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clarent exclure la communauté sans stipuler expressément la séparation de biens, c'est le régime des époux mariés sans communauté, comme plus conforme à la nature du mariage, qu'ils sont censés adopter (1).

768. Les principales règles de ce régime sont exposées dans les art. 1530, 1531, 1532, 1533, 1534 et 1535 du Code, que nous allons reproduire textuellement, pour arriver tout d'abord à prouver cette proposition fondamentale qui fournit la solution de toutes les questions secondaires, à savoir : qu'à part l'aliénabilité des biens, les règles du régime simplement exclusif de communauté sont absolument les mêmes que celles du régime dotal (2).

« La clause portant que les époux se marient sans communauté ne donne point à la femme le droit d'administrer ses biens, ni d'en percevoir les fruits; ces fruits sont censés apportés au mari pour soutenir les charges du mariage (1530).

>> Le mari conserve l'administration des biens meubles et immeubles de la femme, et, par suite, le droit de percevoir tout le mobilier qu'elle apporte en dot, ou qui lui échoit pendant le mariage, sauf la restitution qu'il en doit faire après la dissolution du mariage, ou après la séparation de biens qui serait prononcée par justice (1531).

>> Si, dans le mobilier apporté en dot par la femme, ou qui lui échoit pendant le mariage, il y a des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, il en doit être joint un état estimatif au contrat de mariage, ou il doit en être fait inventaire lors de l'échéance, et le mari en doit rendre le prix d'après l'estimation (1532) (3).

>> Le mari est tenu de toutes les charges de l'usufruit (1533). >> La clause énoncée au présent paragraphe ne fait point obstacle à ce qu'il soit convenu que la femme touchera annuellement, sur ses seules quittances, certaines portions de ses revenus pour son entretien et ses besoins personnels (1534).

>> Les immeubles constitués en dot, dans le cas du présent paragraphe, ne sont point inaliénables. Néanmoins ils ne peuvent

(1) Conf. M. Toullier, t. XIV, no 15.

(2) Telle est aussi la doctrine de M. Zachariæ et de ses annotateurs. V. t. III, § 499, p. 385, et § 531, p. 562.

(3) Tous les auteurs font remarquer que cet article déroge à l'art. 587, d'après lequel l'usufruitier doit rendre les choses fongibles en même quantité et qualité, ou leur estimation à la fin de l'usufruit; mais la règle doit êtrel a même pour la dot sous le régime dotal.

être aliénés sans le consentement du mari, et, à son refus, sans l'autorisation de la justice (1535). »

769. Nous avons dit que les règles du régime sans communauté ne diffèrent en rien de celles de la dot sous le régime dotal, sauf l'aliénabilité. Notre unique tâche dans ce chapitre, consiste à placer ce principe à l'abri de controverse; car, une fois établi, l'on n'aura plus qu'à appliquer, pour toutes les questions de détail, les règles posées dans le chapitre précédent.

La lecture des articles du Code prouve déjà cette parfaite similitude.

Les fruits des biens de la femme mariée sans communauté sont censés apportés au mari pour soutenir les charges du mariage, absolument comme ceux de la dot sous le régime dotal (art. 1530 et 1540). Dans l'un comme dans l'autre cas pourtant, la femme peut se réserver une portion de ses revenus pour son entretien et ses besoins personnels (art. 1534 et 1549).

Dans les deux cas, le mari a l'administration des biens meubles et immeubles de la femme, et, par suite, le droit de percevoir tout le mobilier dont il doit jouir (art. 1531 et 1549).

Dans les deux cas aussi, il est tenu de toutes les charges de l'usufruit (art. 1533 et 1562).

Or, quand la loi elle-même établit une parité aussi parfaite sur les points fondamentaux, comment supposer qu'elle ait voulu établir des différences sur des points tout à fait secondaires? Comment supposer, en d'autres termes, qu'elle ait voulu tirer des mêmes principes des conséquences différentes? A la vérité, il y avait autrefois, indépendamment du point capital relatif à l'aliénabilité, quelques différences entre les droits des époux mariés en pays coutumiers sous le régime exclusif de communauté, et ceux des époux mariés en pays de droit écrit sous le régime dotal, et M. Duranton (1) en a tiré cette conséquence que ces différences doivent aussi être admises sous le Code. Mais cette conséquence n'est nullement légitime. Les différences dont il s'agit ne pouvaient, en effet, s'expliquer rationnellement dans des positions identiques; elles tenaient uniquement à des habitudes et à des antipathies que les auteurs du Code civil, ennemis de toute diversité capricieuse, n'ont pu partager, et dont le maintien contrarierait la fusion qu'ils ont voulu opérer.

770. L'historique de la formation de la loi démontre, du reste

(1) T. XV, noo 278 et 303. M. Bellot, t. III, p. 353, et t. IV, p. 480, tombé dans la même erreur.

est

avec évidence, que les auteurs du Code se sont proposé d'établir l'assimilation que nous induisons du texte.

Dans le projet originaire, on le sait, le régime dotal ne se trouvait pas réglementé d'une manière spéciale. Les auteurs de ce projet distinguaient seulement deux genres principaux d'association conjugale, la communauté et l'exclusion de communauté. Ils subdivisaient ensuite ce dernier genre en trois espèces : dans l'une, le mari devait jouir de tous les biens de la femme; dans l'autre, il ne devait jouir d'aucun de ces biens; dans la troisième enfin, il devait jouir de certains biens sans jouir des autres. Le premier cas devait se réaliser lorsque tous les biens de la femme seraient déclarés dotaux, ou que les époux déclareraient simplement se marier sans communauté ; le second, lorsque tous les biens de la femme seraient déclarés paraphernaux, ou que les époux déclareraient être séparés de biens; le troisième, lorsque les biens de la femme seraient déclarés, en partie dotaux, en partie paraphernaux (1).

Les auteurs de ce projet ne faisaient donc aucune différence entre le cas où tous les biens de la femme étaient déclarés dotaux, et le cas où les époux déclaraient simplement se marier sans communauté; dans les deux cas, l'association conjugale devait être régie par des règles absolument conformes à celles tracées dans les art. 1530 et suivants du Code pour le cas de simple exclusion de communauté (2).

Ce projet, il est vrai, fut ensuite considérablement modifié ; mais on connaît les motifs de ces modifications. Les partisans du régime dotal se plaignirent de ce que ce régime n'était présenté dans le projet que comme une exception au régime de la communauté, tandis qu'à leur dire il méritait tout au moins les honneurs d'un chapitre spécial; ils se plaignirent de ce que les articles qui le réglementaient se réduisaient à six dispositions évidemment incomplètes, alors que le régime de la communauté était réglé par une longue série de dispositions; ils se plaignirent surtout de ce que les auteurs du projet avaient déclaré les biens dotaux aliénables, et avaient même défendu d'en stipuler l'inaliénabilité.

C'est pour faire droit à ces réclamations qu'on ajouta au projet primitif un nouveau chapitre destiné à régler avec plus d'étendue les règles du régime dotal, et, en particulier, celle de l'ina

(1) V. M. Locré, Législation civile, t. XIII, p. 143 et suiv. (2) V. M. Locré, loc. cit.

liénabilité des biens dotaux qu'on jugea indispensable d'admettre. Les articles correspondants aux art. 1530 et suiv. du Code furent alors modifiés pour ne s'appliquer qu'au régime simplement exclusif de communauté; mais il semble que la pensée première de la loi subsista toujours, c'est-à-dire qu'à part l'aliénabilité des biens, ce régime devait produire les mêmes effets qu'une constitution de dot universelle.

Parcourons en effet rapidement les diverses dispositions du chapitre du régime dotal relatives à la dot, autres que celles concernant l'inaliénabilité, et il sera aisé de prouver que toutes doivent s'appliquer au régime exclusif de communauté. Nous passons sous silence, dans ce parallèle, les points sur lesquels on trouve des dispositions semblables dans les art. 1530 et suiv., puisque, sur ces points, il ne saurait y avoir aucune difficulté.

771. L'art. 1549 d'abord, plus explicite en cela que l'art. 1530, dit que le mari a seul le droit de poursuivre les débiteurs et détenteurs de la dot. Or, dans les mariages contractés sans communauté, le mari jouit de tous les biens de la femme : donc, il a le droit d'en poursuivre les débiteurs et les détenteurs (1). Bien plus, comme d'un côté le mari a un intérêt plus actuel que celui de la femme à obtenir le payement ou le délaissement de la dot; comme, d'un autre côté, il est responsable, nous le redirons bientôt, de toutes les détériorations survenues par sa négligence, il semble naturel que seul il puisse agir, c'est-à-dire que la femme ne puisse, même en demandant l'autorisation à la justice, intenter une action contre le gré du mari.

772. L'art. 1550 dispense le mari de fournir caution pour la réception de la dot, s'il n'y a pas été assujetti par le contrat de mariage; il n'y est certainement pas soumis davantage à raison de la réception du mobilier de la femme, dans le cas du régime sans communauté (2).

3. Le mari, d'après ce qui a été dit, n'est pas obligé, pour jouir des biens dotaux de la femme, de dresser au préalable un inventaire, et la femme, par une conséquence fort équitable, doit toujours être admise à prouver, par commune renommée, la consistance du mobilier dont le mari s'est emparé au jour du mariage. L'art. 1531 n'impose pas non plus au mari, en cas d'ex

(1) M. Duranton, t. XV, no 1086, excepte mal à propos les détenteurs d'immeubles.

(2) Conf. MM. Delvincourt, t. III, p. 98; Bellot, t. III, tur, no 503.

p. 347; Bat

clusion de communauté, un inventaire préalable du mobilier comme condition indispensable de sa jouissance; il serait injuste, par conséquent, de ne pas admettre la femme à prouver la consistance de ce mobilier, même par la commune renommée (1).

74. L'art. 1551 dit que l'estimation des meubles dotaux contenue dans le contrat de mariage vaut vente, s'il n'y a stipulation contraire, et l'art. 1552, que l'estimation des immeubles ne vaut pas vente, toujours sauf stipulation contraire. On doit décider de même dans le cas du régime simplement exclusif de communauté, puisque l'analogie est parfaite.

775. L'art. 1553 dit que l'immeuble acquis des deniers dotaux n'est pas dotal, si la condition de l'emploi n'a pas été stipulée par le contrat de mariage, et qu'il en est de même de l'immeuble donné en payement de la dot constituée en argent, c'est-à-dire que, dans les deux cas, la dot de la femme reste ce qu'elle était et peut être exigée du mari, quand même celui-ci aurait acquis ou reçu l'immeuble au nom et du consentement de la femme, qui ne peut changer le caractère de la dot pendant le mariage.

Dans le cas du régime sans communauté, comme la femme peut toujours, avec le consentement du mari, aliéner sa dot, il n'est pas douteux que l'immeuble acquis ou reçu en son nom et avec son consentement, en emploi ou en payement de cette dot, ne devienne sa propriété personnelle; mais, à cette différence près, qui tient à l'aliénabilité propre à ce régime, l'application de l'art. 1553 ne saurait souffrir de difficulté. Si le mari a acquis l'immeuble ou s'il l'a accepté en payement en son propre nom ou au nom de la femme, mais sans son consentement, il est juste que la chose acquise lui demeure propre, c'est-à-dire qu'il souffre de la perte, si l'affaire a été mauvaise, et, par réciprocité, qu'il profite du gain, si elle a été bonne (2).

776. L'art. 1555 dit que la femme, en cas de refus du mari, peut se faire autoriser par justice à donner ses biens dotaux pour l'établissement de ses enfants d'un précédent mariage; mais qu'elle doit alors réserver la jouissance à son mari. Or, si elle a ce droit sous le régime dotal, même lorsqu'elle a des biens paraphernaux, à plus forte raison l'a-t-elle sous le régime

(1) Conf. MM. Toullier, t. XIV, nos 24 et suiv.; Dalloz aîné, Ancien Rép., t. X, p. 282, no 2. V. cependant MM. Duranton, t. XV, no 289; Bellot, t. III, p. 341 et suiv.; Taulier, t. V, p. 220.

(2) V. MM. Duranton, t. XV, no 263; A. Dalloz, vo Communauté, no 1109.

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