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phernalité imposée par le donateur pourrait avoir les plus fâcheux résultats.

Les objections qu'on peut puiser contre notre doctrine dans certains textes du Code civil, n'ont rien qui nous touche.

L'art. 387 dit, par exemple, que l'usufruit légal des père ou mère ne s'étend pas aux biens donnés ou légués aux enfants sous la condition expresse que les père et mère n'en jouiraient point. Un ancien auteur, Despeisses, avait prévu cette objection et fourni la réponse en ces termes (1):

...

et ne

<«<< Lorsque la femme s'est constitué en dot tous ses biens présents et à venir, le mari doit jouir des fruits des biens qui lui ont été donnés depuis ladite constitution, bien qu'ils lui aient été donnés à condition que l'usufruit n'en fût point acquis au mari; car le mari ayant stipulé ladite constitution dotale, même pour les biens à venir, on ne lui peut pas ôter par aucun pacte tels fruits, quod enim ex lege (id est, ex pacto) datum est, lucrum privatus offerre modis omnibus non valebit (2).. sert de dire que bien que le père soit usufruitier des biens de ses enfants, néanmoins il peut être privé dudit usufruit si les biens ont été donnés au fils à cette condition que l'usufruit n'en fût pas acquis au père (3); car l'usufruit étant acquis au père par le seul bénéfice de la loi sans l'industrie et convention du père, cette même loi le lui peut ôter audit cas sans lui faire tort; ce qu'on ne peut pas dire de l'usufruit des biens dotaux stipulés par le mari. >>

L'objection puisée dans l'art. 1401 n'a pas plus de fondement que la précédente. Cet article permet à tout donateur d'exclure de la communauté légale des époux le mobilier qu'il donne à l'un d'eux. Mais, outre que cette faculté peut profiter ici au mari aussi bien qu'à la femme, et ne blesse pas dès lors directement les droits du premier, la loi ne l'a sans doute autorisée que parce que l'exclusion de la communauté, d'une partie du mobilier, ne peut avoir pour l'union conjugale aucune conséquence fàcheuse, puisqu'elle n'empêche pas le mari de jouir de ces valeurs mobilières tant que le mariage dure. Mais l'art. 1401, on doit le remarquer, ne permet pas au donateur de stipuler que les fruits mêmes ou les intérêts de ce qu'il donne ne tomberont pas dans la communauté; le législateur a pensé qu'il pourrait être dange

(1) De la dot, part. ire, sect. II.

(2) Nov. 22, cap. Si autem, 33.

(3) Nov. 117, in princ., et auth. excipitur, C., De bon. quæ liber.

reux pour la femme d'avoir la disposition de ces fruits: et, sous ce rapport, l'art. 1401 favorise notre doctrine, loin de la contrarier.

Concluons donc que si on ne peut pas imprimer le caractère de dotalité à des objets qui sont paraphernaux, d'après le contrat de mariage, on ne peut pas non plus enlever ce caractère aux objets qui, d'après les stipulations matrimoniales, doivent en être affectés (1).

412. Le principe de l'immutabilité des conventions matrimoniales, qui s'oppose à ce qu'on puisse augmenter ni atténuer la constitution dotale, s'oppose aussi à ce qu'on puisse transporter le caractère de dotalité d'un objet à un autre. Ainsi, lorsque, d'après le contrat de mariage, la propriété de la dot doit rester sur la tête de la femme, on ne peut pas, durant le mariage, la convertir par une stipulation en une simple créance sur le mari; et réciproquement, quand, d'après le pacte matrimonial, le mari est devenu propriétaire, on ne peut pas par une convention postérieure transformer la créance de la femme en un corps certain qui puisse être considéré comme dotal.

Toutefois, quand la transformation s'opère en vertu du contrat de mariage lui-même, on sent qu'elle est parfaitement licite; dans ce cas, loin d'être violé, le principe de l'immutabilité des conventions matrimoniales est fidèlement respecté.

413. L'art. 1553 n'est que l'application de ces principes. << L'immeuble acquis des deniers dotaux, y est-il dit, n'est pas dotal, si la condition de l'emploi n'a été stipulée par le contrat de mariage. Il en est de même de l'immeuble donné en payement de la dot constituée en argent »

Toutes les fois donc qu'une dot a été constituée purement et simplement en argent, le mari en devenant propriétaire peut en

(1) Nous devons dire toutefois que la jurisprudence se prononce en sens contraire. V. Req. rej., 16 mars 1846 (aff. Ducos), et Aix, 16 juillet 1846 (aff. Tardieu). — Ajoutons, pour compléter les données fournies par la doctrine sur cette grave question, que M. Sériziat, no 21, a mis en avant un système qui s'écarte à la fois de l'opinion admise par MM. Bellot, Dal'oz et Tessier, et de celle que nous avons soutenue. «La donation, dit cet auteur, devra conserver son effet en ce sens, que le mari n'en profitera pas. La femme n'en jouira pas davantage; mais les revenus seront capitalisés pour former une somme qui ne sera payable à la femme qu'après la dissolution du mariage. » Les considérations que nous avons présentées, ou du moins une partie de ces considérations, s'élèvent aussi contre ce système mixte, qui, d'ailleurs, est, aussi bien que l'opinion tranchée que nous avons combattue, en opposition avec le principe de l'immutabilité des conventions matrimoniales. Tel est aussi l'avis de M. Taulier, t. V, p. 232.

disposer comme il l'entend, et tout ce qu'il acquiert au moyen de cette dot ou qu'il accepte en payement d'icelle devient sa propriété personnelle. Mais il en est autrement si la dot n'a été constituée qu'à charge d'emploi, ou s'il a été convenu que l'immeuble qui serait donné en payement de la dot serait dotal: alors l'objet acquis avec les deniers dotaux, ou l'immeuble donné en payement, deviennent dotaux eux-mêmes et sont par conséquent la propriété de la femme. La clause d'emploi est, du reste, d'un si fréquent usage et d'une si grande importance, qu'il nous a semblé utile de lui consacrer une section spéciale (1).

414. Si l'objet de la dot ne peut être changé après le mariage, il arrive souvent que cet objet, incertain lors du contrat, n'est fixé qu'après. Il en est ainsi toutes les fois que la dot consiste en une obligation alternative; c'est alors le payement, comme on l'a déjà dit, qui détermine l'objet de la dot. Mais le choix une fois consommé, le principe de l'immutabilité ne permet plus de remplacer la chose payée par l'autre chose, qui originairement était aussi dans l'obligation.

Que dire maintenant du cas où la promesse de dot ne frappe directement qu'une chose, mais avec la faculté pour le débiteur de se libérer au moyen d'une chose différente; quand une seule chose, en un mot, est dans l'obligation, et l'autre, pour parler le langage des docteurs, seulement in facultate solutionis? Est-ce encore le payement qui détermine le véritable caractère de la dot?

L'affirmative nous semble évidente, quand la chose formant l'objet direct de l'obligation est une chose non fongible, et celle laissée in facultate solutionis, une somme d'argent ou toute autre chose fongible; car, si le mari n'a reçu qu'une somme d'argent, il serait déraisonnable de vouloir l'obliger à rendre l'objet qui était directement dans l'obligation, puisqu'il ne l'a pas et qu'il est ordinairement dans l'impossibilité de se le procurer.

Il y a plus de difficulté quand la chose comprise directement dans l'obligation était une somme d'argent ou une chose fongible, et la chose laissée in facultate solutionis, une chose non fongible; car, si l'on paye celle-ci, le mari ne laisse pas de pouvoir restituer facilement celle-là. Il nous semblerait injuste pourtant que le mari pût être contraint de restituer une valeur supérieure à celle qu'il a reçue; et s'il peut toujours se libérer en rendant l'objet payé quand il y aurait perte pour lui à se libérer (1) V. la section suivante.

autrement, il est juste qu'il ne puisse pas non plus retenir l'objet quand il y trouverait de l'avantage; c'est-à-dire en définitive, que dans notre sentiment (1), la dot consiste toujours dans l'objet payé, qui est le seul en réalité que la femme ait apporté au mari pour supporter les charges du mariage, et le seul par conséquent auquel la définition de la dot, écrite dans l'art. 1540 du Code, puisse convenir.

Pour qu'un immeuble donné en payement de la dot constituée en argent soit dotal, il n'est donc pas indispensable, comme une lecture superficielle de l'art. 1553 porte d'abord à le croire, que cela ait été dit expressément dans le contrat de mariage : il suffit que le mari ait été dans l'impossibilité de refuser ce mode de payement. C'est seulement dans le cas où le mari a pu exiger la dot en numéraire, que la seconde disposition de cet article doit être appliquée, et que l'immeuble devient sa propriété personnelle.

415. Le fonds dotal peut recevoir des augmentations naturelles par l'effet d'alluvions, d'atterrissements, ou d'autres causes semblables. Ces augmentations sont dotales comme le fonds primitif dont on ne peut généralement les distinguer (2). Il en est de même de l'île formée en face du fonds, quoiqu'elle se distingue mieux de ce fonds, parce que les avantages accordés aux riverains d'un fleuve ou d'une rivière ne sont, en général, qu'une sorte d'indemnité des pertes que ce même voisinage peut leur causer (3) de même encore de l'accroissement de valeur résultant de l'extinction d'un usufruit non racheté à prix d'argent ou de toute autre cause.

Quant aux augmentations et aux améliorations industrielles, il faut adopter, ce semble, un principe différent. Il ne doit pas, en effet, dépendre de la femme de soustraire à ses créanciers des valeurs paraphernales, en les employant à des constructions ou autres améliorations sur le fonds dotal. Ses créanciers devraient donc être admis à faire détacher du fonds tout ce qui serait susceptible de l'être, à la charge de le rétablir dans son état primitif, à moins que la femme n'offrît des sûretés pour le payement de la plus value.

Quant aux améliorations qui ne peuvent se détacher du sol,

(1) V., en sens contraire, M. Tessier, t. I, p. 214.—Dans l'ancien droit, Roussilhe, t. I, p. 252, décidait de même; mais c'était par application du principe que l'estimation de l'immeuble valait vente à l'égard du mari, principe que le Code a changé.

(2) L. IV, D., De jure dot., V. M. Tessier, t. I, p. 284.

(3) V. M. Sériziat, p. 87, no 78.

comme serait le marnage des terres ou d'autres dépenses semblables, les sommes paraphernales employées à cet objet devraient être considérées comme éteintes, et les créanciers de la femme auraient à s'imputer de n'avoir pas pris les précautions convenables pour empêcher la disparition de ces deniers. Il paraîtrait seulement équitable, si l'origine paraphernale des deniers était bien certaine, et l'accroissement de revenu procuré par ces deniers certain aussi, d'autoriser ces créanciers à pratiquer annuellement des saisies sur ce surcroît de revenu, jusqu'à ce qu'ils fussent payés.

Quant à l'augmentation du fonds dotal qui peut être le résultat d'un partage ou d'une licitation, nous avons déjà exposé cidessus (1) dans quel cas elle doit être réputée dotale ou, au contraire, paraphernale.

SECTION V.

DE LA CLAUSE D'EMPLOI.

Sommaire.

416. L'emploi doit être fait de la manière indiquée par le contrat de mariage. 417. Comment doit-il avoir lieu, quand le contrat dit simplement qu'il sera fait emploi ?

418. L'emploi peut porter sur des biens appartenant au mari.

419. L'emploi doit être fait en biens sûrs et responsables.

420. Le débiteur de la dot n'est pourtant responsable de l'éviction qu'en cas de négligence ou d'imprudence.

421. L'acceptation de la femme n'est pas nécessaire pour l'emploi, quand le contrat de mariage ne l'exige point.

422. La femme n'a donc pas le droit d'opter entre la chose acquise et une

créance pour son mari.

423. Si le contrat de mariage exige le consentement de la femme, l'emploi n'est

valable qu'à cette condition.

424. L'acceptation de la femme peut être faite après l'acquisition du mari, mais elle ne peut rétroagir.

425. L'emploi ne peut résulter que d'une déclaration expresse du mari. 426. Cette déclaration peut être faite après l'acquisition, mais elle ne produit alors d'effet que du jour où elle est faite.

427. Il n'est pas rigoureusement nécessaire que le payement soit fait avec les deniers dotaux. - Exemples.

428. Conséquences de l'emploi régulier.

429. Conséquences du défaut d'emploi, quand le prix n'a pas été payé.

430. Le défaut d'emploi expose le débiteur qui a payé le mari aux poursuites

de la femme.

(1) V. n° 395.

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