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de Badajoz, et ses forces étaient encore proportionnées à sa taille gigantesque, tandis que son ambition n'était arrêtée ni par les traités, ni par les liens du sang. Badajoz devait demeurer en partage à Ferdinand, roi de Léon, son allié et son gendre; mais Alphonse, au lieu de lui rendre cette ville, y attendit un siége; il voulut ensuite se faire jour l'épée à la main au travers de l'armée de Ferdinand. Il fut renversé de son cheval, il se rompit la jambe, et fut fait prisonnier. Se défiant alors de sa fortune, il résigna l'administration du royaume entre les mains de son fils don Sanche. Mais lorsqu'il sut que celuici était assiégé dans Santarem par l'émir el Mu ́menim, accompagné de treize rois maures, le vieux héros du Portugal trouva encore assez de forces pour marcher à la délivrance de son fils avec ses vieux soldats, et gagner la bataille où l'empereur de Maroc perdit la vie. Ce ne fut que dans sa quatre-vingt-onzième année (en 1185), que le fondateur de la monarchie portugaise succomba enfin aux attaques de la maladie et de l'âge (1).

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(1)

De tamanhas victorias triumphava
O velho Afonso, Principe subido ;

Quando quem tudo em fim vencendo andava,

Da larga e muita idade foi vencido.

A pallida doença lhe tocava

Com fria mao o corpo enfraquecido,

Gama raconte ensuite les victoires de Sanche, fils d'Alphonse; la prise de Sylves sur les Maures, et de Tui sur le roi de Léon; la conquête d'Alcazar dò Sal par Alphonse II; la faiblesse et la lâcheté de Sanche II, qui, ne songeant qu'à ses plaisirs, fut déposé pour faire place à son frère Alphonse III, conquérant du royaume des Algarves. Après lui, vint Denys, le législateur du Portugal et le fondateur de l'université de Coimbre, dont les dernières années furent troublées par l'ambition de son fils Alphonse IV. Cet Alphonse acquit à son tour le surnom de Brave, par douze ans de guerre contre les Castillans; mais lorsque le pouvoir des princes chrétiens fut mis en danger par une nouvelle invasion des Maures Almoades, conduits par l'empereur de Maroc, il amena des troupes auxiliaires au roi de Castille, à qui il avait donné sa fille en mariage, et il contribua à la brillante. victoire de Tarifa, le 30 octobre 1340. C'est à la fin de ce règne qu'arriva l'aventure de la malheureuse qui fut reine après sa mort; ainsi commence l'épisode d'Inès de Castro, la plus touchante comme la plus célèbre de tout le poëme; elle est destinée à relever, par un intérêt dramatique, les détails de l'histoire dans laquelle le Camoëns s'est engagé.

E pagaram seus annos deste geito
A triste Libitina o seu direito.

<«< Toi seul, ô pur Amour! toi qui, par ta » force cruelle, maîtrises les coeurs des hu» mains, tu causas sa mort lamentable; on di»rait qu'à tes yeux elle était une ennemie per>> fide. Cruel Amour! ta soif n'est point désal» térée par les larmes de la douleur, et dans ta >> tyrannie tu veux voir le sang humain baigner »tes autels. (1) Gentille Inès, tu demeurais » dans ta retraite, recueillant le doux fruit de »tes jeunes années, dans cette illusion de l'âme » libre et aveugle, dont la fortune ne permet » point la longue durée. Tu habitais les rives >> solitaires du Mondego, que tes beaux yeux » n'avaient jamais perdu de vue, et tu ensei>> gnais aux montagnes, comme aux plus jeunes.

(1) Canto III, Str. 120, 121.

Estavas, linda Ignez, posta em socego,
De teus annos colhendo doce fruto;
Naquelle engano da alma, lédo, e cego,
Que a fortuna naõ deixa durar muto;
Nos saudosos campos do Mondego,
De teus formosos olhos nunca enxuto,
Aos montes ensinando, e ás hervinhas
O nome que no peito escrito tinhas.

Do teu Principe alli te respondiam
As lembranças, que na alma lhe moravam;
Que sempre ante seus olhos te traziam,
Quando dos teus formosos se apartavam;
De noite em doces sonhos que mentiam,
De dia em pensamentos que voavam;
E quanto em fim cuidava, e quanto vie
Eram tudo memorias de alegria.

>> herbes, le nom qui était écrit dans ton cœur. » Les souvenirs de ton prince te répondaient >> toujours; les tiens demeuraient toujours dans >> son âme; toujours il les portait devant ses » yeux, quand il se séparait de toi ; la nuit, de >> doux songes par leur illusion ; le jour, les pen»sées qui flottaient devant son esprit, te pei>> gnaient toujours à lui; tout ce qui frappait >> son souvenir, tout ce qui se présentait à sa » vue, était pour lui un gage de bonheur.

» Il refusait de s'unir aux plus belles dames, >> aux plus hautes princesses, car le plus pur >> amour méprise toute chose quand il est as>> servi par un doux regard. Son vieux père, » voyant ses transports, et l'aversion de son fils >> pour le mariage, fut frappé des murmures du >> peuple. Il résolut d'enlever Inès au monde, » pour lui arracher son fils qu'elle retenait cap» tif; il crut, avec le sang d'une innocente, » éteindre le feu brûlant de l'aniour. Mais quelle >> aveugle fureur lui fit lever contre une femme >> faible et délicate l'épée tranchante qui avait >> soutenu le poids et la fureur des Maures? Des

gardes redoutés la conduisaient devant le roi, >> que la pitié commençait à ébranler; mais le » peuple, frémissant contre elle, répétait des >> accusations fausses et féroces, et demandait » qu'on la livrât à une mort cruelle.

» Inès, d'une voix triste et plaintive, se la

>> mente sur le sort de son prince et de ses fils » qu'elle quitte; cette séparation lui cause plus >> d'angoisses que sa propre mort. Levant vers le >> cristal des cieux ses yeux pleins de larmes, >> ses yeux, car l'un des bourreaux retenait >> alors ses mains captives; se retournant en>> suite vers ses enfans pleins de grâce et qu'elle » chérissait, ses enfans, qu'en tendre mère elle >> tremblait de laisser orphelins, elle parla ainsi >> à leur aïeul cruel (1):

>> Si parmi les animaux féroces, à qui la na>>ture enseigna la cruauté dès leur naissance, >> parmi les oiseaux sauvages, qui ne vivent » dans l'air que de rapine, on a vu de pieux >> sentimens en faveur des faibles enfans de » l'homine; ô toi dont le visage, dont le cœur » est encore celui d'un homme, quoiqu'il soit >> peu digne d'un homme d'égorger une femme » timide et sans défense!..... respecte ces faibles » creatures, puisque une mort funeste leur en» les deur appui; prends pitié d'elles à cause

(1) Canto III, Str. 125.

Para o ceo crystallino alevantando
Com lagrimas, os olhos piedosos,

Os olhos, porque as maos lhe estava atando
Hum dos duros ministros rigorosos;

E despois nos meninos attentandó,

Que tao queridos tinha, e tao mimosos,
Cuja orphandade como mãi temia,

Para o avò cruel assi dizia.

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