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la pale de l'aviron était maintenue parallèle à la muraille; aussitôt qu'il s'agissait, au contraire, de faire exécuter à l'embarcation une conversion dans un sens ou dans l'autre, on tournait cette même pale autour de l'axe de l'aviron, de façon à la présenter transversalement, c'est-àdire dans un plan plus ou moins franchement perpendiculaire à celui de la muraille : et c'est cette opposition de la pale qui produisait les mouvements cherchés. Ceux-ci étaient donc assez analogues à ceux qui, dans le cas d'un gouvernail axial — c'est-à-dire fixé dans le prolongement de l'axe longitudinal de la barque sont effectués par le safran; mais, tandis que ce dernier se déplace toujours extérieurement à l'embarcation, des avirons de barrage latéraux manœuvrés à tribord ne pouvaient produire, par opposition de la pale, un mouvement de conversion à droite qu'à la condition d'exécuter un déplacement d'avant en arrière tendant à les rapprocher le plus possible de la muraille, en d'autres termes, de l'intérieur (f) de l'embarcation. C'est seulement lorsqu'ils avaient à produire un mouvement de conversion à gauche qu'ils exécutaient leur déplacement, d'arrière en avant, extérieurement à cette même muraille: ils devaient alors être écartés de celle-ci, et tournés au dehors, en direction, par conséquent, de la rive du fleuve ou du marais sur lesquels naviguait la barque : l'expression pondrait très précisément à cette dernière manœuvre. Une semblable explication ne saurait évidemment être considérée que comme hypothétique; mais l'hypothèse s'accorde de façon au moins curieuse avec la technique du barrage égyptien, telle qu'on peut essayer de la reconstituer d'après les monuments figurés; et, pour ce qui est des deux conditions qu'elle implique nécessairement orientation de la barque vers le Sud, et disposition des avirons de gouvernail, à l'origine, sur le côté droit de la (1) la première répond, nous l'avons vu, à une très

*

corres

coque

Les représentations figurées ne fournissent malheureusement aucune indication à cet égard : les avirons de gouvernail y sont invariablement placés sur le côté du bateau qui est visible pour le spectateur.

ancienne coutume des habitants de la vallée du Nil, et la seconde est parfaitement plausible. Il faut reconnaître, néanmoins, que la traduction ici proposée des termes fet* soulève un assez grand nombre d'objec

tions.

On peut laisser de côté celle qui consisterait à vouloir chercher, pour le premier de ces termes, une signification en rapport avec le signe lui-même. Bien qu'il n'ait jamais été identifié avec une entière précision, l'objet dont ce signe est l'image figure sûrement, en effet, une pièce de charpente ou de menuiserie (1); et l'on pourrait être tenté, dès lors, de le rapprocher du mâtereau vertical auquel sont attachés, dans de très nombreuses représentations, les avirons de gouvernail. En réalité, outre qu'il n'est pas prouvé qu'il y eût rien à tirer de ce rapprochement, celui-ci serait tout à fait arbitraire, car le matereau de gouvernail n'apparaît pas avant la Ve dynastie, tandis que le signe se rencontre déjà dans les inscriptions du tombeau de 1). Certaines objections d'ordre grammatical paraissent au contraire ass ez sérieuses. Elles ont trait principalement au sens qu'il convient de donner, dans les locutions composées avec les termes

et

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ceux-ci étant supposés, encore une fois, signifier respectivement vers l'intérieur », c'est-à-dire dans la direction de la coque de la barque, et vers la terre, c'est-à-dire dans la direction de la rive du fleuve - aux deux mots et. Le premier ne peut être que l'impératif du verbe « — « faire, agir», ici, par conséquent, manœuvrer, diriger»; mais quelle valeur faut-il attribuer au second? L'on s'attendrait qu'il servît à désigner l'objet au moyen duquel s'exécutait l'action exprimée par le verbe ; nous aurions alors affaire à un mot d'origine sans doute fort ancienne, mais tombé de bonne heure en désuétude, signifiant la rame de gouvernail> rame à laquelle les premiers navigateurs égyptiens

(1) GRIFFITH, Hieroglyphs, fig. 78 et 169, et p. 37.

(2) Id., p. 37.

RECUEIL CHAMPOLLION.

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auraient appliqué le terme expressif de la grande", à cause des dimensions considérables qu'elle présentait en effet par rapport aux rames ordinaires. Il est vrai que cette signification n'est prouvée jusqu'ici par aucun texte, mais le vocabulaire nautique égyptien nous fournit par ailleurs, à ce qu'il semble, l'exemple d'un mot formé d'une façon assez analogue; déterminé par la représentation d'un flotteur, ce même mot s'applique en effet, sous l'Ancien Empire et jusqu'à l'époque de la XII® dynastie, à des embarcations qui paraissent avoir été, suivant les cas, des radeaux de papyrus (1) ou des barques en bois (2), c'est-à-dire dont la seule grandeur constituait le trait caractéristique, et justifiait l'appellation qui leur était donnée. D'autre part, si le mot urt, dans les légendes irj hr imj-wrt et *irj hr t-wrt, est bien véritablement un adjectif à valeur de substantif, jouant le rôle d'un complément direct du verbe irj (pp: dirige vers l'intérieur la grande rame, dirige vers la terre la grande rame »), le rejet de ce complément direct à la suite des compléments circonstanciels ḥr imj et *ḥr ts de ce même verbe, pour irrégulier qu'il apparaisse à première vue, s'explique au contraire assez aisément. Comme les indications de direction hr imj et *hrt des commandements irj hr imj wrt et *irj hr to wrt résumaient l'essentiel de ceux-ci, il est naturel que ce soient celles qu'on ait pris très vite l'habitude de donner les premières au barreur. En outre, très vite aussi, les expressions hr imj et *hr 13 ont dû se fondre avec le verbe irj en une sorte de locution toute faite, dans laquelle la valeur propre de ce verbe avait pratiquement disparu, et qui ne signifiait rien de plus, dès lors, que ce que signifiaient ces expressions ellesmêmes, lorsqu'on les employait toutes seules. Le rapport de dépendance de l'ancien complément direct wrt à l'égard. de cette locution devait s'en trouver singulièrement amoindri, comme aussi, du même coup, l'importance de la

(1) Cf. MAR., Mast., pp. 195 et 210.

(*) Gf. la 1. 22 de la stele de I-cher-nofret du musée de Berlin (L. D., II, 135 h = SCHÄFER, Untersuch., IV, 2, p. 31).

:

place occupée, dans l'ensemble de la phrase, par un mot si évidemment sous-entendu, d'ailleurs, qu'on aurait même presque pu le supprimer et les commandants de barque égyptiens en étaient sans doute venus à dire « vers l'intérieur, la rame de gouvernail!», tout à fait de la même façon que des commandants modernes peuvent dire à tribord, la barre!» aussi bien que «la barre à tribord!"

Une autre interprétation du mot serait également possible. Les avirons de gouvernail égyptiens, du moins à l'origine, ne comportaient pas de barre de manœuvre (c'est sous la Ve dynastie, dans les barques de charge du tombeau de Pth-htp(), qu'on relève pour la première fois la présence de traverses de bois attachées dans le voisinage de la partie supérieure de l'aviron, perpendiculairement au manche de celui-ci); ils ne comportaient pas non plus d'estropes (2), et n'étaient pas assujettis à un mâtereau planté dans le pont (3). C'est donc par la seule force de leur poignet que les barreurs devaient les faire tourner autour de leur axe, et les maintenir, aussi longtemps qu'il était nécessaire, dans la position voulue. On devine l'effort qu'exigeait une telle manœuvre, effectuée dans de pareilles conditions; et il est même à présumer que, lorsqu'il s'agissait de faire opérer une conversion un peu prononcée par une barque de dimensions considérables, l'action de l'homme de barre avait besoin d'être appuyée par celle d'autres barreurs exécutant, sur le côté opposé de l'embarcation, des mouvements complémentaires appropriés. Ces mouvements secondaires, d'ailleurs, présentaient les mêmes difficultés que ceux du barreur principal, et pour les mêmes raisons; aussi fallait-il vraisemblablement tenir sans cesse ces différents barreurs en haleine,

" L. D., II, 101 b, 103 b, 104 b.

(2) Les estropes n'apparaissent pas, à ce qu'il semble, avant la IV dynastie (cf. L. D., II, 28-tombe n° 45 de Gizeh).

(3) Les premiers exemples de mâtereau de gouvernail s'observent au tombeau de Pth-hip (L. D., II, 104 b; cf. GRASER, dans Dümichen-Resultate, p. 4).

et les rappeler à l'obligation qui leur incombait d'agir de toutes leurs forces sur leurs avirons de gouvernail, afin de maintenir ceux-ci le plus complètement possible tantôt contre la muraille et tantôt en dehors d'elle. Si cette hypothèse est fondée, le mot pourrait être considéré comme un adjectif ayant la valeur, non plus d'un substantif, mais d'un adverbe (), et signifiant grandement, tout à fait; les commandements

et

devraient alors se traduire agis (sc.: avec ta rame) vers l'intérieur (i. e. : à tribord) complètement", «agis (sc. avec ta rame) vers la terre (i. e. : à bâbord) complètement", et seraient assez comparables, cette fois, aux commandements modernes «barre à droite, toute !», «barre à gauche, toute ! »

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Des divers problèmes qui se posent à propos de l'interprétation ici suggérée des locutions et *TE, le plus délicat est assurément celui que soulève l'étude de deux variantes qu'on rencontre quelquefois pour la seconde d'entre elles. L'une de ces variantes paraît bien venir à l'appui de la thèse soutenue plus haut. En effet, si le mouvement décrit par l'aviron de gouvernail éloignait celui-ci de la barque lorsqu'il s'agissait de barrer à gauche, on comprend que le groupe puisse avoir été, dans certains cas(2), remplacé par : le sigue sans doute qu'un équivalent de ; et, s'il ne constitue une simple variante graphique de, née de la valeur [jtj] de l'hieroglyphe, il s'explique tout naturellement par la signification partie extérieure, dehors d'un édifice de celui-ci (3). Au contraire, la présence d'un signe

n'est pas

dans quelques-unes de ces légendes de barrage est beaucoup plus malaisée à comprendre. Ce signe, à ce qu'il semble, n'est en rapport, lui aussi, qu'avec la locu. Un texte du tombeau de

tion

donne en effet

3

ERMAN, Aegypt. Grammatik 3, § 438 c.

(2) Deir el Gebrawi, II, pl. VII.

(3) Cf. aussi le sens dehors, en dehors du signe (4) L. D., II, 96.

à Sakkarah (4) dirige à bâ

ע

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