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qu'elle désire encore après tant d'efforts et tant de sacrifices infructueux. Redon de Belleville quitta Florence vers la fin de 1790, comblé des bienfaits du grandduc. La felouque sur laquelle il s'était embarqué fit naufrage. Il perdit tout ce qu'il possédait; fut forcé, par ce contre-temps, de s'arrêter à Gênes, et répara bientôt ses pertes, en acceptant de l'occupation dans l'opulente maison des Cambiaso, qui lui confia l'administration des domaines qu'elle venait d'acquérir en Normandie. De retour à Paris, Redon de Belleville trouva ses anciens amis placés aux premiers rangs, soit dans l'assemblée législative, soit dans le gouvernement; mais loin d'envier leur fortune ou d'user de leur crédit, il se tint, autant que possible, dans l'obscurité, uniquement occupé des intérêts dont il était chargé. Cependant une foule de fautes, dont l'histoire impartiale signalera les véritables auteurs, nécessitaient un changement de constitution, et la France prit le nom de république. Il était nécessaire de faire reconnaître ce nouveau gouvernement par les puissances étrangères, et surtout d'éviter un premier refus. La politique fit diriger les premières démarches vers la cour de Naples; non qu'on regardât comme une chose im-portante de faire d'abord reconnaître la république française par un prince de la maison de Bourbon, mais parce qu'on pouvait profiter de l'expédition que les ministres de Louis XVI avaient préparée contre cette puissance et la Sardaigne. La difficulté était

de trouver un envoyé capable de cette mission délicate, qui n'était pas sans danger. Redon de Belleville en fut chargé. La flotte française, sous les ordres de la ToucheTréville, croisait devant Naples. II part et débarque seul, sans escorte, sous le simple uniforme de la garde nationale parisienne, où il était inscrit comme grenadier. Sa contenance suffit pour imposer à la multitude, qui se pressait en tumulte sur ses pas. Les Napolitains, par l'empire des préjugés qui régnaient alors, avaient peine à concevoir, et peut-être plus de peine encore à supporter qu'au nom du peuple qui venait de renverser un trône, un simple particulier, sans autre titre que celui de citoyen, sans autre décoration que celle d'un soldat, osât se présenter devant un monarque, et lui dicter des lois. Néanmoins Redon de Belleville se rend au palais, refuse d'entrer en pourparler avec le ministre, et surmontant tous les obstacles de l'étiquette et de l'usage, il parvient au roi, remet ses dépêches, discute en présence des ministres l'objet de sa mission, et renouvelant en quelque sorte l'action de Popilius, ne donne au roi que quelques heures pour prendre une décision. Il obtient une réponse favorable, et regagne, le jour même, l'escadre française, recon-duit au port dans les voitures de la cour. Il vint lui-même rendre compte de ce succès à la convention, dont il fut favorablement accueilli, et qui l'envoya vers le sénat de Venise et le saint-siége. Mais il échoua dans cette double mission. Le sénat refusa de l'en

tendre; à Rome, il eut plusieurs conférences avec Pie VI. On offrait au pape de respecter sa souveraineté sur le Comtat, s'il donnait un assentiment public et formel à nos lois de réforme ecclésiastique, et s'il cessait d'appuyer de son autorité la rébellion du clergé gallican, peuple sans patrie, comme celui des courtisans, et qui, toujours avide de pouvoir et de richesses, n'a cessé d'être tantôt Français contre le pape, tantôt papiste contre la France. Pie VI écoutait avec plaisir l'envoyé de la république; mais il ne voyait rien de stable dans ce qu'il appelait la révolte française. Redon de Belleville prit congé de S. S. en lui annonçant qu'elle serait victime de ses fausses idées, et l'événement justifia bientôt sa prédiction. Il revint à Paris. La face des choses était changée. La plupart de ses amis avaient péri dans les prisons ou sur l'échafaud; ceux qui survivaient lui conseillèrent de fuir, et se hâtèrent de lui en procurer les moyens. On le chargea d'aller monter des ateliers d'armes dans le midi. Il ne put former que celui d'Avignon. Cet établissement prospérait. Redon de Belleville le soutenait avec les seules ressources de ce talent administratif dont il a donné tant de preuves, et qu'il avait puisé à la bonne école, celle de Turgot, lorsqu'il fut accusé d'aristocratie, arrêté et conduit à pied dans les prisons de Valence, où il serait mort ignoré, sans les soins généreux du maire de cette ville. Quel que fût le malheur des temps, on n'avait point en core imaginé de transformer en

mouvemens séditieux les devoirs sacrés de l'humanité, ni de punir comme un crime l'intérêt qu'on prend aux prisonniers d'état. M. de Montalivet pouvait sans danger consoler et secourir ceux que renfermaient les prisons de Valence. Redon de Belleville passa soit en prison, soit en surveillance, mais toujours sans emploi, tout le temps de la terreur. Après l'installation du directoire, il fut nommé consul à Livourne, poste auquel nos mouvemens militaires en Italie donnèrent une grande importance. Il s'est, pour ainsi dire, associé à la gloire de cette brillante campagne par les services qu'il rendit à l'armée. C'est là qu'il reçut Pie VI, qui était conduit en France. Il se rendit auprès de S. S. pour lui offrir le choix du transport par terre ou par mer, et tout ce qui pouvait adoucir l'amertume de ce pénible voyage. Le pape reconnut Redon de Belleville; et se rappelant en même temps les sages conseils qu'il en avait reçus, il lui serra affectueusement la main en versant des larmes. En vertu de ses fonctions, il fut souvent appelé auprès du général en chef, avec lequel il correspondait directe ́ment. Il acquit bientôt son estime et son amitié, dont il n'a cessé de recevoir des témoignages, alors même qu'aveuglé par le bandeau impérial, Napoléon ne savait plus distinguer ses véritables amis. Du consulat de Livourne, Redon de Belleville fut porté, en 1797, à celui de Gênes, et concourut à l'expédition d'Egypte avec tant de zèle et tant de succès, que pendant sa courte relâ

che à Malte, le général en chef Bonaparte lui donna des preuves publiques de sa satisfaction. Cependant M. Sottin de la Couandière vint à Gênes avec le titre insolite d'ambassadeur. M. Sottin est le premier qui ait passé du ministère à l'ambassade, et de l'ambassade au néant. Sa mission fut de courte durée; et sitôt après sa révocation, Redon de Belleville le remplaça en qualité de chargé d'affaires. Son esprit conciliant sut maintenir la bonne intelligence entre la république ligurienne et les états de Piémont. Il parvint par sa fermeté à assurer la tranquillité de l'intérieur, menacée des factieux. Il fit par venir chez lui quinze députés de l'opposition, auxquels il fit donner leur démission. Plusieurs emprunts pour les dépenses de l'armée française furent ouverts, et remplis par la seule confiance que les capitalistes de Gênes avaient en son caractère. Il ne quitta cette ville que la veille du blocus, pour donner au directoire des informations précises sur la position de Masséna, et rejoignit aussitôt le général Suchet, au pont du Var, pour essayer de rentrer à Gênes, où il avait laissé sa famille. Il avait cessé d'habiter son pays natal depuis un grand nombre d'années; mais son nom était lié à trop d'événemens remarquables pour qu'il pût être oublié de ses concitoyens. Ils le nommèrent, en 1799, député des Deux-Sèvres au corps-législatif. Il n'y siégea point. Le premier consul le renvoya à Livourne, avec le titre de commissaire - général des relations commerciales et une ju

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ridiction qui s'étendait de Naples à la Spezzia. De là il passa avec la même qualité à Madrid, d'où il sollicita et obtint son rappel en mars 1804. Il continuait à être reçu familièrement par le premier consul, et les membres de sa famille. Un jour qu'il était à la Malmaison, le premier consul lui demanda brusquement, après quelques questions sur la situation de l'Espagne : « Que dit-on de moi » à la cour de Madrid? On dit, >> répondit Redon de Belleville a» vec sa franchise ordinaire, que » vous préparez un trône, et que >> vous allez revêtir les ornemens »de la royauté. Eh! que pen>> sez-vous de ce projet ? Je pen>>se que Washington n'a pas eu >> besoin de recourir aux vains prestiges d'une couronne, et que le »>premier des citoyens pourrait se dégrader en devenant le dernier » des monarques. » Le premier consul sourit et ne parut point offense; mais il l'envoya à la préfecture de la Loire-Inférieure. Ce département se ressentait encore des agitations de la guerre civile; et cependant Redon de Belleville, par son application aux affaires par ses inclinations bienfaisantes, ses manières affables et son amour pour la justice, sut se concilier tous les partis. La mémoire de son administration vit encore dans le cœur des habitans, et il reçut une preuve touchante de leur gratitude et de leur estime. Depuis deux ans il avait quitté cette préfecture. Il était hors de France; et en 1809, le collége électoral de la Loire-Inférieure le nomma candidat au sénat-conservateur, quoiqu'il n'eût point sollicité cet hon

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neur, et qu'il eût un compétiteur puissant dans l'évêque Duvoisin, homme habile, écrivain distingué, prélat ambitieux, et courtisan en faveur. A cette époque, Redon de Belleville était intendant-général du pays de Hanovre. Il en fit la remise au roi de Westphalie, et l'empereur le nomma maître des requêtes, lui donna une dotation dans le pays dont il avait été l'administrateur, et l'envoya à Laybach, en qualité d'intendant-général de l'Illyrie. En 1811, il demanda son rappel après que le duc de Raguse eut quitté ce gouvernement. Il fut chargé alors de l'inspection des dépôts de mendicité qui se multipliaient en France assez inconsidérément, et fut nommé administrateur des postes, place qu'il a occupée depuis le 5 avril 1813 jusqu'au 10 août 1816. Destitué par l'effet du système qui prévalait alors, il rentra dans l'obscurité de la vie privée, ne communiquant qu'avec un très-petit nombre d'amis, et se livrant aux fonctions charitables qu'il s'était imposées comme commissaire d'un bureau de bienfaisance devoirs pieux, conformes à ses inclinations et à tous les actes de sa vie. Cependant sa santé s'altérant de plus en plus, il se retira dans un petit domaine qu'il possédait à Bailly, près de Versailles, et y mourut, le 10 août 1820, dans sa 72 année. Redon de Belleville avait la vertu, la pureté, le patriotisme, et souvent l'inflexibilité de caractère, qui ont illustré les grands citoyens des anciennes républiques. Il a laissé un beau souvenir d'une vie entièrement consacrée à

son pays. En retraçant les principaux événemens de son honorable carrière, nous sommes heureux de penser que nous payons à un homme de bien la reconnaissance de la patrie.

BELLEVUE (DIT TANCRÈDE), servit comme officier dans les guerres de la Vendée, avant la bataille ou déroute du Mans. Après cette affaire, s'étant caché en Bretagne, M. de Puisaye, chef des chouans, l'employa à la première organisation de ce corps de partisans, et le chargea ensuite d'insurger le pays entre Nantes et la Vilaine (rivière qui prend sa source près d'Ernée Mayenne). M. Bellevue fut aussi chargé de remplir une mission dans le Morbihan; il signa et publia une proclamation, le 26 juillet 1794, dont l'objet était de faire prendre les armes aux habitans de la Bretagne. Arrêté par ordre de Cormatin, il recouvra la liberté à la sollicitation de Bollet, conventionnel qui avait été envoyé pour apaiser les troubles excités par les chouans. Ce député le prit pour secrétaire, et l'emmena à Paris, où il est depuis resté dans l'obscurité.

BELLEY (J. B.), député de Saint-Domingue à la convention nationale. Il fit partie des deux tiers dés membres de cette assem→ blée qui entrèrent au conseil des cinq-cents. Au mois de mai 1797, il retourna à Saint-Domingue, et était chef de division de gendármerie, lorsque le général Leclerc débarqua dans l'île. Belley abandonna les Français, auxquels il s'était joint d'abord; mais ayant été pris les armes à la main, il fut

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