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disent qu'un mot de la Pàque : « Nous vous donnons aussi la <<< bonne nouvelle de l'accord qui s'est établi à propos de notre « très sainte Pâque grâce à vos prières, ce point a été réglé << comme les autres. Tous nos frères de l'Orient qui ne s'accor<< daient pas en ceci avec les Romains, avec vous et avec ceux qui << suivent depuis le commencement vos usages, feront désormais « la Pâque en même temps que vous. »

Dans ce texte, l'usage corrigé est indiqué comme un usage oriental, non comme un usage asiatique ; on le dit opposé au système suivi en commun par Rome et par Alexandrie. La circulaire impériale est beaucoup plus explicite, tant au point de vue de la distribution géographique des observances que de leurs traits caractéristiques.

2o Constantin indique d'abord, en termes rapides, la solution de la question arienne, puis il vient à l'affaire de la Pâque. Il faut, dit-il, que la grande fête soit célébrée par tous le même jour; dans le choix de ce jour on ne doit pas s'en rapporter aux Juifs. « Il est regrettable de les entendre se vanter que sans eux les chrétiens ne sauraient observer leur Pâque. D'ailleurs, depuis leur déicide, ils sont aveuglés et ne peuvent servir de guides en quoi que ce soit n'en sont-ils pas venus à faire la Pâque deux fois dans une même année? — Ici, l'empereur a évidemment en vue, non l'année romaine qui partait du 1er janvier, ni les diverses années de Syrie ou d'Égypte qui commençaient à l'automne, mais l'intervalle entre deux équinoxes de printemps consécutifs. Du moment où on ne se tenait pas à la règle de célébrer toujours la Pâque après l'équinoxe, il est clair que l'on pouvait avoir deux Pâques, au lieu d'une, entre deux équinoxes de printemps consécutifs.-Constantin poursuit, insistant sur la nécessité de se ranger à l'usage del'immense majorité, « à l'usage que suivent les « églises de l'Occident, du Nord, du Midi, et même quelques-unes « de l'Orient. » Aussi le concile a-t-il jugé et l'empereur espère

1 L'ancienne province d'Asie (diocèse d'Asie au Ive siècle) n'était située à l'orient ni d'Alexandrie, ni de Nicée : il est donc bien clair qu'il ne s'agit pas d'elle dans la lettre du concile.

Cette circulaire est ordinairement citée comme adressée à tous les évêques, de quelque pays que ce fût, qui n'avaient pu assister au concile. En fait, sa rédaction suppose qu'elle a été adressée exclusivement aux évêques d'Orient.

3 Eusèbe, de Solemnitate Paschali, c. 8 (Migne Patr. Gr., t. XXIV, p. 701), indique la même distribution géographique des deux partis.

que sa décision sera exécutée, que les églises auxquelles il s'adresse se conformeront à l'usage que suivent en commun « la <<< ville de Rome, l'Italie et l'Afrique entières, l'Égypte, les « Espagnes, les Gaules, les Bretagnes, toute la Libye, la Grèce, a le diocèse d'Asie, celui de Pont et la Cilicie. »

Pas plus dans la lettre impériale que dans celle du concile, on ne voit indiqué le trait caractéristique du rite quartodéciman ou du rit dominical; le dimanche n'est pas en question. Ce qui est blâmé, c'est d'abord la dissidence sur un sujet aussi grave, puis l'asservissement au comput juif, asservissement humiliant en lui-même et qui entraîne à des erreurs manifestes. La région dissidente n'est pas l'Asie, l'ancienne province, maintenant diocèse d'Asie; celui-ci est au contraire indiqué parmi les pays qui s'accordent avec Rome et Alexandrie; c'est l'Orient, la Syrie et la Mésopotamie, les seuls pays de langue grecque qui ne soient pas nommés, ceux qu'indique l'empereur lorsqu'à la fin de sa lettre il annonce sa prochaine visite, ceux enfin qu'il a formellement exceptés dans son énumération des quatre parties du monde.

3o - Saint Athanase explique en deux endroits différents les motifs de la réunion du concile de Nicée; ces motifs sont la divergence au sujet de la Pâque et l'hérésie d'Arius. Voici comment il s'exprime dans l'épître aux évêques d'Afrique, écrite vers 369: « Le concile fut réuni à propos de l'hérésie arienne et de la Pâque, parce que les chrétiens de Syrie, de Cilicie et de Mésopo<tamie étaient en désaccord avec nous et faisaient la fête au << temps où les Juifs la font 2. » Dans le traité de Synodis, publié vers la fin de l'année 359, il cite les trois mêmes provinces comme étant en désaccord avec le reste de la chrétienté, et, pour exprimer l'accord opéré par la décision synodale, il ajoute ces mots significatifs : « Les Syriens obéirent 3. »

Saint Athanase énumère les pays dissidents, qui sont justement ceux qui manquent dans la lettre impériale; la Cilicie,

1Oi narà Zupíav x. 7. λ. Pour être tout à fait exact, saint Athanase aurait du dire τινὲς κατὰ Συρίαν ; comme il parle de ces choses en passant, il ne s'astreint pas à la rigueur des termes.

* Διεφώνουν πρὸς ἡμᾶς, καὶ τῷ καιρῷ ἐν ᾧ ποιοῦσιν οἱ Ἰουδαῖοι, itolouv nai autoi. Ath., ep. ad Afros, c. 2, p. 713 Bened.) 3 Ath., de Synod., 5, p. 574-575.

cependant, est indiquée sur les deux listes. Placée à la limite des deux observances, il est naturel qu'elle fût partagée. D'ailleurs, la dissidence est caractérisée en général comme judaïque; on a tort de faire la Pâque dans le même temps (remarquer que saint Athanase ne dit pas au même jour) que les Juifs.

Ainsi, tous les témoignages s'accordent sur la nature du débat porté devant le concile de Nicée, sur la sentence qui le termina, sur le pays où régnait la dissidence. Aucun trait ne permet de supposer qu'il soit question de quartodécimans ou d'asiatiques; tous les traits concordent à les exclure et à mettre en cause uniquement les Orientaux non-équinoxialistes.

Cette manière de voir est confirmée par tout ce que l'histoire nous apprend sur l'application de la loi pascale portée à Nicée.

IV

L'OPPOSITION AU DÉCRET DE NICÉE.

1o Le concile d'Antioche in encæniis, réuni dans cette ville en 341, commence ainsi la série de ses canons disciplinaires :

<< Tous ceux qui ont l'audace de violer la définition du saint et grand synode assemblé à Nicée en présence du pieux empereur Constantin, en ce qui concerne la sainte fête de Pâques, doivent être excommuniés et chassés de l'Église s'ils persévèrent dans leur opposition à ces justes décrets. Ceci soit dit pour les laïques. Les chefs ecclésiastiques, évêques, prêtres, diacres, qui oseraient, après le présent décret, séduire le peuple, troubler l'Église, se ségréger et faire la Pàque avec les Juifs, le saint synode décide qu'ils doivent être séparés de l'Église... non seulement ils seront déposés, mais ceux qui communiqueraient avec eux après leur déposition, le seront aussi 1.....

1

Le fait qu'une telle disposition ait dû être prise à Antioche, seize ans après le concile de Nicée, concourt, d'une manière bien significative, à montrer que l'Orient, le diocèse d'Orient, était la patrie de la dissidence. Sur le caractère de l'observance orientale, le concile d'Antioche n'est pas très expressif; il se borne

1 Hardouin, Concil., t. I,
p. 592.

à dire qu'elle consistait à faire la Pâque en même temps que les Juifs.

2° - Saint Jean Chrysostome, dans sa troisième homélie contre les Juifs, donne des détails plus précis. Cette homélie fut prononcée à Antioche, avant le commencement du carême de l'année 3872. Cette année-là, la Pâque chrétienne arrivait le 25 avril, et le 14 nisan tombait le dimanche précédent, 18 avril. C'est précisément dans ces cas de Pâques tardives que le dissentiment se produisait entre les équinoxialistes et les non-équinoxialistes.

Pour les fidèles d'Antioche, les solennités juives avaient, en ce temps-là, beaucoup d'attrait. Vers l'automne surtout, au moment de la fête des tabernacles, les synagogues se remplissaient de chrétiens. Chrysostome se donnait un mal incroyable pour empêcher ce scandale: les discours qu'il a laissés sur ce sujet sont au nombre de ses plus éloquents. Il y avait une véritable bataille à livrer, où le saint n'épargnait pas plus ses poumons que les préjugés populaires. Au début de l'un de ses discours, il se plaint d'un enrouement que lui a valu l'homélie de la veille; cela ne l'empêche pas d'en faire une autre aussi longue. Dans ces circonstances, Chrysostome était tout entier à la lutte présente les hérétiques anoméens étaient remis à une autre fois, les fêtes des martyrs passaient sans panégyrique : les Juifs seuls et leurs solennités maudites le préoccupaient; il en parlait longtemps auparavant, le jour même, le lendemain encore, comptant les chutes, recommandant de les dissimuler et de ne pas propager le scandale.

On conçoit que des gens aussi portés à célébrer les fêtes juives de l'automne, le grand jeûne, les tabernacles, fussent aussi, au temps de Pâques, enclins à suivre la synagogue. Alors, cependant, ils étaient retenus par les usages chrétiens, la règle du dimanche, le grand jeûne de la semaine sainte, les exercices du carême. Tout cela faisait contrepoids aux influences judaïques. Nous n'avons pas ici, qu'on le remarque bien, une observance plus ou moins judaïsante, remontant au judéo-christianisme des

Hom. adv. eos qui Pascha jejunant. Montfaucon, t. I, p. 606.

2 Les Bénédictins arrivent à peu près à cette date : ils auraient été plus précis et plus affirmatifs s'ils avaient remarqué que saint Jean Chrysostome parle d'une Pâque tardive, tombant le 21 de la lune; ces données ne permettent pas d'hésiter entre l'année 387 et les années voisines.

premiers temps. Il ne s'agit que des séductions exercées par les splendeurs de certaincs fêtes juives sur une communauté chrétienne préexistante et depuis longtemps en possession de traditions rituelles parfaitement indépendantes du mosaïsme. En d'autres temps, les pompes du culte païen avaient offert les mêmes dangers et excité au même degré la sollicitude des pasteurs 2. Les mêmes chrétiens qui s'associaient si volontiers aux jeûnes et aux réjouissances des Juifs pendant le mois de septembre, suivaient en mars les exercices du Carême, jeùnaient strictement la semaine de Xérophagie, et fêtaient, le dimanche, la Résurrection du Seigneur. Sur ces divers points, tout le monde était d'accord. Dans l'homélie qui nous occupe, Chrysostome ne laisse pas soupçonner qu'il ait affaire à des gens attachés au 14 nisan ou à l'agneau pascal; on ne voit même pas qu'il soit question des mêmes personnes que dans les autres discours contre les Juifs. Il s'agit de chrétiens qui avancent d'un mois la fête de Pâques et, par suite, la Xérophagie et le Carême. Ces chrétiens, dit-il, ont grandement tort d'en agir ainsi. Ils sont en révolte contre l'autorité des trois-cent-dix-huit Pères du grand concile de Nicée; ils attachent aux calculs juifs et au précepte mosaïque sur le mois pascal une importance qu'ils feraient mieux d'attribuer à des commandements plus graves et toujours en vigueur. L'Évangile condamne les avares, les cruels, les vierges folles, les impudiques; il ne blâme personne d'avoir célébré la Pâque à un autre mois que le véritable. D'ailleurs, à quoi bon s'attacher à un détail de la loi pascale, alors qu'il faut de toute nécessité négliger les autres prescriptions? « Quand le Seigneur << fut crucifié, on était au jour des azymes et au vendredi 3; mais « cette coincidence ne peut se produire toujours. Ainsi, cette année, « le premier jour des azymes tombe le dimanche : il nous faudra, « en conséquence, jeûner toute une semaine après, et ainsi, la

1 Newman, dans son livre sur les Ariens (The Arians of the fourth century, 3 éd. 1871), insiste beaucoup trop, je crois, sur les tendances judaïsantes d'Antioche, qui sont à ses yeux une explication de la naissance de l'arianisme dans cette ville. Je suis convaincu, comme l'illustre théologien anglais, que la capitale de la Syrie est la véritable patrie de l'arianisme, mais le judaïsme et surtout le judaïsme rituel, populaire, ne me paraît pas avoir eu d'influence sur les origines de cette hérésie subtile et philosophique.

2 V. par exemple les canons 1-4, 6, 40, 41, 55-60 du concile d'Elvire (306). 3 On voit, en passant, que saint Jean Chrysostome admet ici le système du quatrième évangile et la Passion du 14 nisan.

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