que les Égyptiens procédaient parfois d'une autre manière, par multiplication d'une des premières dizaines, ce qui n'implique pas l'existence d'un système vigésimal complet, mais seulement un moyen pratique d'expression. A un moment donné, les Égyptiens éprouvèrent le besoin de compléter leur système en créant des noms spéciaux pour les nombres de 6 à 9(1), en empruntant des mots appartenant à une autre langue, non pas tels quels, mais en les déformant de manière à leur donner un aspect égyptien et en les rapprochant ainsi, au point de vue phonétique, de certaines racines indigènes. Cette modification, qui doit être très ancienne, ne peut guère avoir eu lieu que lors du changement de régime provoqué en Égypte par l'invasion ou l'immigration de peuplades asiatiques, caractérisée pour nous par le nom des Shesou-Hor, et à laquelle sont attachées tant d'autres transformations importantes, telles que, dans la langue, l'introduction de nouveaux pronoms personnels. Envisagé de cette façon, le système numérique égyptien nous présente une évolution identique à celle de la langue égyptienne aux époques primitives : le fonds même est essentiellement indigène et s'est développé sur place; il s'est modifié partiellement et amélioré de façon sensible au moyen d'éléments étrangers, par suite de circonstances politiques. L'Égyptien a eu en effet, de tout temps, une . rare faculté d'assimilation; c'est une qualité grâce à laquelle il a toujours réussi à surmonter les grandes crises, à survivre aux invasions en perfectionnant sa civilisation au moyen d'apports extérieurs, sans lui faire perdre son originalité. (1) On est encore en droit d'hésiter au sujet du nombre 6, qui pourrait être, non un vocable d'origine étrangère, mais un mot vraiment égyptien, un nom spécial pour la première unité du deuxième quine, comme, dans certaines langues modernes, il y a des mots de formation spéciale pour les premiers nombres intermédiaires suivant le nombre 10 : elf, zwölf; eleven, twelwe. UN OSTRACON THÉBAIN DE LA XVIII DYNASTIE, PAR M. HENRI SOTTAS. Mon collègue et ami Raymond Weill a bien voulu m’autoriser à publier ce joli petit monument qui est sa propriété. En même temps que la photographie, il m'a remis quelques notes, auxquelles j'ai fait des emprunts. Voici, d'après Weill, les caractéristiques matérielles : Cet ostracon, acheté à Gournah en 1912, est une grosse plaque de calcaire très plane du côté qui fut utilisé pour écrire, mais élevée, dans sa masse, suivant un plan très oblique par rapport à sa face avant. L'objet s'était résolu en plusieurs lames et petits morceaux venus suivant les biseaux résultant de cette conformation; rajusté à la colle forte, il fut trouvé dans cette condition chez le marchand indigène. La face plane écrite est longue, dans le sens des lignes (voir la reproduction), de 210 millimètres, et haute de 130 (dimensions maximum prises sur cette aire de contour irrégulier); l'épaisseur de la plaque varie entre 30 et 40 millimetres. « La surface écrite est entièrement conservée, sauf la chute de petits éclats le long du bord. Sept lignes en écriture hiératique, plus un mot isolé à la hauteur d'une huitième. En noir d'abord, puis, à partir du premier quart de la ligne 6, la fin à l'encre rouge. Les gros points de séparation sont tous en rouge. » TRADUCTION. 1. L'homme dépourvu du nécessaire se trouve possesseur de trésors. 2. Celui qui n'avait pas un lopin de terre a un cortège d'accla maleurs les d'arriver! 11. Or tu es né grand seigneur, et vois, tu as passé ton exis tence 12. dans le cadre des desseins de Dieu sur toi. 13. Honore donc le roi du Sud et glorifie le roi du Nord. COMMENTAIRE. (3) J'ai cru tout d'abord que, dans ce paragraphe, il s'agissait de procurer aux indigents des funérailles décentes. C'était là une des formes de charité qu’affichaient les puissants de ce monde. En regardant de plus près les sens du mot 11, étudiés par Gardiner (A. Z., XLII, p. 120 et suiv. et Recueil, XXXII, p. 227), on voit qu'il veut dire ce mourir, et non ce être porté en terre 5 (1). L'influence qu'a pu exercer sur le procès sémantique l'idée des funérailles par eau est beaucoup moins évidente qu'on ne l'imagine à première vue. En fin de compte, le verbe se prête à un jeu de métaphores dont Sinouhe fournit un exemple : «marier n. Bien qu'il faille se défier des rencontres d'expressions, je crois que notre re arrivern, au sens de faire son chemin dans la vie, est un équivalent très acceptable. (4) Swnw doit être le participe du verbe étudié par GARDINER, Admonitions, p. 41. . (5) +11s ne peut guère être « pseudoparticipen, à cause du redoublement. On y verra un participe à nuance de présent, pour la même raison, et de voix, soit active, soit passive, avec désinence | ou défective. A l'actif, il se rapporterait à m, régime du verbe, soit, littéralement : « il le dirige, lui qui (eum qui) recherche les paroles n. Mais, dans ce cas, il vaudrait peut-être mieux dire e ses paroles, que « les paroles n. Le participe passif serait, au contraire, en apposition au sujet et l'expression « désiré quant aux paroles » logiquement construite. ”) La remarque de Gardiner s'applique surtout aux anciens textes. On rencontre, au moins à l'époque gréco-romaine, l'expression raborder à la nécropolen. Cf. H. JUNKER, Das Götterdekret des Abalon, p. 49. Le style des inscriptions funéraires des Moyen et Nouvel Empires nous a accoutumés à cette alternance des phrases complètes et des participes ou substantifs pris absolument. Exemples, entre autres : Sethe, Urkunden, IV, p. 46, 970 et 1071. La traduction ne tend pas port avec євє. : à établir un rap (6) Le début de la ligne 4, brouillé sur le cliché, est suffisamment visible sur l'original. Avant les deux f on distingue des traits à demi effacés qui semblent répondre au groupe fro", d'ailleurs assez mal formé. Sa présence peut être due à une distraction du scribe, aussitôt corrigée. On sait par quels moyens les potentats au petit pied savaient se faire écouter du vulgaire. D'où les tropes bien connus : « Le jeune homme a un dos; il entend celui qui le frappen, et : « L'oreille du jeune homme est sur son dos n. Cf. SPIEGELBERG, Sludien und Materialen zum Rechtswesen, p. 69. ୧ a (8) Cette phrase est difficile. Le premier groupe peut se transcrire ou .. Dans le premier cas, on aurait, à la rigueur : « préposé au portail de Rannout . La tournure serait alors au vocatif, et le du vers suivant, pronom de la 2e personne, soit : « O préposé au portail de Rannout, Meskhent ne te fixe pas à elle., M à elle.. Mais alors il faudrait, au vers 10, e si ce n'est qu'elle fixe le souffle à ta parinen. En outre, tout verset, entre deux points, forme généralement une phrase. Il n'y a d'exception que pour 12, qui complète 11. Enfin, le discours comporte deux sections bien tranchées, et la distinction est renforcée par la couleur des encres. Pourquoi cette apostrophe viendraitelle au milieu des généralités et non au début des arguments ad hominem ? D'ailleurs, les déesses Rannout et Meskhent sont unies par un lien si étroit, notamment lors de la psychostasie, qu'il est impossible de rompre le parallélisme des deux membres de phrase qui contiennent leurs noms. У a encore d'autres raisons de ne pas re |