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Alpes, parmi lesquels figurait notre savant professeur, M. Lory, que M. Rolland-Banès a pu faire, en dix ou douze jours, sur les formations géologiques des Alpes, une étude qui, pour un géologue seul, livré à lui-même, exigerait plusieurs années.

Nous ne suivrons par le savant ingénieur dans ce travail descriptif et scientifique, dont il serait impossible de reproduire et difficile de résumer les détails, soit qu'il étudie dans la première partie le flanc nord de la Maurienne, depuis Saint-Jean-de-Maurienne jusques et au-delà de Modane, en suivant la rive droite de la rivière de l'Arc, ce principal affluent de l'Isère, soit qu'il explore, dans la seconde, la montagne traversée par le tunnel, entre Modane et Bardonnèche, en expliquant les moyens employés pour en activer le percement. La troisième partie a un intérêt plus direct pour la connaissance de notre sol dauphinois. L'auteur revient d'Italie en France. par le mont Genèvre « où nous trouvons, dit-il, des » blocs erratiques d'euphotides, ainsi que des masses » de variolites, de diallages et d'euphotides, qui se sont fait jour à travers les schistes calcaréo-talqueux, phé»nomène géologique et minéralogique du plus grand » intérêt. » Après avoir suivi la Doire d'Oulx à Cézanne, où il rencontre une vallée de l'aspect le plus sauvage, qui offre un exemple curieux d'une vaste moraine glacière, il arrive sur le plateau du col du mont Genèvre << borné à droite et à gauche par les montagnes arides > entièrement formées par un grand développement des » calcaires noirs du Briançonnais et laissant apercevoir » dans le fond l'admirable panorama des pics grani»tiques et des glaciers du mont Pelvoux. » — « Cette » montagne, ajoute-t-il, remarquable et entièrement

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» composée de roches granitiques (dites vulgairement >> roches primitives parce qu'elles composent en ma»jeure partie la première croûte solide du globe), est » un exemple des plus frappants des soulèvements pro>> duits par la chaleur centrale, alors que la croûte so» lide de la terre pouvait encore céder à la force d'expansion des gaz produits par la masse en fusion; ces >> pics de granit, s'élevant jusqu'à une hauteur de 4,093 >> mètres et couronnant des masses énormes, ne peu» vent être expliqués que par une force provenant du » centre de la terre. >>

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M. Rolland-Banès, après avoir franchi le mont Genèvre et traversé Briançon, signale comme une application directe et intéressante de la géologie à l'industrie, la mine de galène argentifère de l'Argentière, l'une des plus riches de France. Il apprécie la puissance des filons de cette mine, détermine leurs directions, évalue les produits en minerai que leur exploitation comporte. Il termine sa notice en résumant les résultats obtenus dans la session extraordinaire de la Société géologique.

2o Ronsard. Etude historique et littéraire à l'occasion de l'inauguration de sa statue à Vendôme, par M. R. Pornin, membre résidant. Nous passons des sciences naturelles, par une transition un peu brusque, à l'histoire littéraire, et nous trouvons ici une étude instructive et complète sur ce grand poëte de la Renaissance, si loué, si célébré au xvio siècle, si contesté, si déprécié au XVII, et dont notre statuaire, M. Irvoy, a sculpté la saisissante image. Narrateur élégant et critique judicieux, M. Pornin suit Pierre de Ronsard depuis son berceau, à l'humble manoir de la Poissonnière, dans les Vaux du Loir, jusqu'à sa retraite de la cour et à sa mort

au prieuré de Cosme-en-l'Isle, dans la Touraine. Elevé au collége de Navarre, où il rencontra l'amitié de Charles de Lorraine, attaché comme page aux deux fils de François Ier; emmené par Jacques d'Ecosse en Angleterre, où il se livra à l'étude des langues; revenant en France pour être chargé par le duc d'Orléans de plusieurs missions secrètes, le jeune gentilhomme rechercha avec ardeur le commerce des érudits de l'Allemagne et de l'Italie et voulut, de bonne heure, ajouter la distinction du savoir à la faveur dont il jouissait à la cour des Valois. Familier avec la langue latine et les poésies d'Horace, traducteur en vers et traducteur heureux du Plutus d'Aristophane, épris du système de rénovation littéraire professé par Joachim de Belley dans son livre de la Deffense et illustration de la langue française, formé pendant sept années, avec Antoine Baïf, au culte et à la discipline de l'antiquité, il répondit au programme de la nouvelle école en donnant au public son premier livre des AMOURS, où l'on voyait déjà les deux éléments avec lesquels il prétendait édifier notre langue poétique la création et l'infusion des mots, l'imitation constante des œuvres gréco-latines. L'élégie à son livre et les Amours de Marie consommèrent son succès à la cour, sa renommée européenne, son influence sur son siècle. L'idée que personnifiait Ronsard ne fut pas une erreur; elle répondit aux nécessités du temps; à la société nouvelle qui devait bientôt sortir de la Renaissance et de la Réforme, il fallait une langue, une littérature nouvelle. Ronsard en fut le promoteur. On peut, avec sévérité, lui contester l'audace de son entreprise; on ne saurait, sans injustice, en méconnaître l'utilité. Cette entreprise a été généreuse dans son principe, nationale dans son but;

elle ne fut ni sans fruit ni sans honneur. Ce poëte, qui a quelquefois élevé notre poésie à une hauteur de pensée inconnue jusqu'à lui, ou qui a su l'embellir du charme des images, n'était certes pas indigne d'être le précurseur de Corneille et de Racine.

Pour juger Ronsard comme poète, en dehors de son rôle de novateur et de réformateur du langage, M. Pornin cite quelques passages de ses meilleures œuvres poétiques, de celles surtout où il se montre l'écho souvent fidèle d'Anacreon et de Tibulle. Quand Ronsard ne méconnait pas son génie et qu'il n'emprunte à l'antiquité que l'analogie de ses images, il est poète, il tient du ciel le don de sentir et de peindre. Cette poésie neuve qui respirait un abandon rêveur, un goût fantaisiste de couleur et de mélodie, pouvait n'être pas sans charme pour les esprits sérieux, mais elle faisait le délice des femmes, si portées de leur nature à juger des choses par impression. Aussi, aux glorieux témoignages que Ronsard avait reçus des savants, des érudits de l'époque, étaient venus s'ajouter les suffrages des femmes les plus éminentes. Jamais royauté littéraire ne fut plus unanimement ni plus solennellement décernée.

Mais cette gloire eut des revers et des ombres. A la cour de Charles IX, où la faveur royale l'illusionne et accroît ses hardiesses, il s'adonne à la mise en scène de la vie champêtre, qui ne pouvait être qu'une débauche d'imagination inspirée par le désir de plaire. Il travestit, au mépris du goût et des convenances, les noms princiers des personnages de ses idylles et oubliant ici la simplicité des sujets qu'il traite, il dénature, avec son néologisme, son afféterie et ses jeux d'esprit, le noble génie de notre langue. A l'églogue succèdent les premiers chants de la

Franciade, cette malheureuse tentative homérique à laquelle son génie était absolument contraire et que la mort de Charles IX fit avorter. Détròné bientôt par Desportes qui devint le poète dominant de la cour de Henri III, surpris avant l'âge par les infirmités, suite de ses veilles et des molles délices dont il avait vécu, il se détermina à devancer les jours de la retraite, et fut s'enfermer dans un de ses bénéfices, où les hommages vinrent cependant le chercher encore dans la solitude.

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Citons en terminant les dernières appréciations de M. Pornin: « La verve de Ronsard, dit-il, ne soutient << pas longtemps l'effort, elle manque d'haleine; d'une « éclatante lumière, elle tombe dans l'ombre, et là << encore elle a des délicatesses, des teintes de philosophie, des traits de mœurs, qualités plus simples, non << moins heureuses... Voilà le poète, quand il dépose l'ingénieuse audace du novateur; génie fier et simple, mobile et passionné, capable de prendre toutes les «formes, toutes les nuances de la pensée ou du senti«ment. Plaignons Malherbe d'avoir eu l'injurieuse « humeur de biffer vers par vers les inspirations de

Ronsard; regrettons que Boileau, sur les traces de « Malherbe, ait prononcé sans appel contre ce fils pre<<mier-né de la Renaissance. Dans l'œuvre de notre régénération littéraire, chacun de ces trois noms mé<< rite une place distincte et légitimement acquise; l'un n'a aucun droit pour en exciure l'autre. Loin de nous l'intention de préconiser l'appareil néologique que « le chef de la Pléiade s'est évertué à imposer au génie français ne lui faisons grâce ni de ses descriptions << grotesques, ni de son érudition pédante, ni de ses en« jambements défectueux; mais osons dire qu'il a im

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