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Ces particularités s'expliquent parce que l'auteur était d'Arone, où, même à présent, le souletin se trouve, comme à Etéhani, fortement influencé par le bas-navarrais oriental. Du temps de Tartas, cette influence allait jusqu'à constituer une petite variété locale.

Dans l'onsa hilceco bidia, le verbe est employé à l'indéfini, lorsqu'il n'y a pas allocution, et non pas au respectueux, comme on l'aurait fait en bas-navarrais oriental. Les causatifs sont en bai et non en bei. On ne distingue pas entre u et ü, ce qui ne prouve rien contre l'existence de l'ü à cette époque, les Souletins confondant parfois ces sons dans l'écriture, ainsi que ceux de s et z français et de set z basques.

Tels sont les renseignements que je dois à l'obligeance du prince Bonaparte sur le premier livre souletin imprimé connu. Il m'a paru très-intéressant et très-utile de les transmettre aux lecteurs bibliophiles de la Revue.

Bayonne, le 21 avril 1875.

Julien VINSON.

UN DERNIER MOT DE RÉPONSE A M. VINSON

SUR LE VERBE BASQUE.

Notre honorable contradicteur trouve, dans son dernier article (d'octobre 1874), que nous faisons de la philologie sentimentale. Nous tâcherons, dans la présente réponse, de laisser le sentiment tout à fait de côté, et de nous en tenir à la simple observation des faits.

Et d'abord, il convient de poser la question aussi nettement que possible; c'est, à notre avis, la meilleure manière d'arriver à une solution.

M. Vinson soutient que:

1o La racine iz du basque est celle du verbe substantif et que, par conséquent, niz (pour n'iz) correspond d'une manière complète au français « je suis »;

2o La forme zen ou zan (suivant les dialectes), de la troisième personne du singulier de l'imparfait de l'indicatif, n'est point primitive et a dû, à l'origine, être quelque chose comme iz, c'est-à-dire qu'elle renfermait l'idée du verbe substantif.

Nous prétendons au contraire :

1° Que cette racine iz, identique à la marque du médiatif, n'a que la valeur de particule ou tout au plus de substantif à sens abstrait (nulle racine basque n'ayant le sens verbal), et que, par conséquent, niz devra se traduire << per me » ou « mei causà »;

2o Que zen ou zan est bien la forme de la troisième per

sonne du singulier de l'imparfait de l'indicatif; que l'idée verbale ne s'y trouve indiquée ni de près, ni de loin, et que, par suite, da, troisième personne du singulier de l'indicatif présent, ou bien est d'origine étrangère, ou bien ne contient point la notion du verbe, car un peuple ne peut posséder cette notion à certains temps ou modes, pour en être dépourvu à d'autres.

Cela dit, nous allons entrer en matière.

Il est fort possible (c'est une question que nous n'entreprendrons pas d'examiner ici) que les formes dialectiques gira, gara, gare ne soient point des formes allatives, comme nous l'avions supposé. Admettons comme parfaitement établi qu'elles soient pour un archaïque gitza ou même gitzaz. Ceci ne nous semble nullement probant pour la thèse soutenue par M. Vinson. Tout ce que nous en pourrions conclure, c'est que les formes plurielles de l'indicatif sont d'anciens médiatifs, tout comme celles du singulier.

M. Vinson nous reproche d'avoir traduit nuzu et nuk par je suis, tandis qu'il aurait fallu les rendre par << vous m'avez ». Est-ce que nuzu et nuk ne possèdent pas en réalité les deux sens à ia fois? Est-ce qu'il existe une distinction réelle, en basque, entre la conjugaison du prétendu auxiliaire substantif izan et celle du prétendu auxiliaire possessif ukhan? Est-ce qu'un nombre assez considérable de formes ne leur sont pas communes à toutes deux? D'ailleurs, où M. Vinson veut-il en venir? Conteste-t-il les mutations vocaliques à certains modes du verbe? Delurik, delakoz, ne sont-ils pas pour dalurik, dalakoz? Le verbe avoir n'est en basque que le verbe être (ou soi-disant tel), muni des suffixes pronominales régies,

e les transformations de voyelles qu'il éprouve sont dues uniquement, soit à des contractions euphoniques, soit à des adoucissements produits par le poids de la désinence.

Reste l'explication à donner de la forme zan ou zen « il était ». Là se trouve, à notre avis, tout le nœud de la question. Suivant celle que l'on adoptera comme la plus plausible, c'est M. Vinson ou nous qui aurons raison.

La forme archaïque restituée par notre contradictoire iz (au moins aurait-il fallu dire intz, si l'on admet pour les deux premières personnes nintz et kintz) a le petit défaut d'être absolument et purement hypothétique. On n'en retrouve de trace perceptible dans aucun dialecte actuellement subsistant. Tous, au contraire, font usage de formes comme zan ou zen. Or, en bonne logique, toute hypothèse qui ne repose pas sur l'observation des faits est ce que l'on appelle une hypothèse absolument gratuite. A ce titre, elle ne saurait passer pour un argument, et mérite, à priori, d'être impitoyablement rejetée.

D'ailleurs, la présence du tz dans nintzan, hintzan, ne peut s'expliquer que par l'existence antique d'un double z. En effet, la présence du n ne suffirait point à rendre compte de cet qui précède la sifflante. Les exemples abondent à cet égard. On dit en basque abanza « s'avancer »; ganza « le tout, la totalité »; fanza « la face, l'image »; phanza « le ventre, la panse », et non point abantza, fantza, phantza. Donc, nintzan, hintzan sont bien réellement, ainsi que nous l'avions supposé, pour ninz-zan; hinz-zan, plus anciennement niz-zan, hiz-zan, litt. per me, perte defunctum (negotium). Si l'on ne veut pas admettre que zan tout seul ait été la forme primitive de la troisième personne du singulier, pour respecter

l'analogie nécessaire des formes du présent avec celles de l'imparfait, on serait forcé d'accepter un archaïque da-zan ou da-zen. M. Vinson serait-il disposé à reconnaître qu'il ait jamais réellement existé?

D'ailleurs, notre explication se trouve confirmée par ce que nous pouvons observer dans beaucoup d'autres langues, même dans des langues indo-européennes. Le sanscrit n'exprime-t-il pas l'imparfait au moyen de particules renfermant une idée de négation ou de doute? Certains dialectes du Nouveau-Monde ne forment-ils pas le même temps avec une désinence ban, qui a juste le même sens demort, défunt » que le basque zan ou zen? Si toutes ces analogies sont jugées sans valeur, si l'on ne veut voir dans ces coïncidences que le fruit du pur hasard, alors il faudra avouer, avec M. Dictet, que le hasard se plaît à jouer de singuliers tours aux philologues.

Notre contradicteur regarde comme peu conforme aux règles générales de l'esprit humain cette absence de la racine verbale dans une langue. Il serait cependant bon de s'entendre. Cela peut n'être pas absolument conforme à ces lois chez les peuples parlant des idiomes à organisme développé, comme les dialectes sémitiques ou indo-européens. A coup sûr, la chose nous semble on ne peut plus conforme au génie d'une foule, de la plupart même des langues agglomérantes. Le turk, par exemple, qui dit sever, litt. ‹ amans », pour «< il aime »; severim, litt. « mea actio amantis », pour « j'aime », ne possède certainement pas la notion grammaticale du verbe. A plus forte raison en doit-il être de même du basque, cet idiome agglomérant par excellence, et qui, malgré quelques cas de tendance vers la flexion, pousse le principe d'agglomération à des

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