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(ce fut M. le cardinal du Perron qui dit cela) que si on ne leur accorde, ils quitteront l'assemblée des Estats; qu'ils useront de toutes sortes d'incomprestations, et d'excommunications, et d'anathématisations, contre tous ceux qui s'opposeront à cette créance, afin de les précipiter dans les peines, les géhennes, le feu, les enfers.- Demandent que ceux de la religion ayent à se désister d'opiner sur cette affaire (sur cela M. de Buillon prenant la parole, dit que le Roy et la Reyne savoient avec quelle modestie luy et ceux de la Religion avoyent parlé en cette affaire, lorsque le Roy leur avoit commandé d'en opiner, en qualité d'officiers de la Couronne, mais que pour le fond, luy et tous ceux de la religion rendroyent toujours au Roy l'obéissance qui luy est deue); que le premier advocat du Roy du Parlement soit toujours ecclésiastique, et que M. Servin' soit déposé. — Après, M. le cardinal du Perron prit la parole et confirma tout cela, et sur le sujet de l'excommunication dont il parla, Monsieur le Prince dit (je l'ay ouy de sa bouche): Nonobstant toutes les excommunications, il se trouvera toujours beaucoup de François, qui, en conservant le respect qui est deû au Pape, pour ce qui concerne le spirituel, employeront volontiers tous leurs biens et leurs vies, pour la

1 Louis Servin, conseiller d'État, premier avocat général au Parlement de Paris, mort dans l'exercice de ses fonctions en 1626, tandis qu'au nom de sa compagnie il faisait des remontrances au Roi tenant son lit de justice. Les plaidoyers de ce magistrat célèbre par son éloquence et son énergie ont été recueillis en 1631, in-4o. Il a laissé plusieurs autres ouvrages tant latins que français.

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conservation de l'autorité et du service du Roy.Sur cela, M. de Villeroy dit: qu'il semble que l'evesque d'Angers se soit porté si violemment en cette affaire, et ayt offencé le Parlement expressément afin d'obtenir evocation d'un procès qu'il a contre son clergé d'Angers, craignant de retomber au jugement dudit Parlement où il a déjà esté maltraitté.

On leur devoit répondre que le Roy avoit trèsagréable qu'eux et tous ceux qui oseroyent penser à tenir des langages si insolens se retirassent des Estats, et laissassent ceux qui voudroyent demeurer, résoudre les affaires, et sur cela, faire expédier une déclaration. On tient qu'en cette affaire, ils ne prennent avis que des cardinaux et des evesques, et non des capitulans, et que le prieur des chartreux' et carmes ayant voulu prendre la parole sur des propositions que faisoit le cardinal du Perron, et voyant la violence dont il usoit pour l'empêcher de parler, disant qu'après tant de grands prélats qui avoient traitté cette affaire, il s'estonnoit comme il en pouvoit douter, il répondit que puisque cette affaire se traittoit par autorité et non par raison, il n'avoit plus rien à dire.

Les cardinaux sont récusables sur cette affaire, attendu que n'y ayant qu'un degré d'eux au Pape, ils peuvent estre Papes, ou faire les Papes.

Semble que M. le cardinal du Perron se porte à

1 Adam Oger, député du clergé pour la prévôté, ville et vicomté de Paris.

ces aigreurs extraordinaires par la suggestion de son frère qui a grand part avec M. d'Espernon, les Jésuites, et la duchesse de Guise.-L'evesque d'Angers traitte avec luy pour l'archevesché de Sens.

Le cardinal du Perron dit aussi que l'on vouloit introduire en France la confession d'Angleterre, et que c'estoient des pensionnaires du Roy d'Angleterre qui le procuroyent.

Le cardinal de Sourdis dit à Monsieur le Prince, qu'il le récusoit au nom de tout le clergé, à ce qu'il s'abstint d'opiner sur toutes les affaires qui regardent l'Eglise. A quoy Monsieur le Prince répondit (cause de la récusation, sur ce qu'il s'estoit ouvert): Cela est bon aux autres compagnies, mais non au Conseil, où l'on ne laisse d'estre juge encore que l'on s'ouvre.

La Reyne témoigna estre piquée de tant d'insolences. Le Roy leur répondit: qu'ils dressassent leurs cayers promptement, et qu'il leur donneroit toute sorte de contentement. Monsieur le Chancelier ne dit quasi rien.

L'après disnée, le cardinal de Sourdis vint au Conseil des finances; après y avoir un peu esté, il s'en alla. Monsieur le Prince ne luy osta son chapeau. Après que le Conseil fut levé, il rentra. Comme Monsieur le Prince le vit approcher, il dit au Roy et à la Reyne, qu'ils savoyent l'insolence dont le Cardinal avoit usé le matin contre sa qualité de Prince du sang; qu'il supplioit leurs Majestez de ne point souffrir qu'il fust opprimé en cette qualité, et de luy permettre de savoir si le clergé le voudroit avouer;

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en ce cas, former sa pleinte contre le clergé, et s'i. le désavouoit, former sa pleinte contre le cardinal de Sourdis en particulier. Le Roy et la Reyne luy répondirent assez doucement, qu'il fist ainsy qu'il aviseroit.-Après, le cardinal de Sourdis approcha, qui dit, qu'il supplioit leurs Majestez d'avoir agréable la récusation qu'il avoit faite contre Monsieur le Prince, attendu qu'il s'estoit ouvert, et que tout juge qui s'ouvre est récusable. Ensuite de cela, Monsieur le Prince demeura un peu, puis parla à M. le maréchal d'Ancre, et sortant incontinent après, il dit: que le cardinal de Sourdis estoit un prestre, qu'il ne le pouvoit offencer, qu'il avoit rendu au Roy et à la Reyne tout le respect qu'il leur devoit, que pour le fond de l'affaire, il se tiendroit toujours en gros pour le service du Roy; que quant à son particulier, il feroyt ce que leurs Majestez luy commanderoyent.

On dit que sa résolution est de savoir si le clergé avoue M. le cardinal de Sourdis; s'il l'avoue, de former sa pleinte contre tout le clergé, sinon, de la faire contre le cardinal de Sourdis en particulier.-Cette procédure n'est bonne, car il y a apparence que le Clergé ne le désavourra pas, mais il faudroit former la pleinte contre luy en particulier, attendu qu'il ne luy appartient point d'avancer cette parole sans en avoir charge expresse du Clergé, par délibération faite exprès sur ce sujet; ou que si cela n'estoit point, il devoit estre chastié, etc.

On remarque que MM. de Guise furent ce jour là à la chasse, et que M. d'Espernon n'alla point au Louvre.

Lorsque le cardinal de Sourdis fit sa récusation Monsieur le Prince devoit répondre que sans le respect du Roy et de la Reyne, il luy eust passé son espée à travers le corps, pour avoir esté si téméraire que d'oser prononcer cette parole contre un Prince du sang, sur le sujet d'une affaire si importante '.

9. M. le marquis de la Force 2 ayant de longtemps querelle avec M. de Grammont, se dérobbe le soir, auparavant de ses gens, dans le Louvre; sort par la porte des cuisines où deux chevaux de M. de Saint-Angel, son cousin, les attendoyent. Vont coucher hors la ville. Le lendemain 9, à quatre heures du matin, Saint-Angel va dire à M. de Grammont que M. de la Force l'attendoit en tel lieu. M. de Grammont va avec luy, avec son escuyer réputé vaillant. —Arrivé, dit qu'il se veut battre à cheval.-M. de la Force dit qu'il n'estoit raisonnable, veu qu'il estoit mal monté, et que l'autre avoit le Cardinal (barbegris à M. de la Rochefoucault, valant 1200 écus). Néantmoins, se battent. M. de la Force blesse M. de Grammont au bras, retournant à la passade, et M. de Grammont blesse en... du corps; son cheval fait un saut, le jette à terre. M. le marquis de la Force luy fait rendre

1 Voy. le Merc. fr., t. III, qui entre dans les plus grands détails sur les délibérations des assemblées des États et donne l'analyse des principaux discours prononcés dans les réunions des trois ordres.

2 Armand Nompar de Caumont, deuxième duc de la Force, pair, maréchal de France en 1652, mort en 1675.

3 Antoine de Gramont, deuxième du nom, comte de Gramont, de Guiche, de Louvigny, duc et pair en 1643, mort en 1644.

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