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CHAPITRE XII

Fondation de la colonie de Virginie. Le capitaine John Smith; ses nombreuses aventures. Il est nommé président de la colonie. Manière dont il l'organise; son appréciation sur ses compagnons. Il est fait prisonnier par les Indiens. Ceux-ci le regardent comme un demi-dieu. Il est condamné à mort, puis sauvé par la fille du chef, qui épouse un des colons. La première charte de la colonie lui est retirée; mécontentement de la population. Smith part pour l'Angleterre. Situation critique des colons. Ils décident de retourner dans leur patrie; arrivée d'un vaisseau envoyé par la Compagnie de Londres. Second remaniement de la charte. Prospérité générale qui s'ensuit. Le tabac employé comme monnaie courante. Restrictions apportées au commerce de la colonie. Introduction de l'esclavage; ses conséquences. Attaques des Indiens. Retrait à la colonie de sa troisième charte. Elle est déclarée province royale. La population se divise en deux camps. Soulèvement du parti populaire qui chasse le gouverneur. Incendie de la ville de James

town.

COLONIE DE LA VIRGINIE.

Il n'est aucune colonie dont la fondation soit plus ancienne que celle de la Virginie. En avril 1607, treize ans avant l'arrivée des pèlerins de Plymouth, les premiers établissements sur la terre de la Virginie furent créés par la Compagnie de Londres, qui en avait reçu la propriété du roi Jacques Ier. Les premiers habitants de la colonie étaient peu faits, par leur caractère et la position qu'ils avaient occupée en Angleterre, pour supporter les peines d'une installation dans un pays jus

qu'alors inhabité, en sorte qu'avant la fin de l'automne leur nombre était déjà diminué de moitié.

Parmi eux se trouvait le capitaine John Smith dont la vie n'est qu'une suite d'aventures. Né en Angleterre dans le comté de Lancashire en 1579, il n'avait que treize ans lorsqu'il vendit ses livres d'étude et son sac pour fuir la maison paternelle et s'engager sur un navire marchand. Mais son père étant venu à mourir subitement, John Smith se décida à rester deux années encore en Angleterre; au bout de ce temps, n'y tenant plus, il partit pour la France, puis pour la Hollande, qu'il servit dans ses guerres pendant plusieurs années. Il se trouvait, un jour, sur un navire qui se rendait en Italie, lorsqu'une violente tempête s'éleva: accusé par ses compagnons de voyage d'avoir attiré sur tous le courroux céleste parce qu'il était protestant, il fut jeté à la mer. Smith, dont les forces étaient très-grandes, se soutint sur l'eau, nagea plusieurs heures et finit par aborder à une île où un vaisseau corsaire français le recueillit. Tandis qu'il était à bord, ce vaisseau attaqua un navire d'une nation ennemie; Smith prit part au combat et il se distingua tellement par son courage et son impétuosité qu'une part du butin conquis lui fut attribuée. Aussitôt après son débarquement, il se mêla aux guerres qui avaient justement lieu contre les Turcs, et, acceptant le cartel proposé par un officier musulman, il tua cet officier et deux autres qui voulurent le venger. Mais dans la bataille qui suivit, Smith fut fait prisonnier, et, dépouillé de ses vêtements,

les cheveux et la barbe rasés, il fut vendu comme esclave. La Providence qui le protégeait le tira encore de ce mauvais pas sa maîtresse eut pitié de lui, elle lui fournit des armes, et Smith, saisissant un instant favorable, tua son maître, se couvrit de ses habits, et, montant à cheval, s'enfuit en Russie. De là, il alla en Autriche, en Italie, en Espagne, au Maroc, puis, ayant entendu parler d'une expédition pour l'Amérique qui se préparait en Angleterre, il retourna dans sa patrie. John Smith n'eut aucune peine à se faire engager, et il fit partie du premier convoi d'émigrants dont les trois vaisseaux mirent à la voile le 9 décembre 1606.

En arrivant, les nouveaux colons furent enchantés à l'aspect riant et plein de verdure de la contrée qu'ils devaient habiter. Ils nommèrent le fleuve James, «Fleuve du roi, » et, en l'honneur de leur souverain, ils donnèrent à la première ville qu'ils construisirent le nom de « James City, dont on a fait ensuite Jamestown (ville de Jacques).

Dans le principe, il avait été entendu que John Smith, dont les capacités étaient reconnues par tous, aurait la direction de la colonie, mais, comme toujours, il se trouva des jaloux qui voulurent lui enlever cette distinction. Les aventuriers qui composaient les expéditions de ce genre étaient généralement des gens d'un caractère entier, durs et turbulents et dont les fréquentes disputes causaient de grands ennuis à leurs chefs. Smith surmonta heureusement les difficultés qu'on lui opposa, et ses compagnons, reconnaissant

que lui seul pouvait les tirer de leurs embarras continuels, le nommèrent, à la fin et à l'unanimité, leur président. Aussitôt, Smith ordonna la construction d'un fort, il leur apprit à couper des arbres dont ils se servirent pour leurs habitations, et leur fit faire l'exercice comme à de véritables soldats. La punition qu'il infligea aux paresseux fut la privation de nourriture. A tous ceux qui juraient et profanaient le nom de Dieu, il faisait verser dans la manche un seau d'eau froide pour chaque juron.

Dans les premiers temps de son arrivée, dégoûté de la manière dont ses compagnons travaillaient, il avait écrit à la Compagnie de Londres: « Lorsque vous « enverrez un nouveau contingent d'hommes, je vous supplie de m'envoyer trente charpentiers, laboureurs, jardiniers, forgerons ou manœuvres, plutôt que mille « semblables à ceux qui sont ici. »

Le capitaine Smith fit, à différentes reprises, des explorations sur la côte, visitant, avec le plus grand soin, toute la baie de Chesapeake et remontant au nord jusqu'au Maine. Il pénétra aussi dans l'intérieur du continent, cherchant à assurer à sa colonie l'amitié des Indiens et rapportant chaque fois les provisions nécessaires à la subsistance de tous. Dans une de ces explorations, il fut fait prisonnier par les Indiens, qui massacrèrent les quatre ou cinq hommes qui l'accompagnaient. Avec une singulière présence d'esprit et pour échapper au sort qu'il savait lui être réservé, Smith chercha à amuser ses gardiens en leur expli

quant l'usage de la boussole qu'il portait constamment dans sa poche et les mouvements de la terre et du soleil; puis, il leur demanda à écrire à ses compagnons restés dans la colonie. Les Indiens, ne comprenant pas comment il pourrait transmettre son message à ses amis par une simple feuille de papier, consentirent, mais lorsqu'ils apprirent que, par ce moyen, il les informait de ce qui lui était arrivé, ils furent remplis d'étonnement, et le considérèrent comme un homme possédant un pouvoir surnaturel. Ils eurent pour lui le plus grand respect, et, se faisant gloire de le posséder, le promenèrent de tribu en tribu.

En ce temps-là, comme les Indiens n'avaient encore eu que peu de relations avec les Européens, ils avaient conservé toute leur simplicité primitive. Ayant trouvé sur l'un des compagnons de Smith une petite quantité de poudre, ils la semèrent dans un champ, dans l'espoir d'en récolter une ample provision pour leurs prochains combats.

Enfin, Smith fut amené devant Powhattan, grand chef des Indiens, qui le condamna à mort. Au moment où il venait de poser sa tête sur une pierre et s'attendait à recevoir le coup de tomahawk qui devait mettre fin à ses aventures, la fille du grand chef, nommée Pocahontas, s'interposa et obtint de son père et des autres guerriers la vie et la liberté de John Smith, qui retourna auprès des siens emportant des promesses d'amitié de la part des Indiens.

Quant à sa protectrice indienne Pocahontas, elle

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