi je vous écris pour vous proposer de vous vendre 1,000 hectolitres de froment à 20 fr. l'hectolitre; plusieurs jours se passent; puis vous me répondez que vous acceptez ma proposition; le même jour, ignorant cette acceptation, je vous écris que je retire mon offre; nos lettres se croisent. Je ne serai point engagé, parce que j'ai retiré mon offre avant qu'elle fût devenue obligatoire. Sans doute, au moment où vous l'avez acceptée, elle subsistait encore; car je ne l'ai retirée que plus tard; votre volonté d'acheter a donc existé à une époque où ma volonté de vendre existait encore. Mais, pour qu'il y ait consentement et par suite contrat, il ne suffit pas que les volontés coexistent, il faut encore qu'elles concourent, c'est-à-dire qu'elles se touchent; or elles ne peuvent concourir que lorsque je connais votre acceptation. L'art. 932 fournit en faveur de cette solution un argument qui paraît décisif, en disposant que, lorsque l'acceptation du donataire n'est pas contenue dans l'acte même de donation, il ne suffit pas, pour que le donateur soit lié, que cette acceptation soit faite dans les formes légales, mais qu'elle doit en outre être notifiée au donateur, qui jusque-là pourrait se dédire, retirer son offre. On dit, il est vrai, que c'est là une décision spéciale à la donation, et qui tient à la défaveur dont le législateur l'entoure. Mais cette défaveur, qui explique très bien les formes rigoureuses auxquelles le législateur soumet les donations, n'expliquerait nullement la particularité dont il s'agit. La jurisprudence et la doctrine sont divisées sur cette question. On invoque surtout, en faveur de la solution contraire à celle qui vient d'être développée, deux arguments, puisés l'un dans l'art. 1121 in fine, l'autre dans l'art. 1985 al. 2; mais ils sont tirés l'un et l'autre du silence de la loi, ce qui leur enlève une grande partie de leur valeur. Dans notre sens, Orléans, 26 juin 1885, Sir., 86. 2. 30.

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Les négociants, qui annoncent dans des circulaires, prospectus, affiches... les prix et conditions de leur négoce, sont dans un état permanent d'offres à l'égard du public, tant qu'ils ne les ont pas retirées, de telle sorte que la demande conforme à ces conditions constitue une acceptation, et forme, dès qu'elle est parvenue à leur connaissance, le lien de droit. Ainsi un entrepreneur de transports annonce par la voie des journaux qu'il transportera telles marchandises de tel lieu dans tel autre à tant la tonne; tous ceux qui présentent des marchandises de cette nature et offrent de payer le prix convenu peuvent exiger qu'elles soient transportées. La jurisprudence en a conclu encore que, si une marchandise a été mise à l'étalage à un prix indiqué, dès qu'un acheteur déclare vouloir la prendre à ce prix, le marchand est obligé de la livrer pour le prix affiché, et doit, en cas de refus, être condamné à des dommages et intérêts. Tribunal de commerce de la Seine, jugement du 5 janvier 1869, Dall. pér., 1869. 3. 14.

798. Le consentement peut en principe être manifesté soit expressément (par écrit, par paroles ou même par signes), soit tacitement, eadem vis est expressi atque taciti consensus. Le consentement tacite résulte d'actes qui en font nécessairement supposer l'existence. On en trouve des exemples dans les art. 1738 et 1759, relatifs à la tacite réconduction, et dans l'art. 1985 al. 2. En cas de contestation sur la signification des faits d'où l'on prétend faire résulter le consentement tacite, c'est au juge qu'il appartiendra de statuer : sa règle de conduite

doit être de n'admettre l'existence du consentement tacite qu'en vertu de faits qui ne peuvent laisser planer aucun doute sur la volonté de leur auteur.

§ I. Des vices du consentement.

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4 Lision. 799. Aux termes de l'art. 1109: « Il n'y a point de consentement » valable, si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été » extorqué par violence ou surpris par dol ». Les vices, qui peuvent altérer le consentement au point de le rendre nul (ce qui entraînera par voie de conséquence la nullité du contrat lui-même), sont donc l'erreur, la violence et le dol. Il faut ajouter la lésion dans certains cas exceptionnels.

No 1. De l'erreur,

800. Suivant Donneau, l'erreur consiste à croire vrai ce qui est faux et faux ce qui est vrai, La définition de M. de Savigny est plus élégante : <«< L'erreur, dit-il, est la fausse notion que nous avons d'une chose ». La puissance la plus élevée de l'erreur est l'ignorance, qui n'est autre chose que l'absence de toute notion. En droit, les effets de l'ignorance sont en général les mêmes que ceux de l'erreur.

L'erreur dont l'un des contractants a été victime, exerce sur son consentement une influence plus ou moins délétère suivant les circonstances. Dans certains cas, elle est exclusive du consentement; alors le contrat ne se forme pas, parce qu'il manque d'un des éléments essentiels a son existence : l'erreur rend donc ici le contrat inexistant. Dans d'autres cas, l'erreur, sans faire disparaitre le consentement, le vicie d'une manière grave; elle est alors une cause de nullité du consentement et par suite du contrat. Dans d'autres cas enfin, l'erreur est sans influence sur la validité du contrat, parce qu'elle n'altère pas d'une manière assez profonde la moralité du consentement. Examinons successivement ces diverses hypothèses.

Cas dans lesquels l'erreur rend le contrat inexistant.

801. L'erreur est exclusive du consentement, et rend par suite le contrat inexistant dans trois cas:

A Lorsqu'elle porte sur la nature de la convention. Je vous propose de vous vendre un objet mobilier moyennant un certain prix; vous comprenez que je propose de vous le donner, et vous prenez livraison de l'objet, déclarant que vous acceptez ma proposition. Il n'y a ni vente ni donation, parce qu'il n'y a pas consentement. Nous avons voulu deux choses différentes; par conséquent nos deux volontés ne se sont pas rencontrées, elles n'ont pas concouru; nous ne sommes pas d'accord, il n'y a rien de fait;

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