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du capulet rouge, et en costume montagnard. Cette image est l'objet d'un pélerinage où se rendent, le jour de l'Assomption, plus de douze mille montagnards, armés de leurs carabines. Ils viennent se prosterner devant elle, la pressent entre leurs bras, qu'ils passent aussi sur sa tête, sur ses épaules, en descendant jusqu'aux talons, et la couvrent de leurs baisers. Ceux qui se sont plus particulièrement dévoués à son culte, portent au bout d'un bâton des chapelets de bois, des anneaux de cuivre, qu'ils font toucher à cette statue. Le lendemain, à onze heures, on dit la messe, et presque tous les assistans viennent recevoir le pain de la communion.

Le bon paysan dont la cabane est près de cette chapelle, alla chercher d'excellent lait. Ce breuvage nous parut si délicieux et répara tellement nos forces, qu'il nous pénétra de toutes les douceurs de la vie pastorale. Nous voulûmes voir le lieu où cet homme pouvoit le conserver si frais pendant l'ardeur brûlante du jour c'est un simple réservoir pratiqué dans un ruisseau ou un torrent, et couvert de quelques tables de pierre; il est impossible, sans avoir été prévenu, d'en soupçonner l'existence. Ce champêtre rafraîchissement nous fut servi dans des vases de bois de pin, avec des cuillers de la même matière (1).

(1) Avec un pareil aliment, il est impossible que celui même

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Au retour de la chapelle, les pèlerins vont au roc de la Raillé: là, ils s'agenouillent et chantent des litanies, pendant que les plus fervens escaladent la pierre, et en détachent des blocs qu'ils réduisent en petits fragmens, pour les distribuer aux assistans.

qui est le moins accoutumé à la vie des montagnes, puisse ne pas trouver à vivre avec propreté et agrément; car, du reste, il ne faut pas s'attendre à une cuisine recherchée. M. DE SAINT-AMAND, dans son Voyage pittoresque et sentimental aux Pyrénées, p. 142, a décrit avec une gaieté piquante la manière dont on y prépare les mets. «< On y fait la cuisine, dit-il; quelle cuisine, grands dieux ! les pinceaux mêmes de Teniers et de Callot ne sauroient la repré» senter. Veut-on de la soupe; elle sera bientôt faite. La marmite » part pour aller puiser l'eau du Gave, car jamais on ne vit encore ?

de cruche à Héas : la marinite revenue est suspendue sur un feuʊ » de genièvre, seul bois de chauffage dont on use ici: la marmite ́» va bouillir; grande nouvelle, puisque la soupe est achevée. Oui, » mes amis, le pain déjà préparé dans un grand plat de bois, » avec une petite boule de beurre, est inondé d'eau bouillante; » voilà le potage : une gousse d'ail, un ognon cru, mâché par

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cuisinière, puis craché sur le potage, voilà l'assaisonnement, la » dernière façon du traiteur. La soupe est servie; elle est excel» lente. On la mange avec des cuillers de bois, qui ont trois ou » quatre pouces de diamètre. Veut-on du pain; à l'instant la fa

rine, ou de maïs, ou de blé, ou d'avoine, est détrempée dans » l'eau du Gave, base éternelle de tous les ragoûts. On nettoie » bien vîte le foyer; le gâchis est étendu sur l'âtre, puis recouvert

» par les cendres et les charbons de la cheminée. Dix minutes

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après, le pain est cuit; on le dévore; il est délicieux. Je ne fini» rois de la journée, si je voulois vous raconter toutes les dégoû

» tantes malpropretés dont j'ai été le témoin à la pâle lueur de

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quelques morceaux de bois de sapin, enfoncés dans la muraille, >> et qui brûloient en guise de flambeaux,

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A la chapelle d'Héas commence la vallée de Trémousse; on a devant soi l'amphithéâtre de Trémousse et les glaciers qui le couronnent. En avançant environ deux cents pas, on voit à sa droite le port de la Canaou (1), par lequel on descend dans la vallée de Brousse (Beoousse), qui appartient à l'Espagne : on peut y arriver en quatre heures de marche.

(1) On appelle des ports les points où deux vallées se joignent du côté où elles s'élèvent réciproquement. Ces passages sont plus ou moins élevés. Le Tourmalet (suprà, p. 506) est le port ou passage entré les vallées de Bastan et de Campan. Le mot port appartient à une racine commune: port, pore et porte, ont la même origine, Ces mots dérivent du grec prów [je traverse]. Ces ports sont si dangereux pendant les orages, que les périls qu'on y court ont donné lieu à ce dicton cruel: Là le père n'attend pas son fils, et le fils n'attend point son père. Croyons, pour l'honneur de l'humanité, qu'on n'a pas d'exemple qu'aucun montagnard ait suivi

cet affreux précepte.

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CHAPITRE CXXVIII.

SORTIE D'HÉAS.

――

L'Arioste.

Vallée d'Estaoubé. - Mont-Perdu, Le Comelie. Brèche de Roland. Tours de Marboré.-Vallée de Gavarnie. - Amphithéâtre. Cascades. Oule. -Ponts de neige. Pyrénées. Étymologie de leur nom. - Histoire. — Hercule. — Annibal. Sarrasins. - Charlemagne. - L'évêque Turpin. - L'enchanteur Atlant. - Bradamante. Roland. Agramant. Ferragus. Histoire moderne. GAVARNIE. Montagnards. - Isard, Ours.- Chiens.- Templiers.- Contrebandiers. Chasseurs. Manière de s'éclairer; de faire le beurre. Nourriture. - Vêtemens. Usten

siles. Moeurs des montagnards.

Retour à Luz.

-La Peyrada. SAOUSA.

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EN

N quittant le séjour solitaire où la chapelle d'Héas rappelle l'humble crèche dans laquelle le Sauveur du monde feçut l'adoration des bergers, nous nous replongeâmes dans l'affreux chaos que nous avions déjà traversé. Nous passâmes le Gave sur un petit pont, et nos chevaux le traversèrent à gué; nous suivîmes un chemin pierreux et escarpé dans l'âpre montagne d'où nous avions vu le matin tomber dix à douze cascades.

Bientôt nous entrâmes dans la vallée d'Estaoubé,

par un pont près duquel le Gave forme une belle cascade; le sommet du Mont-Perdu, qui s'élevoit devant nous, commençoit à se couvrir de nuages (1). Nous laissâmes cette vallée, pour monter sur le plateau du Comelie; le rhododendron avertit que l'on est élevé de deux cents toises au-dessus du niveau de Baréges. Laurens eut soin de nous faire remarquer les divers aspects qu'on y découvre, la vallée d'Héas, la vallée d'Estaoubé, le port Pinède et le MontPerdu.

Nous montâmes sur un autre plateau où étoient disséminées plusieurs huttes de bergers nous regardâmes de là encore une fois la brèche de Roland. On appelle ainsi une muraille de rochers, élevée entre la France et l'Espagne, à une hauteur de cinq à six cents pieds. Cette muraille forme un croissant dont la convexité est tournée vers la France. C'est là qu'on prétend que le vaillant neveu de Charlemagne, monté sur son cheval de bataille, s'ouvrit un passage, et en deux coups de durandal, sa fameuse

(1) Il faut lire, dans l'excellent ouvrage de M. RAMOND, Voyage au Mont-Perdu, la description de cette montagne, qui s'élève au-dessus de tous les autres pics des Pyrénées, et les curieuses observations géologiques dont elle a été l'objet. M. Ramond a donné comme frontispice une vue de la vallée d'Estaoubé et du Mont-Perdu, dessinée par lui-même. Les cristallisations granitiques, les polypiers, et autres pétrifications marines qu'il a trouvées au promontoire du lac du Mont-Perdu, et qu'il a figurées pl. II et III, sont aussi du plus grand intérêt.

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