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Ce document serait suffisant pour prouver l'identité de Zarou et d'Avaris, mais je crois pouvoir fournir d'autres arguments en faveur de la thèse que je soutiens (1). Comme on va le voir, les témoignages de l'histoire sont absolument d'accord avec les données topographiques.

Nous examinerons, d'abord, les fragments de Manéthon, qui représentent la tradition égyptienne. Ces témoignages sont garantis par des documents égyptiens contemporains ou à peu près.

1° L'Africain, d'après Manéthon, rapporte que les envahisseurs étaient des Phéniciens qui occupèrent Memphis et bâtirent une ville dans le nome Séthroïte ».

2° Josèphe, d'après Manéthon, donne une version sensiblement différente : (le roi Salatis) « ayant découvert dans le nome saïte une ville très avantageusement située à l'est de la branche bubastite et nommée d'après une ancienne tradition théologique Avaris".

L'interprétation de ces deux textes présente de sérieuses difficultés. Le nome Séthroïte (Saite de Josèphe) est, d'après Ptolémée, à l'est de la branche bubastique, dans laquelle on reconnaît généralement la branche pélusiaque. La capitale du nome était Héracléopolis, identifiée, par beaucoup de savants, avec Tell el-Chérîg, au nord-est de Tanis; selon moi, ce seraient les ruines de Tennis, au sud de Port-Saïd. Quoi qu'il en soit de ces divergences d'opinions, il est certain qu'Héracléopolis était située à

parlant de la stèle de l'an 400, dit qu'elle est dédiée à Seth de Tanis. On ne comprend pas cette interprétation du document, puisque, à la page 178, il reconnait, comme tout le monde du reste, l'identité de Zarou, marqué sur la stèle, avec Tell Abou-Seifeh, proche d'El-Qantarah.

(1) Avaris a été identifié avec Héroopolis (Tell el-Maskhoutah) par Champollion; avec Tanis, par Mariette, de Rougé et Brugsch; avec Péluse, par Zoéga, Ebers et Alan Gardiner; avec Tell el-Her, par Ebers, Lepsius et Chabas. Ed. Meyer avait pensé autrefois à Daphnae, mais dans son Histoire il abandonne cette hypothèse et pense qu'Avaris est à l'extrémité orientale du Delta, sur la route militaire qui conduit en Asie et près du lac Menzale ». Mais cette description ne peut convenir qu'à Zarou et dans aucun cas à une autre localité. Alors comment expliquer : Seth de Tanis? Enfin R. Weill propose Héliopolis, avec réserve, comme étant le site d'Avaris.

droite de la branche tanitique. En conséquence, il résulte d'après cette observation que la branche pélusiaque n'est pas la branche de Bubaste, ou il faut admettre que le nome Séthroïte était à cheval sur la branche pélusiaque (1).

y a là un petit problème géographique assez important à élucider. D'autre part, si Avaris est Zarou, il faut bien admettre que le nome Séthroïte, gréco-romain, est l'équivalent du nome Khent-abet égyptien, avec changement de capitale. En effet, si Zarou reste toujours, pour les listes égyptiennes, chef-lieu du nome, elle cesse de l'être, ou n'apparaît jamais comme telle, dans les listes grecques. C'est à ce moment que Tanis et Péluse brillent dans l'histoire politique de l'Égypte (2).

3° Josèphe, d'après Manéthon, dit que le roi Salatis << venait au temps de l'été, tant pour distribuer le blé et payer la solde, que pour exercer assidûment les troupes afin d'inspirer la crainte aux étrangers ».

Avaris, nous l'avons vu, était une ancienne ville, rebâtie par Salatis. L'origine de cette ville date, pour le moins, du Moyen Empire. Il n'y a dans l'isthme que deux villes-forteresses qui peuvent prétendre à une antiquité aussi haute Tekou (Tell el-Maskhoutah) et Zarou. Péluse, politiquement, est de fondation récente; son histoire ne commence qu'à partir du vire ou viie siècle, c'est-à-dire à une date postérieure de plusieurs siècles à la domination des Hyksôs. Pour cette seule cause, l'identification AvarisPéluse serait à rejeter. Les ruines de Tell el-Maskhoutah, à l'extrémité orientale du ouâdî Toumîlât, représentent l'emplacement de la ville grecque Héroopolis, et avec

A. H. GARDINER, The Delta Residence of the Ramessides, dans Journal of Egyptian Archaeology, vol. V, 1918, p. 249, pense que la branche bubastite séparait les nomes Séthroïte et Tanite.

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(2) M. GARDINER, The Delta, carte, pl. XXXV, commet une erreur, contraire à l'opinion de Manéthon, en marquant Péluse Avaris PaRamsès, à gauche de la branche pélusiaque; les ruines sont au contraire situées sur la rive droite. Du reste, Ptolémée (liv. IV, ch. 5) cite Péluse entre la branche pélusiaque et Gerron. Je pense que M. Gardiner a été influencé par la Table de Peutinger et la Carte de Madeba; ces deux documents mettent en effet Péluse à l'occident du fleuve.

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beaucoup de vraisemblance, la ville égyptienne de Tekou, Souccoth de la Bible, suivant la proposition de M. Naville. C'est l'Avaris de Champollion. Mais les raisons qui me portent vers Zarou, et dont la plupart ne peuvent s'appliquer à la position de Tekou, m'obligent à rejeter cette autre hypothèse.

Avaris, dit Manéthon, était la résidence d'été du roi Salatis. Mais nous savons aussi, par les documents égyptiens, que Pa-Ramsès (le palais ou la demeure de Ramsès II), que j'ai identifié avec Zarou, était la ville choisie par les souverains de la XVIII-XIX® dynasties. C'était aussi le lieu de concentration des troupes, et le point de départ des armées pour toutes les expéditions vers l'Asie. Et à ce sujet, je crois nécessaire de faire remarquer que le nom égyptien d'Avaris,, écrit quelquefois avec le déterminatif des pays étrangers, Hat-oudrt, signifie «le Château du départ», expression qui convient très bien au rôle militaire joué par Zarou pendant toute la durée de la monarchie égyptienne (1). Ramsès II y avait fait construire un palais, dont on n'a plus que le souvenir, et qu'on appelait pour cela Pa-Ramsès. Peu après, Zarou porta le nom de « PaRamsès». Elle était située, dit le papyrus Anastasi III, 7, 4:X

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mencement des pays étrangers, à la fin de l'Égypte » (2).

4° Josèphe, d'après Manéthon, raconte Après un assez long temps de souffrances passé dans les carrières, le roi consentit à leur donner (aux Impurs et Lépreux) pour retraite Avaris alors déserte, autrefois habitée par les Pasteurs." Avaris était donc un lieu de rélégation.

Une autre tradition, rapportée par Josèphe, d'après

(1) Le papyrus Anastasi III, pl. 7, 1. 6-7, dit au sujet de Pa-Ramsès : (c'est) la principale place de ta cavalerie (celle de Ménephtah), le point de concentration de tes troupes, le port de tes vaisseaux». Cette description est parfaitement conforme à ce que nous savons de Zarou et d'Avaris.

A noter la position de Pa-Ramsès entre Zahi (l'Asie) et Ta-meri (l'Égypte) signalée par le pap. Anastasi IV, pl. 6, 1. 1; et

sur le bord du Ann (Anastasi IV, pl. 6, l. 10).

RECUEIL CHAMPOLLION.

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Choerémon (Contra Apionem, I, 32), nous dit que les Impurs se rendirent à Péluse et y trouvèrent 380,000 hommes laissés par Aménophis (cf. les 240,000 hommes de Salatis). D'autres légendes citent Rhinocorura comme lieu de détention (Strabon, XVI, 2; Hérodote, II, 137; Diodore, I, 60 et 65). Enfin, suivant une tradition arabe, citée par Le Mascrier (Desc. de l'Égypte, II, p. 3-4), Memphis aurait été à l'origine un lieu de détention.

Ces différentes versions montrent que, déjà à l'époque grecque, on avait perdu la notion exacte de l'emplacement de ce lieu de relégation. Heureusement pour nous, un décret de réformes du roi Horemheb, gravé sur l'un des murs de Karnak, résout d'une façon certaine ce petit problème, en même temps qu'il apporte un nouvel élément en faveur de l'identité Zarou-Avaris. L'un des articles du décret interdit et punit sévèrement la rapine, l'oppression des pauvres, la prévarication; selon la loi, les coupables avaient le nez coupé et étaient déportés pour la vie à Zarou (1).

En dehors de ces documents, il reste à examiner deux autres textes qui présentent une grande valeur pour élucider cette intéressante question.

Le premier est connu depuis longtemps. C'est le récit d'un capitaine de vaisseau Ahmès, fils d'Abana, vivant à l'époque du roi Ahmès Ier, qui participa à la prise d'Avaris. On sait que le siège suivi de la prise de la ville mit fin à la domination asiatique. Ahmès fait l'historique de ses campagnes; il raconte surtout ses exploits et les faveurs royales obtenues à chacune de ses prouesses; il ignore totalement le travail de ses collègues sur terre et sur l'eau. C'est donc un simple épisode de ce mémorable siège, parmi beaucoup d'autres, qui nous est parvenu. Cela dit, voici le passage du récit d'Amès relatif à Avaris (2) : " On mit le siège devant la ville d'Avaris (Hat-ouárt). J'accomplissais des actes de bravoure devant Sa Majesté.

(Max MÜLLER, Egyptological researches, pl. 97, l. 16-23.

(2) V. LORET, L'inscription d'Ahmès, fils d'Abana, tome troisième de la Bibliothèque d'étude de l'Í. F. A. O.

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Voici, j'étais désigné pour (diriger) le vaisseau Kha-emmen-nefer. On combattait sur l'eau, xa)==

dans le Zedkou de la ville d'Avaris... On combattait

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AK dans la région méridionale de cette ville. Voici, j'amenai un prisonnier vivant, homme. Je descendis dans l'eau; voilà qu'il fut conduit à l'état de prisonnier sur la route de la ville. Je traversai l'eau sous lui (c'està-dire que le prisonnier était sur Ahmès). »

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Dans cette partie de l'inscription d'Ahmès, trois points, que j'ai soulignés, sont à considérer particulièrement : 1° On combattait, sur l'eau, dans le Zedkou de la ville d'Avaris. Ce passage montre qu'Avaris était située sur le bord d'une voie ou d'un bassin navigable, que le texte appelle Zedkou, que l'on traduit ordinairement par « canal. Malheureusement ce mot n'est connu que par cette inscription, et son sens est absolument douteux. M. Loret (loc. cit. au vocabulaire) rend Zedkou par « canal ". Selon M. Gardiner qui identifie Avaris avec Péluse, le Zedkou représenterait la branche Pélusiaque, ou la partie voisine qui touche Péluse (1). Mais, d'autre part, il donne à la section comprise entre Daphnae et l'embouchure du fleuve le nom de Shiḥór. J'ai montré ailleurs (2), que le Shihor l'étang d'Horus", et non pas «eaux d'Horus comme traduit M. Gardiner, représentait le lac de Ballah. Le Shihor produisait du sel et des joncs (3); il ne pouvait pas, pour cela, être une rivière d'eau cou

rante.

Si maintenant l'on accepte mon hypothèse, à savoir : Zarou= Avaris, on se trouverait en présence d'une double dénomination pour désigner le canal du Nil à Zarou, ou plus exactement au Shihor, dans lequel il se dé-versait d'abord - ta denȧt «le fossé », : -- www 二 dont

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(1) Alan H. GARDINER, The Defeat of the Hyksos by Kamose: The Carnarvon Tablet N° 1, dans Journal of Egyptian Archaeology, vol. III, 1916, P. 99; The Expulsion of the Hyksos, ibid., 1918, p. 53; 'The Delta Residence of the Ramessides, ibid., vol. V, 1918, Carte et p. 251.

(2) Notes sur l'Isthme de Suez, chap. XIII.

(3) GARDINER, The Delta, p. 185.

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