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LITTÉRAIRE.

'ANNÉE M. DCC. LXXX.

Par M. FRERON.

Parcere perfonis, dicere de vitiis. MART
TOME CINQUIEME

A PARIS,

Chez MERIGOT, le jeune, Libraire,
Quai des Auguftins, au coin de la
rue Pavée.

M. DCC. LXXX

L'ANNÉE

3:

LITTÉRAIRE.

LETTRE I.

La Veuve du Malabar, ou l'Empire des Coutumes, Tragédie par M. le Mierre, représentée pour la première fois par les Comédiens François le 30 Juillet 1770, & remife au Theatre le 29 Avril 1780, avec cette Epigraphe:

Quæ fera gens hominum, quæve hunc tam

barbara morem

permittit patria?

Virg. Eneidos, lib. 1.

A Paris, chez la veuve Duchefne,
Libraire, rue Saint-Jacques, au

Temple du Goût.

IL y a

bientôt dix ans, Monfieur

que cette Pièce fut jouée pour la première fois. Son fuccès alors fut très

équivoque: il ne l'eft pas aujourd'hui La reprise a été des plus heureuses. M. le Mierre a joui de tous les honneurs du triomphe. Plus de trente repréfentations de fuite, applaudies avec une efpèce de fureur

Lui firent trouver l'apogée
la félicité des Dieux.

Rouffean.

Son enthoufiafme a dû être fi vrai, fi fimple, fi naturel, que ce n'eft pas fans peine que je me détermine à le détromper. Jugez de mon embarras. Mon caractère me porte à l'indulgence, & l'intérêt de la raifon me fait une loi d'être févère. Il faut donc, fi je veux me conformer à ce qu'elleexige, oublier l'homme, pour ne penfer qu'à l'Ecrivain; ce qui me conduit à la cruelle néceffité de les affliger tous deux. Telles font les triftes fuites attachées à l'importante, mais pénible fonction que je me fuis impofée. On est loin de fe douter de ce qu'il en coûte à un Critique pour être fidèle au devoir qu'il s'eft prefcrit, & du courage dont il a befoin pour le remplir avec cette impartialité, feule capable de

tamener le Public de ses préventions. Heureusement il n'en eft pas de ce Public comme des Auteurs. Il entend raison fur fes travers, permet qu'on les lui reproche, & même qu'on lui en faffe honte ; & nous l'avons vu fouvent, en dépit de fes préjugés, fe rétracter & prononcer contre lui-même. Il ne s'agit pour cela que de faire briller à fes yeux le flambeau de la vérité. S'il eft fujet à la perdre de vue, ébloui par le faux éclat de quelqu'invention nouvelle, il n'a befoin que de la reconnoître pour se rengager avec plaifir fous fes drapeaux. Que devient alors l'idole qu'il s'étoit faite & qu'il lui avoit préférée ? Il la brife, trop heureux d'appaifer par-là la Divinité qu'il avoit outragée. Je placerai à la fin de cet article, des réflexions dont il fera toutà-la-fois & l'objet & le Juge. Auparavant je dois vous rendre compte de l'ouvrage que je vous annonce. En voici l'analyse exacte.

fe

Ade premier. Un Indien vient de mourir. Grand événement pour le Peuple, & fur-tout pour les Prêtres. Aura-t-il fes fuites naturelles? En un

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