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Déjà la cour a décidé, par un arrêt de cassation du 25 octobre 1811, rendu au rap. port de M. Bauchau, que le droit d'Opposi tion aux ordonnances des chambres d'instruction, accordé par l'art. 135 au ministère public et aux parties civiles, n'est pas exclusivement borné au seul cas où la mise en liberté du prévenu aura été ordonnée par la chambre d'instruction....

» Eh! peut-on n'être pas frappé des inconveniens auxquels donnerait lieu journel lement l'opinion adoptée par la cour de Liége?

» Quoi! la chambre du conseil d'un tribunal de première instance déclarera qu'il n'y a pas lieu à poursuivre un prévenu de crime contre lequel s'éleveront les commencemens de preuve les plus graves ! Et parceque le juge d'instruction devançant l'erreur de sa compagnie, aura omis de décerner contre ce prevenu, avant son rapport, un mandat de depot ou d'arrêt, le procureur du gouvernement ne pourra pas former Opposition à l'ordonnance de ce tribunal! Il sera force de la respecter! Il n'aura aucun moyen pour en faire prononcer la reformation! Peut-on concevoir rien de plus déraisonnable, de plus absurde ?

» Mais qu'on y fasse bien attention: si, pour échapper au reproche de prèter au législateur une intention aussi choquante, on est obligé de convenir, que, dans cette hypothese, l'Opposition du procureur du gouvernement est recevable; il faudra bien que l'on convienne aussi que le procureur du gouvernement peut former Opposition à une ordonnance qui, en laissant le prévenu d'un crime en état d'arrestation, le renvoie, comme prévenu de simple délit, devant le tribunal correctionnel. Car, d'un côté, il n'y a pas plus mise en liberté dans le premier cas que dans le second; et d'un autre côté, si, dans le premier cas, il importe à l'ordre public que le prévenu soit poursuivi, il ne lui importe pas moins, dans le second, que l'on ne réduise pas à une simple amende, à un simple emprisonnement, la peine afflictive et infamante qu'a encourue un grand coupable.

» Vainement, au surplus, la cour de Liege a-t-elle cherché, dans les art. 193 et 214 du Code d'instruction criminelle, un remède aux inconvéniens qu'entraînerait son système.

» Sans doute, l'ordonnance de la chambre du conseil qui renvoie le prévenu d'un crime au tribunal correctionnel, n'empêche pas ce tribunal de se déclarer incompetent pour le juger. Sans doute, si ce tribunal refuse de

se déclarer incompétent, la cour d'appel pourra, sur l'appel du ministère public, réformer son jugement, et ordonner qu'il sera instruit contre le prévenu dans la forme du grand criminel.

» Mais de ce que, par une voie détournée, longue et qui peut le conduire jusqu'à la cour de cassation, le ministère public peut obtenir la réformation d'une ordonnance de renvoi à la police correctionnelle, s'ensuit-il qu'il ne puisse pas, pour parvenir à la même fin, prendre une voie plus directe, plus courte et plus sûre, celle de l'Opposition à l'ordonnance même?

» Le tribunal correctionnel, auquel la chambre d'accusation renvoie le prévenu d'un crime, peut aussi se déclarer incompétent pour le juger; il peut aussi, nonobstant l'arrêt de la chambre d'accusation, renvoyer le prévenu devant les juges competens pour instruire au grand criminel. Et cependant le recours en cassation est ouvert immédiatement, en pareil cas, contre l'arrêt de la chambre d'accusation. La cour l'a ainsi jugé plusieurs fois, et notamment par un arrêt du 7 novembre 1811, portant annullation d'un arrêt de la chambre d'accusation de la cour de Paris, du 15 octobre précédent, par lequel Amand-Felix Leclerc, prévenu d'un crime de vol avec escalade, avait été renvoyé à la police correctionnelle.

» Pourquoi donc la voie d'Opposition ne serait-elle pas aussi ouverte immédiatement au ministère public pour faire réformer surle champ une ordonnance de chambre du conseil qui, sans mettre le prévenu en liberté, le renvoie à la police correctionnelle, tandis que, d'après la nature du crime qui lui est imputé, il devrait être traduit à la cour d'assises ou à la cour spéciale?

» Ce considéré, il plaise à la cour, vu les art. 442, 416 et 135 du Code d'instruction criminelle, casser et annuler, dans l'intérêt de la loi, et comme violant les règles de la compétence, les arrêts de la cour de Liége, des 27 avril et 8 mai derniers, dont les expéditions sont ci-jointes; et ordonner qu'à la diligence de l'exposant, l'arrêt à intervenir sera imprimé et transcrit sur les registres de ladite cour.

» Fait au parquet, le 8 juin 1812. Signé Merlin.

» Ouï le rapport de M. Aumont... (1), la

(1) Les motifs de cet arrêt, que j'omets ici sont les mêmes que ceux de l'arrêt du 25 octobre 1811.

cour casse et annulle, dans l'intérêt de la loi, les arrêts rendus, les 27 avril et 8 mai derniers, par la cour de Liége, chambre des mises en accusation.... >>.

Même décision dans l'espèce que voici :

Le 10 juin 1812, réquisitoire du procureur du gouvernement au tribunal de première instance d'Amersfoort, tendant à ce que, attendu que d'une procédure faite par le juge d'instruction de ce tribunal, il résulte que les nommées Alida Renstbysen et Elizabeth Blanken sont prévenues d'avoir volé conjointement, dans une maison habitée où l'une d'elles était domestique, ces deux femmes soient renvoyées devant la cour de La Haye, pour être mises en accusation.

Le lendemain, ordonnance de la chambre du conseil, qui, dans la fausse supposition que le vol imputé aux prévenues, ne porte point le caractère de crime, mais seulement celui de délit, renvoie les prévenues à l'audience correctionnelle.

Opposition à cette ordonnance, dans les vingt-quatre heures, de la part du procureur du gouvernement; et conclusions du procureur général à ce que les prévenues soient mises en accusation, et traduites devant la cour d'assises.

Le 21 août suivant, arrêt de la cour de La Haye, qui, attendu que l'ordonnance du 11 juin ne met pas les prévenues en liberté, déclare l'Opposition du procureur du gouvernement non-recevable.

Recours en cassation contre cet arrêt; et, le 8 octobre de la même année, arrêt, au rapport de M. Busschop, qui casse, par les motifs exprimés dans celui du 23 octobre 1811.

Le 28 janvier, le 5 février, le 19 mars et le 14 mai 1813, autres arrêts, au rapport de M. Oudart, et de M. Audier-Massillon, qui, dans les mêmes circonstances, en cassent d'autres de la cour de La Haye, de la cour d'Aix, et de la cour d'appel du grand-duché de Berg, des 14 et 28 décembre 1812, 23 février et 2 avril 1813.

L'un de ces arrêts, celui du 19 mars 1813, ayant renvoyé devant la cour de Liége, l'affaire sur laquelle était intervenu celui de la cour d'appel du grand-duché de Berg, du 22 décembre 1812, et qui avait pour objet un vol domestique dont la chambre du conseil du tribunal de première instance avait renvoyé la connaissance à la police correctionnelle, la cour de Liége, persistant dans l'opi nion qu'elle avait déjà manifestée précédem

ment (1), a rendu, le 25 juin de la même année, un arrêt ainsi conçu:

« Considérant qu'on ne doit point s'étonner si le pouvoir donné au procureur du gouvernement, de former Opposition dans les espèces énoncées dans les art. 128, 129 et 131 du Code d'instruction criminelle, cesse dans le cas de l'art. 130, puisque les catégories et les résultats sont differens; car, dans les premières, le prévenu est ou peut être tellement dégagé de l'action publique, qu'il ne reste plus, au ministère qui la dirige, aucun moyen d'obtenir une réparation que la nature du crime ou du délit, ses circons tances et les charges paraissent exiger; mais ce danger n'existe point dans la catégorie de l'art. 130; le prévenu doit encore reparaitre devant ses juges, non pas seulement pour y souffrir une légère réprimande, ou supporter seulement des intérêts civils, mais pour y subir un examen dont les suites peuvent entrainer pour lui, sinon des peines afflictives et infamantes, des peines qui peuvent encore être très-rigoureuses.

» Le procureur du gouvernement reste au surplus environné de tous les moyens que la loi lui donne pour faire redresser l'erreur des premiers juges.

» L'appréciation des charges n'en sera pas moins faite encore par le tribunal de police correctionnelle, dans une affaire de ce genre, comme elle est faite dans les affaires qui lui sont soumises avec l'aveu de la partie publique. Et il est si vrai que l'Opposition ou l'aveu n'opère rien sur le caractère du fait, tant et si long-temps qu'elle n'est pas définitivement jugée, qu'il arrive que le tribunal de police correctionnelle se déclare incompétent dans une affaire qui cependant lui avait été soumise avec l'attache et de la chambre du conseil, et du procureur du gouvernement;

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derniere analyse, la cour de cassation, juste appréciateur des formes, remettrait les choses dans l'état que la société et la loi revendi. quaient.

» Mais, au reste, doit-on craindre que des magistrats que l'honneur retient dans les tristes fonctions de juger les hommes, sans autre avantage que celui de trouver dans leurs cœurs le sentiment et l'assurance d'avoir rempli leurs devoirs, puissent être susceptibles de se coaliser pour sauver un grand coupable?

» Considérant que le législateur a donc pu être mû par ces indications, lorsqu'il a si formellement établi une différence dans les dispositions contenues dans les articles relatifs à l'Opposition;

» Qu'il importe peu à l'effet des art. 128, 129 et 131, que l'individu prévenu ait été arrêté ou ne l'ait pas été, puisque la loi n'en réserve pas moins à la partie civile et au procureur du gouvernement les droits que ces dispositions devaient justement leur attri buer, puisqu'elle déclare positivement au second paragraphe de l'art. 129, que les mises en liberté, dont il est parlé à cet article et au précédent, ne pourront préjudicier aux droits de la partie civile ou de la par tie publique, ainsi qu'il sera expliqué (dit elle) ci-après; quels droits veut elle leur conserver? C'est celui du recours, sans doute, c'est-à-dire, l'Opposition. Dans quels cas? Comment doivent-ils faire valoir ces droits? Elle va le prononcer instantanément dans l'art. 135 lorsque la mise en liberté des prévenus sera ordonnée conformément aux art. 128, 129 et 131, le procureur (du roi) et la partie civile pourront s'opposer à leur élargissement. C'est ici où la prévoyance du législateur est remarquable; c'est ici où il manifeste bien qu'il ne veut rien oublier; c'est ici où il prouve que ses dispositions seront combinees avec réflexion, qu'elles sont enfin en harmonie avec sa pensée. En effet, pour obvier à ce que pourrait offrir de få cheux, pour la partie publique, pour la société, l'opinion qu'un prévenu pourrait être élargi, quoique le recours à l'autorité com pétente fût réservé pour faire infirmer une déclaration qui allait soustraire le prévenu à l'action directe de l'un et de l'autre, il a voulu que, dans les droits réservés par le S. 2 de l'art. 129, celui de s'opposer à l'elargissement fút bien déterminé, parcequ'en effet l'un pouvait aller sans l'autre. L'elargissement n'est donc mentionné dans cet article, que dans le dessein de faire retenir, s'il y a eu arrestation, et pour cela seule.

ment, puisque le renvoi des poursuites, aux termes de l'art. 128, donnait ouverture à l'emploi des droits réservés dans le second paragraphe de l'art. 129, soit que le prévenu fut arrêté, soit qu'il ne le fût pas. On ne peut donc pas, pour aider au système qui nous ferait dépasser les limites posées, supposer gratuitement au législateur l'intention, qui serait singulière, il faut l'avouer, de ne pas accorder le recours quand le prévenu n'est pas arrêté; puisque ce renvoi des poursuites peut s'appliquer même à un contumax, et que, dans ce cas, la partie publique n'en aurait pas moins le droit de se pourvoir pour faire infirmer la déclaration qui le renvoie de la poursuite, ou, autrement dit, qui le met en liberté; parceque l'ordonnance qui met réellement en liberté, n'est pas celle qui ordonnerait un élargissement, mais celle qui décharge l'homme prévenu d'un crime ou d'un delit, de tout ce qui peut mettre obstacle à la jouissance des droits de citoyen;

» Considerant que, dans l'hypothèse de l'art. 130, on ne rencontre aucun des motifs qui ont pu exciter le législateur dans les autres le prévenu n'est pas renvoyé des poursuites; il n'est pas mis en liberté; il n'est pas élargi; il reste au contraire sous la main du procureur du gouvernement; tandis que, si le recours ne lui est pas accordé dans les autres, il va lui échapper; que, si le législateur, frappé de ces différences, n'a pas accordé le recours dans le cas de l'art. 130 et l'a donné dans les autres, c'est qu'entre ceuxci il y a analogie, et parcequ'entre ces derniers et celui de l'art. 130, il n'y en a pas; parcequ'il est très-probable que les leçons de l'expérience lui avaient suggéré cette dispo sition qu'on ne trouverait pas étrange, si c'était le moment d'examiner les inconvé niens qui peuvent marcher à la suite d'une interpretation contraire; que les motifs de la distinction, fondés sur les differences, étant connus, tout concourt à démontrer que la lettre est conforme à l'esprit, au sens que le legislateur a voulu avoir; que, pour pouvoir lui en présumer un autre, il faudrait livrer sa conviction à des raisonnemens qui laissent toujours la véritable question indécise et ne font que lui en substituer d'autres; qu'abstraction même faite de ces motifs trèspuissans sans doute, il faudrait supposer, non seulement que ce qui est exprimé en termes clairs et précis, n'est pas une démonstration pour ceux que la loi veut obliger, mais encore que ce n'est pas ce que le légis lateur a dit ou fait qui devrait déterminer et fixer cette obligation, mais ce qu'il aurait

pu ou dû faire; enfin, que ce qui restreint, circonscrit, ne limite pas;

» Considérant que, si la marche tracée par la loi, n'était pas la plus courte, il est bien probable qu'elle est la plus salutaire et qu'elle serait la plus efficace; que ce serait encore une question de savoir si elle serait la plus longue. Il est incontestable que, si l'Opposition n'est pas fondée, elle est la plus courte; car le procureur du gouvernement pouvant immédiatement faire juger l'affaire, il aura l'avantage de s'assurer bien mieux par les débats, si en effet une circonstance qui doit aggraver, est constatée; qu'on ne peut le définir sur des déclarations écrites; qu'il aura de plus l'avantage bien plus précieux de s'assurer si le prévenu est coupable ou non. Si la circonstance est détruite, nulle nécessité d'Opposition; si le prévenu n'est pas coupable dans l'opinion du procureur du gouvernement et celle du tribunal.

» Il faut s'arrêter ici et conclure:

» Le procès aura été jugé avant même qu'il n'ait pu être examine par la chambre d'accusation; la vindicte publique n'a pas été entravée, elle est vite satisfaite; le prévenu, la société, le trésor public y auront gagné.

» La marche, tracée par la loi, est donc la meilleure; car si l'Opposition avait eu lieu, il y aurait encore eu un intérêt blessé, celui du prévenu dont la détention aurait été prolongée pendant tout le temps qu'il aurait fallu employer pour l'envoi des pièces, pour leur retour, pour qu'elles pussent parcourir toutes les distances, souvent très-grandes, qui séparent les tribunaux de première instance et les cours d'appel; et il est à remarquer que ce préjudice est irréparable.

» Si l'Opposition est fondée, il faudra sans doute renvoyer les pièces à la cour d'appel; mais le caractère du délit etait en question, il n'en sera que mieux établi. Voila le seul circuit que raisonnablement on peut craindre. Il faut peser et juger de quel coté se trouvent le plus d'inconveniens;

Considérant qu'en produisant les hypotheses aussi loin qu'il est possible à l'imagina tion de les porter, il faudrait toujours convenir que, dans cette dernière du moins, le prejudice peut être réparé, que la vindicte publique peut encore être satisfaite, la société tranquillisée, et la loi exécutée;

» Considerant finalement que les chambres d'accusation des cours d'appel ne peuvent avoir caractère et juridiction pour connaitre des Oppositions formées par le ministère public et par les parties civiles, que dans les cas où le droit d'Opposition leur est donné;

» La cour déclare qu'il n'y a pas lieu de statuer sur l'Opposition dont il s'agit ».

Le procureur général de la cour de Liége se pourvoit en cassation contre cet arrêt; et conformément à la loi du 16 septembre 1807, l'affaire est portée devant les sections réunies sous la présidence de M. le grand-juge ministre de la justice.

« La question sur laquelle vous avez, en ce moment, à prononcer (ai-je dit à l'audience du 29 octobre 1813), n'en est plus une pour votre section criminelle depuis deux ans, votre section criminelle l'a résolue par un grand nombre d'arrêts délibérés avec la plus grande maturité; et de toutes les cours dont ces arrêts ont annulé les décisions qui y étaient contraires, il n'y en a plus que deux, celle du grand duché de Berg et celle de Liége, qui persistent dans l'opinion qu'ils ont réprouvée.

» C'est déjà pour nous un grand préjugé que l'opinion réprouvée par ces arrêts, n'est pas en harmonie avec le véritable esprit de la loi; et en effet, plus nous avons medité la loi dans son ensemble et dans les divers textes dont elle se compose, plus nous nous sommes convaincus qu'elle ne peut pas être entendue dans le sens que lui prête l'arrêt qui vous est dénoncé par le procureur général de la cour de Liège.

» Le Code d'instruction criminelle, considéré dans son ensemble, relativement à notre question, nous présente les chambres du conseil des tribunaux de première instance comme des juridictions essentiellement subordonnées, pour tous les actes qui emanent d'elles sur le rapport du juge d'instruction, à la chambre d'accusation de la cour ordinaire de leur ressort. C'est ce qui résulte clairement de la denomination de premiers juges qu'attribuent à ces chambres, en les envisageant dans leurs rapports avec la chambre d'accusation, les art. 229, 231, 233 et 235 de ce Code. Et telle est l'idée qu'en a donnée l'orateur du gouvernement, M. Treilhard, à la séance du Corps legislatif, du 7 novembre 1808: Daignez, messieurs ( ce sont ses termes), saisir l'ensemble de la marche que nous avons suivie au premier aspect, elle peut paraitre compliquée ; dans la réa ité, elle est bien simple. Des officiers de police judiciaire, répandus sur toute la surface de l'Empire, veillent sans cesse pour la répression des crimes, des délits et des contraventions; ils constatent les faits, chacun dans sa partie; le procureur du gouvernement est le centre où tout vient aboutir. Le juge d'ins truction réunit toutes les preuves, de quelque

nature qu'elles puissent être, et soumet l'af. faire à la chambre du conseil. ENFIN S'ÉLÈVE,

AU-DESSUS DES PREMIERS TRIBUNAUX, UN CORPS

DE MAGISTRATURE fortement constitué, inaccessible à la séduction et à la crainte, éloigné de tous les motifs de considérations locales qui ont pu égarer les premiers juges. C'est là que se formera la déclaration importante s'il ya lieu à accusation. Je ne crois pas qu'il fut possible de réunir plus de garantie pour la súreté publique et pour la sûreté particu

lière.

» Cet aperçu général du système du Code d'instruction criminelle, suffit certainement pour assurer aux chambres d'accusation des cours, le droit de réformer toutes les ordonnances des chambres du conseil des tribunaux de première instance qui leur sont déférées par les parties compétentes.

» Car toutes ces ordonnances, par cela seul qu'elles sont des actes d'une juridiction subordonnée à une autorité supérieure, sont toutes passibles de révision de la part de cette autorité; et il n'est besoin pour les faire réviser en effet par cette autorité, que de les lui faire parvenir par une voie légale.

» Cette voie, le Code d'instruction criminelle la qualifie d'Opposition; mais, dans la réalité, c'est une sorte d'appel. L'Opposition proprement dite n'est ouverte qu'à la partie qui n'a pas été entendue, et elle ne peut être portée que devant les juges dont est émané l'acte qu'elle a pour objet. L'Opposition à laquelle sont sujettes les ordonnances des chambres du conseil des tribunaux de première instance, est ouverte au procureur du gouvernement et à la partie civile, quoique tous deux aient paru dans l'instruction, quoique tous deux y aient fourni leurs moyens; et c'est devant la cour d'appel qu'elle est portée. Ce n'est donc pas une Opposition proprement dite; c'est donc une voie introduite aux mêmes fins que l'appel; et si elles n'est pas soumise à toutes les formes, si elle n'a pas tous les effets de l'appel ordinaire, elle a du moins, avec l'appel ordinaire, un but commun, celui de saisir le juge supérieur de la connaissance des actes du premier juge.

» Cela posé, que faut-il pour que le procureur du gouvernement, ou la partie civile, puisse, par la voie de l'Opposition, déférer à la chambre d'accusation de la cour d'appel, une ordonnance quelconque de la chambre du conseil du tribunal de première instance?

» Faut-il que cette ordonnance soit expressément rangée, par le Code d'instruction criminelle, dans la classe de celles qui sont susceptibles d'Opposition ? Non saus doute : il TOMA XXII.

suffit qu'elle n'en soit pas exceptée par une disposition expresse du même Code; et pourquoi? Parceque la faculté d'attaquer tous les actes de la chambre du conseil du tribunal de première instance, est de droit commun; parceque le droit commun régit nécessairement tout ce qui n'est pas soustrait à son empire par une exception positive.

» Or, y a-t-il, dans le Code d'instruction criminelle, quelque texte qui affranchisse de l'Opposition l'ordonnance par laquelle le prévenu d'un crime emportant des peines afflictives ou infamantes, est renvoyé, en état d'arrestation, à la police correctionnelle, comme s'il n'était prévenu que d'un délit emportant la peine de l'emprisonnement?

» La cour de Liége reconnaît elle-même qu'il n'y en a aucune; et dès là, notre question est décidée.

» Qu'importe que l'art. 135 ne parle de l'Opposition que relativement aux cas où la mise en liberté du prévenu sera ordonnée conformément aux art. 128, 129 et 131 cidessus?

» Cet article, il faut le dire, nous avertit lui-même, par la frappante inexactitude avec laquelle il est rédigé, que nous devons nous attacher bien moins à sa lettre qu'à son esprit.

» D'une part, il est énoncé, à la fin de son premier paragraphe, qu'en cas d'Opposition, d'envoi des pièces sera fait, ainsi qu'il est dit à l'art. 132; et c'est évidemment une erreur. L'art. 132 ne porte rien autre chose si ce n'est que, dans tous les cas de renvoi, soit à la police municipale, soit à la police correc tionnelle, le procureur du gouvernement est tenu d'envoyer, dans les vingt-quatre heures, au plus tard, au greffe du tribunal qui doit prononcer, toutes les pièces après les avoir cotées; et assurément ce n'est ni au greffe d'un tribunal de police, ni au greffe d'un tribunal correctionnel, c'est uniquement au procureur général de la cour d'appel, que doivent être transmises les pièces sur le vu desquelles la cour d'appel doit juger l'Opposition da la partie publique ou de la partie civile. ¡Non-seulement cela résulte de l'exposé des motifs de la loi dans lequel il est dit en toutes lettres que, dans tous les cas d'Opposition, les pièces sont nécessairement transmises au procureur général, et l'affaire est soumise à une révision dans la cour d'appel; mais cela résulte encore bien plus manifestement de la nature même des choses: car il serait souverainement déraisonnable de sou. mettre à la révision d'un tribunal de police, l'ordonnance du tribunal de première instance

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