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croître le pin sylvestre; mais, il ne pourrait pas plus que ce pin être cultivé sur des sables quartzeux aussi arides que ceux sur lesquels on peut encore cultiver avec succès le pin maritime. M. Jacquinot de Presle en a fait semer, en 1832, en Sologne, sur une étendue de 42 ares d'un sable blanc improductif; le plant auquel ce semis a donné naissance, avait en 1844 une belle apparence. Le pin laricio présente, comme le pin sylvestre, l'avantage de pouvoir être cultivé sur les terrains calcaires ordinaires, et j'en parle d'après ma propre expérience; je ne puis d'ailleurs dire s'il réussirait aussi bien que le pin sylvestre sur les craies de la Champagne; l'épreuve en aura sans doute été faite, mais les résultats ne m'en sont pas connus.

VII. CREATION D'UNE FUTAIE DE PINS LARICIO. Ce que j'ai dit relativement à la création d'une futaie de pins maritimes, dans le chapitre précédent, s'applique à la création d'une futaie de pins laricio, à quelques modifications près, que je vais indiquer.

Lorsque pour créer une futaie on veut employer la plantation, si l'on se sert de plant herbacé on réussit moins bien avec le plant de pin laricio qu'avec celui de pin maritime, parce que le plant herbacé de la première espèce étant beaucoup plus petit que celui de la seconde, demanderait à être planté avec plus de soin; ce qu'il est difficile d'obtenir quand on opère en grand. Le plant de pin laricio plus âgé, ayant un peu plus de chevelu que celui de pin maritime et étant un peu moins chargé de branches vers la tête, reprend, au contraire, un peu mieux que lui. Ainsi, dans les terrains où les semis échouent ou réussissent mal, on pourra très-facilement créer une pinière de pins laricio en employant la plantation; mais il faut employer du plant âgé de 3 ans au moins. Le plant provenant de semis naturel réussit rarement; il est donc très-important d'employer du plant de pépinière, qui, étant garni de chevelu, reprend très-bien.

M. Vétillart dit, dans ses Observations sur la culture du pin maritime, citées dans le chapitre précédent, qu'il sema en 1830 du pin laricio sur 3 ares de terrain sablonneux préparé avec soin, et que deux ans après, au mois de mars, il repiqua son plant, qui réussit très-bien; mais c'est là une véritable culture en pépinière. M. Jacquinot de Presle a repiqué plusieurs fois du plant de pin laricio, de 2 et 3 ans, pris dans des semis qui avaient été exécutés en grand sur des terrains sablonneux, et il n'a réussi qu'une seule fois. Moi, j'ai repiqué plusieurs centaines de plants de pin laricio de 3 ans, avec beaucoup de soin, dans une terre de pépinière bien préparée, et il n'en est pas resté deux sur cent; j'avais levé ce plant, dans ce semis d'expérience sur labour dont j'ai parlé page 57, et dont je parlerai plus en détail, en ce qui concerne le pin laricio, quand je m'occuperai de sa culture au moyen du semis à demeure. Au même endroit où périssaient presque tous les plants de pin laricio tirés d'un semis sur labour, il n'en périssait, pour ainsi dire, pas un seul de ceux du même âge que l'on plantait en même temps, mais qui avaient été élevés en pépinière.

Si l'on emploie le semis pour créer une futaie de pins laricio, on n'éprouvera

pas plus de difficulté que pour en créer une de pins maritimes. Lorsque les graines de pin laricio sont bonnes, elles lèvent aussi facilement que celles de pin maritime, mais il y en a un plus grand nombre de stériles, et il y a par conséquent plus de déchet dans les premières que dans les secondes : l'on a vu qu'un kilogramme de graine de pin maritime contient trois fois moins de graines qu'un kilogramme de graine de pin laricio; il suffirait donc de semer 4 kilogrammes de graine de pin laricio par hectare, si le même nombre de ces deux espèces de graines contenait un même nombre de graines fécondes; mais celle du pin maritime en contenant davantage, on sèmera 6 kilogrammes au moins de graine de pin laricio par hectare.

Le pin laricio enfonce son pivot de 6 à 8 centimètres en terre, dès la première année, mais sa tige reste chétive; il en résulte que les plantes parasites peuvent lui être beaucoup plus nuisibles qu'au pin sylvestre et qu'au pin maritime, qui poussent plus promptement que lui (Voy. chap. XI, art. IV, V et VI). Par cette raison, il est très-utile de semer du pin maritime en même temps que du pin laricio, afin d'occuper promptement le terrain; ainsi avec les 6 kilogrammes de graine de pin laricio on en sèmerait autant de graine de pin maritime; mais lorsque l'on sème ainsi de la graine de pin maritime, il faut commencer les éclaircissages dès la seconde année, s'il est nécessaire, en les faisant porter sur le pin maritime; sans quoi il aurait été préférable de ne pas en semer, parce que ce pin, ayant une croissance plus rapide que le pin laricio, pourrait l'étouffer. Si l'on manquait de graine de pin laricio, ou si l'on voulait l'économiser, on pourrait n'en semer que 4 kilogrammes et même que 3 par hectare, et l'on augmenterait alors la quantité de graine de pin maritime; il y a moins d'inconvénient à en semer trop que trop peu, quand on est décidé à faire éclaircir en temps utile.

Dans le terrain consacré à un semis d'expérience, dont j'ai parlé page 57, j'avais semé en 1837, sur la plus mauvaise partie, un mélange de graines de pin laricio et de pin maritime; le plant provenant de ce semis s'empara du terrain, dès l'automne de la seconde année, et je commençai à l'éclaircir en supprimant le pin maritime; ce pin aurait disparu après la troisième année, si je n'en eusse conservé une dizaine de plants jusqu'à l'automne de 1844, pour en comparer l'accroissement avec celui du pin laricio et avec celui du pin sylvestre. J'avais semé sur une autre partie de ce terrain qui était de beaucoup meilleure qualité, du laricio seul et il n'occupait pas encore entièrement le terrain en 1844; son accroissement a été plus lent que celui du premier, parce que le terrain étant meilleur et n'étant pas occupé à beaucoup près, s'est couvert de bruyères, de joncs marins et de gazon. Dans le premier semis, la bauteur moyenne du pin laricio, à l'automne de 1841, était d'un mètre; à l'automne de 1842, elle était de 1",55; à l'automne de 1843, de 2,22, et à l'automne de 1844, de 2,92. Si donc, dans les premières années, le pin laricio prend moins d'accroissement que le pin sylvestre, il le rattrape ensuite (Voy. p. 180), et l'on a vu qu'ordinairement, sous le climat de Paris, il finit par le dépasser. Je présume que le pin laricio sera un

jour très-répandu en France, qu'il y sera très-utile et qu'il y atteindra, toutes choses égales d'ailleurs, de plus belles dimensions que le pin sylvestre,

La greffe herbacée que je décrirai, chap. XII, art. II, réussit très-bien quand on greffe le pin laricio sur le pin sylvestre; elle peut, par conséquent, procurer des porte-graines plus promptement que le semis, et servir à transformer de jeunes futaies de pins sylvestres en futaies de pins laricio. Il suffit, pour opérer cette transformation, de greffer dans une futaie de pins sylvestres un nombre suffisant de sujets en pins laricio et de supprimer, par des éclaircissages successifs, les pins qui n'ont pas été greffés à mesure qu'il est nécessaire. On trouve dans la forêt de Fontainebleau de remarquables exemples de ces deux opérations. M. de Larminat, pendant qu'il était conservateur de cette forêt, et M. de Boisdhyver, qui lui a succédé, y ayant fait exécuter, depuis 1822, un grand nombre de greffes de pin laricio sur pin sylvestre, des quartiers qui étaient originairement en pins sylvestres se trouvent transformés en quartiers de pins laricio.

D'après ce que j'ai vu

VIII. AMÉNAGEMENT, EXPLOITATION ET REPRoduction. de la culture du pin laricio, sous le climat de Paris, et d'après ce qu'on rapporte des futaies de cet arbre dans les montagnes de la Corse et de la Calabre, je pense qu'on doit traiter les futaies de pins laricio absolument comme celles de pins sylvestres; je renvoie donc à ce que j'ai dit à ce sujet, pages 189-192.

Le pin laricio étant peu chargé de branches dans la partie inférieure de son tronc, ayant un pivot qui s'enfonce profondément en terre et réussissant trèsbien dans les taillis de bois feuillus, est l'un des arbres que l'on peut élever eu futaie sur taillis qui causent le moins de dommage à ce taillis.

IX. QUALITÉS ET USAGES DU bois; produits divers. Je ne connais ni la couleur, ni la pesanteur spécifique, ni la qualité du bois du pin laricio sous le climat de Paris, où il n'en existe encore qu'un bien petit nombre de sujets qui soient assez âgés pour qu'on puisse en faire du bois d'œuvre; je sais qu'il est plus résineux que le bois du pin sylvestre, qu'il a une pesanteur spécifique plus grande, et je présume qu'il lui est généralement inférieur en qualité; il me paraît d'ailleurs probable, ainsi que je l'ai dit, qu'il y acquerrait de plus belles dimensions et en moins de temps. Le bois du pin laricio est employé en Corse pour les constructions, la menuiserie et la petite mâture. Il y a fort longtemps qu'on s'en sert dans les arsenaux pour la construction des parties des vaisseaux autres que la mâture; en 1788 on l'employa pour la première fois à la mâture, et il fut trouvé moins fort et moins élastique que les bois du Nord, particulièrement que le pin sylvestre, celui dont on se sert le plus fréquemment en France pour cet usage. Actuellement on l'emploie à Toulon en bordages et à la mâture, on en a fait souvent de beaux mâts de hune pour vaisseaux et frégates. Un fait qui a été observé dans le parc de Bagnoles (Orne) semblerait venir à l'appui de ce que je viens de dire du manque d'élasticité du pin laricio; c'est que parmi les laricio, les pins sylvestres, les pins du lord et les mélèzes qu'on y a plantés, et qui s'y trouvent exposés à des

vents très-violens, les pins laricio sont ceux qui ont eu le plus grand nombre de trones brisés par les vents. On ne peut pourtant pas conclure avec certitude de ce fait que cet arbre est plus cassant que ceux auxquels je viens de le comparer, parce qu'étant plus chargé de branches qu'eux vers la tête, pendant les premières années, il est alors plus exposé à ce genre d'accident.

Tenore s'exprime ainsi qu'il suit sur l'emploi du bois du pin laricio dans le royaume de Naples, page 76 de son Essai sur la géographie physique et botanique du royaume de Naples. « On a employé de tout temps les troncs des pins laricio aux >> constructions navales et civiles; et il n'est pas difficile de se procurer dans les » Siles des mâts d'environ 100 pieds de hauteur et d'environ 3 pieds de diamètre. » C'est de ces pins qu'on tire la poix fameuse que Virgile et Horace ont célébrée » dans leurs vers harmonieux, et c'est le bois résineux de ces arbres que les habi>> tans des villages adjacens aux Siles brûlent au lieu de chandelles pour éclairer » leurs maisons. Par une analogie singulière avec les noms et les usages des an» ciens, on n'appelle autrement que Tedae ces morceaux de bois dont la fumée épaisse noircit de telle sorte les habitations, les habillemens et les visages » mêmes de ces pauvres villageois, qu'en les visitant on se croit presque trans» porté au milieu des cavernes sombres et ténébreuses des Cimmériens. »

X. ACCIDENS, MALADIES, ANIMAUX NUISIBles. - Les gelées ne m'ont paru causer aucun dommage au pin laricio, du moins sous le climat de Paris.

Les pins laricio qui ont résisté aux vents pendant leur jeunesse n'en sont pour ainsi dire jamais renversés par la suite, parce qu'ils sont très-solidement enracinés lorsque leurs racines peuvent pénétrer dans le sol; mais leur tronc, avant qu'ils aient dépassé 30 ans, m'a paru plus exposé que celui des pins sylvestres à être brisé par les vents.

La neige et le givre peuvent causer de grands dommages dans les jeunes futaies de pins laricio comme dans celles de pins sylvestres.

Le dommage que peuvent causer les quadrupèdes et les oiseaux dans les pinières de pins laricio est absolument semblable à celui qu'ils peuvent causer dans les sapinières; mais comme je pense qu'on ne devrait point exploiter ces pinières en jardinant, les quadrupèdes ne pourraient leur nuire que quand elles seraient jeunes.

Les lapins broutent moins le pin laricio que le pin sylvestre; ils sont d'ailleurs moins tentés par les branches du bas de cet arbre qui s'étiolent et meurent à mesure qu'il grandit.

Il est très-probable que les insectes nuisibles au pin laricio sont les mêmes que ceux qui sont nuisibles au pin d'Autriche, avec lequel il a beaucoup d'analogie, et l'on a remarqué en Autriche que ces insectes ne sont autres que ceux qui attaquent le pin sylvestre (Voy. chap. X, art. II). Je n'ai encore remarqué sur le pin laricio que deux insectes qui y causent du dommage, et ce sont deux bostriches, les mêmes dont j'ai parlé dans l'art. X du chapitre du pin sylvestre; l'un brun, qui mangeait les pousses en même temps qu'elles croissaient, l'autre noir,

qui en mangeait la moelle; le premier m'a paru préférer le pin sylvestre au pin laricio, le second paraissait préférer le pin laricio. Ce dernier bostriche avait, en 1844, causé de tels dégâts dans l'allée de mon parc dont j'ai précédemment parlé, où les laricio alternent avec les mélèzes, que le dessous des arbres était quelquefois jonché des pousses de l'année; les pins maritimes et les pins sylvestres qui forment avec des pins laricio un massif que traverse cette allée avaient été beaucoup moins attaqués. Non-seulement dans les pousses attaquées un canal remplaçait la moelle qui avait été mangée, mais un grand nombre de trous faisaient communiquer ce canal avec le dehors, ce qui avait occasionné la rupture et la chute d'une partie de ces pousses. Je trouvai le 27 août, de petits bostriches noirs dans les canaux qui remplaçaient la moelle; cependant il serait possible que ces canaux eussent été creusés par la larve de l'insecte, car M. Jacquinot de Presle me dit avoir trouvé un ver de couleur fauve à tête noire dans le canal médullaire, et je l'y ai trouvé aussi; cet insecte n'attaque d'ailleurs ordinairement que les pins laricio âgés de moins de 15 ans, et j'ai été étonné qu'il eût attaqué les miens qui en avaient 17. Il y a 72 pins laricio dans l'allée où ils alternent avec des mélèzes, et il y en a le même nombre dans deux rangées parallèles à cette allée qui sont dans la pinière et dans le taillis. Les premiers, qui se trouvent dans une situation plus aérée, ont été beaucoup plus maltraités que les seconds; j'en ai remarqué huit, au printemps de 1845, qui étaient en si mauvais état qu'on devait craindre d'en voir périr plusieurs.

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