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UN CHANOINE

DEVANT LE PARLEMENT

PAR M. GUSTAVE VALLIER.

Séance du 22 février 1867.

Messieurs,

L'an passé, M. Caillemer nous rappelait, dans cette enceinte, une spirituelle quoique méchante plaisanterie du dernier siècle, à l'adresse d'un arrêt prétendu du Parlement de Grenoble, rendu au profit d'une dame qui avait eu la chance de donner un fils à son époux quatre ans après l'absence de celui-ci...... Et il nous apprenait le degré de confiance qu'il fallait accorder à cette curieuse pièce apocryphe. Qu'il me soit permis de soumettre aujourd'hui à notre érudit confrère et au chercheur heureux le pendant de cette historiette que j'ai, dernièrement, recueilli très-vivace et fort accrédité à Aix, en Provence. Il s'agit bien encore du Parlement de Dauphiné, mais la personne incriminée n'est plus une femme, c'est un chanoine! Rassurez-vous, Mes

sieurs, le cas en litige ne ressemble nullement à celui de la dame. Voici le fait :

Vers mil sept cent et tant, un chanoine du Chapitre de la cathédrale de Grenoble avait pour habitude hélas ! les chanoines ne sont pas les seuls qui sacrifient à cette faiblesse !— de n'être jamais exact aux offices, et néanmoins de réclamer avec beaucoup de régularité la distribution à laquelle les membres présents avaient droit. Plusieurs fois déjà le coupable avait été dûment averti et admonesté par le doyen du Chapitre : ce droit de présence au chœur ne pouvait équitablement être accordé à qui n'assistait pas à l'office entier; c'était affaire de conscience.... Rien n'y faisait : l'obstiné chanoine persistait à venir fort tard occuper sa stalle. On sentit le besoin d'une répression, et il fut décidé, par un article additionnel au règlement, que tout membre du Chapitre, entrant au chœur après le dernier coup de cloche, serait dorénavant privé de la distribution.

Quelque temps s'écoula, pendant lequel aucune atteinte ne fut portée à la discipline. Un jour pourtant, notre chanoine arriva juste au moment fatal. Inquiet, et redoutant d'être pointé par l'épingle officielle et d'être privé, par conséquent, de la rémunération quotidienne, il hâta un peu trop le pas et fit une chute à l'instant précis où il mettait le pied sur la première marche du chœur et où le dernier coup de cloche retentissait. Or, comme il fut constaté que la tête seule était dans le chœur et que les pieds se trouvaient encore dans la nef, on lui refusa impitoyablement son droit de présence à l'office. Procès. Les juges condamnèrent le chanoine. Celui-ci était fort tenace et il en appela au Parlement de la décision du Chapitre, prétextant que, du moment

que sa tête était dans le chœur, son corps était censé s'y trouver aussi. Mais le Parlement, après de magnifiques considérants, décida que le chanoine était absent, attendu que la partie constitutive et essentielle du chanoine ne réside jamais dans la tête, mais bien dans l'estomac et dans le bassin....

Cette historiette est, je le répète, fort accréditée dans le Midi de la France, et c'est sa popularité même qui m'a engagé, Messieurs, à poser ce nouveau problème juridique à notre confrère, M. Caillemer, dont vous connaissez tous l'habileté dans certaines solutions épineuses. Puisse-t-il être aussi heureux dans cette nouvelle recherche, qu'il l'a été dans celle qui l'a précédée !

A GRENOBLE,

DISCOURS DE RÉCEPTION LU A L'ACADÉMIE DELPHINALE

PAR M. L'ABBÉ SERVONNET.

Séance du 22 février 1867.

MESSIEURS,

:

L'élection par laquelle vous avez bien voulu m'appeler à prendre place au milieu de vous, n'a pas seulement excité en moi un vif sentiment de reconnaissance; elle m'a donné, permettez-moi de le dire avec une entière simplicité, un bon exemple et un touchant spectacle. J'ai vu, dans ce choix, ce qui se peut voir de meilleur la force s'inclinant vers la faiblesse ; des hommes qui ont tous les genres de talents et de distinctions, qui sont l'honneur des diverses carrières libérales, qui ont accompli les plus considérables et les plus utiles travaux, daignant accueillir parmi eux, avec le nom de collègue, un humble disciple qui a tout à apprendre et ne peut, vraiment et en bonne conscience, se reconnaître que le mérite de la bonne volonté.

Car le titre même que j'ai paru avoir à vos suffrages, Messieurs, est un titre emprunté, et votre bienveillance

seule a pu lui donner quelque prix. J'avais eu le bonheur de publier une partie de la correspondance de saint François de Sales (1), et vous avez voulu témoigner, par ce scrutin dont je recueille le bénéfice, de votre religieuse sympathie pour cet homme incomparable qui est en même temps un éminent esprit, un grand littérateur, un sage par excellence, une âme et un cœur d'élite s'il en fut jamais, cet homme dont le nom seul rappelle tout le côté doux et consolant de la religion, cet homme, enfin, qui doit être compté parmi les principaux bienfaiteurs de notre chère ville de Grenoble.

Il m'a donc semblé, Messieurs, que j'entrerais dans votre pensée en laissant à saint François les honneurs de la séance de réception, comme il a eu ceux de la séance d'élection. Pour cela, j'ai recueilli, afin de vous. les présenter aujourd'hui, les souvenirs d'une des époques les plus intéressantes de notre histoire religieuse, de cette époque où le saint évêque de Genève nous appartint d'une manière spéciale, vécut au milieu de nous, nous évangélisa, nous édifia et nous aima.

Ces heureuses relations de saint François avec Grenoble durèrent pendant les deux stations consécutives de l'Avent de 1616 et du Carême de 1617, de l'Avent de 1617 et du Carême de 1618.

Nous allons faire le simple récit de ces deux années fécondes, indiquer les traits principaux du séjour de François à Grenoble, et entrer dans le détail des œuvres

(') Lettres de saint François de Sales à des Religieuses, 2 volumes. Un rapport trop bienveillant que M. Albert du Boys a fait à l'Académie sur cet ouvrage, le 9 février 1866, est inséré au Bulletin de cette année.

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