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LA

MOSAÏQUE DE CHEIKH ZOUÈDE,

PAR

M. PAUL PERDRIZET.

A quatre ou cinq lieues à l'ouest d'El Arich, au bord de la mer, sont des vestiges anciens, que M. Jean Clédat a explorés en 1913. Les résultats de ces recherches ont paru dans le tome XV des Annales du Service des Antiquités de l'Égypte, sous le titre : Fouilles à Cheikh Zouède.

Le plus intéressant des monuments exhumés à Cheikh Zouède est, sans contredit, le tapis de mosaïque en opus vermiculatum, long de 4 m. 75, large de 3 mètres, dont M. Clédat, avec son talent connu, a fait le relevé au trait reproduit ici à la planche II: relevé très exact, comme on s'en rendra compte en le comparant aux trois excellentes phototypies qui accompagnent le rapport de M. Clédat, et qui reproduisent respectivement le haut, le milieu et le bas de cette belle mosaïque. Je dis belle, en raison surtout de sa conservation: il n'y manque pas un cube. Elle se compose de trois tableaux superposés.

En haut, la triste histoire de Phèdre et d'Hippolyte. La vieille nourrice, TPOOOC, à qui EPWC, volant audessus d'elle, indique d'un geste impératif la détestable mission qu'elle doit remplir, apporte à IППОAYТОС une tablette où est écrit le nom EAPA, cependant que la

(Le bracelet en plomb, reproduit par CLEDAT, p. 41, fig. 16, porte une inscription en relief qui, évidemment, doit être lue: w Báonavos Oust! hors d'ici le jeteur de sorts! L'adverbe ¿¿w a le même sens qu'en rhomaïque ŎEw.

reine (E▲PA), assise dans son palais, sur un fauteuil à haut dossier ovale, regarde avec inquiétude du côté de la nourrice, et que deux chasseurs, KYNAPOI, sous les arbres de la forêt, attendent leur jeune maître, et con- . tiennent son destrier qui piaffe.

Au-dessus, dans un long cartouche à queues d'aronde, tenu par deux Amours volant, cette inscription métrique, dont la lecture est certaine, comme celle des deux autres inscriptions de la mosaïque. Cette première inscription débute par un mot, NAOIE, qui est manifestement une erreur du mosaïste, lequel était, je pense, un ouvrier égyptien, peu au fait du style poétique grec et même, peut-être, des écritures grecques, minuscule et majuscule. Je propose de lire IÃOIΣ(); l'inscription se rapportait au portrait du fondateur, ce portrait devait décorer un des panneaux de la grand'salle dont M. Clédat a exhumé le pavement:

[δ]οις Νέστορα τὸν φιλόκαλον κτίστην.

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C'est, soit un sénaire iambique, si l'on admet qu'en raison de l'accent, iλóxadov ait pour quantité. soit un iambique sénaire catalectique, avec césure au troisième pied :

Le premier et le troisième pieds seraient des iambes, le deuxième un trochée, le quatrième un tribraque, le cinquième un spondée.

Il résulte, de ce vers, que le personnage qui fit construire l'édifice où se trouvait notre mosaïque s'appelait Nestor. Qu'un Egyptien riche et distingué, probablement fonctionnaire, au ne ou au ve siècle de l'ère chrétienne, ait porté comme cognomen le nom d'un des

En cours d'impression, je prends connaissance d'une note de PLASSART sur les inscriptions de la mosaïque de Cheikh Zouède (Bull. de corr. hell., 1916, p. 359). PLASSART voit dans NAOIC une graphie iotacisante de Nats, et dans l'inscription qui commence par NAOIC une dédicace, faite par une dame du nom de Nais.

principaux personnages de l'épopée homérique, c'est l'indice, entre tant d'autres qu'on pourrait rassembler, de ce désir nostalgique qui ramenait l'Hellénisme moribond vers ses origines comme vers une Fontaine de Jouvence. Non notre Nestor fût nécessairement de sang grec : que sa famille était peut-être égyptienne, mais l'éducation, les traditions, le milieu social l'avaient hellénisée.

Sous l'histoire de Phèdre et d'Hippolyte, en deux lignes, une inscription métrique, formée comme le numéro 113 du recueil de Kaibel), d'un hexamètre, suivi de trois pentamètres :

δεῦρ ̓ ἴδε τὰς χάριτας χαίρων, φίλε, ἅς τινας ἡμῖν
τέχνη ταῖς ψήφοις ἔμβαλε, πηξαμένη

τὸν Φθόνον ἐκ μέσσου καὶ ὄμματα Βασκανίης,
τῆς ἱλαρῆς τέχνης πολλάκις εὐξάμενος.

Ici vois avec plaisir, ami, les charmantes choses que pour nous l'Art a formées avec les cubes du mosaïste, à la stupeur (ankauévn) complète (ex μéoσov) de l'Envie aux yeux jaloux...

J'arrête ma traduction à la fin du deuxième pentamètre, ne voyant pas à quoi se rapporte le troisième.

Deuxième tableau. La pompe de Dionysos. Le dieu, AIONYCOC, est assis dans un char dont ЄPWC est le cocher, et que traînent un Centaure et une Centauresse. Celle-ci joue de la grande lyre, celui-là de la flûte phrygienne (2). L'inscription TEAЄTH, entre Dionysos et le Centaure, est-elle le nom de la Centauresse, ou s'applique-t-elle à la fête orgiastique que le tableau représente? J'opterais pour la première hypothèse (3). A côté du char de Dionysos court une panthère, elle semble lapper le vin qui tombe de la cruche du dieu. Derrière la

Cette épigramme a été copiée par FRANKEL à la villa Gilloteau à Nice (Arch. Ztg., 1874, p. 148). Prope Nicaeam Italorum, écrivait KAIBEL en 1878. Ce prope Nicaeam Italorum en dit long sur les sentiments gallophobes de ce professeur de l'Université allemande de Strasbourg: il ne pouvait les contenir, même dans une compilation épigraphique! (2) Dict. des Antiq., s. v. TIBIA, p. 312. (3) Lexicon de ROSCHER, S. v. TELETE.

:

panthère, un pampre. Devant le char, Silène, en tunique, portant une outre sur les épaules, et tenant une tasse de la main droite. Devant Silène, dansent un Bacchant, CKIPTOC, ceint de la nébride, et une Bacchante quasiment nue le Bacchant fait sonner des cliquettes, la Bacchante des crotales. Rangée inférieure à gauche, un cratère, puis HPAKAHC (peau de lion, massue) ivre et titubant; un jeune Satyre (petites cornes pointant sur la tête, pedum) le soutient. Ensuite, panthère et canthare. Ensuite, Pan le chèvre-pieds (grandes cornes de bouc et nébride), une grappe dans une main, cliquettes dans l'autre. Puis, dans le champ, syrinx et cliquettes. Puis, un Bacchant nu (nébride, pedum), qui souffle dans une corne. Enfin, une Bacchante décemment vêtue (chiton et manteau) qui danse, le thyrse dans une main, dans l'autre le tambourin.

Troisième partie. Moins haute que les deux autres, elle est formée d'un grand titulus à queues d'aronde (une couronne dans chacune), entouré d'une zone d'oiseaux, tant sauvages que domestiques, à la picorée parmi les herbes du Nil (à gauche en bas, une oie picore les graines d'un lotus). Le titulus renferme quatre lignes qui sont autant d'hexamètres :

Εἴ με φιλεῖς, ώνθρωπε, χαίρων ἐπέβαινε μελάθρων,
ψυχὴν τερπόμενος τεχνήμασιν οἶσιν ποθ ̓ ἡμῖν.
Πέπλον ἱμερόεντα Χαρίτων ἡ Κύπρις ὕφανεν

λεπταλέη ψηφίδι, χάριν δὲ ἐνεθήκατο πολλήν.

Si tu es un ami, ô homme, entre, le cœur joyeux, dans cette grand' salle, pour avoir le plaisir de regarder les travaux d'art qui

sont ici.

Le voile charmant des Grâces, c'est Cypris elle-même qui en a figuré le tissu en menus cubes de mosaïque, et elle a donné à son ouvrage beaucoup d'agrément.

Le dernier distique, qui ne se rapporte pas au pavement où il est écrit, concernait-il une autre mosaïque contenue dans la même salle ou dans le même édifice, et

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