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Mais on connaît les dissensions violentes qui avaient existé entre les barons anglais et Jean Sans-Terre. Ces querelles, quelque temps assoupies, se renouvelèrent avec son fils, Henri III, et, à la suite de la défaite de celui-ci, la reine et les princes savoisiens durent quitter le pays. C'est alors que le comte Pierre alla chercher querelle à l'évêque de Lausanne, en se prévalant des droits sur divers fiefs du pays de Vaud qui avaient appartenu à la famille de sa femme, née princesse de Zeringhen. Il réussit à se créer un établissement et à prendre dans le canton de Vaud un rôle propondérant, et alors il insista pour organiser dans la contrée des Etats conformes à ceux qu'il avait vu fonctionner en Angleterre. Del Pozzo a rapporté avec détail l'histoire de cette création, qu'on retrouve aussi dans l'histoire de la Suisse, de Muller, et il constate notamment qu'indépendamment de leurs réunions ordinaires, les Etats pouvaient se rassembler quand ils le voulaient, à Mondon, chez le gouverneur du pays, en faisant seulement prévenir trois jours à l'avance le syndic de cette ville.

Ceci tendrait à faire croire que les Etats de Savoie, au moins depuis le temps où ils avaient déféré la souveraineté du pays au comte Pierre, avaient, comme dans le pays de Vaud, qui était resté placé en meme temps. sous l'autorité du prince Pierre, des moyens sommaires d'assurer leur réunion.

Ce point, et une foule d'autres, exigeraient encore une étude longue et détaillée pour leur éclaircissement. En attendant que je puisse la reprendre, je me borne à faire remarquer que les Etats français, qui se sont assemblés seulement à partir du commencement du XIVe siècle, n'ont pas exercé des prérogatives aussi étendues que celles qui ont appartenu aux Etats de Savoie.

Leur convocation a presque toujours été une cause de trouble dans l'Etat. Quoiqu'ils aient quelquefois demandé l'avantage d'être assurés d'avance d'une convocation périodique de la part du souverain, ils ne l'ont jamais obtenue; leur influence a été dominée et contrariée par celle des Parlements, qui sont parvenus à attirer à eux une foule de pouvoirs politiques dont n'a jamais joui le Sénat de Savoie, ni celui de Piémont, érigé plus tard. Et enfin, les rois, qui craignaient les effets de leur puissance, ont tenu, depuis Louis XIII, à les laisser dans l'oubli. On sait que leur dernière convocation eut lieu sous ce prince, en 1614, et qu'ils ne furent ensuite rappelés qu'en 1789, lorsque la révolution était déjà imminente et se préparait à emporter la monarchie.

ELOGE FUNEBRE

DE

M. IMBERT-DESGRANGES

PAR M. GAUTIER,

Président de l'Académie Delphinale.

Séance du 26 février 1878.

L'Académie Delphinale a récemment perdu le plus ancien de ses membres. M. Calixte Imbert-Desgranges, décédé conseiller honoraire à la Cour d'appel de Grenoble, appartenait à notre compagnie dès 1836. La retraite à laquelle il s'était voué, toute studieuse qu'elle était encore, le retenait depuis plusieurs années éloigné de nos séances; mais il en avait été autrefois, pendant une certaine période, un des collaborateurs actifs et assidus. Ceux d'entre nous qui peuvent faire remonter un peu loin leurs souvenirs académiques sont à même de témoigner de la fermeté de son esprit, de l'ardeur de ses convictions, de l'indépendance et de la franche expression de son sentiment. Les Mémoires de l'Académie nous le montrent, en 1838, protestant en termes énergiques contre un projet de fusion qui lui semblait n'être pour la Société des sciences et des arts qu'une proposition de dissolution déguisée au profit d'une autre société. Vers la même époque, il soumet à votre compagnie le projet d'un atlas historique et géographi

T. XI.

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que du Dauphiné, composition étendue et variée, grand tableau encyclopédique auquel viendraient s'appliquer les aptitudes diverses et les recherches spécialisées de chacun de ses membres. Ce projet, dont l'utilité fut généralement reconnue et auquel on applaudit avec empressement, ne put être néanmoins adopté. L'Académie ne se sentit pas organisée pour sa réalisation collective, qu'elle dut abandonner aux bonnes volontés individuelles. Parmi ses travaux ultérieurs, le plus marquant fut sa Dissertation sur le passage d'Annibal à travers les Alpes, où, suivant pas à pas Tite-Live et Polybe, il trace, à l'aide de son érudition et d'une étude approfondie de la topographie des Alpes, un itinéraire nouveau qui concilie dans leurs divergences les récits de l'historien grec et de l'historien latin. Il y a lieu de citer encore ici un Mémoire sur les eaux de la Motte et le projet de les conduire à Grenoble; une étude sur l'harmonie de la cosmogonie de Moïse avec les sciences modernes; un second Mémoire sur le passage d'Annibal, un travail de controverse sur la question du paupérisme, et plusieurs Rapports. On voit par ces œuvres variées, qui touchent à des matières scientifiques et littéraires de divers genres, la part que M. Desgranges avait prise aux labeurs de l'Académie Delphinale et la place qu'il doit conserver dans nos Annales. C'est payer un légitime tribut à sa mémoire que de les rappeler aujourd'hui, en laissant toutefois, à celui qui deviendra son successeur au siége que sa mort laisse vide, le soin de vous entretenir avec plus de détail et d'intérêt de ses écrits, de ses études et de sa vie, et de remplir en son honneur la page que doit lui consacrer notre juste et sympathique confraternité.

COMMUNICATION

DE M. DE ROCHAS D'AIGLUN

CAPITAINE DU GÉNIE

Séance du 20 mars 1878.

Le 7 juin 1788, les membres du Parlement de Grenoble ayant reçu des lettres de cachet pour s'être opposés à l'enregistrement d'édits royaux, il y eut en ville une émeute restée célèbre sous le nom de Journée des tuiles, à cause des projectiles dont le peuple, monté sur les toits, se servit contre les troupes.

M. PILOT a raconté cet épisode dans la partie historique de la Statistique du département de l'Isère, publiée en 1846. C'est au sujet de ce récit que le général DODE (') adressa à M. Pellenc, préfet de l'Isère, la lettre suivante dont j'ai retrouvé le brouillon dans des papiers de famille :

>> Monsieur le Préfet,

Paris, le 18 janvier 1847.

> J'ai l'honneur de vous accuser réception des deux volumes » de la Statistique du département de l'Isère, ainsi que de la Carte » géologique qui les accompagne, dont vous avez eu l'extrême >> obligeance de me faire l'envoi. Ces documents sont d'un grand >> intérêt sous tous les rapports, et le vif attachement que j'ai tou>> jours conservé pour le pays qui m'a vu naître et où j'ai passé ma » première jeunesse, me les rend personnellement très-précieux. » Le récit de la Journée des tuiles, dont j'ai été le témoin, étant >> alors pensionnaire au collége, me la rend présente comme pour» rait l'être un événement récent. Je pourrais y ajouter, comme

(1) Le maréchal Dode naquit en 1775 et avait par conséquent environ 12 ans au moment où se passèrent les faits qu'il raconte.

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