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Paris de la fosse où il était tombé. On pourrait tout au plus voir là une allusion à la sévérité du roi envers les usuriers juifs, en même temps qu'un vestige de l'animosité de ses sujets contre cette malheureuse race; car le sens général de la légende est moins défavorable au souverain qu'au juif lui-même.

Quelle autre dissidence pourrait-on signaler? Une chanson sur les Établissements de Saint Louis, exprimant la plainte amère d'un seigneur vexé par la juste sévérité des Enquesteurs royaux? « J'aime bien rester maître de mon fief,» s'écrie-t-il 2. Ce mot trahit toute sa pensée; on ne doit donc prendre sa critique que pour la récrimination intéressée d'un particulier. Quoi encore? L'insulte d'une femme de Paris, qui, au dire du confesseur de la reine Marguerite, reprocha à son souverain de n'être que le roi des moines et des clercs? C'est un outrage gratuit et isolé, auquel Louis ne répondit que par un bienfait. Quant aux contes reproduits par le Ménestrel de Reims, ils n'atteignent en rien la personne royale, et, s'ils la font intervenir, leur savant éditeur a pris soin de démontrer que c'était le plus souvent sans respect pour l'histoire authentique, et même pour la vraisemblance'. D'ailleurs, ils étaient récités et ils ont été rédigés pour la distraction de quelques châtelains, et ne représentent nullement l'opinion générale. Ce n'est point dans tous ces écrits qu'il faut chercher l'expression du véritable sentiment de la nation à l'égard de son prince. Il faut bien plutôt la demander à ces anecdotes réellement populaires, que les fidèles entendaient journellement dans la bouche de leurs orateurs favoris, et que ces orateurs eux-mêmes empruntaient souvent au répertoire fécond des bruits publics. C'est ce que nous avons essayé de faire, et le résultat de cette enquête, en donnant un couronnement nécessaire aux nombreux travaux dont le règne de saint Louis a été l'objet, ne peut qu'ajouter une autorité nouvelle au touchant accord de ses historiens.

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1 Mone, Anzeiger für Kunde, col. 453, Hist. litt., t. XXIII, p. 160.

2 Bibliothèque de l'École des chartes, t. I, p. 370-374.

3 V. le recueil des Historiens de France, t. XX, p. 106.

Récit d'un Ménestrel de Reims, édit. Wailly, préface, p. LXIII et suiv.

L'AUTEUR DE L'IMITATION

NOUVELLES CONCLUSIONS TIRÉES D'UN NOUVEAU MANUSCRIT

Les articles sur l'auteur de l'Imitation parus ici en 1873 et en 1874, ont soulevé, à l'étranger comme en France, quelque opposition. Ils tendaient, si l'on s'en souvient, à éliminer définitivement du débat les trois prétendants les plus accrédités, Gersen, Thomas à Kempis et Gerson. Dès lors, il était naturel que chacun d'eux trouvât parmi ses partisans de nouveaux défenseurs. La controverse, éteinte depuis une quinzaine d'années, s'est tout à coup ranimée. Pendant que MM. Jean Darche et Élie Petit, en France, soutenaient les prétentions de, Gerson, M. l'abbé Ducis, de concert avec M. l'abbé Blanchet et le P. Mella en Italie, relevait les titres de Gersen, et M. Hirsche, en Allemagne, M. l'abbé Delvigne, en Belgique, et chez nous M. Th. Brunton, défendaient les droits de Thomas à Kempis 2.

1 Voir la Revue, t. XIII, p. 527, et t. XV, p. 93.

2 JEAN DARCHE. Clé de l'Imitation de Jésus-Christ. Gerson et ses adversaires. Paris, Thorin, 1875, in-8 de 363 p.

ÉLIE PETIT. Revue de l'Art chrétien, t. XX, p. 271.

L'abbé Ducis. L'auteur du traité de l'Imitation de Jésus-Christ. Annecy, Perrissin, 1875, in-8 de 24 p.; L'auteur de l'Imitation de Jésus-Christ. Annecy, 1876, pet. in-4 de 90 p.

L'abbé A. BLANCHET. Le Monument du bienheureux Jean Gersen à Cavaglia. Ivrée, 1875, in-12 de 41 p.

Le P. CAMILLO MELLA, S. J. Della Controversia Gerseniana. Prato, tipogratia Giachetti, 1875, in-8 de 203 p. (Extrait de la Civiltà Cattolica.)

KARL HIRSCHE. Prolegomena zur neuen Ausgabe der Imitatio Christi nach

Il n'est pas question, en ce moment, de répondre à chacun de ces honorables contradicteurs. Les lecteurs de la Revue des questions historiques voudront bien seulement se rappeler que les nouvelles recherches publiées ici avaient pour point de départ un nouveau manuscrit produit dans le débat, auquel, à la suite de M. H. Delaborde, conservateur du Cabinet des Estampes à la Bibliothèque nationale de Paris, l'auteur de ces articles avait assigné, avec un supplément de preuves, la date de 1406.

Les partisans de Gersen ont d'autant mieux accepté cette conclusion, qu'elle leur fournissait un argument de plus en faveur de l'hypothétique abbé de Verceil. Quant aux défenseurs de Gerson et de Thomas à Kempis, intervenus à ce propos, on reconnaît assez par leurs observations qu'ils n'ont pas vu le manuscrit et même que plusieurs d'entre eux sont étrangers aux études paléographiques '. Un seul, M. Hirsche, a examiné le manuscrit en question, et c'est à ses objections, qui dénotent un examen trop rapide ou trop superficiel, qu'il y aura lieu de répondre plus tard, si les circonstances permettent de mener à bonne fin des études déjà anciennes sur l'auteur et le livre de l'Imitation.

Pour le moment, il suffit de maintenir cette date de 1406 contre des critiques insuffisantes, et de passer outre.

Dans le présent travail, on voudrait seulement faire connaître un manuscrit qui vient à l'appui des conclusions précédemment émises.

On peut l'appeler, comme celui de 1406, un manuscrit nouveau dans le débat. Car, s'il a été autrefois signalé par dom Martène, il n'a jamais été ni décrit ni invoqué au cours de la

dem autograph d. Thomas v. Kempen, etc... Berlin, Lüderitz, Scheverlagsbuchhandlung. Carl Habel, 1873-1877, 2 vol. in-8.

L'abbé DELVIGNE. Quelques remarques à propos d'une nouvelle édition de Imitation de Jésus-Christ. Revue de l'Art chrétien, t. XIX, p. 233. — Les Récentes recherches sur l'Auteur de l'Imitation de Jésus-Christ. Bruxelles, Alfred Vromant, 1877, gr. in-8 de 44 p.

Th. BRUNTON. Thomas à Kempis. Notes, matériaux et recherches sur l'auteur du livre de l'Imitation de Jésus-Christ. Paris, Plon, 1873, in-4 de 47 p.

L'honorable M. Jean Darche, qui a mis tout son cœur et un peu plus de passion qu'il ne conviendrait, dans un sujet de cette sorte, à défendre Gerson va jusqu'à dire naïvement que « les manuscrits embrouillent la question. »

controverse qui se prolongea pendant tout le XVIIIe siècle '. De tous les manuscrits de l'Imitalion, connus jusqu'à ce jour, il est pourtant le plus précieux par la date qu'il porte. On s'étonnerait à bon droit que les savants auteurs du Voyage littéraire eussent omis d'en faire mention, s'ils l'avaient remarquée; cette date leur aura certainement échappé dans une inspection rapide du manuscrit. Il y a lieu de la mettre en lumière, pour en déduire des conséquences qui concordent pleinement avec celles que fournit le manuscrit, mal à propos contesté, de 1406.

Le manuscrit qui nous occupe en ce moment, est de format in-4°, sur papier, avec quelques feuilles de parchemin intercalées çà et là. Il est conservé dans son état primitif avec une ancienne reliure à plats de bois; il forme un recueil compacte de cent quatre-vingt-trois feuilles dont les rectos seuls sont numérotés.

La feuille de garde porte ces mots : Liber Cenobii sancti Pauli aliter Rubeevallis in Zonia ordinis canonicorum regularium sancti Augustini prope Bruxellam. Cette mention nous apprend que le manuscrit appartenait originairement au monastère de Saint-Paul de Rougeval, de l'ordre des chanoines réguliers de Saint-Augustin.

En tête du recueil est une longue table des matières, dont voici les premiers articles:

TABULA TRACTATUUM INFRA SCRIPTORUM

Quedam similitudines magistri Jacobi de Vitriaco.
Item quedam exempla ejusdem magistri.

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Item quidam tractatus de sequela Christi et de quibusdam virtutibus valde bonus.

Etc., etc.

32

Ce dernier article se rapporte au premier livre de l'Imitation qui débute sans titre, au commencement de la page 32, par

1 C'est à l'obligeance de M. le comte Riant, son propriétaire actuel, que je dois la communication de ce précieux manuscrit. Au lieu de se réserver à lui-même de le faire connaitre au public, il a bien voulu me permettre, avec le désintéressement d'un véritable érudit, de m'en servir le premier pour la suite de mes études. Qu'il me permette de le remercier publiquement de sa

courtoisie.

ces mots soulignés: Qui sequitur me non ambulat in tenebris, dicit Dominus.

Tout au haut de la page, une main étrangère a ajouté la mention suivante, en caractères gothiques d'une autre écriture et d'une encre différente de celle du recueil: Tractatus fratris Thome Kempis canonici regularis.

Cette addition a été signalée en ces termes par Marlène et Durand dans leur Voyage littéraire : « Le Monastère de RougeCloître n'est qu'à cinq quarts de lieue de la Cambre. C'est une des plus belles maisons que les chanoines réguliers aient dans les Pays-Bas... Il paraît par quelques manuscrits que les religieux de Rouge-Cloître qui étaient de la Congrégation de Vendesheim gardaient autrefois la clôture, comme font aujourd'hui les Chartreux. Nous y trouvâmes (en 1713) les livres de l'Imitation de Jésus-Christ, à la tête desquels on avait mis d'une main postérieure le nom de Thomas à Kempis '. »

Le recueil, composé de vingt-cinq petits traités ou extraits spirituels, se termine par le Floretus, opuscule assez souvent copié dans les manuscrits du moyen âge 2. A la page cent quatre-vingt-troisième et dernière, qui est malheureusement déchirée en partie, se trouve la formule finale avec la date :

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Chacune de ces lignes est traversée d'une barre au minium; c'est la manière du copiste de souligner les titres et les chiffres dans son manuscrit.

Il est à peine besoin de faire remarquer que cette mention, placée à la fin du recueil, le date tout entier. Le volume est un

1 Martène et Durand, Voyage littéraire, t. I, part. п, p. 205. Il paraît que l'endroit où était situé le monastère en question, avait pris indifféremment le nom de Rouge-Cloître et de Rouge-Val.

2 Le Floretus se trouve dans plusieurs manuscrits ainsi indiqué: Incipit liber pulcherrimus metrice compositus qui dicitur Floretus quasi flos de sacræ Scripturæ libris, etc. C'est sous ce titre qu'il a été imprimé pour la première fois. On l'a attribué mal à propos à saint Bernard. Dom Rivet (Hist. lill. de la France, t. VIII) le donne avec plus de vraisemblance à Jean de Garlande, auteur présumé du Facelus, qui est un traité métrique de piété du même genre.

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