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rir de cette manière, de même le temps pendant lequel des servitudes continues et apparentes ont été possédées avant le Code, dans les pays où aucune servitude ne pouvait s'acquérir sans titre, ne compte pas pour la prescription. ]

[Quand il y a des ouvrages apparens existant depuis trente ans, on présume qu'il y a eu dans le principe une convention dont la trace s'est perdue; mais ce n'est qu'une présomption, qui doit céder à la réalité. Si donc il existe la preuve qu'il y a eu, à la vérité, concession, mais à titre précaire, la plus longue possession ne suffira pas pour acquérir la servitude; cela rentrerait dans la classe des actes de tolérance, qui ne peuvent servir de base à la prescription. Ce principe est général, et s'applique à toutes les choses qui peuvent s'acquérir par la prescription. C'est dans ce sens que l'on dit: Meliùs est non habere titulum, quàm habere vitiosum. Ces servitudes pourraient-elles s'acquérir par dix ou vingt ans, avec titre et bonne foi?

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Appliquez au surplus à l'acquisition des servitudes par prescription, la règle, tantùm præscriptum, quantùm possessum. On n'acquiert précisément que ce dont on a joui. Si l'on n'a eu qu'une croisée ouverte pendant trente ans, on a acquis le droit de la conserver; mais on ne pourrait en ouvrir une seconde, etc. Il n'en serait pas de même, si la servitude de vue était établie par titre. Dans ce cas, l'existence d'une seule croisée ayant suffi pour la conserver, est toujours libre au propriétaire du fonds dominant d'en user comme il le juge convenable. (DUNOD, des Prescriptions, partie 1re, chap. 4. ) La raison de différence provient de ce qu'il est possible qu'une servitude de vue soit concédée pour une seule croisée seulement; lors donc qu'il n'est représenté aucun titre, et que la servitude n'est appuyée que sur une convention présumée, cette convention doit toujours être supposée la plus avantageuse au propriétaire du fonds servant.

Pourrait-on acquérir par la prescription un nouveau mode d'exercer la servitude? Il faut distinguer: Ou le nouveau mode augmente, ou il diminue la servitude ancienne, ou il en constitue une nouvelle. S'il diminue l'ancienne servi

tude, comme toute servitude, quelle qu'elle soit, se perd par le non-usage, on perd alors ce qu'on peut appeler en quelque sorte l'excédent de l'ancienne servitude sur la nouvelle, que l'on conserve, dans ce cas, telle qu'elle a été exercée en dernier lieu, quia minus majori inest. Tel est le cas où, ayant le droit de passer en voiture sur votre terrain, j'y ai passé à pied pendant trente ans ; comme le droit de passer en voiture renferme celui de passer à pied, j'ai conservé ce dernier droit, et j'ai perdu le premier.

Si le nouveau mode augmente la servitude, il faut encore distinguer: Si la servitude est de nature à être acquise par prescription, le nouveau mode peut être acquis de la même manière; secùs dans le cas contraire seulement,

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toujours par la même règle, que minus majori inest, l'on conservera l'ancienne servitude. Tel est le cas où ayant le droit de passer à pied sur votre terrain, j'y ai passé à cheval ou en voiture pendant trente ans : comme le passage cheval ou en voiture renferme le passage à pied, j'ai conservé mon ancien droit; mais je n'ai pas acquis le nouveau mode de passage, parce que c'est une servitude discontinue, qui ne peut s'acquérir par la prescription. Mais si, ayant le droit d'avoir des vues obliques, j'en ai eu de droites pendant trente ans, j'ai acquis par la prescription le droit de les conserver dans le même état, parce qu'un droit de vue peut en général s'acquérir par la prescription.

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La même distinction doit avoir lieu, lorsque le nouveau mode change l'ancienne servitude et en constitue une nou→ velle. Si la nouvelle est continue et apparente, elle pourra s'acquérir par prescription; sinon l'ancienne sera éteinte, et la nouvelle ne sera pas acquise. On peut donner pour exemple du premier cas, celui où ayant droit de prendre des vues sur une partie déterminée de votre fonds, je les ai prises pendant trente ans sur une autre partie; dans ce cas, j'ai perdu la servitude primitive, et j'en ai acquis une nouvelle. On peut donner pour exemple du second cas, celui où ayant droit de passer sur une partie déterminée de votre fonds, j'ai passé sur une autre partie pendant trente ans; j'ai perdu alors la première servitude, et je n'ai pas

acquis la nouvelle. (L. 10, § 1, ff. Quemadm. Servit. amitt.)

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Il faut, au surplus, observer une différence essentielle entre la perte de l'ancienne servitude et l'acquisition de la nouvelle c'est que, même à l'égard des servitudes continues et apparentes, il pourra arriver que l'ancienne soit éteinte, et que la nouvelle ne soit pas acquise; dans le cas, par exemple, où pendant le délai de la prescription, le fonds, assujéti a été possédé par un propriétaire contre lequel la prescription ne courait pas; putà, par un mineur ou par un interdit; car alors il aura acquis par le non-usage, pendant trente ans, de la part du propriétaire dominant, la libération de l'ancienne servitude; et ce dernier n'aura pas acquis la nouvelle contre lui, dans le même délai, puisque nous supposons que la prescription a été suspendue, pendant quelque temps, par la minorité ou par l'interdiction du propriétaire du fonds servant.

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Ces décisions paraîtront peut-être un peu rigoureuses en quelques points; mais je les crois fondées en principe et nécessaires, d'ailleurs, pour empêcher les atteintes que les propriétaires des fonds dominans sont toujours disposés, surtout dans les campagnes, à porter au titre constitutif de la servitude.]

Le titre constitutif de la servitude peut être suppléé de différentes manières, suivant la nature de la servitude: ainsi, à l'égard de celles qui ne peuvent s'acquérir par la prescription, c'est-à-dire des discontinues, et des continues non apparentes, il ne peut être suppléé que par un titre recognitif, 695. émané du propriétaire du fonds asservi : à l'égard des autres, nous avons vu, au commencement de ce Titre, que la des692. tination du père de famille valait titre, mais avec le concours des circontances suivantes.

[ Il faut un titre recognitif ou un jugement rendu avec ce propriétaire, et passé en force de chose jugée. Res judicata pro veritate accipitur.

Observez qu'aux termes de l'article 1337, le titre recognitif ne dispense de la représentation du titre primordial, qu'autant qu'il en relate spécialement la teneur, ou bien

lorsqu'il y en a plusieurs conformes, soutenus de la possession, et que l'un a au moins trente ans de date. J'avoue cependant que, nonobstant la disposition de cet article, qui paraît bien formelle et bien générale, il me semble difficile de l'appliquer à la matière des servitudes, qui se traite principalement entre gens de la campgane. Comment, en effet, pourrait-on regarder comme insuffisant, l'acte par lequel un propriétaire aurait reconnu purement et simplement que son fonds est assujéti, envers tel autre, à telle servitude? Je pense donc que le législateur a seulement voulu dire, dans l'article 695, que quelque fortes que soient les présomptions alléguées par celui qui réclame une servitude du nombre de celles qui ne peuvent s'acquérir par prescription, elles ne peuvent jamais suppléer le titre constitutif, qui ne peut être remplacé que par une reconnaissance émanée du propriétaire du fonds asservi. Cette interprétation paraît même d'autant plus probable que le Titre des Obligations, dont l'article 1337 fait partie, n'ayant été discuté et décrété que long-temps après celui des Servi- . tudes, l'on ne peut pas dire que le législateur a eu en vue, dans l'article 695, la disposition de l'article 1337.]

Il faut que les fonds actuellement divisés aient appartenu au même propriétaire;

Que ce soit lui qui ait mis ou laissé les choses dans l'état d'où résulte la servitude. [ Lui, c'est-à-dire le propriétaire. 693. Secùs, si c'est un usufruitier, un fermier ou autre possesseur semblable.

J'ai ajouté le mot laissé, parce que le propriétaire est censé avoir mis lui-même les choses dans l'état dont il s'agit, lorsque les ayant trouvées dans cet état, il les y a laissées.]

Enfin, que l'acte d'aliénation ne renferme rien de contraire au droit prétendu. [ Il en serait de même, si c'était un 694. acte de partage entre co-héritiers ou co-propriétaires. ]

Dans ce cas, la servitude continue d'exister, activement ou passivement, en faveur du fonds, ou sur le fonds aliéné.

[Remarquez 1o que la disposition de l'article 694 peut

être invoquée contre le propriétaire lui-même, par celui en faveur duquel il a disposé du fonds, et ses ayant-cause.

2o. Que cette disposition est fondée, non pas sur le principe que la servitude est un droit réel qui suit le fonds dans toutes les mains où il passe : car ici, il n'y a pas de servitude: nemini res propria servit; mais sur ce que, quand le propriétaire de deux immeubles en vend un, il est censé le vendre dans l'état où il se poursuit et comporte, et l'acquéreur est censé l'acheter de la même manière.

Il faut donc que la servitude soit, non-seulement contmue, mais encore apparente; autrement l'acquéreur pourrait dire qu'il a été trompé, s'il s'agissait d'une servitude passive; ou, si elle était active, il ne pourrait dire qu'il a entendu acheter le fonds avec tel droit de servitude.

Il faut que ce soit le propriétaire qui ait mis la chose dans l'état d'où résulte la servitude; autrement il pourrait l'avoir ignoré, et la présomption de volonté n'aurait pas lieu de sa part.

- Enfin, il est évident que, si l'acte d'aliénation contient une stipulation contraire au droit prétendu, la présomption doit cesser.

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Observez encore qu'il n'est plus nécessaire, comme l'exigeait l'article 216 de la Coutume de Paris, que la destination du père de famille soit prouvée par écrit; c'est-à-dire qu'il n'est pas nécessaire de prouver par écrit que l'état d'où résulte la servitude, existait au moment où les fonds ont été divisés. Ce fait pourra donc être prouvé par témoins. Voir un arrêt de Colmar, du 4 décembre 1817, rapporté dans SIREY, 1822, 2° partie, pag. 16.]

SECTION III.

Des Droits et Obligations résultant de l'établissement des Servitudes.

L'effet des servitudes qui dépendent du fait de l'homme, est d'établir entre le propriétaire du fonds dominant et celui du fonds servant, des rapports particuliers qui augmentent

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