Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

une pièce éditée dans les précédentes collections, pièce incontestablement plus importante que toutes celles que les veilles du P. Theiner ont pu découvrir, et qui brille par une éclipse totale dans l'édition de Didot. Or, cette pièce est précisément celle qui traite de la révolution du Comtat au spirituel et au temporel, et qui condamne les Droits de l'homme sub duplici respectu.

Que cette omission d'une pièce qui, avec la traduction, n'a guère moins de cent pages, soit une inadvertance, c'est absolument impossible, d'autant plus que cette omission est la seule. Qu'elle soit une omission préméditée, c'est absolument nécessaire.

Mais pourquoi le P. Theiner n'a-t-il pas voulu mettre dans sa magnifique collection imprimée à Paris une des pièces les plus instructives que le Saint-Siége ait données de 1790 à 1800? A-t-il craint de compromettre une certaine popularité qu'il doit à ses dissentiments avec les jésuites et à sa justification de Clément XIV ? Cette hypothèse, qui a pu rencontrer des partisans, n'est pas la nôtre. Nous croyons que l'illustre oratorien n'a pas donné le bref dont il s'agit parce qu'il ne rentrait pas exactement dans son titre : Documents relatifs aux affaires religieuses de la France, attendu que Pie VI ne s'adressait pas du tout aux Français (on était alors en 1791), mais à ses sujets du Comtat Venaissin. Que d'autres trouvent cette supposition trop subtile et plus jésuitique qu'oratorienne, peu nous importent ces pasquinades. Il est de la dernière évidence que le P. Theiner n'a omis le bref du pape Pie VI que parce qu'il le connaissait dans toutes ses parties, et cela nous suffit pour affirmer que la condamna

www

tion de la Déclaration n'était nullement inconnue au sein du collége des théologiens romains.

Si donc la députation de ce collége a laissé M. l'abbé Godard dans l'ignorance où elle l'avait trouvé, c'est qu'il lui a plu de faire ainsi. — Mais alors, à quoi se borne la valeur d'une approbation des théologiens romains, dans les termes précités? A beaucoup et à peu de chose. Beaucoup, si on considère combien il est précieux de posséder l'assurance qu'un livre ne renferme aucune proposition qui, considérée dans ses rapports avec la doctrine catholique, soit digne de censure; peu de chose, s'il s'agit de savoir à quel point un livre est savant, bien fait et opportun.

Ceci posé, nous nous sentons enhardi à examiner certaines propositions de la seconde édition, que M. l'abbé Godard a maintenues malgré les critiques que nous avions faites dans le Monde, et à en discuter d'autres qu'il avait faiblement alléguées la première fois, et sur lesquelles il a cru devoir renchérir en seconde instance.

M. l'abbé Godard, cherchant à expliquer comment il a pu s'exprimer trop favorablement sur la Déclaration des droits de l'homme, après plusieurs raisons, arrive à celle-ci, qu'il a ménagée pour la péroraison : « C'est en« fin à cause de la manière dont cette Déclaration fut «< accueillie à la Constituante par les évêques et le clergé «< du second ordre, qui l'ont souscrite; » et il y revient encore quelques pages plus bas en ces termes : « Nous « ne prétendons pas atteindre (par nos reproches) les « évêques présents qui ont souscrit la Déclaration, ainsi << que le clergé du second ordre. S'ils ont cru devoir agir

libéralisme. Si Mer Cruice est pour Suarez, en qui s'entend toute l'école, et pour saint Thomas dont la Somme figurait à côté des saints Evangiles, sur l'estrade d'honneur qui s'élevait au milieu du concile de Trente, nous concevons qu'il parle de la transformation de la monarchie païenne par l'esprit chrétien, qu'il montre les Papes préparant la civilisation moderne, tandis que leur puissance temporelle servait admirablement la liberté et le progrès des peuples. Mais si Monseigneur, pour des raisons à lui connues, n'ose pas abandonner l'école gallicane et le système de Bossuet sur les droits dynastiques, comment peut-il parler encore de la transformation de César par le christianisme et du droit nouveau des peuples régénérés dans le baptême ? Ne sait-il pas que le César gallican est calqué sur le César romain, et qu'une partie trop considérable de l'épiscopat français, victime de l'éducation théologique qu'elle avait reçue dans l'ancienne Sorbonne, formulait l'inamissibilité du pouvoir royal en 1826 et en 1835, comme auraient pu le faire les légistes de l'antiquité la plus aveuglée par l'esclavage? N'a-t-il pas lu dans la préface de la censure des cinquante-six propositions lamennaisiennes, préface qui a paru en 1835 sous la signature de Mer l'archevêque de Toulouse, l'apologie de ce passage d'un mandement de Mgr Legroing de la Romagère, évêque de Saint-Brieuc à cette époque? « Fidèles à Dieu ainsi que vous le fûtes toujours, vous << continueriez d'obéir dans l'ordre civil à celui qui tien<«< drait du ciel la puissance souveraine, quelque déréglées que fussent ses mœurs, quelle que fût sa croyance << religieuse, quels que pussent être les abus apparents

serment constitutionnel, ne justifie toutes les assertions qu'on rencontre dans l'Exposé des principes qu'ils envoyèrent de Londres à Sa Sainteté. Certes, en parlant de la sorte nous n'avons nulle envie de renier ou de méconnaître les grands talents et les grandes vertus de cette antique Église, notre Mère après celle de Rome, de cette Église qui nous a engendrés à la foi et au sacerdoce, Église qui a résisté jusqu'au sang, ce que nous n'avons pas fait encore, et qui, revenant de l'exil au milieu des pierres dispersées du sanctuaire, rebâtit avec un égal courage le temple matériel et le temple spirituel du divin Crucifié. Mais ses malheurs ne peuvent pas non plus nous faire oublier ses défauts; nous avons même le devoir de rechercher, en face des mystères de l'avenir, si ces défauts n'ont pas été pour une part dans ses malheurs. En effet, moins on nous suppose d'héroïsme au cas d'une nouvelle commotion sociale, plus il est nécessaire que nous prenions une position inexpugnable et facile à défendre.

Or, il est incontestable que la théologie, telle qu'on l'enseignait en France au xvír° siècle, était pleine de préjugés, de concessions, de lacunes, et même d'infiltrations de l'esprit philosophique. Les pièces collectives signées par l'épiscopat et le clergé pendant la Révòlution, en portent les traces les plus regrettables. Le Saint-Siége seul parle toujours la même langue, et au risque de n'être pas compris, d'inspirer même un certain respect humain à ceux qui soutenaient ses droits vis-à-vis de l'Assemblée nationale, il frappe sur les erreurs en vogue à tort et à travers, comme un sourd sublime aux agitations éphémères, n'écoutant que la voix éternelle de la tradition.

On lui en faisait un sarcasme, et il s'en faisait une gloire!

Du reste, en parlant avec cette franchise du bilan de l'Église gallicane en 89, nous ne dirons rien que les polémistes catholiques de cette époque n'aient osé dire dans le temps, avant le retour de l'ordre avec le Premier Consul. Et ici ne croyez pas que nous fassions allusion aux génies chrétiens que la fureur révolutionnaire avait poussés à l'émigration, de Maistre, de Châteaubriand, de Bonald. Ce qui est plus curieux et plus fort, à Paris même, les prêtres qui secondaient de leur collaboration les revues catholiques dont M de Boulogne était l'âme, Barruel, Feller, Guillon, tenaient le même langage et déploraient hautement que les évêques et prêtres de l'Assemblée constituante, victimes de leur éducation gallicane, eussent admis certains principes qui rendaient bien difficile le plan général de la controverse chrétienne. Le dernier que nous avons nommé, M. l'abbé Guillon, qui devait si tristement succomber à la paix après avoir vaincu à la guerre, dans sa collection générale des brefs relatifs à la Révolution française, publiée à Paris en 1798, ne put se résoudre à laisser passer sans réflexions et sans réserves la réponse des prélats au bref du 10 mars 1791. Il accompagna le texte de notes abondantes, qui sont un bel exemple du zèle que les écrivains ecclésiastiques peuvent avoir pour l'intégrité de la doctrine, en y prodiguant les marques les plus sincères de respect et d'attachement pour leurs Pères dans la foi. L'édition des brefs, que nous avons continuellement citée dans le corps de cet ouvrage, et qui porte la date de Rome, 1800, n'a pas

« VorigeDoorgaan »