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L'acquéreur s'engageait à payer le prix convenu par le traité, et cette obligation ne pouvait pas être détruite par le résiliement qu'il eût voulu exercer. On verra ci-après que le regrès était établi en faveur des vendeurs : les acheteurs ont tenté, par la loi des correlatifs, de se procurer le même avantage; mais on leur a répondu que l'usage du regres étant contraire aux principes, et n'ayant été introduit que par des raisons particulières au vendeur, ils ne pouvaient invoquer une jurisprudence établie contre eux; que la loi restait immuable à leur égard, et qu'elle ne pouvait être altérée en leur faveur, par des arrêts qui n'avaient pour objet que leur désavantage.

De là, l'arrêt du parlement de Paris, du 3 mai 1653, rapporté par Soefve, tome 1, cent. 4, chap. 33, qui a débouté un acheteur de sa demande en résiliement.

Le parlement de Flandre a jugé la même chose, quoique, par une disposition particulière, la coutume dans laquelle la question se présentait, autorisat également le vendeur et l'acheteur à resilier réciproquement la vente et l'achat des maisons et héritages, tant que les choses étaient entières.

Dans le fait, Nicolas Duquesnoy achete à Douai, le 30 juin 1749, de François Crombet, un Office de notaire à la gouver nance de la même ville. Dans le jour même, Duquesnoy fait signifier à Crombet un acte par lequel il lui déclare qu'usant de la faculté accordée aux acheteurs, comme aux ven. deurs, par l'art. 6 du chap. 3 de la coutume de Douai, il résilie son achat et le tient pour non avenu. Le lendemain, Crombet répond par un autre acte, que la disposition de la coutume n'est pas applicable aux Offices, et que si Duquesnoy se refuse à l'exécution de son contrat, il se pourvoira en justice pour l'y faire contraindre.

Crombet se pourvoit en effet, le 15 juillet, devant les officiers de la gouvernance. Rien de plus simple que ses moyens : « Les Offices » sont des immeubles de droit; ils sont af » franchis des dispositions coutumieres, qui » ne portent que sur les maisons et héritages; si celles-ci permettent au vendeur et » à l'acheteur le repentir après le contrat,

le droit commun l'interdit; l'un et l'autre » peuvent également être contraints à l'exécution de leurs engagemens ».

Duquesnoy soutient, au contraire, que les Offices, quoiqu'immeubles de droit, sont soumis au droit coutumier; que le privilége accordé par la coutume de Douai à l'acheteur et au vendeur, doit avoir son effet pour les

Offices, comme à l'égard des autres biens; que d'ailleurs il n'est pas particulier à cette coutume: que la plupart des interprètes sont d'avis qu'il est de droit commun.

Cette défense n'a point réussi à Duquesnoy. Les officiers de la gouvernance de Douai l'ont condamné, par sentence du 20 novembre 1749, à exécuter le contrat du 30 juin.

Appel au parlement de Flandre. Duquesnoy a épuisé, dans un mémoire de 24 pages in-folio, tous les moyens de droit et de fait qu'il était possible d'accumuler, pour obtenir la réformation de cette sentence; mais vains efforts. Par arrêt du 29 février 1750, rendu à la seconde chambre, au rapport de M. de Taffin, la sentence a été confirmée avec amende et dépens.

V. A l'égard du vendeur, les engagemens qu'il contractait par un traité d'Office, étaient 1o. d'exécuter la vente; 2o. de la garantir; 3o. de l'entretenir.

VI. Le vendeur d'un Office exécutait la vente qu'il en avait faite, en remettant à l'acquéreur les pièces nécessaires pour l'obtention de ses provisions, et spécialement en lui fournissant une procuration ad resignandum: s'il s'y refusait, l'acquéreur avait une action pour l'y faire condamner.

Mais si le vendeur était pourvu de l'Office qu'il aliénait, il pouvait, comme on le verra dans l'instant, éluder l'effet de la condamnation ou même la prévenir, en exerçant le regrés.

Ainsi, cette première obligation du vendeur était fort imparfaite, puisqu'il dépendait de lui de la réduire à rien.

VII. L'obligation de garantir la vente, était subordonnée à son execution: si le vendeur pouvait, par le moyen du regrès, se dispenser d'exécuter la vente, et qu'il profitat de cette faculté, il est clair qu'il n'y avait plus de garantie à exercer ni à faire valoir contre lui. Mais, hors ce cas, le vendeur d'un Office était obligé d'en garantir la vente.

Cette obligation générale en renfermait trois particulières :

La première, de faire cesser, en faveur de l'acquéreur, toutes les prétentions de ceux qui auraient, ou voulu revendiquer l'Office comme leur propre bien, ou y demander part à titre de co-propriété;

La seconde, de faire lever les oppositions formées au sceau des provisions par les créanciers du vendeur, ou, en cas que les provisions eussent été scellées à la charge de ces oppositions, de rembourser à l'acquéreur ce

qu'il avait payé en conséquence aux oppo

sans;

La troisième, de rendre le prix qu'il avait reçu, lorsque l'acquéreur ne pouvait point, par un vice de la résignation, se faire pourvoir de l'Office.

Nous disons, par un vice de la résignation: car si l'obstacle était venu de toute autre cause, l'acheteur n'aurait pas pu répéter son prix; et s'il ne l'avait pas encore payé, il pouvait y être contraint.. C'est ce qu'a jugé un arrêt du parlement de Normandie, du 19 décembre 1669, rapporté par Basnage sur l'art. 514 de la coutume de cette province.

La garantie à laquelle était tenu le vendeur d'un Office, ne s'étendait pas aux événemens qui survenaient après le contrat de vente, quand ce n'était pas son fait qui y avait donné lieu et qu'il n'était pas convenu de les garantir. Cela résultait du principe général, qu'après la vente, la chose est aux risques de l'acheteur; et que, si elle vient à périr ou à se détériorer sans la faute ni le fait du vendeur, c'est pour l'acheteur qu'elle périt ou qu'elle se détériore.

Ainsi, que, par le fait du prince, les droits d'un Office fussent diminués, ou l'Office même supprimé, c'étaient des événemens que le vendeur n'était pas obligé de garantir. Loyseau a pourtant soutenu le contraire dans son Traité des Offices, liv. 3, chap. 2, no. 32; mais c'est un paradoxe démenti par la juris. prudence des arrêts.

« Après l'Office vendu (est-il dit dans le » recueil de Perrier et Raviot, tome 2, » page 400), s'il vient à être supprimé, le >> vendeur n'en est point responsable, parce» que nul n'est garant du fait du prince; c'est » une force majeure. Ainsi jugé à la grande » chambre (du parlement de Dijon), le 6 juil» let 1668, entre Jeanne Chifflot, femme de » Pirre Singet, et Jean Gici, fils du premier » mariage avec Germain Gici, pour un Office » de notaire ».

La même chose a été jugée par un arrêt du parlement de Paris, du 26 mai 1742. Le sieur de Gourlade avait acquis, le 12 janvier 1739, l'Office de contrôleur du pavé de Paris. Le 26 du même mois, il fut scellé à la grande chancellerie, un édit portant suppression de cette charge. En conséquence, le sieur de Gourlade, ne pouvant pas obtenir de provisions, s'adressa au châtelet pour faire ordonner que le prix qu'il avait déposé, lui serait rendu. Le châtelet l'ordonna effectivement ainsi; mais sur l'appel, l'arrêt cité infirma la sentence, et condamna l'acquéreur à payer, nonobstant la suppression de l'Office.

A plus forte raison, le vendeur n'aurait-il pas pu être inquiété pour une taxe qui, au moment de la vente, eût été établie sur son office par un édit du roi, et sur laquelle cependant il eût gardé le silence dans le contrat. C'est ce qui a été jugé par un arrêt du parlement de Provence, du 30 juin 1642, rapporté dans le recueil de Boniface, tome 2, liv. 4, tit. 1, chap. 12; et cela, sur le principe que le vendeur devait seulement garantir que l'Office subsistait, qu'il lui appartenait, et qu'il n'était point hypothéqué à ses dettes. V. ci-après, no. 8, l'arrêt de la même cour, du 6 juin 1780.

Si l'office tombait dans les parties casuelles, par le défaut du vendeur d'avoir acquitté le droit de centième denier pour le temps qui avait précédé la résignation, qui est-ce qui en était responsable?

Sans contredit, c'était le vendeur. L'art. 21 de l'arrêt du conseil du 6 juillet 1772 en contenait une disposition expresse : « Voulant » prévenir (portait-il) les contestations qui » pourraient s'élever, lorsqu'un résignant » qui n'aurait pas payé le centième denier, » viendrait à décéder sans avoir survécu qua>> rante jours à sa résignation, pour savoir si » la perte du droit de résignation et de » l'Office doit être à la charge de ses repré» sentans, ou à celle du résignataire, sa » majesté ordonne et entend qu'elle ne puisse » être à la charge du résignataire, et qu'il ait » son recours en garantie contre ses ven» deurs ou leurs ayant cause, tant pour le » droit de résignation que pour le prix prin»cipal de l'Office, s'il l'a payé, à moins qu'il » n'y ait clause expresse du contraire dans » son contrat ou autre titre d'acquisition; et » sans toutefois qu'il puisse, sous prétexte » dudit recours, prétendre aucuns domma»ges et intérêts par forme d'indemnité ou

» autrement ».

VIII. L'obligation d'entretenir la vente d'un office était tellement de rigueur pour celui qui l'avait faite, qu'il ne pouvait pas, au moins lorsqu'il était majeur, la faire cesser, même par la restitution en entier pour cause de lésion d'outre-moitié.

« La lesoin (disait l'auteur du Droit com» mun de la France, tome 1, page 371, édi »tion de 1770), n'est d'aucune considération » dans une vente d'Office; tout le droit vient » de la provision; le prix est réputé incertain; » et cette incertitude ferme absolument la » voie à la restitution en entier ».

n'é

Ce qu'enseignait à cet égard Bourjon, tait qu'une répétition de ce qu'avaient dit

avant lui Loyseau, dans son Traité des Offices, liv. 3, chap. 2, no. 28; d'Olive, liv. 1, chap. 30; Bouchel, dans son Trésor du droit français, tome 2, page 529; Rousseau de Lacombe, dans sa Jurisprudence civile, aux mots Restitution en entier, sect. 3, no. 14; La Peyrere, lettre O, no. 35; Gueret sur Leprêtre, cent. 1, chap. 12; Brillon, aux mots Lésionvente d'Office; Ferrière, dans son Diction naire de Droit et de pratique, au mot Lésion; en un mot, tous les auteurs qui avaient traité cette matière. Et leur doctrine avait toujours été suivie par les tribunaux.

Duperrier, tome 2, page 458, edition de 1721, rapporte un arrêt du parlement de Provence, du 19 juin 1632, qui juge que la lésion, même d'outre-moitié, ne peut pas faire rescinder la vente d'un Office.

On trouve dans le Dictionnaire de Brillon, au mot Office, no. 43, une note de Maillart, commentateur de la coutume d'Artois, qui nous apprend que, par arrêt de la grand'chambre du parlement de Paris, du 2 mai 1709, il avait été décidé qu'il n'échet rescision contre les traités d'achat des Offices des commissaires aux saisies-réelles, à cause de l'incertitude des charges.

C'est aussi ce qui a été jugé, même pour un Office domanial, par un arrêt rendu à Douai, le 20 juillet 1773, entre Pierre Jobart, receveur des amendes de la maitrise des eaux et forêts du Quesnoy, appelant d'une sentence rendue par le lieutenant général de la gouvernance de Douai, le 27 juillet 1779, d'une part; Pierre et Marie Carrion, intimés, d'autre part.

Dans l'espèce de cet arrêt, la veuve du sieur Carrion, qui était mort propriétaire des Offices de receveur des amendes et de garde-general de la maîtrise du Quesnoy, les avait vendus l'un et l'autre au sieur Jobart, pour la modique somme de 2850 livres. Le sieur Jobart en revendit un 1800 livres. Après la mort de la veuve Carion, ses enfans prirent des lettres de restitution en entier contre la vente : leur unique moyen était la lésion énorme qu'avait éprouvée leur mère, en vendant pour 2850 livres deux Offices qui produisaient annuellement plus de 1800 livres, et dont un seul avait été vendu pour la même somme. Ces circonstances firent impression sur les premiers juges; mais sur l'appel, la sentence qui avait entériné les lettres de restitution en entier, fut réformée.

On citait au procès la plupart des autorités indiquées ci-dessus; et l'on y ajoutait que Bourjon étendait sa doctrine jusqu'au cas où la vente serait d'un Office domanial, parce

que la qualité de Domanial n'empêche pas l'incertitude du prix.

En était-il de même quand la vente était faite par un mineur? C'est un point sur lequel on ne trouve pas, à beaucoup près, la même unanimité d'opinions que sur le précédent.

Loyseau, à l'endroit déjà cité, est pour l'affirmative du moins, on doit le croire ainsi d'après la réponse qu'il fait à deux 1596 et 21 avril 1610, qu'il s'était lui-même arrêts du parlement de Paris, des 23 février opposés comme portant atteinte au principe general, qu'on ne peut pas faire rescinder,

pour cause de lésion, la vente d'un Office. Voici ses termes : « Après avoir vu ces ar»rêts, j'estime qu'ils sont plutôt fondés » sur le dol, ou sur la minorité de ceux à » qui les Offices appartenaient, que sur la » lésion d'outre moitié ». Il avertit cependant que les restitutions en entier du chef de dol, de crainte, de violence et de minorité, « sont moins favorables et plus difficiles » à obtenir dans les offices que dans les autres >> biens ».

La Peyrère se borne à des doutes et ne décide rien. Mais son annotateur dit que, « dans notre usage (il parle du ressort du » parlement de Bordeaux), la minorité n'est » d'aucune considération en vente d'Office ».

Bourjon pense comme Loyseau, sur le fondement que la lésion ouvre la restitution en entier aux mineurs, dans tous les cas qui n'en sont pas exceptés par la loi, et qu'il n'y a point d'exception particulière pour la vente des Offices; mais il exige que, par l'acte même, la lésion soit évidente.

D'Olive n'admet pas plus le moyen de lésion dans la bouche d'un mineur, que dans celle d'un majeur; et il confirme son opinion par un arrêt du parlement de Toulouse, du 31 juillet 1628, rendu après partage. Le motif qu'il donne à cette décision est bien digne de ces anciens magistrats, qui ont lutté de toutes leurs forces contre l'introduction de la vénalité des Offices : « Si nous avons souf» fert (dit-il) la vente publique des magis» tratures, qu'il n'était pas en notre pou» voir d'empêcher, nous en avons (au moins) » rejeté le nom; táchons de moderer par la » douceur du mot l'amertume de la chose; >> car nous avons marqué ce commerce du » mot de composition; et de plus, pour » joindre les effets aux paroles, nous lui » avons refusé en nos jugemens les avan»tages ordinaires que les lois accordent aux » contrats de cette nature. Ainsi, quoique

» la lésion et la minorité soient des remèdes » communs desquels on se sert pour la résolu>tion des ventes, toutefois, en fait d'Offices, > nous ne les recevons pas, estimant à bon » droit que le prix n'est pas considérable en » une chose qui, par le bon ordre, n'en » devrait point recevoir d'autre que celui » de la vertu (1); et que le bas âge de celui » qui vend, ne peut aussi entrer en consi» dération, parceque ce n'est pas de la main » du vendeur que l'officier tient l'Office, » mais bien de celle du prince, qui, seul en son » royaume, a la distribution des honneurs » et des dignités ».

Soulage, dans ses observations sur le recueil de d'Olive, imprimées à Toulouse en 1784, page 81, joint son suffrage à l'autorité de ce magistrat, et assure qu'elle est confirmée 1o. par d'autres arrêts du même parlement, que rapportent Maynard, liv. 3, chap. 61, et Albert, lettre D, chap. 5; 2o. par un arrêt du parlement de Paris, qu'on trouve dans le Traité des Offices de Loyseau, liv. 3, chap. 9, no. 75. Mais qui compterait sur la foi de pareilles citations, se tromperait fort nous les avons vérifiées toutes, et il ne s'en est pas trouvé une d'exacte, pas même une qui eût le moindre rapport à la ques

tion.

C'est bien pis, lorsqu'à la page 82, cet auteur dit qu'il en est autrement de la vente par décret des Offices. Quoi! on refusait à un mineur la restitution en entier contre la vente d'un Office, lorsque c'était lui ou son curateur qui l'avait faite, et on la lui eût accordée contre une vente qui aurait été l'ouvrage de la justice elle-même! Cela est-il concevable? Mais que penser du même écrivain, quand on le voit, quelques lignes plus bas, convenir que la restitution en entier s'accorde plus facilement aux mineurs contre une vente par contrat, que contre une vente par décret? Il est donc des hommes à qui les inconséquences et les contradictions les plus frappantes ne coûtent rien?

Quoiqu'il en soit, Raviot, sur les arrêts de Perrier, quest. 144, no. 8, combat l'opinion de d'Olive, même pour le cas où la lésion est soufferte par un majeur.

Les Offices (dit-il) étant vénaux et hériditaires, et participant, dans le siècle où nous sommes, de la nature des autres biens, je ferais grande difficulté de n'admettre en

(1) Nititur sola virtute potestas, dit Claudien en louant l'empereur Théodose, d'avoir aboli la vénalité des Offices.

aucun cas le bénéfice de la lésion, ni le privilége de la minorité. Je sais bien que les ventes de meubles ne sont point rescindées par la lésion d'outre-moitié du juste prix............., et qu'autrefois les Offices étaient considérés comme meubles; mais à présent les notions sont différentes : les Offices sont plus regardés comme immeubles que comme meubles, puisque cette espèce de biens ne tombe point dans la société conjugale, et qu'on en distri bue le prix par ordre d'hypothèque. Les Offices sont à présent la portion la plus considerable du bien d'une famille : pourquoi, s'il intervient une lésion énorme dans une vente, ou si un mineur s'est laissé surprendre, les vendeurs ne pourraient-ils pas implorer le secours des lois?

» Je conviens que, pour une vente d'Office, on ne doit pas légèrement admettre le bénéfice de la restitution, parceque le prix des Offices est variable, et que c'est un bien sujet à de grands orages, à des taxes, à des suppressions, à des diminutions de prix, à des retranchemens de gages. Mais aussi, lorsque la lesion est notable et certaine, lorsqu'il parait que la facilité d'un mineur a été surprise, pourquoi, dans ces cas favorables, ne pas faire usage des lois qui accordent le bénéfice de la restitution à ceux qui sont trompés, non point pour rentrer dans l'Office, mais pour obtenir un supplement de prix ? J'ai vu, en ce cas, restituer un mineur qui avait acheté trop chèrement un Office.

» Le sieur Joly, avocat du roi au bailliage de Dijon, ayant vendu son Office au sieur Chamonet, mineur, celui-ci prit des lettres de rescision qui furent entérinées ( au parlement de Bourgogne), par arrêt donné à l'audience publique..... le 7 décembre 1691 ».

Cependant Raviot lui-même, dans ses additions, page 30 du tome 1, revient à l'opinion qu'il avait d'abord condamnée. « L'arrêt » que nous avons rapporté (dit-il), et par le» quel un mineur a été restitué contre l'ac » quisition d'un office, n'eut pour motif que » la lésion considerable que le mineur souf» frait, ce qui faisait présumer un dol de la >> part du vendeur; autrement, le mineur » n'est pas restituable en pareil cas : plusieurs » arrêts qui sont dans les auteurs, et qui » furent cités à l'audience, l'ont ainsi jugé, » quand même, depuis la vente, l'Office au» rait diminué ».

On voit que, dans cette espèce, ce n'était pas le vendeur qui articulait la lésion, mais bien l'acquéreur; et certainement, sans circonstances particulières, un pareil moyen n'aurait pas été écouté dans la bouche de

celui-ci; car si, dans les choses ordinaires, un acheteur n'est pas admis à faire rescinder son achat pour lésion d'outre moitié, à bien plus forte raison devait-il en être de même dans les Offices.

On ne peut rien de plus précis là-dessus que l'arrêt rendu au parlement d'Aix, le 6 juin 1780, entre le sieur Chantre, jugegarde de la monnaie de la même ville, et le sieur Robaud.

Le 10 octobre 1776, le premier vend au second son Office de juge-garde de la monnaie, pour le prix de 15,000 livres, taux de l'évaluation qu'il en avait faite le 27 décembre

1771, en exécution de l'édit du mois de février précédent.

Au mois de février 1777, on apprend que le roi a liquidé les Offices de tous les hôtels des monnaies; et en effet, le sieur Chantre reçoit un modele de quittance, daté de 1776, le mois et le jour en blanc, par laquelle il est dit qu'au moyen de la réduction des gages, la finance de son Office est fixée à 5000 livres, et le centième denier à 50 livres.

Le sieur Chantre communique ce modèle de quittance au sieur Robaud, qui n'était pas encore reçu ni même pourvu.

Le 6 mars 1778, requête du sieur Robaud en entérinement des lettres de rescision qu'il venait l'obtenir contre la vente, et demande en restitution des sommes qu'il avait payées à-compte du prix.

Dans le cours de l'instruction, le sieur Robaud prend des conclusions subsidiaires, à ce que le prix de l'Office, porté à 15,000 livres dans le traité fait entre lui et le sieur

Chantre, soit réduit à 5000 livres, confor mément à la fixation que le roi en a faite avant la vente.

Le 2 janvier 1779, sentence qui déboute le

sieur Robaud de toutes ses demandes, tant principales que subsidiaires, et le condamne aux dépens.

le Appel au parlement de Provence; et, 6 juin 1780, arrêt au rapport M. de Gras, qui confirme la sentence, et condamne le sieur Robaud aux dépens de l'appel.

IX. Un mineur était-il obligé d'entretenir la vente d'un Office, lorsqu'elle était faite sur un simple avis de parens sans autorisation du juge?

Il y a, dans le Journal des audiences, un arrêt du parlement de Paris, du 24 février 1626, qui a jugé pour l'affirmative, mais dans un cas où l'Office avait été vendu deux fois plus que le père du mineur l'avait achete. Soefve, tome 2, cent. 3, chap. 41, en rapTOME XXII.

porte un autre de la même cour, du 24 février 1665, qui a confirmé la vente d'un Office faite par une mère tutrice de son fils, sans avis de parens.

X. Nous avons déjà dit que l'obligation du vendeur d'un Office, d'exécuter et d'entretenir la vente, souffrait une exception dans le cas du regrès.

On appelait regrès la faculté de rentrer dans un Office qu'on avait résigné, en revoquant la procuration ad resignandum et le traité par lequel on s'était obligé de la donner. Cette faculté devait paraitre bien étrange à ceux qui la consideraient d'après les principes.

En alienant les Offices, en les rendant vénaux et héréditaires, en un mot, en les mettant dans le commerce, le souverain avait permis à ses sujets qui en seraient revêtus, de les vendre.

En permettant de les vendre, il avait sans doute voulu qu'on leur appliquát toutes les règles du contrat de vente.

Du moins il n'avait pas dit le contraire; et il eût fallu de sa part une dérogation bien expresse à ces règles, pour qu'il eût été possible de les faire flechir en faveur des vendeurs d'Offices.

Voilà des idées d'une vérité évidente et

palpable, et sûrement il était impossible de les concilier avec la faculté du regrès.

En vain disait-on, pour justifier cette faculté, que, suivant plusieurs textes du droit romain et l'opinion d'une foule d'interprètes, un vendeur n'est pas obligé de délivrer précisément la chose vendue, parceque c'est un fait, et que, d'après la maxime de Bartole, nemo potest præcisè cogi ad factum.

Sur ce point, le sens intime est un oracle plus sûr que toutes les lois et toutes les gloses

possibles. Je veux acheter, vous désirez vendre le notaire vient, nos conventions sont arrêtées, on les redige, nous signons. Que se passe-t-il alors dans mon áme? Que se passe-t-il dans la votre? Sans doute, vous sentez, comme moi, que vous vous liez; vous ne pensez pas plus que moi à vous réserver intérieurement une ouverture secrète pour vous départir d'une obligation que je crois et dois croire irrévocable. La faculté de résilier est alors bien loin de votre intention.

Mais prenez-y garde, c'est par l'intention qui nous animait l'un et l'autre au moment du contrat, que nous devons être jugés: c'est à cette intention que la justice doit s'attacher, c'est cette intention qui doit être exécutée.

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