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Or, comme saint Barthélemi a laissé sa peau Pise, aussi y a-t-il laissé une main. A Triers il у en a je ne sais quel membre; à Fréjus, un doigt; à Rome, en l'église Sainte-Barbe, d'autres reliques. Ainsi encore n'est-il point des plus pauvres car les autres n'en ont pas tant.

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Toutefois chacun en a encore quelque lopin, comme saint Philippe a un pied à Rome, ad Sanctos-Apostolos, et à Sainte-Barbe je ne sais quelles reliques; Item, plus à Triers. En ces deux dernières églises, il a semblablement saint Jacques pour compagnon, lequel a pareillement une tête en l'église Saint-Pierre, un bras à Saint-Chrysogone, et un autre ad Sanctos-Apostolos.

Saint Mathieu et saint Thomas sont demeurés les plus pauvres, car le premier avec son corps. n'a sinon quelques os à Triers, un bras à Rome à Saint-Marcel, et à Saint-Nicolas une tête; sinon que par aventure il m'en soit échappé quelque chose, ce qui se pourrait bien faire; car en tel abîme, qui n'y serait confus?

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Pour ce qu'ils trouvent en leur chroniques que le corps de saint Jean-l'Évangéliste s'évanouit incontinent après qu'on l'eût mis en la fosse ils n'ont pu produire de ses ossemens. Mais, pour suppléer ce défaut, ils se sont rués sur son bagage. Et premièrement ils se sont avisés du calice, auquel il but le poison, étant condamné par Domitien. Mais pour ce que deux l'ont voulu avoir, il nous faut croire ou ce que disent les alchimistes de leur multiplication, ou

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que ceux-ci, avec leur calice, se sont moqués du monde. L'un est à Bologne, et l'autre à Rome à Saint-Jean-de-Latran. Ils ont puis après controuvé son hoqueton et une chaîne dont il était lié quand on l'amena prisonnier d'Éphèse, avec l'oratoire où il soûlait prier étant en la prison. Je voudrais bien savoir s'il avait lors menuisiers à louage pour lui faire des oratoires; item quelle familiarité avaient les chrétiens avec sa garde, pour retirer sa chaîne, et en faire une relique ? Ces moqueries sont trop sottes, et fût-ce pour abuser les petits enfans.

Mais le joyau le plus férial est des douze peignes des apôtres, qu'on montre à Notre-Dame de l'Ile-sur-Lyon. Je pense bien qu'ils ont été du commencement là mis, pour faire accroire qu'ils étaient aux douze pairs de France; mais depuis, leur dignité s'est accrue', et sont devenus apostoliques.

De sainte Anne.

Il nous faut dorénavant dépêcher, ou autrement jamais nous ne sortirons de cette forêt. Nous réciterons donc en bref les reliques qu'on a des saints qui ont été du temps que Notre-Seigneur Jésus-Christ vivait; puis conséquemment des martyrs anciens et des autres saints. Sur cela les lecteurs auront à juger quelle estime ils en devront avoir.

Sainte Anne, mère de la vierge Marie, a l'un de ses corps à Apt en Provence, l'autre à Notre

Dame de l'île à Lyon. Outre cela, elle a une tête à Triers, l'autre à Duren près Cologne, l'autṛe en Thuringe, en une ville nommée de son nom. Je laisse les pièces qui sont en plus de cent lieux; et entres autres il me souvient que j'en ai baisé une partie en l'abbaye d'Orcamps près de Noyon, dont on fait grand festin. Finalement, elle a un de ses bras à Rome en l'église Saint-Paul. Qu'on prenne fondement là-dessus, si on peut.

Du Lazare, de la Madeleine, etc.

Il y a puis après le Lazare, et la Madeleine sa sœur. Touchant de lui, il n'a que trois corps que je sache; l'un est à Marseille, l'autre à Autun, le troisième à Avalon. Il est vrai que ceux d'Autun en ont eu gros procès à l'encontre de ceux d'Avalon. Mais après avoir beaucoup dépensé d'argent d'un côté et d'autre, ils ont tous deux gagné leur cause; pour le moins ils sont demeurés en possession du titre.

Pour ce que la Madeleine était femme, il fallait qu'elle fût inférieure à son frère : pourtant elle n'a eu que deux corps, dont un est à Vézelai près d'Auxerre; et l'autre, qui est de plus grand reà Saint-Maximin en Provence; là où la tête est à part, avec son Noli me tangere, qui est un lopin de cire, qu'on pense être la marque que Notre-Seigneur Jésus-Christ lui fit, par dépit, pour ce qu'il était marri qu'elle le voulût toucher.

nom,

Je ne dis pas les reliques qui en sont dispersées par tout le monde, tant de ses os que de ses che

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veux. Qui voudrait avoir certitude de tout cela, il s'enquerrait pour le premier, à savoir si le Lazare et ses deux sœurs, Marthe et Madeleine, sont jamais venus en France pour prêcher. Car en lisant les histoires anciennes, et en jugeant du tout avec raison on voit évidemment que c'est la plus sotte fable du monde, et laquelle a autant d'apparence que si on disait que les nuées sont peaux de veau, et néanmoins ce sont les plus certaines reliques qu'on ait; mais encore qu'ainsi fût, il suffisait d'abuser d'un corps en idolâtrie, sans faire d'un diable deux ou trois.

De saint Longin et des trois Rois.

Ils ont aussi bien canonisé celui qui perça le côté de Notre-Seigneur en la croix, et l'ont appelé saint Longin. Après l'avoir ainsi baptisé, ils lui ont donné deux corps, dont l'un est à Mantoue, et l'autre à Notre-Dame de l'Ile près Lyon(1).

Ils ont fait le semblable des sages qui vinrent adorer Notre-Seigneur Jésus après sa nativité. Et premièrement, ils ont déterminé du nombre, disant qu'ils n'étaient que trois. Or, l'Évangile ne dit pas combien ils étaient; et aucuns des docteurs anciens ont dit qu'ils étaient quatorze ; comme celui qui a écrit le commentaire imparfait sur saint Mathieu, qu'on intitule de Chrysostome.

Après, au lieu que l'Évangile les dit philosophes,

(1) On a parlé plus haut de sa lance. Voyez aussi l'article Longin dans le Dictionnaire.

ils en ont fait des rois à la hâte, sans pays et sans sujets. Finalement ils les ont baptisés, donnant nom à l'un Balthasar, à l'autre Melchior, et à l'autre Gaspar. Or, encore que nous leur concédions toutes leurs fables, ainsi frivoles qu'elles sont, il est certain que les sages retournèrent au pays d'Orient. Car la sainte écriture le dit, et ne peut-on dire autre chose sinon qu'ils moururent là. Qui est-ce qui les a transportés depuis ? et qui est-ce qui les connaissait, pour les marquer, afin de faire ainsi des reliques de leurs corps? Mais je m'en déporte, d'autant que c'est folie à moi de redarguer des moqueries tant évidentes. Seulement je dis qu'il faut que ceux de Cologne et ceux de Milan se combattent à qui les aura (1); car tous deux prétendent ensemble de les avoir, ce qui ne se peut faire. Quand leur procès sera vidé, lors nous aviserons ce qu'il sera de faire.

De saint Denis.

Entre les martyrs anciens, saint Denis est des plus célèbres; car on le tient pour un des disciples des apôtres, et le premier évangéliste de France. A cause de cette dignité, on a de ses reliques en plusieurs lieux. Toutefois, comme l'on dit, le corps est demeuré entier seulement en deux lieux, à Saint-Denis en France, et à Regensbourg (2) en Allemagne.

(1) Calvin se trompe. On ne montre à Milan que le tombeau vide des trois rois. Voyez l'article Rois.

(2) Regensburg est le nom allemand de Ratisbonne.

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