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ple, par l'effet d'une séparation de corps ou de biens, la communauté doit être liquidée, comme si le contrat de mariage n'avait pas procuré au conjoint de leur auteur un avantage excessif. Le droit, dans ce cas, demeure en suspens pour être mis en action contre le nouvel époux ou ses héritiers, s'il y a lieu, c'est-à-dire si les parties intéressées survivent à leur auteur. 366. D'une autre part, les enfants ne seraient pas reçus à former l'action en réduction s'ils renonçaient à la succession de leur père ou de leur mère remarié ; c'est à la qualité d'héritier qu'est attaché le droit résultant des art. 1098, 1496 et 1527 combinés; or l'héritier qui renonce est censé n'avoir jamais été héritier: la renonciation rend donc les enfants incapables d'agir en retranchement. Sous ce rapport, il n'y a pas lieu de suivre la doctrine de Pothier (1) d'après lequel : lorsqu'un seul enfant du premier lit avait survécu à l'auteur de la libéralité résultant du second mariage, il n'était pas nécessaire que cet enfant fût héritier du donateur; il suffisait, pour qu'on dût reconnaître en lui la capacité d'agir, qu'il fût capable de venir à la succession. Aujourd'hui, selon nous, point de capacité sans une acceptation de la succession au moins sous bénéfice d'inventaire. Par cela même, la capacité n'existerait plus si l'héritier était frappé d'une indignité de succéder. C'est aussi l'opinion des auteurs (2).

367. Lorsque le droit au retranchement est établi, on peut se demander de quelle manière il y doit être procédé. A cet égard, les anciens auteurs indiquent une marche qui peut encore être suivie.

Les apports respectifs des deux époux étant constatés, l'époux survivant et les héritiers du prédécédé, dont l'action en réduction a été admise, reprennent chacun leurs apports respectifs, déduction faite des dettes correspondantes qui auraient été acquittées par la communauté. Ces reprises une fois exercées, on fait deux parts de ce qui reste dans la communauté, l'une pour l'époux survivant, l'autre pour les héritiers de l'époux prédécédé. La masse de la succession de ce dernier se trouve ainsi formée: elle comprend, d'une part, les apports dont la reprise a été faite, et, d'un autre côté, la moitié de ce qui était resté dans la communauté après la reprise des apports respectifs. La masse ainsi composée est ensuite divisée et distribuée par tête entre tous les enfants de l'époux prédécédé, en comptant comme

(1) V. loc. cit.

(2) V. MM. Duranton, t. XV, no 247, et Bugnet sur Pothier, loc. cit.

un enfant de plus l'époux survivant dont l'avantage se trouve ainsi renfermé dans les limites de la quotité disponible déterminée par la loi (1).

368. D'ailleurs, tout ce qui précède établit suffisamment que l'administration de l'enregistrement ne pourrait pas se prévaloir de la disposition des art. 1496 et 1527 pour réclamer le droit de donation sur ce qui lui paraîtrait excéder la quotité disponible dans l'avantage fait à l'époux, dont le conjoint avait des enfants d'un précédent mariage. « Outre que ces dispositions, disent très-bien MM. Championnière et Rigaud, ne sont faites que dans l'intérêt de la réserve, il résulterait de leur application, non l'existence d'une libéralité, mais une réduction de la stipulation » (2).

369. Terminons nos observations sur la communauté en rappelant que la communauté conventionnelle n'étant et ne pouvant être qu'une modification de la communauté légale telle que l'intérêt ou la volonté des futurs époux peut la conseiller, les règles de la seconde doivent être suivies en tout ce qui n'en a pas été écarté par l'établissement de la première.

Telle est la disposition de l'art. 1528, dont nous avons eu souvent l'occasion de rappeler le principe (3).

(1) V. Renusson, De la communauté, part. ive, ch. III, nes 21 et 22.

(2) Traité des droits d'enregistrement, t. IV, no 2915.

(3) V. notamment suprà, nos 3 et suiv., et notre premier volume, au n° 290.

CHAPITRE III.

DU RÉGIME DOTAL.

370. Pour expliquer dans tous leurs détails les principes du régime dotal, nous traiterons dans autant de sections distinctes 1o de la soumission au régime dotal; 2° des biens qui doivent être réputés dotaux ; 3° des cas où le mari devient propriétaire de la dot; 4° du principe de l'immutabilité des conventions matrimoniales appliqué à la dot; 5o de la clause d'emploi ; 6 des droits du mari sur les biens dotaux, et de ses obligations; 7° de l'inaliénabilité du fonds dotal; 8° de l'inaliénabilité de la dot mobilière; 9° des diverses exceptions au principe de l'inaliénabilité; 10° des formalités exigées pour l'aliénation de la dot; 11° des remplois; 12° des transactions, partages, compromis, acquiescements, désistements, compensations, novations, remises, atermoiements et concordats, relatifs à la dot; 13° de la révocation des aliénations de la dot indûment faites; 14° de l'imprescriptibilité des biens dotaux; 15° de la restitution de la dot; 16° des intérêts de la dot à restituer, et de la division des fruits de la dernière année; 17° des priviléges de viduité et des épargnes des femmes; 18° du legs de la dot; 19° des sûretés accordées par la loi pour la restitution de la dot; 20° des biens paraphernaux; 21° de la communauté d'acquêts sous le régime dotal; 22° du droit d'enregistrement dans ses rapports avec le régime dotal.

SECTION PREMIÈRE.

DE LA SOUMISSION AU RÉGIME DOTAL.

Sommaire.

371. La soumission au régime dotal ne résulte pas de la simple déclaration que la femme se constitue une dot;

372. Ni de la stipulation d'après laquelle les époux se prennent avec leurs biens et droits;

373. Ni de la déclaration faite par les époux, qu'ils se marient sans communauté ou qu'ils seront séparés de biens;

374. Ni de la constitution du mari pour mandataire irrévocable de la femme.

375. Il n'est pas nécessaire pourtant que la soumission au régime dotal soit exprimée en termes sacramentels.

376. La déclaration que les biens de la femme ou quelques-uns de ses biens seront dotaux emporte soumission au régime dotal; critique d'un arrêt contraire.

377. La soumission au régime dotal peut n'être que partielle.

378. Quid dans le cas où le contrat de mariage n'exprimant pas l'adoption du régime dotal, un des époux allègue que c'est ce régime qui avait été convenu. Responsabilité du notaire.

371. Le régime de la communauté formant le droit commun, comme nous l'avons vu dans les chapitres précédents, les époux ne sont soumis au régime dotal que lorsqu'ils adoptent expressément ce régime.

L'art. 1392 dispose en conséquence: « La simple stipulation que la femme se constitue ou qu'il lui est constitué des biens en dot ne suffit pas pour soumettre ces biens au régime dotal, s'il n'y a dans le contrat de mariage une déclaration expresse à cet égard. » Le mot dot, en effet, n'est pas exclusivement propre au régime dotal, puisque la dot, aux termes de l'art. 1540, est, en général, le bien que la femme apporte au mari pour supporter les charges du mariage. La constitution d'une dot n'ayant ainsi rien d'antipathique avec le régime de la communauté, il est impossible de voir dans cette seule constitution une soumission au régime dotal.

372. On ne saurait voir non plus une soumission à ce dernier régime dans la clause, assez usitée autrefois, par laquelle les époux déclareraient simplement se prendre avec leurs biens et droits. C'était principalement dans les pays de droit écrit, dans la Guyenne notamment, que cette clause était employée, et l'on n'était pas d'accord alors sur le point de savoir si l'effet de cette clause était de rendre tous les biens de la femme dotaux, ou tous, au contraire, paraphernaux (1). Aujourd'hui, cette clause, quand elle n'est accompagnée d'aucune autre, laisse les époux soumis au régime de la communauté légale; car l'art. 1393 dispose expressément que ce régime doit prévaloir toutes les fois que le contrat de mariage ne contient pas de stipulations spéciales qui y dérogent ou le modifient. Or, dans la clause en question, nous ne voyons rien qui déroge au régime de la communauté, puisque sous ce régime les époux se prennent aussi avec leurs biens et droits; et rien qui le modifie, puisqu'il n'est pas dit de quelle

(1) V. M. Tessier, t. I, p. 12, note 31.

manière les biens et droits de l'un des époux doivent profiter à l'autre.

373. « La soumission au régime dotal ne résulte pas non plus de la simple déclaration faite par les époux qu'ils se marient sans communauté ou qu'ils seront séparés de biens (art. 1392, §2). » En pareil cas, sans doute, la communauté est exclue; mais l'exclusion n'emporte pas virtuellement soumission au régime dotal, car le régime simplement exclusif de communauté et le régime de la séparation de biens ont leurs règles spéciales, distinctes de celles du régime dotal.

374. La soumission au régime dotal ne saurait résulter enfin de la clause, fort usitée autrefois dans le Dauphiné, par laquelle la femme constituait simplement son mari pour son procureur fondé général et irrévocable à l'effet de gérer et administrer tous ses biens. Dans l'ancien droit, l'effet d'une telle clause était d'emporter soumission au régime dotal et constitution générale de dot; mais sous l'empire du Code civil, cette formule, qui s'appliquerait tout aussi bien au régime de la communauté, puisque, sous ce régime, le mari administre, à moins de stipulation contraire, les biens de la femme et ceux de la communauté, cette formule ne saurait produire l'effet que lui avait assigné l'ancienne jurisprudence du parlement du Dauphiné (1).

375. Est-ce à dire cependant, que l'adoption du régime dotal doive être écrite dans l'acte en termes exprès, et en quelque manière sacramentels? Non. L'article 1392, dans un but d'unité et dans un esprit de préférence pour le régime de la communauté, déroge, il est vrai, à la règle d'interprétation posée dans l'art. 1159 du même Code, d'après lequel ce qu'il y a d'ambigu dans une convention s'interprète par ce qui est d'usage dans le pays où le contrat est passé; mais il ne déroge ni à l'art. 1156, qui veut qu'on recherche la commune intention des parties contractantes, ni à l'art. 1161, qui veut que toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier. Ainsi, quand il y a ambiguité, le régime dotal doit sans doute être réputé exclu; et il y a toujours ambiguité aux yeux de la loi, s'il n'y a dans le contrat de mariage qu'une simple stipulation de constitution de dot, ou une simple déclaration d'exclu

(1) La cour de Grenoble a constamment proclamé depuis la promulgation du Code civil l'opposition qui existe, sous ce rapport, entre l'an ien droit et les principes consacrés par le Code. V. arrêts du 12 février 1830 aff. Chastel); janvier 1840 (aff. Duralle), et 8 décembre 1845 (aff. Bouchier).

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